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Description archivistique
Corpus numérique sur l'histoire du château et des jardins de Saint-Germain-en-Laye
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Écroue de la chambre aux deniers lors d’un séjour du roi à Saint-Germain-en-Laye

« Du mercredy dix huict juillet mil six cent soixante et huict, le Roy à Saint Germain
Panneterie
Au boulanger, pour bouche, VII douzaines II pains : VI l. XVI s. II d.
A luy, pour le commun, LXXIX douzaines VIII pains : LXXV l. XIII s. VIII d.
Somme : IIIIxx II l. IX s. X d.
Eschansonnerie
Au marchand de vin pour bouche, III septiers : IX l. XVI s. VI d.
A luy, pour vin des tables, LXers II quartiers pte : C IIIIxx XVIII l. VII s. XI d.
A luy, pour vin de commun, XXIXers III quartiers pte : LIX l. XV s.
A luy, pour vin du bureau, XVers II quartiers : L l. XV s. IIII d.
Somme : IIIc XVIII l. XVI s. VII d.
Cuisines
Au pourvoyeur suivant le menu pour la bouche : CLIX l. III s. IIII d.
A luy, pour le commun suivant le menu : Vc LXXVI l. XI s. X d.
Somme : VIIc XXXV l. XV s. II d.
Fournitures d’office
Aux escuyers : XV l.
A ceux du commun : XXI l.
A ceux quartier et du chambellan : XLVIII l.
Au verdurier : VIII l.
Au paticier : XXVI l. XV s.
Somme : CXVIII l. XV s.
Fruiterie
Aux officiers panneterie bouche, pour fruit du Roy : XXII l.
Aux officiers fruiterie commun pour fruit des tables, cire blanche es table, cy : CLXVII l. XVI s. VI d.
Somme : C IIIIxx IX l. XVI s. VII d.
Fourriers
Aux messieurs les maitres d’hostel : X l.
Aux quatre controlleurs : VI l.
Aux deux medecins : VI l.
Aux capitaines du charroy : XLIIII l.
Au marchand du linge : XXIIII l.
A Lecomte, pour blanchissage grand maistre et chambellans : X l.
Aux quatre lavandiers : X l. X s.
Au falotier : III l.
Aux consierges : III l.
Aux porteurs bouche : XX s.
A six pauvres : III l. XII s.
A deux balayeurs : XXIIII s.
Aux chiens du Roy : III l. IIII s.
Aux officiers de fourriere pour bois et charbon : LXXII l. IIII s.
A eux, pour prise de paille : XVI s.
Somme : C IIIIxx XVIII l. X s.
Somme du jour : seize cent quarante trois livres deux sols deux deniers
L. Sanguin, Charange »

Marché pour la construction du Château-Neuf

« Devis des ouvraiges de maçonnerye et pierre de taille qu’il convient faire de neuf pour le Roy nostre sire au parachevement et perfection du bastiment encommencé au parc de son chasteau de Saint Germain en Laye sur le devant de la riviere de Seine, où y a de present deux pavillons construictz avec autre commancement de logis attenant lesd. pavillons qui sont ja fondez et commancez suivant les matieres, estoffes et espoisseur d’icelluy commancement, tant pour les principaulx murs que des autres murs de refent separant les salles, chambres et garderobbes que manteaulx de chemynee de pierre de taille au premier estaige d’icellui bastiment et second estaige qui sera en galletas. Seront lesd. manteaulx maçonnez de brique avec les souches des tuyaux d’icelles. Faire les lambris desd. galletas de tout led. bastiment de plastre avec tous les enduictz des murs qui sont ja faictz que de ceulx qui sont à faire de chaulx et sable et les planchers et aires d’icelluy bastiment de plastre, pavez par le dessus de carreau de terre cuitte, le tout suivant le premier marché qui a esté cy devant faict pour raison desd. bastimens.
Fut present honnorable homme Guillaume Marchant, juré du Roy en l’office de maçonnerye, demeurant à Paris rue Geoffroy Lasnier, parroisse Saint Gervais, lequel recongnut et confessa avoir promis et promet au Roy nostre sire, ce acceptant par hault et puissant seigneur messire Albert de Gondy, duc de Retz, pair et mareschal de France, à ce present, et par noble homme Jehan de Donon, conseiller du Roy et contrerolleur general des Bastimens de Sa Magesté, de faire et parfaire bien et deuement comme il apartient au dire d’ouvriers et gens à ce congnoissans tous et chacuns les ouvraiges de maçonnerye qu’il convient faire pour Sad. Majesté au lieu et endroict declaré par le devis transcript de l’autre part, et ce des estoffes, matieres et façons plus au long speciffiez, contenuz et declarez par led. devis, et pour ce faire sera tenu led. Marchant fournit toutes les pierres de taille, la taille d’icelles, chaulx, sable, plastre et autres matieres à ce necessaires, le tout selon et au desir dud. devis et selon qu’ils sont commancés. A commancer à besoigner à iceux dedans le jour de mardy prochain XXVIe jour de ce present mois et an, et continuer sans discontinuer avec bon nombre d’ouvriers et rendre le tout faict et parfaict en la plus grande diligence que faire ce pourra en sorte que le tout soit faict et parfaict dedans la fin de ceste presente année sy faire ce peult. Ceste promesse et marché faictz moyennant et à raison de six escuz d’or sol pour chacune thoise thoisez selon la coustume de Paris, les lucarnes, entablemens et escalliers de pierre de taille estimez à la juste valleur, lequel prix sera payé aud. Marchant par le tresorier general des Bastimens du Roy au feur et à mesure que led. Marchant besoignera ausd. ouvraiges. Promettant. Obligeant corps et biens comme pour les propres affaires du Roy. Renonçant. Fait et passé dans l’hostel dud. seigneur duc de Retz siz à Paris rue d’Autruche pres le chasteau du Louvre le XXIIIIe jour d’avril MVc quatre vingtz quatorze avant midi.
Du vingt quatriesme d’apvril 1594
De Gondi, Marchant
Leroy, DeBriquet »

Lettre du préfet concernant l’établissement d’un Prytanée à Saint-Germain-en-Laye

« Versailles, le 25 germinal an 8
Le préfet au citoyen Lemoyne, architecte inspecteur des bâtimens nationaux à Saint Germain
Le ministre de l’intérieur m’ayant chargé, citoyen, de choisir dans la commune de Saint Germain en Laye l’emplacement le plus propre à recevoir la section du Prytanée français qui doit y être établie. Je vous invite à m’indiquer le bâtiment le plus convenable à cet usage, sous le double rapport de la commodité et de l’économie. Veuillez bien en même tems m’adresser le devis des travaux que cet établissement pourra nécessiter. J’attends de votre zèle pour la chose publique toute la célérité que cette opération exige.
Salut et fraternité »

Préfecture du département de Seine-et-Oise

Supplique présentée par les officiers de la prévôté de Saint-Germain-en-Laye

« Pour les officiers de la prevosté de Saint Germain en Laye
La jurisdiction est sans ressort et s’estend seullement dans le bourg dudit Saint Germain. Il est diminué des deux tiers depuis l’absence du Roy et il y a 250 maisons à vendre et à louer, sans y comprendre 60 hostels des seigneurs de la cour qui sont occuppez par des concierges seullement, et les habitants n’y font aucun commerce. Il est composé de 200 officiers commenceaux qui ont leurs causes commises aux requestes de l’Hostel et du Pallais. Sa Majesté est le 14e roy né audit Saint Germain et ses predecesseurs n’ont jusqu’à present fait fonds pour le bien de leurs affaires sur leur Maison royalle, dont les officiers de ladite prevosté ont toujours esté distinguez et exempts de touttes augmentations de gages, finances et taxes. Lesdits officiers sont dans l’impossibilité de prendre les gages compris dans le roolle arresté au Conseil qui leur a esté signiffié, ne recevans aucuns droits ny emoluments de leurs charges, attendu le peu d’affaires et la misere dudit lieu, où il y a 200 familles dans la pauvreté qui forment plus de 200 pauvres. »

A cette supplique est joint un état des officiers :
« Estat des officiers de la prevosté de Saint Germain en Laye
Un prevost
Un lieutenant
Un conseiller verificateur et rapporteur des deffauts de nouvelle creation : Me Georges Legrand exerce ces charges conjointement
Un procureur du Roy : Me Claude Legrand
Un commissaire enquesteur et examinateur : Me Louis Guillou de Fonteny
Un greffier civil et criminel, il est domanial : Me Nicolas Denis Payer, commis, en fait l’exercice
Un receveur des consignations, de nouvelle creation : Me Jean Pager
Un commissaire des saisies reelles, de nouvelle creation : Me Gabriel Lange
Un tiers refferendaire taxateur des depens, de nouvelle creation : ledit Lange
Un nottaire : ledit de Fonteny
Six procureurs postulaires : Mes Jacques Gramond, Estienne Delagarde, Gabriel Lange, Charles Vieillard, François Boussiard et Thomas Delastre
Six huissiers : Pierre Dusuc, Jacques Duhamel, Jacques Bellier, André Sevestre et deux autres non remplis
Nous Georges Legrand, seigneur des Alluetz, conseiller du Roy, prevost de Saint Germain en Laye, certiffions à monseigneur Phelypeaux, conseiller d’Estat ordinaire, intendant de justice, police et finance en la generalité de Paris, que le present estat qui composent le siege de la prevosté dudit Saint Germain est veritable. Ce fait ce 26 avril 1694. »

Prévôté de Saint-Germain-en-Laye

Inventaire des textiles trouvés dans le garde-meuble du château de Saint-Germain-en-Laye

« En la presence de moy Thomas Legendre, substitut juré, commis et ordonné par justice soubz et en l’absence de Michel Fromont, tabellyon juré en la prevosté de Sainct Germain en Laye et des tesmoingtz soubz scriptz a esté ce jourd’huy par Guillaume Allart, tapissyer du Roy nostre sire, suyvant le mandement a luy faict par le Roy nostre sire de bailler, delivrer et mis entre les mains de Jehan Martin, tapissyer ordinayre du Roy nostre sire et garde des meubles et ustancilles du chasteau de Saint Germain en laye, ad ce present, cent troys pieces de tappicerye, la declaration desquelles cy apres ensuict.
Premyerement six pieces de verdure a grant feuillaige semés de bestes et oyseaulx. Item sept pieces de meme verdure d’arbres et petis enffans par en bas. Item six pieces de tappicerye damaree de jaulne sur champ bleu. Item sept pieces de meme verdure sur champ jaulne. Item six pieces de fontaynes. Item sept pieces de [barré : meme] verdure semee de bestes et oyseaux. Item sept pieces de meme verdure a bestes et oyseaulx. Item six pieces de grant feullaige a bestes et chardons. Item six pieces de bergerye et vollerye a haulte lisse. Item six pieces de sauvaiges. Item unze pieces de l’Hospital d’amours tant grandes que petites parmi lesquelles y en a eu aucunes qui ont esté couppees et faict de l’une deux. Item sept pieces de bucherons. Item quinze grandz pieces de tapisserye dont huict desd. pieces en est contenu l’histoire de Moyse et les sept autres en est aussi contenu les douze moys de l’an historiees, lesquelles quinze grandz pieces de tappicerye susd. sont neusves, seynes et entieres, garnyes an thouelle et ruben par hault et par bas, par les costez et montans par voye avec du cordage par hault servant pour tendre icelles, et les autres qui sont quatre vingtz huict pieces qui sont toutes cassees et rompues faulte de garniture et de rantraicture. Plus a esté ced. joud’huy baillé, delivré et mis en les mains dud. Jehan Martin par led. Allart une grant piece de vellours vert de huict laiz sur troys aulnes et ung quart de haulteur doublé de damas vert, ung rideau de drap vert d’un lay et demy sur troys aulnes de hault, ung aultre petit rideau de drap vert d’un lay et demy sur deux aulnes de hault, sept baies fait pour soustenir les tappiceryes avecques ung petit tabernacle de boys doublé par dedans de lynomfle, lesquelles tappiceryes et ustancilles cy dessus declairees estoient en la salle des mebles dud. chasteau que led. Allard a dict le tout luy avoir esté baillees en sa garde par le commandement du feu roy, que Dieu absolve, des le premyer jour de fevryer dernier passé y en ung an, et icelles tappiceryes prinses assavoir quatre vingtz huict pieces du consierge de Fontaynebleau, de la reception desquelles il dict avoir baillé recepissé aud. consierge par le commandement de monsieur l’Amyral, et les autres quinze grandz pieces en lad. salle [barré : des meubles], de la reception desquelles il dict aussi avoir baillé recepissé a deffunct maistre Jacques Duval, tresorier de l’Espargne, par le commandement de mond. seigneur l’Amyral, desquelles tappiceryes et ustancilles, ensemble des clefz de lad. salle des meubles dud. chasteau de Sainct Germain en Laye, led. Jehan Martin s’est chargé et en ce faisant a promis an quicter, descharger et faire tenir quicte led. Boullard (sic) et ses biens envers le roy notred. sire et autres qu’il apartiendra, ensemble de toutes parts, dont lesd. Guillaume Allard et Jehan Martin respectivement m’ont requis lettre, ce que leur ay auctroyé pour leur servir. Et estoient ad ce present noble homme Gratien de la Salle, escuyer, et honnorables hommes René Caillou, jardinyer du Roy nostre sire, et Mathurin Bon, serruryer dud. seigneur aud. Saint Germain en Laye. »

Mémoire du jardinier Delalande concernant sa maison près du Château-Neuf

« Aux citoyens composant le conseil général du directoire du département de Seine et Oise
Citoyens,
Le citoyen Charles Denis Delalande, pourvu ci devant de l’office de jardinier de Louis XVI au boulingrin du château neuf de Saint Germain en Laye, a une indemnité à répéter sur les biens du ci devant comte d’Artois. Cette indemnité est une créance bien légitime, et à quelque somme qu’on la fixe, elle n’égalera jamais sa perte, et ne pourra réparer les vexations et les injustices qu’il a éprouvé.
En exécution de l’article VI de la loi du 2 septembre 1792, il va établir sa réclamation, elle formera la déclaration prescrite par cette loi.
Les faits ne seront ici rapellés que succinctement, parce qu’ils sont au long détaillés dans un mémoire à consulter, imprimé, joint à la présente déclaration, et qu’il est bien essentiel, Citoyens, que vous lisiés.
Faits
Un des ayeux du citoyen Delalande obtint de Louis XIII, en 1626, la permission de construire des bâtimens près le boulingrin.
Le brevet porte : « qu’il ne pourra, ni ses successeurs, être expulsés sans remboursement ».
Ce titre est parfaitement en règle, toutes les formalités ont été remplies, et cette concession a été confirmée par Louis XIV et Louis XV.
La famille Delalande a possédé l’office de jardinier et habité la maison dont il s’agit depuis 1626 jusqu’en 1778, que le ci devant Roi ayant concédé à son frère, ci devant comte d’Artois, le château neuf de Saint Germain, dont le boulingrin fait partie, le citoyen Delalande est devenu l’objet des vexations, sans nombre et bien notoires, qu’a commises le surintendant des finances, Sainte Foi.
Il fut expulsé subitement de la maison où depuis 164 ans ses ancêtres avaient fixé leur séjour.
Il ne put obtenir ni le temps de chercher un logement, ni l’indemnité qui lui était due, ainsi que l’ont obtenues les personnes qui occupaient des logements au château, et ainsi que le voulait la concession faite par le ci devant Roi à son frère, qui porte : « que tous ceux qui occupaient des logemens au château neuf, même ceux qui n’en avaient qu’à titre de grâce, ou seraient conservés dans leur jouissance, ou obtiendraient un dédommagement proportionné ».
Il fut enfin forcé de sortir précipitamment et de se loger où il put, en attendant qu’il eut fait préparer un logement convenable, ce qui lui a occasionné et nécessité des dépenses et des pertes considérables.
Douze années se passèrent. Alors une commission fut établie pour gérer les finances du ci devant comte d’Artois, remédier aux dépradations du surintendant Sainte Foi, et réparer ses injustices.
Le citoyen Delalande s’adressa à cette commission. Il réclama auprès d’elle deux choses : la première, la rentrée en jouissance de sa propriété ; et la seconde, le dédommagement des pertes et dépenses occasionnées par son injuste expulsion.
Après bien des longueurs, des discussions, des difficultés, on a, enfin, reconnu le droit qu’il avait de rentrer dans la maison de ses pères, et cette commission, par sa décision du premier octobre 1790, lui rendit justice, en lui accordant le premier objet de sa réclamation et, par une inconséquence inconcevable, fit une injustice criante en lui refusant le second objet, le dédommagement.
Voici ce que porte cette décision : « Sur la réclamation faite par le sieur Delalande relativement à la construction faite par ses auteurs d’un corps de logis près le château neuf de Saint Germain en Laye, il a été arrêté que ledit sieur Delalande pourrait rentrer en jouissance dudit bâtiment, sans néanmoins aucune indemnité pour la privation dudit logement, et sans pouvoir rien répéter de ce qu’il pourra lui en coûter pour s’arranger avec le sieur Bonnemaire, qui y loge en ce moment ».
En conséquence de cette décision, le citoyen Delalande est rentré en jouissance de son bien.
Patiemment, il a attendu le règne de la justice qui se préparait pour de nouveau se faire entendre sur le second objet de sa réclamation. Ce temps si désiré est arrivé : vous êtes des républicains, Citoyens, et votre concitoyen n’a pas à craindre que vous préfériés, comme l’ont fait les commissaires, les intérêts du ci devant comte d’Artois à la justice, quoique ces intérêts soient devenus ceux de la Nation.
Moyens
Dans l’équité, la décision des commissaires prouve, d’un côté, que le citoyen Delalande était bien fondé dans les deux objets de sa réclamation, et, de l’autre, l’inconséquence des commissaires.
En effet, il a été reconnu que la maison lui appartenait et qu’il avait le droit d’y entrer. S’il a eu le droit d’y rentrer, il s’ensuit qu’il en a été mal à propos expulsé, et que son expulsion est une vexation, une injustice. Il s’ensuit qu’il a souffert pendant douze années et plus une privation de jouissance et trois fois la perte des déménagemens. Il s’ensuit qu’on doit réparer cette maison prise en bon état et rendue dans un état de dépérissement total, par la négligence et les dévastations de ceux qui l’ont occupée, et que ces réparations ne doivent point être à sa charge. Il s’ensuit une inconséquence marquée des commissaires et le mépris de ce principe universel et sacré que celui qui fait ou occasionne le dommage doit le réparer. Il s’ensuit, enfin, que les commissaires n’ont rendu qu’une demie justice, à la faveur du despotisme du temps.
Ces conséquences sont incontestables : pour s’y refuser, il fallait nier le droit de rentrer dans la maison. Mais ce droit a été reconnu : par cette reconnaissance, le principe a été admis, et l’admission du principe entraînait nécessairement la conséquence.
Aujourd’hui, Citoyens, que votre concitoyen, qui connait votre intégrité, a le bonheur de vous avoir pour juges, il attend avec sécurité votre décision, convaincu que son bon droit vous frappera et que vous allez être les réparateurs des torts qui lui ont été faits : il ne lui reste plus qu’à établir, par évaluation, les objets de l’indemnité qu’il réclame.
Objets d’indemnité
1° Les réparations nécessaires et indispensables pour mettre la maison en état d’être habitée : il ne demande rien au delà de ce que les experts estimeront, mais il croit pouvoir évaluer cette dépense à six mille livres, ci : 6000 liv.
2° Le dédommagement de ces trois délogemens, du préjudice que ses meubles ont éprouvé, des pertes considérables occasionnées par ces déplacemens, et de l’échec que sa fortune en a reçu : il réduit cet objet à quatre mille huit cens livres, ci : 4800 liv.
3° Et enfin, la restitution des jouissances dont il a été privé : d’un côté, son explusion l’a forcé de prendre un logement, qui lui est revenu à plus de dix huit cens livres par année ; d’un autre côté, la maison pourrait être louée de mille à douze cens livres, il réduit à 1200 livres par année les non jouissances, ce qui revient, pour les douze années et demie, à quinze mille livres, ci : 1500[0] liv.
Ainsi, l’indemnité que réclame le citoyen Delalande ne peut s’élever moins qu’à vingt cinq mille huit cens livres, ci : 25800 liv.
Il se porte créancier du ci devant comte d’Artois de cette somme, il demande à la toucher sur le produit de ses biens, et c’est ce qu’il attend de votre justice.
Delalande
Pièce justificative : Extrait du registre des délibérations de la commission établie pour l’administration des finances de monseigneur comte d’Artois
Quatre vingt quinzième séance
Du vendredi premier octobre 1790
Sur la réclamation faite par le sieur Delalande, relativement à la construction faite par ses auteurs d’un corps de logis près le château neuf de Saint Germain en Laye, il a été arrêté que ledit sieur Delalande pourrait rentrer en jouissance dudit bâtiment, sans néanmoins aucune indemnité pour la privation dudit logement, et sans pouvoir rien répéter de ce qu’il pourra lui en coûter pour s’arranger avec le sieur Bonnemaire, qui y loge en ce moment.
Pour ampliation, Gobault de Griguelle, secrétaire.
Certifié véritable et conforme à l’original que j’ai dans mes mains, et que j’offre de représenter, ainsi que tous mes autres titres. A Saint Germain en Laye, l’an premier de la République française, le premier décembre mil sept cent quatre vingt douze.
Delalande »

Quittance pour des armes fournies pour le château de Saint-Germain-en-Laye

« Nous Jehan, sire de Talbot et de Fournevall, mareschal de France, cappitaine de Meaulx, Craeily et Pontoise, confessons avoir eu et receu du Roy nostre seigneur par les mains de noble homme Guillaume Fforsted, escuier, maistre des ordonnances et artillieries du Roy nostred. seigneur en Normandie, les parties d’ordonnances et habillemens de guerre cy appres declairés, c’est assavoir trois grosses arballestes de bois de Roumenie, l’une servant pour tret de garrotz et les deux autres servant pour tret de doudame, quatre guyndatz chacun a double poullie, quatre guyndatz senglez, deux milliers de tret de doudame, trois milliers de tret de demy doudame et trois milliers de tret commun, quinze coffres ausquelz a esté mis icellui tret, cinquante livres de fil d’Envers, six milliers de chausse trappez enfonssez en deux barilz, quatre barilz de pouldre a canon, chacun baril contenant IIc L livres de lad. pouldre, et deux milliers de tourteaulx pour falotz enfonssez en deux queues, toutes lesquelles parties avoient esté ordonnez audit Fforsted nous estre delivrees par mandement du Roy nostred. seigneur donné le XXIIme jour de may derrain passé pour icelles estre emploieez en la garde, seureté et deffence desd. places de Meaulx, Craeily et Pontoise, excepté lesd. III arballestes et Vm d’icellui tret que retenons en nostre main pour et ou lieu de III autres arballestes et Vm d’icellui tret que ja pieça delivrasmes de nostre propre pour la sauvegarde, seureté et deffence de la place et forteresse de Saint Germain en Laye, de toutes icelles parties dessus declairees nous en tenons content et bien paié et de ce qui est ordonné pour les villes dessusd. nous promettons en rendre bon compte au Roy nostred. seigneur ou quant il appartiendra. En tesmoing de ce, nous avons fait mettre en ces presentes le seel de noz armez le tiers jour de juing l’an mil CCCCXXXIX. »

Contrat de mariage d’Anne de Montmorency et de Madeleine de Savoie à Saint-Germain-en-Laye

« [f. 189] Contrat de mariage de mademoiselle Madeleine de Savoye avec M. le connetable de Montmorency a Saint Germain en Laye le 10 janvier 1526
A tous ceux qui ces presentes lettres verront, Jean de La Barre, chevalier, comte d’Estampes, vicomte de Bridiers, baron de Veretz, seigneur dudit lieu de la Barre, de Villemartin et du Plessis du Parc les Tours, conseiller, chambellan ordinaire du Roi notre sire, premier gentilhomme de sa chambre et garde de la prévôté de Paris, salut. Savoir faisons que [f. 189v] par devant François Bastonneau et Gabriel Lefevre, notaires du Roi notre dit seigneur en son Châtelet de Paris du nombre ancien des soixante, furent presents en leurs personnes tres haut et tres puissant prince François, par la grace de Dieu roi de France, madame Louise, duchesse d’Angoumois, d’Anjou et du Maine, mere du Roi, monseigneur Anne de Montmorency, grand maitre et marechal de France, chevalier de l’Ordre, gouverneur et lieutenant general dudit seigneur en Languedoc, en leurs noms, et madame Anne de Tende, veuve de monseigneur René, batard de Savoie, en son vivant comte de Villars et de Tende, [f. 190] aussi chevalier de l’Ordre, gouverneur et lieutenant general pour ledit seigneur en Provence et grand maitre de France, tant en son nom que comme tutrice et curatrice de Madeleine de Savoye, sa fille, et des autres enfants dudit defunt et d’elle, et stipulant en cette partie pour ladite Madeleine, d’autre part, lesquelles parties esdits noms, de leurs bons grés, pures, franches et liberales volontés, et sans aucune contrainte, si comme elles disoient, en la presence de reverend père en Dieu monseigneur François de Tinteville, eveque d’Auxerre, et de haut et puissant monseigneur Guillaume, seigneur et baron de Montmorency, pere dudit seigneur grand maitre, reconnurent et [f. 190v] confesserent par devant lesdits notaires comme en droit jugement par devant nous, et encore par la teneur des presentes lettres reconnoissent et confessent que pour raison du mariage qui au plaisir de notre Seigneur sera fait et solemnisé en Sainte Eglise desdits messire Anne de Montmorency et de ladite Madeleine de Savoye, a ce presents, ils avoient et ont fait, passé et accordé entre eux les traités, accords, dons, douaires, promesses, obligation et choses contenues en ces presentes et en trois feuillets de papier baillés auxdits notaires de par lesdites parties et par eux lus a icelles parties, dont la teneur ensuit :
En ensuivant le bon plaisir du Roi et [f. 191] de madame sa mere, monseigneur Anne de Montmorency, grand maitre et marechal de France, chevalier de l’Ordre, gouverneur et lieutenant general dudit seigneur en Languedoc, et madame Anne de Tende, veuve de feu monseigneur René, batard de Savoye, en son vivant comte de Villars et de Tende, aussi chevalier de l’ordre du Roi, gouverneur et lieutenant general pour ledit seigneur en Provence, et grand maitre de France, ont convenu et accordé les articles qui s’ensuivent, et premierement mondit seigneur le grand maitre prendra a femme et epouse damoiselle Madeleine de Savoye, fille desdits feu comte de Villars et de ladite [f. 191v] veuve, laquelle damoiselle Madeleine de Savoye prendre a mari et epoux ledit seigneur grand maitre, si Sainte Eglise s’y accorde, en contemplation duquel mariage icelle dame comtesse de Villars et de Tende, au nom et comme curatrice de ladite damoiselle Madeleine et autres enfants dudit defunt et d’elle, donnera et promet donner en dot a sadite fille la somme de cinquante mille livres tournois, de laquelle somme de cinquante mille livres tournois ladite veuve se fait debitrice principale et icelle promet payer en son propre et privé nom, et le Roi promet donner auxdits futurs conjoints pareille somme [f. 192] de cinquante mille livres tournois, et ce pour l’amour qu’il porte auxdits seigneur grand maitre, a ladite comtesse et a sadite fille, et desir qu’il a que ledit mariage se fasse, laquelle somme de cent mil livres tournois se spayera dedans le jour de la solemnisation dudit mariage, et sortiront les deux parts desd. cent mille livres, apres avoir esté payees, nature de propre pour ladite fille, qui seront converties en rentes ou heritage au profit d’icelle, et si lesdits deniers n’avoient eté employés en rentes, ledit seigneur grand maitre ou ses heritiers seront tenus fournir, sur les biens, rentes a ladite damoiselle [f. 192v] ou a ses heritiers a la raison du denier quinze, laquelle rente sera rachetable par ledit seigneur grand maitre ou ses heritiers a ladite raison, a une, deux ou trois fois, en payant le sort principal, prorata et les arrerages qui en seront dues et echues au jour dudit rachat. Et quant a l’autre tierce partie desdits cent mille livres tournois, sortiront nature de meubles au profit desdits futurs mariés. Et sera tenue ladite dame comtesse habiller et enjouailler sadite fille selon son etat. Et sera douee icelle damoiselle, et la doue icelui seigneur grand maitre de douaire prefix seulement, c’est a savoir, de deux mille livres tournois de rente viagere [f. 193] pour en jouir par elle sa vie durant, sans ce que ledit douaire soit transferé aux enfants dudit mariage, ni que iceux enfants puissant dire ni pretendre ledit douaire etre leur propre heritage, nonobstant toutes coutumes des pays et lieux où les terres et seigneuries dudit seigneur grand maitre seront situees et assises a ce contraires. Avec ce aura icelle damoiselle pour son demeure, outre ledit douaire, l’hotel et maison seigneuriale de Villiers le Bel audit seigneur grand maitre appartenant, ou l’hotel et maison d’Escouan, c’est a savoir au cas que ledit seigneur grand maitre allat de vie a trepas avant monseigneur de Montmorency [f. 193v] son pere, ledit hotel de Villiers le Bel, et apres le deces d’icelui seigneur de Montmorency pourra icelle damoiselle prendre, si bon lui semble, ledit hotel et maison dudit Ecouan, ou icelui hotel de Villiers le Bel, a son choix et election. Toutefois, sera et est accordé que durant la vie de mondit seigneur de Montmorency, pere dudit seigneur grand maitre, ladite damoiselle n’aura pour son douaire que la somme de douze cents livres tournois de rente, et apres son deces deux mille livres tournois, comme dit est. Et du jour de la solemnisation dudit mariage seront iceux futurs mariés communs en biens meubles et acquets immeubles, qui se diviseront [f. 194] par moitié entre le survivant et les heritiers du premier decedant, et leurs dettes mobiliaires seront sur iceux meubles payees, et neanmoins sera et est accordé que où et au cas que ledit seigneur grand maitre, durant et constant ledit mariage, acquit aucunes portions de la baronnie de Montmorency qui ont eté par ci devant par partages, douaires ou autrement separees et distraites de ladite baronnie de Montmorancy et seigneurie d’Escouan, et aussi la terre et seigneurie de Saint Leu et autres fiefs dependants d’icelle baronnie, pour iceux reunis a ladite baronnie, en ce cas ladite damoiselle et ses heritiers, apres la dissolution de ladite [f. 194v] communauté, seront tenus delaisser audit seigneur grand maitre ou a ses heritiers la moitié desdites choses acquises et qu’ils pourroient pretendre a eux appartenir au moyen de ladite communauté en leur rendant toutefois et payant la moitié du prix que icelles choses ainsi acquises auront couté, en rente ou heritage de ladite valeur. Et en faveur et contemplation dudit mariage, le Roi donnera et donne auxdits futurs mariés par donation faite entre vifs la baronnie de Montberon, ainsi qu’elle se comporte et etant, sans y rien retenir, fort le ressort, souveraineté et hommage, laquelle baronnie est de l’acquet de feu de bonne mémoire [f. 195] madame de Rohan, veuve de feu monseigneur le comte Jean d’Angolesme, son ayeul, et declarera et declare ledit seigneur que son bon plaisir est que la proprieté, possession et seigneurie de ladite baronnie soit et demeure au survivant desdits mariés, et apres eux aux enfants descendants dudit mariage, et en defaut d’enfants sera et demeurera au survivant desdits conjoints, pour en disposer comme de sa propre chose. Et madame mere du Roi donnera et donne par donation faite entre vifs et irrevocable auxdits futurs conjoints les acquets qu’elle a faits en son nom et tout ce qu’elle a et lui peut competer et appartenir audit lieu de Montberon [f. 195v] sans y rien retenir ni reserver a telles et semblables qualités et conditions que le Roi leur a donnees audit lieu de Montberon. Et sera et est accordé que outre et hors les articles dessusdites que lesdites parties contracteront et se regleront en toutes autres choses concernant ce present traité selon les us et coutumes de la prevoté de Paris, promettants lesdites parties comparantes esdits noms par les fois et serments de leurs corps pour ce par elles baillés et mis, c’est a savoir par le Roi nostre sire en parole de Roi, et par madame mere du Roi en parole de princesse, et par les autres corporellement es mains desdits [f. 196] notaires, comme es notres souveraines pour le Roi notredit seigneur ces presentes et tout le contenu esdits articles avoir agreables, tenir fermes et stables a toujours sans jamais a nul jour aucunement y contrevenir, soit par voie d’erreur, d’ignorance, de decevance, lesion, circonvention ni autrement en quelque maniere que ce soit, aincois rendre et payer respectivement tous couts, frais, missions, depens, dommages et interets qui faits, eus soufferts et soutenus seroient au defaut de payement, en icelui poursuivant, et de tenir, entretenir, enteriner et accomplir tout ce que dessus est dit esdits articles, et en ces presentes lettres contenu et ecrit sous l’obligation de tous et chacuns leurs biens, ceux de leurs hoirs, meubles et immeubles presents et a venir qu’ils chacun en droit soi en soumirent et soumettent pour ce du tout a la jurisdiction et contrainte de ladite prevoté de Paris et de toutes autres cours, justices et jurisdictions [f. 196v] où trouvés seront, et renoncerent en ce faisant expressement par leursd. foi et serments a toutes exceptions de deceptions, dols, fraudes, barats, cautelles, cavillations, noms, raisons, actions, graces, reliefs, impetrations, dispensations, absolutions et a toutes autres choses generalement quelconques que l’on pourroit dire contre ces presentes, leur contenu et effet, et au droit disant generale renonciation non valoir. En temoin de verité, nous a la relation desdits notaires avons mis le scel de ladite prevoté de Paris a ces lettres faites et passees multiples au lieu de Saint Germain en Laye l’an 1526 le dixieme jour de janvier, et de ces presentes, du consentement desdites parties en ont eté faites et expediees quatre lettres, deux pour mondit seigneur le grand maitre et deux pour ladite comtesse de Tende et sa fille, cette pour ladite comtesse et sa fille.
Signé Bastonneau et Lefevre »

États des sommes allouées pour les travaux aux châteaux de Saint-Germain-en-Laye

« [f. 82] Extraict des parties emploiées en l’estat general des Bastimentz du Roy dont la despence est à faire et commandée par Sa Majesté en la presente année mil six centz vingt quatre
[…]
[f. 85] Chasteaux de Saint Germain en Laie
Vieil chasteau
Pour reste des ouvraiges et reparations faictes esd. chasteaux en l’année derniere MVIc XXIII, pour ce qui peult estre deub aux ouvriers : IXm VIIc XVII l.
Les augmentations qui ont esté faictes au [f. 85v] corps de logis neuf de la basse court dud. vieil chasteau : IIIm l.
La cloison à faire en la chambre de la dame de La Roche : VIc l.
Sur les reparations necessaires à faire au vieil chasteau contenuz en ung estat particulier : IIm l.
Le plomb qu’il convient pour reparer la chapelle, cy : VIIc L l.
La vuidange des fossés des chasteaux vieil et neuf : XIIc l.
Pour paver le bout du petit pont dud. vieil chasteau : CLXXV l.
Pour relever tout le pavé de la court : XIIc l.
Pour la conservation des orangers qui sont au jardin de Lalande : XIIc l.
Pour restablir les jambaiges de la grande porte du verger : VIc l.
Pour restablir plusieurs endroictz de la muraille qui separe le parc d’avec le parterre entretenu par Lalande : M l.
Pour resparer ung pan de mur de closture dud. parcq : VIIc LXXV l.
S’il plaist au Roy que l’on restablisse le logis des Loges : M l.
Pour ung puis necessaire dans la chancellerie : Vc l.
[f. 86] Pour la construction du jeu de paulme : XXm l.
L’entretenement de quatre hommes pour le nettoiement du chasteau : IIIc l.
Pour les reparations qui peuvent survenir pendant le cour de l’année : IIIIm l.
[Total :] XLVIIIm XVII l. I s.
Bastiment neuf dud. Saint Germain
Pour relever et reposer tout le pavé qui est le long des offices du Roy : IIIIc l.
Pour remedier aux puanteurs qui se font au hault des deux escalliers dud. château : CL l.
Pour les barreaux de fer qui sont necessaires à plusieurs croisées au hault dud. escallier : IIIc l.
La continuation des terrasses et descentes dud. Saint Germain : XXm l.
Pour ung passage qui donne la commodité aux habitans du Pecq d’aller à leurs heritages, cy : VIc l.
Pour emploier aux reparations qui surviennent pendant le cours de l’année : M l.
[Total :] XXIIm IIIIc L l.
Jardins des chasteaux dud. Saint Germain
Le restablissement à neuf de la treille des muscatz et jassemins : IIIIc XXVIII l.
[f. 86v] Le restablissement des pallisades de bois sauvaige : CLXXV l.
Pour remedier à l’incommodité qui se trouve à l’entrée du parcq quant il pleust : IIc XL l.
Pour refaire de neuf les deux petits parterres qui sont en la descente des grottes : VIIIc l.
Pour les despences extraordinaires desd. jardins aud. chasteau : VIIIc l.
[Total :] IIc IIIIm XLIII l.
[…]
[f. 87] Total du present abregé : IIIIc Lm l. »

Chambre des comptes

Liste des membres de la Maison du roi d’Angleterre à Saint-Germain-en-Laye

« Secretarys of State :
Lord Middleton,
Mr Caryl
Under Secretarys :
Mr Lindsey,
Mr Nieran,
Mr Dempster
Vice-Chamberlains :
Mr Stafford, to the King
Mr Porter, to the King
Mr Robert Strickland, treasurer
Mr Conquest, paymaster to the Household
Ladys of the Bed Chamber to the Queen :
Mrs Strickland,
Mrs Mulso,
Mrs Turene,
Lady Waldegrave
Grooms of the Bed Chamber to the King :
Coll. Bagnall,
Capt Lloyd,
Capt Trevanion,
Mr Biddulph,
Capt MacDonnel,
Col. Slingsby
Gentlemen Ushers to the King :
Mr Carney,
Mr Wincle,
Coll. Baggot,
Capt Hatcher,
Mr Runky,
Mr Turine,
Mr Dutton,
Mr Copley
Equerries to the King :
Mr Ralph Sheldon,
Mr Richard Biddulph,
Mr Magennis, equerry to the Queen
Pages to the King who have pentions but are not in waiting :
Mr Buckley,
Mr Barry,
Mr D. Neale,
Mr Windham,
Mr Floyd
Pages to the Queen :
Mr Persino,
Mr Strickland
Gentleman Usher to the Queene :
Mr Crane
Clerks to the Kitchin :
Mr Berkenhead
and Mr Parry
Lord Galway, Lord of the Bed Chamber, Lord Griffin, Lord of the Bed Chamber : a pension of 3000 livres a year
Pages of the back stairs to the King and Queen :
Mr Labbady,
Mr Bablyt,
Mr Prior,
Mr Heywoord,
Mr Labary,
Mr – a Frenchamn
Mr Labbady, closet keeper to the King, in his absence Mr Dujardain
Pages of the presence :
Mr Hyde,
Mr Aram,
Mr
Lt General Hamilton, Master of the Wardrobe
Doctor Constable, King’s Physician
Mr Bolio, Chirurgeon
Sir William Waldegrave, Queen’s Physician
Earl of Perth, Governor to the prince
Mr Plundin, Under-Governor
Doctor Betham, a priest preceptor
Doctor Ingleton, a priest sub-preceptor
Father Constable, a Jesuit chaplain
His grooms of the Bed Chamber :
Mr Layburn,
Mr Nevil,
Mr Strickland,
Mr Sackville
Gentleman Ushers :
Mr Symes,
Mr Duping
Mr Mosma, writing master and French master
Capt Booth, teach the prince to exercise the pike and musket
Mr Buckingham, riding master
Sir William Ellis, two of the commissioners for the Board of the green cloth
Mr Sheridan
Mr Doyle, two messengers who are constantly employed to carry letters
Mr Nash
Mr Lee, messengers employed about the castle
Mr Powlett,
Mr Walsh,
Mr White
Mrs Stafford, governess to the Princess
Bed Chamber women : Mrs Plowden,
Mrs Biddulph,
Lady Lee,
Mrs Symms
Father Constable, confessor and chaplain
Pages to the back stayres :
Mr Fulham,
Mr Wilkie
Mr Middleton, apothecary to the King, Queen, Prince and Princess
Mc Macarty, King’s butler
Mr Gautier, furnishes the King with wines and the house with wax candles
Mr Pemberton, layes the cloath for the King, Queen, Prince and Princess
and Mr Symson
Mr Atkins, cooks
Mr Broomer,
Mr Thomas,
Mr Miner,
Mr Dulater
Another Mr Dilater, almoner to the King and Prince
Mr Halfpenny, sadlers
and Mr Shaw
Mr Lewin, perveyors for the stables
and Mr Devereux »

Administration du roi d'Angleterre à Saint-Germain-en-Laye

Lettre de Carlo Vigarani à la duchesse de Modène concernant la réception du grand-duc de Toscane et le petit appartement du roi à Saint-Germain-en-Laye

« Serenissima Altezza,
Dal letto, ove m’ha confinato alucni giorni sono l’excessiva occupatione havuta per le feste fattesi all’arrivo e dimora qui del Serenissimo Gran Principe di Toscana, subito ricevuti i pregiatissimi commandi de L. A. V. Serenissima, ho’ avisato il signore Pouch, acio con la sua destrezza, e in conformita d’essi commandi, dia qualche lume dell’intentione che hanno cuca il partito le persone, che pensano a la compra de le rendite dell’A. V. Serenissima, siche col prossimo ordinario spero potergliene render conto.
Con l’ultima mia avisai l’arrivo a la corte del Serenissimo Gran Principe, e come S. M. lo havesse ricevuto a la prima visita, come per sorpresa, cise ch’essendo S. M. ne la sua camera con il solo duca di Saint Agnan, ora primo gentilhuoma, e con tre o quattr’altri servitori all’entrar di S. A. mostra d’esser sorpreso, e lasciato il capello su la tavola s’avanzo alcuni passi a riceverlo. E di la lo condusse egli stesse da la Regina. Qualche giorno dopo, il Re havendolo contotto a Versaglia ivi lo regalo di musiche, balli, comedie, collationi, giardini illuminati, e fuochi d’artifizio ; tornando il Re a San Germano, e S. A a Parigi ove sta alloggiato in casa del suo residente benche sia sevito da tutti gli ufficiali, carozze e staffieri del Signore duca di Guisa, il che m’haveva da prima fatto credere che fosse anche allogiato in sua casa.
A San Germano dopoi sele e fatta redere una comedia galante framezzata con balletti, e musciha, e con qualche scena : cosa pero di poca importanza, dopo la quale ogni volta sene ritorna a dormir a Parigi, anzi a cena, essendo ben presso a meza notte quando fnisse l’opera, non essendovi stato convito alcuno per anche, ecredo non vene sara. Tutta la casa di Conde e ritirata credo per la discrepannza de titoli e delle precedenze. Li duchi e Pari non l’honna visitato perche non le ha voluto dar la mano. […]
Ha S. M. fatto fare qui due cabinetti nel suo appartamento tutti ricoperti per tutto di specchi incastrati in cornici di legno indorate e sopradipinte, opera richissima del signore Brun, pittore eccelente : sopra gli spechi son dipinti bellissimi comparti d’ornamenti, che fanno un ammirabil vaghezza, ma la pittura e dietro al cristallo tra esso e l’argento vivo ; maniere e studi nuovi a quale vado applicando con la speranza di ripatriare un giorno per godere l’istessa fortuna del Principe nella sua gloriosa servitu alla serenissima casa, e sotto i clementissimi auspizy de L. A. V. Serenissima, a la quale profadamente inchinandom, mi dedico, de L. A. V. Serenissima,
Umilissimo, devotissimo et obligatissimo servitore.
C. Vigarani
Di S. Germano, li 30 Augusto 1669 »

Liste des courtisans logés au Château-Vieux de Saint-Germain-en-Laye

« 1 paire of stairs :
Mr Controller Skelton
Dutchess of Tyrconnel
Mr Hide
Lord Chamberlain
Duke of Berwick
Lady d’Almond
Earle of Melfort
Count Molza
Mr Carill
Mr Turene
Mrs Turene
Lady Sophia Buckly
Lady Walgrave
Mr Conquest
Sir John Sparrow
Lord Dumbarton

2 paire of stairs :
Lady Governess
Lady Strickland

3 paire of stairs :
Mr Lavery and the King’s necessary woman
Father Warner
Marquis d’Albeville
Mr Dupuis and the Lady Strickland’s servants
Lady Governesse’s servants
Mr Balthazar
Mrs London
Mrs Walgrave

4 paire of stairs :
Mr Brown
Mr Graham
Mr Joshn Stafford
Officers of the guard
Father White
Mr vice chamberlain Strickland
Mr Inese the priest
Father Gally
Mrs de Lauter
Mrs Chappell
Mr Benefield
Sir William Walgrave
Count Lauzun
Mr Biddulph
Mr Leyburn
Mrs Rogé
Lady Lucy Herbert
Father Ruga
Father Sabran
Sir Edward Hales

5 paire of stairs :
Mr Buckingham
Mr Noble
Mr Cadrington and the Prince’s necessary woman
The King’s barber
Mr Beaulieu
Mrs Simms
Mr Dufour
Mess. Ronchi priests
Mr Ronchi gentleman usher

Ground rooms :
Mr Martinash
Mr Atkins the cook in a room lent him by the concierge
Captaine Trevanian
Mr Harrison
Mr Francis Stafford
Mr Inese the gentleman usher
Mr La Croix
Mr Gothard
The King’s wardrobe
Mr vice Chamberlain Porter
Captain MacDonnel
Mr Labady
Mr Riva
Mr Crane
Sir Roger Strickland
Mr des Arthur
Mr Nevil
Madame Nurse »

Administration du roi d'Angleterre à Saint-Germain-en-Laye

Description par Louis Le Laboureur du petit appartement du roi au Château-Vieux de Saint-Germain-en-Laye

« [p. 1] Mademoiselle,
Je ne veux point vous surprendre, preparez vous [p. 2] à lire une grande lettre ; mais si le discours en est long, la matiere en est belle. Avec cela c'est une piece que l’on a souhaitée de moy ; et en voicy l’histoire en peu de mots. Nous avons eté ces jours passez voir de petits cabinets que le Roy s’est fait faire depuis peu à Saint Germain. O la belle chose ! un de vos amis qui se trouva tout proche de cet admirable lieu, et qui y entra avec nous, veut que je vous en fasse la description. Pour moy je ne say [p. 3] pas à quoy il pense. Il auroit bien meilleure grace de faire luy meme ce qu'il conseille aux autres ; et j’ai vingt raisons pour l'en convaincre, dont la moindre est qu’il a cent fois plus d'esprit que moy. Mais il n’importe, la chose est resolue ; je lui veux obéir, et vous montrer à tous deux en cette occasion que rien ne m'est impossible quand il s’agit de vous satisfaire.
Vous savez bien que ce chemin si clair
Qu’on voit au ciel pendant la nuit obscure,
Meine au Palais du grand dieu Jupiter,
Comme un auteur digne de foi l'assure ;
[p. 4] C’est Ovide, et cela suffit.
Mais vous ne savez pas peut estre
Qu’à Saint Germain, tant le jour que la nuit,
Depuis deux ans on en voit apparaître
Un autre en l’air qu’a voulu qu’on y fît
Monsieur Colbert, des Bâtiments le Maître.
Il est si beau, si belle en est la vue,
Qu'en y passant, les yeux sont eblouis !
Et ce chemin meine et sert d'avenue
Aux cabinets de notre grand Louis.
C’est un haut et magnifique balcon que l’on a fait au vieux château, le long des appartements du Roy et de la Reine, du côté qui regarde le nord. Cette piece apporte tant d’ornement et tant de commodité à ce palais, qu’on la croit aussi ancienne que [p. 5] tout le reste du bâtiment. On se persuade qu’elle y a toujours été, parce qu’elle y devoit toujours etre ; et c'est ainsi que l’on est surpris tous les jours en voyant le succez des ordres de ce genie universel qui prend le soin de ces choses, et qui sait si bien donner la dernière perfection à tout ce qui dépend de son ministere.
Toute la cour donne le nom de terrasse à ce balcon ; et en effet, il est assez large pour meriter qu’on l’appelle ainsi. Vous pouvez [p. 6] juger, apres la promenade que vous avez faite ici pendant la saison des cerises, si nous devons nous connoitre en belles vues : quoy qu’il en soit, Mademoiselle, je vous dis maintenant en prose qu’il n’y en a point de plus riche au monde ni de mieux variée que celle qui se presente devant la terrasse dont je vous parle. De là on a le plaisir de se promener des yeux dans les jardins du Roy et à plus de quatre lieues aux environs, dans des valons et sur des coteaux [p. 7] qui font une perspective admirable.
Tant de si doux objets ; une découverte si avantageuse ; le voisinage d’une grande foret et d'une grande riviere ; la pureté de l'air, et je ne say combien d'autres belles choses qui se rencontrent heureusement ensemble à Saint Germain en font aimer le sejour au Roy, et sont cause que le vieux château l’emporte aujourd'hui sur tous les modernes. Voilà ce que c'est que d’avoir eu du commencement la nature [p. 8] favorable ! Cela fait bien voir que ce n’est pas la belle architecture qui rend les palais agreables et qui les fait habiter.
Admire qui voudra la pompe de cet Art ;
La charmante nature a des graces à part
Qui touchent davantage et les yeux et les ames.
On ne peut m’opposer de valables raisons.
Nature fait les belles femmes
Et les belles maisons.
C’est elle qui donne les belles scituations et les beaux paisages ; et comme elle ne fait pas de semblables liberalitez à tous ceux qui batissent, il arrive de là aussi qu’on voit assez de riches bâtiments [p. 9] et peu de belles maisons.
Monsieur Le Brun, avec qui nous avions fait la partie, nous mena d’abord sur cette terrasse : la compagnie fut surprise et charmée d’une veue si accomplie ; et il n’y eut personne qui ne s’imaginât estre passé dans l’ancienne Assirie ou dans l’ancienne Egypte par la machine de quelque songe, et se trouver dans ces jardins suspendus, dont on a fait tant de bruit. Cette vision n’etoit pas si hors de raison qu’on diroit bien, et vous le connoitrez par [p. 10] la suite. On peut de cette terrasse aller à la chambre du Roy, qui s’habilloit alors :
En ce lieu neanmoins parurent peu de gardes ;
La liberté s’y trouvait comme ailleurs ;
Et le nombre des hallebardes
Le cedoit à celuy des fleurs.
Nous y marchions entre deux rangs de lauriers cerises, de tricolors, de jasmins et de tubereuses, et tandis qu’avec un petit cristal dont je me sers pour allonger ma courte veue, je cherchois notre Montmorency d’où nous etions partis, notre conducteur alla s’assurer de l’ouverture [p. 11] des cabinets, et nous vint rejoindre après avoir obtenu la permission de nous y faire entrer.
Il nous falloit passer devant une porte qui repond de la chambre du Roy sur cette terrasse ; elle etoit ouverte et si fort assiegée de courtisans, qu’il n’y avoit presque point de place pour aller au delà. Le roi etoit alors auprès de cette porte, et c'est d’où venoit une si grande presse. Je tachay de le voir en passant, mais ce fut en vain ; l’eclat de sa personne est si [p. 12] grand que j’en fus frappé, même en ne la voyant pas. J’eus beau avoir recours au petit cristal que je tenois à la main, cela ne servit de rien ; au contraire, mon eblouissement s’accrut au lieu de diminuer ; et j’expérimentay ainsi la verité de ces sages paroles qui disent que celuy qui cherche trop curieusement la Majesté sera opprimé par la gloire.
La terrasse finit à trois ou quatre pas au dessous de cette porte de la chambre du Roy, et c’est à cette extremité [p. 13] que commence de ce côté là le petit appartement que nous allions voir. Il est rangé sur une autre terrasse de plain pied qui regne tout le long d’une autre face du vieux château et qui regarde les cours du château neuf. Il y a, au bout de la terrasse où nous etions, une porte qui nous fut ouverte ; et alors nous entrames dans les lieux tant desirez, où je trouvay encore mille autres sujets d’eblouissement.
En effet, je defie l’imagination [p. 14] la plus riche et la plus heureuse de se former une idée de choses qui puissent montrer tout ensemble tant d’art, tant d’esprit et tant de magnificence. Tous les murs et les plafonds sont revetus de glaces et de miroirs avec des quadres et des ornemens dont l’or fait la moindre richesse. On y marche sur des planchers qui seroient dignes de faire la pompe des plus belles voutes et d’etre au dessus des testes les plus superbes. Ce ne sont que des marbres de [p. 15] toutes les couleurs, des ouvrages en mosaique et des parquets de pieces de rapport. On y voit en tous les coins et en cent autres endroits de grands vases d'argent chargés de fleurs, des pilastres et des termes de meme métal qui portent des filigranes d'or : et tout cela me parut si eclatant que, me ressouvenant de la devise du Roy,
Je crus en verité, sans pousser trop les choses,
Estre, par un miracle à nul autre pareil,
Transporté d’ici bas au palais du Soleil,
Tel qu’on le voit baty dans les Metamorphoses :
Mais le Soleil qui brille en ces lieux enchantez
N’a point ces ardeurs violentes,
Qui font en mille endroits deserter les citez,
[p. 16] Qui noircissent le teint, qui fletrissent les plantes,
Qui dans l’aride sein des plaines languissantes,
S’insinuant de tous cotez,
Vont jusqu’en leurs canaux voûtez
Secher les rivieres naissantes ;
Et n’exposent aux yeux des familles errantes
Que des sablons ingrats de bestes frequentez.
L’astre du ciel où nous etions,
Car d’un celeste nom ces beaux lieux semblent dignes,
Ne repand que de doux rayons
Et des influences benignes
Qui font fleurir ses regions.
Au lieu des chiens brulans, des devorants lions,
Des centaures, des scorpions,
Et de telles bestes malignes
Que l’autre visite en son cours,
Celui cy fait regner les beaux arts en nos jours,
Et son zodiaque pour signes
En ce lieu n’a que des Amours.
Mais ces Amours sont instruits à toutes les belles et grandes choses : ils se jouent avec les lions et les léopards ; [p. 17] ils batissent, ils travaillent, ils vont à la chasse, ils manient les armes, et se montrent capables de tout. On en voit de toutes parts qui sont peints sur des glaces, et dont les différentes postures font autant de douces emblemes. Mais ce qui est singulier en tous ces tableaux, c'est qu’étant peints derriere les miroirs, les premiers traits que le pinceau y a couchez forment la figure telle qu’on la voit ; au lieu que dans la peinture ordinaire ce sont les derniers coups [p. 18] de pinceau qui l’achèvent et qui la finissent.
Monsieur de Pellisson, qui etoit au lever du Roy et qui se trouva sur la terrasse comme nous passions, entra avec nous dans ce beau palais des amours. Nous nous y reconnumes tous deux avec autant de surprise que de joye ; les premieres paroles que nous nous dimes furent de vous, et c’est lui qui m'a conseillé de vous faire le recit de tant de belles choses.
Mais pour m'en acquitter avec honneur, il faudroit [p. 19] que je pusse me ressouvenir icy de tout ce que j’en entendis alors dire à monsieur le comte de Nogent. Vous connoissez la modestie de monsieur Le Brun, qui n’est pas moins admirable que ses ouvrages. Il ne parle bien volontiers que des choses qu'il n’a point faites ; et comme celles que nous regardions viennent toutes ou de ses mains ou de sa tête, il se contentoit de nous les montrer sans nous en faire remarquer l’esprit. Monsieur le comte de Nogent, [p. 20] qui nous a fait la grace de nous aimer un peu, et qui voulut bien alors nous venir joindre, y supplea merveilleusement. Il nous expliqua toutes choses, mais avec un esprit qui luy est singulier et à ceux de son nom ; en sorte, Mademoiselle, que si vous trouvez quelque endroit qui vous plaise dans la description que je vous fais, vous luy en devez avoir toute l’obligation.
Jusqu’icy, je ne vous ay parlé que confusement de tout cet admirable bijou ; [p. 21] mais pour vous en donner une idée plus distincte, il faut que je tache d’imiter le bel ordre que vous gardez dans tous les recits que vous faites. Ces cabinets, car je les nomme ainsi, tant à cause qu’ils tiennent peu de place que parce qu’ils sont joints à la chambre du Roy, qu’ils accompagnent ; ces cabinets, dis je, font entr’eux un petit appartement entier par les pieces qui le composent. Aussi le Roy appelle cela sa chambre particuliere, pour en faire la diference [p. 22] d'avec l’autre, qui est ouverte à toute sa cour.
Je vous ay fait entendre que nous y entrames par une porte qui est au bout de la terrasse où nous etions venus d'abord ; mais je vous y veux donner une autre entrée pour vous faire voir chaque chose en son rang, et c’est par la chambre du Roy. Admirez un peu le credit que je me donne icy. Le premier lieu qui se presente de ce coté là est une antichambre, dont les lambris sont tout de miroirs enrichis d'or : il y en a partout, comme je vous ay dit, et jusqu'aux plafonds.
Au milieu du plafond qui est sur l'estrade à l’entrée que je vous ay promise, est le portrait d’une beauté accomplie qui tient une pomme d'or ; et à la voute, qui est au delà de l’estrade et qui est enfoncée d’une maniere d’architecture fort riche, il y a au fond la figure de Junon qui tient un sceptre et qui a un paon auprès d'elle.
De ces tableaux incomparables
L’un, par sa pomme d'or et ses charmes connus,
Represente aux regards ce qu’ils aiment le plus,
Ce juste arrangement de choses agreables,
Ces yeux brillans et bien fendus
Cette bouche, ce nez, ces cheveux admirables,
Ces roses, ces lis répandus
Qui cachent de doux homicides ;
Tous ces pieges enfin subtilement tendus
Où l’on a veu tomber les dieux et les Alcides,
C’est la Beauté.
Et l’autre qu’on a peint sur le meme modelle,
Cette Junon pleine de majesté,
Est la supreme autorité,
Altiere et jalouse comme elle.
Cette dernière figure toute royalle est accompagnée de diverses emblemes qui sont rangées alentour, dans les pans de l’enfoncement de la voûte. Vous ne doutez pas, Mademoiselle, que ces emblemes ne soient [p. 25] peintes avec toute l'excellence de l'art ; mais vous ne savez pas ce qu’elles représentent, et je vais vous l'apprendre. Ce sont les inclinations du Roy. Cela devoit être touché d'une façon poetique qui fut aussi agreable que judicieuse et spirituelle. C’est ce que l'on a fait, et vous l'allez voir.
Comme les diferentes inclinations que l’on a pour les choses sont, à les bien entendre, autant de diferents amours qui y portent les hommes dès leur [p. 26] plus tendre jeunesse, on ne pouvoit pas mieux, ce me semble, figurer celles du roi, toutes sérieuses et toutes grandes qu’elles sont, que par de petits amours appliquez attentivement à ces memes choses. Aussi monsieur Le Brun, qui est un excellent poete en toutes ses peintures, n’y a pas manqué en celles cy. Il s'est tout à fait bien servi de ces petits symboles dans un dessein si vaste, et cela produit le plus agreable effet du monde.
Il a consideré diferemment [p. 27] les inclinations du Roy, les unes comme luy venant de la nature, et les autres comme luy étant données par la raison. Les premieres, telles que la chasse, la musique et la danse, n’ont pour objet que le seul plaisir ; et les autres, comme le commerce et la guerre, regardent le bien et la gloire de l’Etat. Pour representer ces différentes choses, monsieur Le Brun s’est servi partout de memes acteurs, mais qui font de diferentes actions et qui sont toutes [p. 28] proportionnées à leur age, ce qui rend la fiction tout à fait agreable.
Ainsi l’on y voit avec grand divertissement un de ces petits amours chasseurs qui s’est passé la tête dans un cor, qui l’embarrasse ; et un autre qui, aimant la musique, touche une viole de ses doits, et prete en meme temps l’oreille fort attentivement, comme si le son que l’on tire de cet instrument avec la main seule pouvoit estre bien harmonieux.
[p. 29] Surtout je pris plaisir à voir
La posture diverse
De ces jeunes enfants qui marquent le commerce,
Occupez de tout leur pouvoir,
Comme negociants d’un notable savoir,
A tenir leurs journaux, les lire,
Charger, rayer, chifrer, ecrire,
Conter argent, payer et recevoir.
D’autres, pour qui la gloire a de plus nobles charmes,
Dans un quadre opposé cherchent d'autres emplois :
L’un prend l'epée, un autre endosse le harnois ;
Et faisant tous l’essay de quelques pieces d'armes
Montrent qu’ils ont le cœur françois,
Qu’ils aiment les fameux explois
Et qu’ils craignent peu les alarmes.
Mais le peintre savant,
Voulant montrer que bien souvent
Tel se met en campagne et commence la guerre,
Qui ne peut à son gré la terminer après,
En a figuré tout exprès
Un d’entre eux que son casque serre,
Et qui de ses deux bras, trop foibles et trop courts,
Ne pouvant plus l’oter de sa tête enfantine.
Semble appeller à son secours
[p. 30] La troupe voisine
Des autres amours.
De là, à main gauche, est une chambre destinée au repos du Roy, où l’on voit dans l’enfoncement de la voute, qui est faite en coupe, trois petits amours qui sont peints d’une manière inimitable. Ils tiennent tous trois de toutes leurs mains un meme lustre avec un empressement merveilleux ; et quoiqu’ils paroissent fort empeschez à en soutenir le poids, qui est trop grand pour la petitesse de leur corps, la peinture [p. 31] est si artistement faite qu'on apperçoit neanmoins à leurs yeux et sur leur visage la joye qu’ils ont à eclairer le Roy avec ce lustre.
Il y en a quatre autres autour d’eux dans le fond de la coupe ; mais ils ne leur ressemblent pas. Je n’ay jamais rien veu de si opposé : ils ne respectent aucune puissance, et n’epargnent ni les heros ni les dieux memes.
Le premier, pour faire voir qu’il exerce son empire jusque dans les cieux, [p. 32] tient, ce me semble, un cygne et un aigle dont il contraignit autrefois Jupiter de prendre la figure.
Le second, voulant montrer que les enfers n’ont pas moins ressenti aussi son pouvoir, arbore, pour marque de la victoire remportée sur Pluton, le sceptre fourchu de ce dieu, qui, d'ailleurs, representant la richesse, donne par sa defaite un double triomphe à l’amour.
Le troisieme, qui n’est guere moins fier, se rit de la force guerrière, et se [p. 33] fait un trophée des armes de Mars.
Le dernier ne traite pas mieux la force héroïque : il se joue de la depouille d'Hercule ; et, non content de montrer la massue de ce domteur de monstres jettée à ses pieds avec une quenouille, le petit emporté prend encore la peau du lion : il se la met sur la teste et s’en coeffe plaisamment comme s’il en vouloit faire une mascarade.
Sur les cotez de la coupe, on voit les divertissements [p. 34] du Roy qui sont representez par ses maisons de plaisance ; et l'on y remarque entre autres Saint Germain, Versailles et Fontainebleau. Mais, parce que le Roy a bien montré qu’il fait aussi ses plaisirs des travaux de la guerre, on n’a pas oublié d'en peindre une petite image auprès de cette derniere maison, par la representation du camp qu’il y a fait faire autrefois.
Au plafond de l'alcove, qui est entourée de force jeunes amours peints sur [p. 35] les glaces du lambris, on voit le tableau d'une deesse qui n’etalle pas seulement tous les charmes de la beauté sur son visage, mais qui repand aussi de ses mains toutes sortes de pieces d’or et d’argent, et qui a encore derriere elle une corne d'abondance dont il sort quantité d'autres richesses.
Il n’est pas besoin, Mademoiselle, de vous dire que cette nymphe represente la magnificence ; vous devinez des enigmes qui sont bien plus dificiles ; [p. 36] mais que vous semble de la scituation que monsieur Le Brun luy a donnée ? Ne trouvez vous pas qu'il l’a placée bien judicieusement dans le voisinage de tous ces petits audacieux ?
N’en deplaise à tous les amours
Que tant de victoires couronnent,
Cette belle qu’ils environnent,
Prete aux amants de grands secours.
Il y a sur l'estrade un lit à la romaine, dont les rideaux, qui etoient retroussez, sont d'un tissu d'or et d'argent qui me parut un ouvrage aussi nouveau qu’il est riche. Le dossier [p. 37] du lit est un relief d’argent à jour, où l’on voit au coté droit un petit amour qui conte curieusement les dents d’un lion, et un autre de l’autre coté qui tient doucement un leopard au cou. Il y en a un troisieme au dessus d’eux qui est assis sur un aigle au milieu du dossier, d’où il menace tout le monde d’une fleche qu’il tient couchée sur son arc.
Comme les princes et les souverains n’ont point de plus seure garde que l’amour, je m’imagine que [p. 38] celuy là est en faction, et qu’il veille à l’entour du lit du Roy ; mais tandis qu’il est ainsi à l’erte, on en voit quantité d’autres aux glaces du lambris de l’alcove qui sont dans une posture paisible, et qui invitent au repos ceux qui les regardent.
Celuy cy, le doit sur la bouche,
Semble imposer silence à tous ;
Celuy là, fatigué de tirer trop de coups,
Ote son carquois et se couche.
Un, que le grand jour effarouche,
Eteint de son flambeau les feux cuisans et doux.
Un autre enfin, qui n’est ni peureux ni jaloux,
S’endort et fait bien voir qu'aucun soin ne le touche.
Ainsi tous ces amours promettent le repos ;
Et je n’en vis qu’un seul, dans un coin de l’estrade,
[p. 39] Qui se tenoit en embuscade,
Et decochoit un trait dispos.
Mais ce trait est un coup de ùaître,
Que l’illustre Le Brun fait là bien à propos :
Sa pensée est d’instruire, et de faire connetre
Que l’amour est un petit traitre ;
Qu’il s’en faut defier de loin comme de près,
Et qu’en quelque etat qu’on puisse etre,
Il est bien mal aisé d’echapper à ses traits.
Mais ce jeune avanturier n’est pas encore si dangereux ni si formidable que celuy dont je vais vous parler ; il y a bien à dire. Il n'est auprès de lui tout au plus que,
de la plebe degli Dei,
pour me servir des termes de l’Aminte du Tasse ; et l'autre, bien au contraire,
[p. 40] E tra grandi e celesti il piu potente.
En voicy la raison. C'est que le premier n’a qu’un but et qu’une visée, au lieu que cet autre tient au bout de sa fleche quiconque est si hardi que de le regarder. On a beau changer de place et se tourner de tous cotez, on est toujours à sa mercy, toujours à la pointe de son trait ; et y eut il cent personnes à le voir, il les mire tous ensemble et chacun en particulier. D’ailleurs, il n'épargne ni l’habit ni la profession ; et je vous nommeray [p. 41] des gens de notre compagnie qui me parurent tout embarrassez de voir qu’il donnoit sur eux aussi bien que sur les autres.
Pour voir ce mauvais garçon, il faut entrer dans un cabinet qui tient à la chambre que je viens de vous montrer, et qui est la dernière piece de l'appartement. Il est pris dans une petite tour voisine qui fait le coin des deux terrasses dont nous avons parlé : sa figure est octogone, et l’on y voit des miroirs dans tous les lambris, [p. 42] et des filigranes d'or et d'argent rangées sur la corniche qui regne tout autour, comme dans les deux autres pieces precedentes. Il y a encore dans ce cabinet deux grandes figures d’argent, qui sont si hautes et si bien faites, qu’on en demeure tout surpris en entrant.
L’une represente Apollon,
Lors que, dans l'aimable vallon
Où serpente le doux Penée,
Joignant la nymphe qui le fuit,
Il n’a de sa course obstinée
Rien que des feuilles pour tout fruit.
C’est de cette belle fugitive qu’est venu en ligne directe [p. 43] le jeune laurier qui est dans votre jardin, et dont vous m’avez promis une couronne quand il sera plus grand.
L’autre figure est aussi belle,
J’eus bien longtemps les yeux dessus ;
Mais de dire comme on l'appelle,
Excusez moi, de grace, il ne m’en souvient plus.
Le terrible assaillant que je vous ai tant vanté est au plafond de ce cabinet ; et comme ses coups sont inevitables, on ne voit aussi partout sur les glaces du lambris que des emblemes qui ne parlent que de ses prises et de ses conquestes.
[p. 44] Le cœur fidelle qui est representé par une colombe qu’un petit amour tient à la main ; l’humeur altière et la causeuse qui sont figurées par de jeunes amours qui tiennent l'un un paon et l'autre une pie ; enfin, je ne sais combien d’autres diferents symboles de diferents amours sont peints là de toutes parts, comme autant de prisonniers de guerre qui ont eté faits par ce victorieux.
Ne croyez pas, Mademoiselle, qu’il n’ait point d’autre fleche à tirer que [p. 45] celle qu’il presente ; on lui en appreste à tous momens de nouvelles : et c’est pour cela sans doute que l’on voit dans le meme lambris un autre petit amour à l’ecart, qui est occupé à eguiser et afiler des traits. Il est merveilleusement attentif à son travail, et, pour moy, je pense que c’est un officier des plus experts à qui le prince qui est au plafond a donné particulierement cette charge dans sa maison.
Il y a dans l'ouverture de la cheminée un grand vase [p. 46] d’argent qui fait cent petites fontaines jaillissantes à discrétion ; et cela sert, quand on veut, à rafraichir agreablement le lieu en eté. Au manteau de cette cheminée, on voit les quatre elements en quatre figures separées qui composent un quarré ; et dans le milieu est un amour triomphant, qui, avec toutes ces figures elementaires jointes ensemble, tient un portrait merveilleux dont il tire toute sa gloire et toute sa puissance.
[p. 47] Tout fier de tenir cette image,
Il insulte aux plus grands vainqueurs,
De ce qu’ils n'ont autre avantage
Que d’accroistre leur héritage
Par la force et par les rigueurs
Que Bellone met en usage ;
Au lieu qu’au seul aspect de ce charmant visage,
Il est maitre absolu des plus rebelles cœurs,
Qui viennent tous luy rendre un volontaire hommage.
Là, tel qu’il fut jadis quand de l'affreux Chaos,
Faché de voir le trouble enorme,
Il chassa de la masse informe
La haine et le desordre enclos ;
On le voit gouverner l’air, le feu, l'eau, la terre,
Et de ces ennemis adoucissant la guerre,
Donner à l’univers la paix et le repos.
Avouez, Mademoiselle, que vous etes eblouye de tant de belles choses, et que vous seriez bien aise de trouver maintenant [p. 48] quelque grotte où vous pussiez vous delasser, et prendre un peu de rafraîchissement. Je me doute que cela ne vous deplairoit pas. He bien, vous allez estre servie à point nommé ; il y en a une icy tout proche, où vous verrez, entr’autres choses, un jet d'eau de plus de dix pieds de hauteur, et la plus charmante cascade qu’il y ait au monde. Il ne faut que repasser dans l'antichambre, par où je vous ay fait entrer de la chambre du Roy.
Vous ne me croyez pas ; car quelle apparence qu’on puisse trouver une grotte, avec des jets d’eau et des cascades, sur un balcon ? Mais il falloit cela aussi pour achever l’enchantement. Venez donc, s’il vous plaist, et faites moi l'honneur de me suivre jusqu'à l'autre bout de ce petit palais.
Au delà de l'estrade de l'antichambre, à main droite, vis à vis des beaux lieux que je viens de vous faire voir, se trouve cette admirable grotte, où, du [p. 50] milieu du plancher qui est d’un marbre de toutes couleurs, il sort un gros jet d'eau qui va jusqu’au plafond attaquer un petit amour qui tient un foudre.
A voir cet amour au travers de l’eau qui le couvre, on diroit qu'il s’offense de l’insulte que luy fait son ennemie, et meme, dans le mouvement de l’eau, il semble qu’il se tremousse, comme s’il vouloit lacher la foudre qu’il tient toute preste sur elle. Mais cette eau se moque de sa colere et de ses menaces ; [p. 51] et, non contente de luy porter son bouillon jusques dans le nez, elle fait encore passer la figure de son jet au travers des glaces du plafond, et forme ainsi un second jet au dessus de ce petit foudroyant, qui, par cet agreable prestige, a l’affront encore de paroitre enfermé entre deux eaux jalissantes.
Au coté le plus apparant de la grotte, contre un mur tout revetu de marbre, et justement au milieu de ce mur, il y a le relief d’un Neptune qui est representé [p. 52] sur son char tiré par des chevaux marins. Cette figure, qui est d’argent, deploye de tous cotez quantité de petites nappes d'eau les plus agreables du monde, et fait ainsi la belle cascade que je vous ay promise.
Mais ce n'est pas la seule figure qui soit dans cette grotte ; j’y en vis quatre autres qui ne luy cedent nullement, ni pour la matiere, ni pour la forme. Ce sont des amours que je n’ozerois appeler petits comme les autres, parce [p. 53] qu’ils me parurent d’une taille assez grande. Ils portent chacun sur leur teste une corbeille chargée de fruits, qui font une infinité de jets d’eau ; mais le jet du milieu de la corbeille, comme le plus haut et le plus fort, domine sur tous les autres, qui se contentent de noyer ces fruits et de faire une douce pluye à l'entour de ces jeunes enfants.
Chacun d’eux est dans une grande coquille, assis cavalierement sur un dauphin qui jette aussi de l'eau ; [p. 54] et ces divers jalissemens se rassemblant dans cette coquille, qui est soutenue par de petits tritons dorez, toute l’eau se repand de là en meme temps dans des bassins de marbre blanc, et fait, en tombant, comme une menue grille d'argent qui emprisonne ces petits dieux marins.
Tous les autres ornements sont de même ; on n’a jamais veu encore un si beau coquillage ; et ce n’est pas seulement à cause qu’il est enrichy de quantité de branches de corail de toutes [p. 55] couleurs, mais aussi parce qu’il est arrangé avec tout l'art imaginable. L'ouvrier s’est aquité en cela tout à fait bien de son devoir.
Ce ne sont que festons, arcs, fruits, pampres, raisins,
Et la peinture encore animant ces rocailles,
Y figure partout à l'entour des murailles
Mille petits Amours marins,
Les uns assis sur des ecailles,
Et les autres sur des dauphins.
Mais ce n'est pas tout encore : cette grotte en produit plusieurs autres, et cela se fait par les miroirs qui sont aux lambris et aux plafonds des chambres, qui representent tous [p. 56] cette grotte à l’envi l’un de l'autre ; en sorte que lorsqu’on luy donne l'eau, on voit aussitot cent cascades pour une, et infinis jets qui se reproduisent de tous cotez. Chaque glace renvoye aux autres la figure des objets qu’elle reçoit ; et ce que l’une n’a pas directement, elle l’emprunte de quelqu’une de ses voisines. Ainsi, rien ne se perd dans ces miroirs, et l’œil y retrouve presque partout l’image de bien des choses qu’il a veues reellement en ces lieux, mais qui ne se [p. 57] peuvent plus voir de la place où l’on est. En voicy un exemple.
On ne saurait voir de l’estrade de l'antichambre le veritable Neptune qui est dans la grotte, parce qu’il est derriere un mur qui le cache. Cependant, on ne laisse pas d’en trouver la figure dans les miroirs de cette estrade, et cela vient d’une seule glace assez eloignée que ce Neptune regarde de coin, laquelle, après en avoir receu l'image, la distribue ensuite à toutes les autres glaces.
[p. 58] Il y a meme quantité d’arbres des jardins d’alentour qui se viennent mirer aussi dans ces chambres par les fenestres qui repondent sur le balcon ; ce qui fait autant de tableaux, de paisages qu’il y a de miroirs. Je vous donne à penser, Mademoiselle, si de tels tableaux sont naturels et si ces arbres sont bien representez.
Nous nous vimes sous leur ombrage,
Et vimes aussi des oiseaux,
Qui passoient dans la cour entre les deux Chateaux,
Peindre dans ces miroirs leur vol et leur plumage.
Voicy bien d’autres choses que j’ay à vous dire, [p. 59] et c'est où j’aurois grand besoin de votre secours pour les exprimer dignement. Agreez donc, s’il vous plaist, que je vous invoque en cet endroit comme la maitresse du Parnasse, et que je vous prie de me preter votre plume pour un moment. Encore une fois, j’en aurois grand besoin, et ce seroit afin de pouvoir vous dire avec toute la force et la delicatesse de notre langue que le Roy vint en ces beaux lieux comme nous etions si fort occupez à les admirer, et [p. 60] qu’il nous fit voir dans ce temps là celuy qui est le mieux fait de tout son royaume. Il etoit seul et ne fut jamais vetu plus simplement ; cependant, il effaçoit la pompe et la magnificence meme.
Alors, je vis en sa personne
Tout ce riche appareil de gloire et de splendeur
Qui peut accompagner une vaste couronne,
Et par le saint respect que la Majesté donne,
Fait la véritable grandeur.
Je vis dans ses regards, sur son front, en son geste,
Parmi les graces, les appas,
Tout ce qu'on peut voir icy bas
De fort, d’auguste et de celeste.
Je ne m’etonnay plus de ses divins explois,
De ses succès, de ses conquestes ;
Et je dis alors plusieurs fois :
Louis est un miracle, il est le Roy des Roys.
[p. 62] Il est né pour ranger l’Univers sous ses loix,
Et mettre sous son joug les plus superbes testes.
Avec luy l’allegresse entra dans tous ces lieux,
Et soudain les miroirs, avides
De faire le portrait de ce Victorieux,
Quitant tout autre objet, eures leurs glaces vuides,
Pour ne plus figurer qu’un Louis à nos yeux.
Je ne vis plus alors que ce Roy glorieux ;
Son image partout me parut eclatante,
Et ravi de la voir si belle et si frequente,
Moi qui brule pour luy d'un zele ambitieux,
Je crus voir du Ciel radieux
Descendre autour de moy la machine roulante,
Et me trouver parmi les Dieux.
Après que le Roy s’en fut allé et que j’eus un peu recueilly mes esprits, que sa presence avoit mis en desordre, je vins à faire reflexion sur son merveilleux naturel à propos du bel endroit [p. 62] où nous etions. Je ne pouvois assez le louer, de la force qu’il a dans ses affaires, et de la delicatesse qu’il montre dans ses divertissemens. J’admirois que, dans les grands desseins qu'il medite pour le salut et la gloire de son Etat, il put encore penser à toutes les belles choses, et les ordonner avec une connoissance si parfaite et si universelle.
En effet, il se partage en cent occupations diferentes, et il est tout entier à chacune. Il regle ses finances, il assure le repos à ses [p. 63] sujets, il assiste ses alliez, il reprime les infidelles, et, au milieu de tout cela, il ne laisse pas de cultiver les arts et les sciences. Faut il qu'il fasse la guerre, il en dresse le plan dans son cabinet ; il l’execute aussitot luy meme à la campagne, malgré les ardeurs de l’eté et les glaces de l'hiver ; et c’est, Mademoiselle, ce qui vous l’a
fait appeler si heureusement le Heros de toutes les saisons.
Est il sollicité par ses voisins de faire la paix, il arrete, à leurs prieres, le torrent [p. 64] de ses armes, que nulle force etrangère ne pouvoit ni retenir, ni soutenir. Il donne seul la paix à toute l’Europe ; et après avoir joint des provinces entieres à son royaume, non seulement il essaye de l’enrichir par l’etablissement du commerce et des manufactures, mais il travaille encore tous les jours à l'orner par les palais et les maisons qu'il y fait batir ou qu'il embellit.
Ces nobles divertissemens meritent des louanges aussi bien que les travaux [p. 65] les plus serieux. Il est beau de se jouer quelque fois de la sorte, et les rois n'ont que trop d'illustres exemples qui les y invitent.
Ainsi, la haute intelligence
Qui gouverne cet ynivers,
Apres tant d'ouvrages divers,
Tant d’astres, de fleuves, de mers
Qui montrent sa toute puissance,
Veut bien, pour recreer les yeux,
S’exercer encore en tous lieux
A cent autres petits ouvrages.
Tantot sur des moules nouveaux
Faits de ses mains doctes et sages,
Elle se plaist, le long des eaux,
A former divers coquillages.
Tantot elle descend jusqu’en nos Jardinages
Pour y peindre toutes les fleurs ;
Et dans les champs et les bocages,
Enseignant aux oiseaux de diferens ramages,
On la voit de mille couleurs
Distinguer encor leurs plumages.
[p. 66] Mais c’est assez de vers et de prose ; je prends un peu trop l’essor : il est temps de me reposer, et de finir cette lettre, qui vous assurera de mes respects et que je suis,
Mademoiselle,
Vostre tres humble et tres obeissant serviteur,
Le Laboureur
De Montmorency, ce 4 septembre 1669. »

Le Laboureur, Louis

Lettre de William Paget, ambassadeur d'Angleterre, concernant un voyage du roi en petit comité à Saint-Germain-en-Laye

« The Frenck King, leaving the Queen and the rest of the Household here at the Louvre, lies at St. Germain’s Dalley with only the Privy Council, Privy Chamber and Privy Band ; having ordered the harbingers to lodge no man nearer than Paris, and his Privy Council and Chamber to lodge none but their own servants. It is done either for quietness or to avoid such as haunt the Court to learn proceedings. Feared thereby to be excluded from all intelligence ; but has, by credible means, learnt that the Prothonotary St. Poule, brother to the bp. of Montpellier, whom the King sent with another to the Great Turk, in October, is intercepted about Ragusa. »

Paget, William

Lettre d’Henri IV concernant des arbres fruitiers en partie destinés à Saint-Germain-en-Laye

« A nos amez et feaulx les gens tenans nostre chambre des comptes à Pau
Nos amez et feaulx,
Desirans peupler nos jardins et vergers de Fontainebleau, Saint Germain et les Tuilleries de plusieurs bon arbres fruictiers, notamment de millicotons et pavyes, desquels ils en sont despourveus, et saichant qu’il y en a grand nombre dans les jardins de nostre ville et chasteau de Pau, à cette cause, vous ne ferés faulte, incontinent la presente receue, de faire arracher des dicts arbres de milicotons et pavyes qui sont dans les susdicts jardins et lieux circumvoisins, la plus grande quantité que faire se pourra, à l’aage de deux ou trois ans seulement, et iceux faire delivrer à Arnaud de Bayle, present porteur, l’un de nos fouriers ordinaires, que nous envoyons expres pour cest effect, pour nous les faire amener et conduire jusques aux lieux que nous luy avons ordonné. Sy n’y faictes faulte, car tel est nostre plaisir.
A Rouen, le XIIIe jour de janvier 1597.
Henry »

Henri IV

Reçu du coffre des joyaux de la fille du roi donné à Saint-Germain-en-Laye

« Marguerite des Barres, dame de Bouville, faison savoir a touz que nous avons eu et receu de Pierre des Essartz, argentier le Roy mon seigneur, un coffre pour mettre les jouiaux ma dame Jehanne, fille du Roy de France mon seigneur, et un esprevier de toile blanche pour ma dite dame. En tesmoing de ce j’ai scellé ceste cedule de mon scel. Escript a Saint Germain en Laye VIII jours de fevrier. »

Lettre de l'ambassadeur de Venise concernant la venue du roi au château de Saint-Germain-en-Laye

« [...] et hora stiamo aspettando quello che pîacerà le commissioni dell’Eccellentisismo Senayo ; il che non cerdemo che possa esser prima che doppo l’arrivo di S. M. in San Germano, dove fa preparare alcuni stantie più all ‘uso d’Italia, che di questo paese, dovendo essere cinque o sei l’una dentro l’altra, guarnite de finissime razzi con letti di seta et oro, con portieri particulari ognuna di esse, persone di qualcho conto, che habbiano cura che non vi entri cosi ognuno undifferentemente, perchè si stià con più decoro. Questi portieri si muteranno ogni tre mesi, et per loro mercede haveranno un vestimento di veluto con una collana di duecento scudi da tenere al collo mentre durerà il tempo del loro servicio. Et sicome si parte in ciò S. M. dall’ordinario, volendo questa apparentia di maggior grandezza, così ha regolato ancora li gentilhuomini della camera, riducendoli di quattrocento che prima erano, al numero di quatroventi, trenta per quartieri, accrescendo la loro provisione da duecento fino a seicento scudi per uno, ma con obligo di seguitar sempre la persona sua in ogni luoco con due cavalli da guerra ; il che sarà eseguito, oltrte che rappresentarà maggior splendore, conforme alla grandezza d’un tanto Re, servirà ancora pêr maggior sicurità della Maestà Sua [...]. »

Payements concernant Saint-Germain-en-Laye dans le rôle du trésor royal

« [f. 50] Aud. Le Begue [Charles Le Begue, tresorier general des Bastimens du Roy], la somme de cent mil livres ordonnée pour employer au fait de sad. charge, scavoir XXXIm l. au payement du prix de la maison achetée de la damoiselle Lhuillier pour le bastiment du Louvre, XVIm l. pour parfaire les XXXVIm l. accordez par advances aux entrepreneurs dud. bastiment du Louvre, et LIIIm l. pour commencer les ouvrages à faire tant au chasteau de Fontainebleau, Versailles, Saint Germain en Laye, palais Royal et autres maisons royales pendant la présente année 1662, y compris les frais, cy : Cm l.
[…]
A luy, la somme de treize cens mil livres que Sa Majesté luy a ordonnée pour employer au fait de sa charge tant au bastiment neuf du Louvre et Versailles, [f. 50v] achapts de maisons que accommodements du palais des Tuilleries, palais Royal, Fontainebleau, Saint Germain en Laye que autres despences extraordinaires à faire pendant lad. année 1662, y compris les gages des officiers et entretenemens ordinaires et les taxations, cy : XIIIc m l.
[…]
[f. 167] Aud. Bourlon [Pierre Bourlon, trésorier des veneries, toiles de chasses et fauconnerie], la somme de sept cens cinquante livres que Sa Majesté a ordonnée pour délivrer, scavoir VIc l. à Jean de Medeville, maistre tailleur d’habits à Paris, pour son paiement et remboursement de treize casaques des couleurs de Sa Majesté qu’il a livrées à treize gardes des bois, eaues et forests de Sainct Germain en Laye, et CL l. à Pierre de Laguerre, bourgeois de Paris, à luy aussi ordonnées par Sad. Majesté pour son paiement et remboursement de treize pieux qu’il a fournis aux susd. treize agrdes des bois, eaues et forests de lad. forest, cy VIIc L l.
[…]
[f. 223v] Au sieur Legrend, exempt des gardes de la prevosté de l’hostel, et à deux archers de lad. prevosté, la somme de six vingt livres que Sa Majesté luy a ordonné pour s’estre transportez par ordre de Sad. Majesté et avoir esté employez pendant six jours à faire conduire à Saint Germain en Laye des bateaux chargez d’avoine [f. 224] et d’autres necessitez pour la suite de Sad. Majesté, cy : VIxx l.
[…]
[f. 286] Aud. d’Aligre [Michel d’Aligre, tresorier des Menus Plaisirs du Roy], la somme de deux cens trente quatre livres que Sa Majesté luy a ordonnée pour employer au payement tant des carrosses qui ont conduit les comediens à Saint Germain en Laye que des charrettes qui ont porté leurs hardes suivant les parties arrestées par le sieur duc de Mortemart, premier gentilhomme de la chambre de Sa Majesté, cy : IIc XXXIIII l.
A luy, la somme de quatre cens quarante une livres dix sols que Sa Majesté luy a ordonnée pour le payement du logement des soubz maistres, chantres de la musique de la chapelle de Sa Majesté, et de vingt neuf licts qui ont servy pour les coucher pendant un mois de sejour qu’ils ont faict au lieu de Saint Germain escheu le XXIIe juillet dernier, à raison de XV l. X s. pour chacun lict, cy : IIIIc XLI l. X s.
[…]
[f. 286v] A luy, la somme de quatre cens quatre vingts seize livres que Sa Majesté luy a ordonnée pour employer au faict de sa charge, mesme au payement du second mois du logement et licts des soubz maistres, chantres et enfans de la chapelle de Sa Majesté à Saint Germain, qui est escheu au XXIIe du mois passé, sur le pied de XXXII licts, à raison de XV l. X s. par mois pour chacun lict et logement, cy : IIIIc IIIIxx XVI l.
[…]
[f. 287v] A luy [Claude Fauverel, commis par le Roy à l’exercice de la charge de me Pierre Cirano, tresorier des offrandes du Roy], la somme de trois cens trente huict [f. 288] livres neuf sols que Sa Majesté luy a ordonnée pour employer au faict de sad. commission, mesme pour la despence des pains benits rendus par Sad. Majesté en l’eglise du Pecq proche de Saint Germain le jour de la feste de la Madelmaine de la presente année, cy : IIIc XXXVIII l. IX s.
[…]
[f. 344] Au capitaine Legrand, exempt des gardes du Roy en la prevosté de son hostel, la somme de [f. 344v] deux cens quarante livres que Sa Majesté luy a ordonnée pour avoir vacqué pendant douze jours tant à assister les marechaux des logis et fourriers de Sa Majesté à auctoriser la craye pour les logements de Saint Germain en Laye que pour se transporter le long de la riviere de Seine pour faire voicturer aud. Saint Germain en Laies les bateaux chargez d’avoine et autres choses necessaires pour la fourniture de la maison, cour et suite de Sa Majesté, cy IIc XL l. »

Mandement donné à Saint-Germain-en-Laye pour le paiement d’éperviers apportés au roi

« Henry de Meudon, chevalier le Roy nostre sire, maistre enquesteur des Eaues et forés d’icelui seigneur par tout son roiaume et de celles de nostre seigneur le duc de Normendie, au receveur de Dansjont en Passeis ou a son lieutenant, salut. Savpoir vous faisons que Huet Picart a rendu a court devers le Roy dix esperviers vis et sept mouches vis, huit esperviers mors en chemin et sept mouches mors semblablement, si vous mandons de par le Roy nostre sire que tous les despens faiz par le dit Huet et par ceux qui aporterent les diz esperviers et mouches en venant a court et en demourant illec et en retournant au pais vous compté sanz nul delai au dit Huet et paiez en la maniere que autrefoiz avés accoustumé sanz attendre nul autre mandement sur ce. Donné a Saint Germain en Laie le premier jour d’aoust l’an mil CCC trente neuf. »

Lettre de Louis XV à son petit-fils, l’infant Ferdinand de Parme, mentionnant une chasse à Saint-Germain-en-Laye

« A Versailles, ce 22 janvier 1770
Mon cher petit fils,
Je suis charmé que vous ayez fait vos Rois gaiement, mandez m’en un peu de détails, car je sus charmé de voir que vous vous amusez convenablement à votre état. Nos glacières sont pleines et je pars pour la chasse à Saint Germain par un temps qui me paraît assez beau.
Je vous embrasse de tout mon cœur, mon cher petit fils.
Louis »

Annonce de l’installation d’une maison de retraite des Légionnaires au château du Val

« Une exquise résidence du XVIIe siècle va devenir la maison de retraite des Légionnaires
Si vous longez l’admirable terrasse de Saint-Germain puis vous enfoncez dans la forêt, vous trouvez, à flanc de coteau, dominant la vallée de la Seine, entre Saint-Germain-en-Laye et Maisons-Laffite, le château du Val, aux lignes pures et belles. Mansart le construisit ; Desjardins et Le Hongre le décorèrent ; Le Nôtre, alentour, dessina un parc à la française. La beauté simple de la façade se révèle aux yeux du promeneur à travers une merveilleuse grille.
C’est en 1669 que Louis XIV fit construire cette demeure. En cet endroit, jadis, Henri Iv se plaisait à chasser et Louis XIIII y fit plus tard élever un pavillon pour y reposer sa santé compromise.
Pendant des années, dans ce château qui abritait sa magnificence parmi les frondaisons magnifiques de la forêt de Sainte-Germain, la société la plus brillante se donna rendez-vous. Tour à tour, sous Louis XV et sous Louis XVI, il fut la résidence préférée des grands favoris : la Pompadour, les Brancas, les Lamarck, plus tard le maréchal et la maréchale de Beauvau. Les salons entendirent bien des confidences, sinon des propos brillants ; les pavanes et les gavottes y retentirent, et aussi les conversations profondes des philosophes, car Rousseau, Voltaire, d’Alembert, Turgot, Necker, Condorcet, Malesherbes en furent les familiers. Sous l’Empire, Napoléon y donna, avec sa cour, des fêtes brillantes.
Et, depuis lors, riche d’un grand passé, le château du Val a conservé son caractère et son charme. Il le conservera désormais. M. Lacoste, le dernier propriétaire, en a très généreusement fait don à la Société de la Légion d’honneur afin d’y installer une maison de retraite pour les légionnaires les plus méritants.
Une merveille d’architecture qui eût peut-être été dégradée ou délaissée sera ainsi préservée. Dans le parc, les grottes de Francini seront conservées, et rien ne sera détruit de ce qui fait le charme, la poésie et la douceur de ce coin d’Ile-de-France.
Ceux qui auront bien mérité le ruban rouge et que la vie aura éprouvée pourront y venir achever une vieillesse heureuse, sur ces hauteurs que l’on nommait, au XVIIIe siècle, la « Montagne Bon Air ».
Cinquante chambres sont prévues. La Société de la Légion d’honneur paiera une partie des frais de la pension et la légionnaire l’autre partie. On songe à réserver quelques chambres aux légionnaires les plus éprouvés et qui vivraient là gratuitement. La maison que l’on aménage sera confortable et moderne à souhait, et un immense parc sera réservé aux pensionnaires.
Tous ceux qui voudraient y être admis peuvent écrire au secrétaire général de la « Société de la Légion d’honneur, 1, rue de Solférino. Heureux seront les cinquante légionnaires qui pourront, dans un site aussi merveilleux, connaître les loisirs et le repos qu’ils auront chèrement gagnés.
Jean Delage »

Description du fonctionnement du pénitencier militaire de Saint-Germain-en-Laye

« Pénitencier militaire de Saint-Germain
En entrant sous cette vaste porte sombre, en franchissant cette grille dont la clef est tenue par un sous-officier, oublions les brillantes fêtes, les magnifiques splendeurs, le luxe royal dont ce château fut un temps le théâtre ; préparons-nous plutôt à la visite que nous allons faire par le souvenir des grandeurs déchues qui ont remplacé dans ces lieux la majesté de Louis XIV émigré à Versailles ; dans ces tours, le long de ces vastes balcons, erra madame La Vallière, consolée par de rares visites jusqu’au jour où son âme aimante ne trouva plus que Dieu qui pût remplir le vide laissé par le grand roi ; dans ce corps de logis qui fait face à la pelouse, Jacques II qui, pour être un prince imbécile, n’en dut pas être moins malheureux, passa plus d’une triste soirée, entre sa femme et sa fille, reportant sa pensée à la belle réception que lui avait faite son hôte de France et que suivit l’abandon nécessairement réservé au malheur qui s’abrite trop près des grandes prospérités. Le triste monarque, dont le doyen de Killerine nous montre la modeste cour, mourut là, faisant ces rêves de restauration que plusieurs générations devaient continuer ; sa femme, sa fille, y moururent après lui. Depuis lors, les princes de France semblèrent éviter la contagion de déchéance dont les murs de Saint-Germain étaient imprégnés : le château devint une caserne, puis une école militaire de cavalerie, et enfin il est devenu ce que vous annoncent ces grilles, ces verrous, ces murs qui s’ajoutent à la profondeur des fossés, un pénitencier militaire.
Si, en entrant dans ces cours, en entendant fermer derrière soi toutes ces ferrures, on n’éprouve pas ce sentiment de cœur, ce pressentiment douloureux qui vous accueille à la porte de toute prison, c’est qu’on sait que là on ne va pas voir le crime hideux, endurci par le temps, rendu incorrigible par les mauvaises passions, par les habitudes de corruption et de débauche ; on se dit que toute cette population, qu’une faute a privée pour un temps de sa liberté, est dans la force de l’âge, que tous ces prisonniers ont un avenir, qu’ils vivaient sous une loi exceptionnelle, sous la loi militaire, dont la rigueur nécessaire fait un crime, un crime sévèrement puni, de ce qui, pour un jeune homme de cet âge, dégagé des liens de fer de la discipline, ne serait souvent qu’un tort excusable, ignoré du monde et couvert par l’indulgence de la famille. Pénétrons donc sans hésitation dans cette maison de rachat ; nous ne verrons que des corps jeunes et robustes, apprenant à faire un emploi intelligent de leurs forces, des cœurs qui s’émeuvent à tous les nobles sentiments, et qui travaillent à se réhabiliter assez pour être encore dignes de porter l’uniforme.
Cette institution, qui, jusqu’à présent, a donné les plus heureux résultats, a été appliquée, pour la première fois, à l’armée par ordonnance royale du 3 décembre 1832. Les essais en furent faits dans les bâtiments de l’ancien collège Montaigu, situés entre le collège Sainte-Barbe et la place du Panthéon ; mais ce local, dont les sombres constructions vont disparaître dans les plans d’amélioration et d’embellissement qui vont s’exécuter dans ce quartier, devint bientôt trop étroit pour le nombre de détenus ; il fallut faire un nouveau choix et, au mois d’avril 1836, le pénitencier militaire fut transféré à Saint Germain. Les vastes appartements, les galeries, avaient été distribués en rangées de cellules ordinaires, où chaque prisonnier se retire le soir ; les celliers avaient fait place à des cellules ténébreuses, où sont renfermés ceux qui ne se soumettent pas à l’ordre de la maison. L’immense hauteur des salles d’armes, des salles de gala, avait été coupée en plusieurs étages d’ateliers, et le château royal pouvait recevoir cinq cents prisonniers. La haute surveillance du pénitencier est remise à M. le lieutenant général comte Sébastiani, commandant de la première division, et qui, plus d’une fois, a manifesté le chaleureux intérêt qu’il porte à l’établissement : chaque année, un inspecteur général est désigné par le ministère de la Guerre pour lui faire un rapport sur les résultats de l’année et les améliorations à obtenir.
Cette création, dont tout l’honneur revient à M. le maréchal Soult, est surtout remarquable par ce point que le condamné militaire est seulement suspendu de son service, mais ne cesse pas de faire partie de l’armée et reste soumis au code particulier qui la régit. Lorsqu’il entre dans le pénitencier, où l’envoie le jugement d’un conseil de guerre, il est dépouillé pour un temps de l’uniforme de son régiment et en revêt un de couleur grise, dont la forme rappelle beaucoup celui de la petite tenue du cavalier, et dont la simplicité n’admet aucune de ces couleurs voyantes et bariolées dont on affuble ordinairement les détenus. La tenue militaire est de rigueur pour tous les chefs employés à l’établissement ; ces chefs sont encore soumis à tout ce qu’ils devaient observer à l’égard de leurs soldats : il leur est défendu d’injurier, de maltraiter de gestes ou de paroles les détenus, qui, de leur côté, doivent le respect à leurs chefs de tout grade. Afin que personne n’en ignore, les dispositions qui règlent ces devoirs réciproques sont lues tous les dimanches à l’inspection. Tous les mouvements [p. 344] sont réglés par le commandement militaire ; le compte de masse que le condamné avait à son régiment est transmis à l’administration, qui continue à le régler de la même manière ; les fautes contre la discipline sont punies disciplinairement ; les délits et les crimes sont soumis aux conseils de guerre ; enfin, à l’expiration de leur peine, ceux qui n’avaient plus qu’un an de service à faire sont renvoyés dans leurs foyers, les autres sont dirigés sur un des trois bataillons d’infanterie légère d’Afrique ; quelques-uns, par une exception que leur mérite une conduite exemplaire, obtiennent la faveur de rentrer, aussitôt après leur libération, dans des régiments de l’armée intérieure.
Le système d’Auburn est celui dont se rapproche le plus le système de Saint-Germain, c’est-à-dire que les prisonniers couchent isolément dans des cellules et mangent et travaillent en commun et en silence. Pendant les récréations, ils peuvent parler. Nous allons examiner l’emploi d’une journée de travail pendant l’hiver.
A six heures et demie du matin, un tambour choisi parmi les prisonniers bat la diane, signal du réveil ; les sous-officiers surveillants prennent les clefs de leurs divisions respectives et vont ouvrir les cellules. Chaque détenu nettoie sa demeure nocturne, plie dans des dimensions données ses couvertures et le sac de campement dans lequel il couche ; les ablutions corporelles ont lieu dans les corridors, du 1er octobre au 1er avril ; le reste de l’année, elles ont lieu dans la cour ; tous les détails d’une propreté parfaite sont scrupuleusement surveillés et s’exécutent en silence.
Environ un quart d’heure après, les détenus descendent en ordre dans la cour ; l’appel a lieu de la même manière et avec les mêmes batteries que dans la ligne ; les hommes sont formés en bataille sur trois rangs et inspectés. La distribution de pain se fait immédiatement ; chaque homme reçoit pour sa journée une ration de pain de même poids et de même qualité que celui délivré à la garnison. Aussitôt après, au commandement de l’adjudant de semaine, tous les détenus sont conduits en ordre et au son de la caisse à leurs ateliers ; chacun d’eux se rend à la place qui lui est assignée et se met à l’œuvre ; à l’exception d’explications données à voix basse par les contre-maîtres, un silence complet règne partout ; rompre ce silence est un cas de punition.
A huit heures et demie a lieu la visite du chirurgien-major ; il visite les malades mis à l’infirmerie pour indisposition légère ; à la tisanerie il reçoit ceux qui viennent se présenter, prescrit les remèdes nécessaires et envoie à l’hôpital du lieu ceux dont l’état exige cette translation ; là, dans une salle consignée, ils reçoivent, comme tous les autres malades, ces soins touchants que l’on rencontre partout où se trouvent les dignes sœurs de la charité.
A onze heures du matin, un roulement donne le signal du repas ; les hommes sortent des ateliers en ordre et se forment en bataille ; au commandement de l’adjudant, ils entrent au réfectoire, tous s’arrêtent devant leur place accoutumée et se tiennent debout ; à un coup d baguette, tout le monde s’assied et le repas commence.
A son arrivée au pénitencier, chaque détenu est pourvu d’un litre, d’une gamelle de même contenance et d’un gobelet d’un quart de litre, le tout en étain ; il reçoit, de plus, une cuiller de bois et un couteau à pointe arrondie ; tous ces objets sont disposés sur la table à la place du détenu auquel ils appartiennent.
Les rations sont individuelles ; elles consistent, pour le repas du matin, les mardi, jeudi et dimanche, en une soupe grasse et une portion de viande désossée pesant quatre-vingt-douze grammes ; et pour le repas du soir, les mêmes jours, en une soupe aux légumes ; les autres jours de la semaine, les détenus reçoivent, pour leur repas du matin, une soupe aux légumes, et pour le repas du soir une portion de légumes assaisonnés.
Les détenus qui se conduisent bien peuvent améliorer leur nourriture en prenant à leurs frais, au repas du matin, un quart de litre de vin, dix centimes de fromage, un demi-kilog. de bain bis-blanc. On retire cette permission pendant un temps donné à ceux qui se font infliger des punitions.
A onze heures et demie, un nouveau coup de baguette annonce la fin du repas ; les hommes, qui, pendant toute sa durée, ont gardé le silence, se lèvent, sortent en ordre et vont au préau de la récréation ; là encore ils sont suivis par ces conseillers muets qu’une bienveillante prévoyance à multipliés autour d’eux ; des inscriptions ingénieusement choisies mettent sans cesse sous leurs yeux des avis résumés en phrases courtes et qui frappent l’esprit en se fixant dans la mémoire. Dans leurs ateliers, si un moment de découragement a ralenti leur ardeur, en levant la tête, ils ont lu :
LE TRAVAIL DU CORPS DELIVRE DES PEINES DE L’ESPRIT
Dans ces inscriptions, ils trouvent même une protection : si un maître d’atelier ou un surveillant oubliait les recommandations du règlement, l’ouvrier peut lui montre sur la muraille :
REPRENDS TON PROCHAIN AVANT DE LE MENACER
Dans les préaux, il n’a pas suffi de défendre les mauvais propos et les jeux de hasard : il a fallu mettre ces hommes en garde contre l’entraînement de la colère ou de leurs courts loisirs ; ils lisent ici :
POINT DE PRIORITE POSSIBLE AVEC LA PASSION DU JEU : ON COMMENCE PAR ETRE DUPE, ON FINIT PAR ETRE FRIPON
Et là :
DANS UN CŒUR PERVERS, LA PASSION DU JEU MENE A L’ECHAFAUD ;
DANS UNE AME HONNÊTE, ELLE CONDUIT AU SUICIDE
Toutes ces pensées sont salutaires, utiles ; mais nous ne pouvons nous refuser à en citer encore qui nous ont surtout frappé. En entrant au pénitencier, le condamné trouve sa sentence justifiée par la morale quand il aperçoit devant lui, dans la première cour, ces mots :
QUICONQUE ENFREINT LA LOI N’EST PAS DIGNE D’ÊTRE LIBRE
Enfin, en sortant, voici la dernière pensée qu’il trouvera [p. 345] sur ces murs qu’il abandonne :
ON NE PEUT PLUS ROUGIR DE SES FAUTES QUAND ON A TOUT FAIT POUR LES REPARER
Reprenons l’emploi de la journée. Pendant que leurs camarades causent ou lisent des livres d’instruction appartenant à l’établissement, ceux qui sont illettrés vont assister à un cours d’enseignement mutuel qui a lieu à la même heure.
A midi et demi, après l’appel, les travaux recommencent, et se prolongent jusqu’à sept heures ; le souper ne dure qu’un quart d’heure ; la retraite se bat, et à huit heures un roulement annonce le coucher. Chaque homme emporte dans sa cellule son bidon rempli d’eau ; les portes sont fermées, et les clefs rapportées à un poste intérieur, où elles restent sous la responsabilité de deux surveillants de garde. Pendant la nuit, un officier de service fait, dans l’intérieur, trois rondes, pour s’assurer qu’il n’y a pas d’hommes malades ou de tentatives d’évasion, et le commandant d’une garde de vingt-six hommes placée au pénitencier est chargé des rondes extérieurs.
L’état n’apporte à ce régiment d’autre changement que d’avancer l’heure de la diane, et de prolonger d’une heure la journée d’atelier, qui se trouve ainsi portée à onze heures de travail.
Le dimanche est un jour consacré plus spécifiquement aux soins de propreté ; ce jour-là, chaque homme descend dans les préaux son sommier, son sac de campement, sa couverture et son oreiller pour les battre ; les cellules sont frottées, les portes et les serrures nettoyées à fond. Après une première inspection des sous-officiers, les prisonniers, dans leur tenue la meilleure, vont assister à la messe dans la chapelle gothique ornée par Louis XIII, et où Louis XIV fut baptisé. Du haut de cette chaire qu’ont occupée les plus grands orateurs chrétiens, un aumônier leur fait une instruction religieuse. C’est un spectacle imposant que de voir de la tribune tous ces hommes en colonne serrée, officiers et sous-officiers en tête, assister avec respect au service divin. On ne peut se défendre d’une vive émotion, lorsque, au moment où le prêtre élève l’hostie, cette masse compacte, par un seul mouvement, met le genou à terre, et écoute, dans un pieux recueillement, les chants que font entendre quelques-uns de leurs camarades placés derrière l’autel. On est bien plus impressionné encore si l’on vient à apprendre là que ces voix énergiques chantent des vers composés par un de ceux qui les a précédés dans ce séjour d’expiation, un jeune soldat que son talent, ses malheurs et son repentir ont rendu célèbre, il y a quelques années. J’ai vu plus d’un œil devenir humide quand une voix jeune et fraîche fait entendre ces paroles :
Sur nous qui t’implorons, à genoux sur la pierre,
Sur nous tous, qu’un moment d’imprudence et d’erreur,
Conduisit en ce lieu, domaine du malheur,
O Dieu ! laisse tomber un regard tutélaire.
Et plus loin :
Du trône saint d’où ta main guide
Les astres roulant dans le vide,
Seigneur, Dieu clément, oh ! vois notre douleur !
Vois nos regrets et nos alarmes,
Rends-nous la liberté, nos armes,
Et finis nos jours de malheurs.
Le digne aumônier qui dirige la conscience de ces soldats leur a dit, du haut de la chaire de vérité, que tout motif humain devait être écarté dans l’accomplissement des choses saintes : « Vos actes religieux, leur a-t-il dit, sont entre le ciel et vous, et jamais ils ne serviront à vous procureur des biens temporels ». Cette règle, sagement observée, éloigné tout soupçon d’hypocrisie. Le 30 avril dernier, une soixantaine de détenus ont reçu la communion des mains de monseigneur l’évêque de Versailles, qui vient tous les ans visiter et consoler les habitants du pénitencier.
Les touchantes allocutions de ce pasteur, les sages instructions de l’aumônier, ne sont pas les seuls moyens que l’on emploie pour fortifier dans le cœur des prévenus le désir de [p. 346] leur régénération morale ; le lieutenant-colonel Boudonville, commandant du pénitencier, seconde puissamment tous les sentiments qui peuvent ramener au bien ces jeunes citoyens, qu’un seul instant d’erreur a souvent amenés là ; un registre de moralité est établi avec un soin scrupuleux, et présente un compte ouvert à chaque homme : on y inscrit exactement les profès successifs dans la conduite et le travail, ainsi que les punitions et les motifs de ces punitions. A deux époques de l’année, au 1er mai et dans le mois de novembre, le commandant va examiner les titres que peut avoir chaque détenu à la clémence royale ; mais cette faveur ne peut s’étendre qu’à ceux qui ont au moins subi la moitié de leur captivité : les lettres de grâce qui réduisent ou remettent la peine sont lues à la grande revue du dimanche, à midi, en présence de tous les détenus formant le carré. C’est là un beau jour pour tous, et pour ceux qui sont rendus à la France, à l’armée, à leur famille, et pour ceux à qui la délivrance de leurs amis semble dire : Méritez, espérez.
Le lendemain de ce jour de délivrance est souvent triste et plein de regrets. On sait, en effet, que les abords des prisons, les jours où les portes doivent s’ouvrir, sont assiégés par des hommes perdus, par d’ignobles femmes, qui, spéculant à chaque fois sur le pécule amassé pendant la captivité, sur les privations subies, sur l’enivrement du grand air de la liberté, guettent les libérés comme une proie, s’emparent d’eux, les entrainent à tous les désordres, à toutes les débauches, et ces heureux du matin doivent se féliciter si, le lendemain, au réveil, ils n’ont perdu que le fruit de leurs économies forcées.
L’administration du pénitencier de Saint-Germain vient de donner un bon et grand exemple. Il y a quelques jours, seize hommes avaient atteint le terme de leur expiation ou obtenu remise de leur peine : au lieu de quitter le château pour tomber dans les hideuses séductions qui déjà les attendaient, on les a vus, revêtus de l’uniforme des corps divers auxquels ils appartenaient, sortir en rangs sous le commandement d’un sous-officier, traverser au pas et en bon ordre cette ville que leurs devanciers avaient plus d’une fois troublée des excès de leur joie, et se diriger sur Versailles, où ils sont trouvé dans la discipline militaire l’appui dont ils avaient besoin contre eux-mêmes. Loin de se plaindre de cette précaution, ils ont chargé le sous-officier qui les accompagnait de leurs remerciements pour le commandant.
Rendons un juste hommage à M. le maréchal Sault, dont la prévoyant sollicitude a créé, organisé cet établissement, où, tandis que la punition se subit, l’homme s’améliore, et d’où il sort le cœur plus affermi dans le bien, l’intelligence plus cultivée, et possédant une des industries qui s’exploitent dans les huit ou neuf ateliers entre lesquels les prisonniers sont répartis. Mais pour que la généreuse pensée du ministre produisit tous ses résultats, il fallait que l’exécution en fût remise à un officier dont le cœur fut noble, la pensée droite, la raison ferme : le pénitencier de Saint-Germain a dépassé toutes les espérances, et le maréchal et les officiers recommandables de cet établissement ont reçu leur plus douce récompense quand les rapports ont constaté que parmi tous les militaires rendus à la liberté depuis 1839, on ne compte qu’une récidive sur deux cents libérés, que plusieurs ont obtenu de l’avancement, occupent des emplois de confiance et même ont mérité des distinctions. »

Récit de l’installation du roi et de la reine d’Angleterre à Saint-Germain-en-Laye

« [p. 280] Le 21 au matin, jour de S. Thomas, le bastiment qui portoit la reine d’Angleterre arriva à Calais, après [p. 281] avoir couru risque de faire naufrage au port, puisqu’il s’en fallut peu qu'il ne touchait un banc qui en estoit à dix pas ; mais le maistre du paquetbot qui se trouva là fort à propos luy servit de guide, et empefcha par là ce malheur. Après que la reine fut debarquée, le capitaine du yacht dit qu'il sçavoit bien qu'il menoit cette princesse et le pince de Galles, et qu'il l'avoit toujours reconnu. Elle ne voulut point que M. le duc de Charost luy fist rendre aucuns [p. 282] honneurs à Calais. […] [p. 283] Comme la reine [p. 284] devoit faire quelque sejour à Bouligne jusqu’à ce qu’on eust receu des nouvelles de la Cour, elle demanda d’estre logée au convent des Ursulines mais, M. le duc d‘Aumont ayant fait preparer l’appartement de madame la duchesse sa femme, elle ne put le refuser. […] [p. 284] Cependant, le Roi ayant sceu que cette princesse estoit arrivé en [p. 288] France, ce monarque qui a toujours esté l’appuy des malheureux et l’azil des opprimez en ressentit une joye proportionnée au triste etat ou il scavoit qu’elle se trouvoit. […] [p. 321] La nouvelle de l’arrivée du roy d’Angleterre à Ambleteuse ayant esté receue à Versailles, M. le marquis de Beringhen l’apprit à Beaumont par un courrier que le [p. 322] Roy lui depescha. […] [p. 328] M. le Premier, après s’etre acquité de sa commission auprès de la reyne d’Angleterre, qu’il auroit conduite jusqu’à Saint Germain sans les nouveaux ordres qu’il receut, ne songea plus qu’à partir la nuit mesme pour aller au devant de Sa Majesté britannique. […]
[p. 329] Le 6, cette princesse partit de Beaumont pour se rendre à Saint Germain en Laye, dont le Roy avoit fait meubler le chasteau pour la loger. Il avoit d’abord fait preparer celuy de Vincennes, [p. 330] mais Sa Majesté croyant l’air de Saint Germain meilleur pour la santé du jeune prince, et ce chasteau plus commode pour voir la reyne plus souvent, avoit changé de dessein.
Le Roy partit le mesme jour de Versailles pour aller au devant de cette princesse. Il estoit accompagné de monseigneur le Dauphin, de Monsieur et des princes et principaux seigneurs de la Cour. Il s’avança jusques auprès de Chatou, et les gardes du corps, les gendarmes, [p. 331] les chevaux legers et les deux compagnies de mousquetaires s’etendoient dans la plaine depuis le pont du Pec jusqu’à ce village. Quoyque leurs habits ordinaires soient assez riches et que le tout ensemble produise un effet fort éclatant, chacun s’estoit efforcé ce jour là de se mettre proprement et l’on peut dire que tous les officiers estoient magnifiquement vestus. Le carosse de Sa Majesté et celuy où estoit la reyne d’Angleterre ayant paru, chacun descendit du [p. 332] sien, dans le mesme temps, et le Roy et cette reyne se saluerent. Le Roy luy presenta monseigneur le Dauphin et Monsieur, et la remit ensuite dans le mesme carosse, où estant aussitost monté il se plaça à sa gauche, et monseigneur le Dauphin et Monsieur se mirent sur le devant. Lorsqu’on fut arrivé à Saint Germain, le Roy conduisit la reyne dans l’apartement qui luy avoit esté preparé. Il demeura quelque temps en public avec elle, et luy presenta monsieur le [p. 333] Prince, monsieur le Duc et monsieur le prince de Conty. Le Roy, en prenant congé de cette princesse, luy dit « qu’il alloit voir le prince de Galles pour apprendre s’il n’estoit point fatigué du voyage ». La reyne voulut l’y accompagner et lui dit « qu’elle avoit esté ravie qu’il ne fust pas en age de connoistre ses malheurs, mais qu’à present elle estoit bien fachée qu’il ne fust pas en etat de reconnoistre l’obligation qu’il luy avoit ». Le Roy revint ensuite à Versailles et laissa cette princesse dans [p. 334] l’admiration de ses manieres toutes engageantes et qui, avec le brillant de la majesté, laissent paroistre un air tout affable qu’il seroit difficile d’exprimer. Ce monarque de son costé trouva beaucoup d’esprit et de grandeur d’ame dans cette princesse. Elle a l’air noble ; toute penetrée qu’elle est de sa douleur, elle n’en paroist point embarassée. Elle sent bien ce qu’elle est et quoy qu’elle soit fort honneste, elle scait placer ses honnestez selon les gens et est tout à fait maitresse d’elle mesme.
[…]
[p. 359] Le roy d’Angleterre […] monta à Clermont dans le carosse du Roy que M. le Premier avoit [p. 360] au voyage en allant au devant de la reine et qu’on y avoit fait venir de Beauvais toute la nuit. M. le Premier et M. le duc de Bervick entrerent dans ce carosse avec Sa Majesté, qui alla ainsi jusqu’à Saint Germain en Laye, avec des attelages du Roy qu’on avoit mis en relais. Tout Saint Denis estoit remply du peuple de Paris, qui marqua sa joye par ses acclamations lorsqu’il vit arriver Sa Majesté britannique, ce qui acheva de faire connoiste qu’il n’y a point de peuple au monde si fidelle [p. 361] et si zelé que celuy de France, ny qui se plaise davantage à entrer dans tous les sentimens de son Roy. Tout se trouva remply de peuple, de carosses pleins de personnes de qualité et de cavaliers depuis Paris jusqu’à Saint Denis, et ce prince n’entendit que des acclamations, et ne vit que de la joye sur tous les visages.
Sa Majesté receut ce monarque au milieu de la salle des gardes de Saint Germain. La joye qu’ils eurent de se voir parut dans leurs embrassades, qui furent reiterées [p. 362] plusieurs fois. Leurs complimens estant finis, le Roy mena Sa Majesté britannique dans la chambre de la reine son epouse, qui estoit au lit, et apres y avoir demeuré quelque temps et l’avoir aussi mené chez le prince de Galles, il s’en retourna à Versailles.
Le 8, le roy d’Angleterre vint l’apres dinée à Versailles rendre visite à Sa Majesté, ayant dans son carosse M. le duc de Bervick, M. le Premier et M. de Lausun. Le Roy le receut à la porte de [p. 363] la salle des gardes et le conduisit dans son petit salon, puis dans son cabinet, où ils demeurerent seuls pendant plus d’une heure et demie. Sa Majesté le conduisit ensuite par la grande galerie à l’appartement de madame la Dauphine, qui l’attendoit dans sa chambre avec un fort grand nombre de dames. Cette princesse estant avertie qu’il venoit par la galerie, s’approcha environ à trois pas de la porte. Le roy d’Angleterre entra, accompagné du [p. 364] Roy, de monseigneur le Dauphin et d’une très grande quantité de seigneurs de la Cour. Il baisa madame la Dauphine des deux costez et ensuite Madame qui s’y trouva. Il baisa après monseigneur le duc de Bourgogne, monseigneur le duc d’Anjou et monseigneur le duc de Berry qui accompagnoient tous trois madame la Dauphine. On ne fut point assis. Madame la Dauphine estoit du costé de la balustrade et, le Roy donnant toujours la droite au roy d’Angleterre, [p. 365] estoit avec Monseigneur du costé des fenestres. La conversation dura un quart d’heure. Ce monarque prit congé pour aller chez Monseigneur, qui un moment auparavant estoit sorty de chez madame la Dauphine, pour l’aller attendre dans son appartement. Le Roy accompagna ce monarque en sortant jusqu’au haut du grand degré. Monseigneur le receut à la porte de la salle de ses gardes, et le roy fit tomber la conversation sur la campagne de ce jeune prince, [p. 366] à qui il donna les louanges qui luy sont dues, mais il luy dit ensuite « qu’il s’estoit trop exposé et qu’à l’avenir il devoit se menager davantage ». Monseigneur lui repondit, avec beaucoup de presence d’esprit, « qu’estant duc d’York il ne s’estoit pas moins exposé lorsqu’il combattoit dans les troupes de France ». Le roy repliqua « qu’il n’estoit alors qu’un malheureux aventurier mais que comme il seroit presentement le plus ancien lieutenant general s’il avoit continué, il croyoit que le Roy le [p. 367] feroit marechal de France ». Monseigneur le reconduisit jusqu’au mesme lieu où il avoit esté le recevoir. Il alla ensuite chez Monsieur, qui estant veritablement indisposé, gardoit le lit ce jour là. Comme il estoit assez naturel de parler du prince d’Orange, ce qu’on en dit fit tourner la conversation sur la bataille de Cassel et Monsieur fut loué d’avoir battu un pince si fier et qui ne manquoit ny de hardisse ny de courage. Ce prince repondit là dessus [p. 368] « qu’il voudroit qu’une semblable occasion se presentast encore et qu’il exposeroit volontiers sa vie pour le service du roy d’Angleterre ». Ce monarque alla après cela rendre visite à Madame et s’en retourna à Saint Germain. M. le Premier l’y accompagne et luy dit le soir en prenant congé de luy que la Maison du Roy qu’il avoit menée au devant de la reine avoit ordre de demeurer auprès de Leurs Majestez pour les servir.
Le 9, monseigneur le Dauphin se rendit à Saint [p. 369] Germain et visita Leurs Majestez britanniques.
Le 10, Madame et mademoiselle y allerent aussi, et le 12 les princesses du sang.
Le 13, Monsieur les visita pareillement et sur les deux heures les princes du sang firent les mesmes visites. Le mesme jour, sur les quatre heures du soir, la reine d’Angleterre vint à Versailles. Le Roy, monseigneur le Dauphin et Monsieur la receurent au plus haut du grand escalier. Elle parut se defendre la droite [p. 370] de Sa Majesté. On luy avoit preparé un fauteuil qui estoit à droite de celuy du Roy et elle s’y mit. La conservation dura un quart d’heure et l’esprit de cette princesse se montra aussi brillant qu’il avoit dejà fait. Le Roy luy dit « qu’il estoit surpris de l’entendre si bien parler françois et de de qu’on ne luy remarquoit aucun accent etranger ». Elle repondit « qu’elle s’estoit toujours senti de l’inclination pour la France et que c’estoit de là que venoit la facilité qu’elle avoit eue à apprendre le françois ». [p. 371] Leur conservation étant finie, le Roy la conduisit chez madame la Dauphine, qui l’attendoit dans sa chambre avec un tres grand nombre de dames, qui estoient fort parées. Quand cette princesse fut avertie que la reine venoit par la galerie, elle s’avança jusque dans la porte. La reine la baisa d’un costé et madame la Dauphine, luy donnant la droite, la mena dans son grand cabinet. On y avoit preparé six fauteuils, scavoir pour la reine, madame [p. 372] la Dauphine, les trois jeunes princes et Madame. Celuy de la reine estoit au milieud e la chambre et les autres estoient tournez un peu du costé du fauteuil de cette princesse. Toutes les duchesses furent assises. Madame la duchesse de Powis, gouvernante du prince de Galles, et madame la comtesse de Montecuculi, une des dames d’honneur de la reine, comme estoient icy les dames du Palais, puisqu’elles sont plusieurs et qu’elles servent par semaine, eurent [p. 373] les tabourets. On s’etonnera que je donne icy le nom de duchesse à madame de Powis apres l’avoir apellée plusieurs fois marquise ; la raison de ce changement est que le roy d’Angleterre, depuis son arrivée à Saint Germain, a recompensé le zele de M. de Powis, son marquis, en le faisant duc. La conversation dura une demy heure. On se leva et madame la Dauphine conduisit la reine jusqu’à la porte de son cabinet. Cette princesse alla ensuite chez Monseigneur, qui la receut [p. 375] à la porte de la salle de ses gardes et la reconduisit jusqu’au mesme endroit. Elle alla après chez Monsieur et chez Madame, qui luy firent tous les honneurs dus à une reine. »

Dépenses et recettes concernant Saint-Germain-en-Laye dans le compte des revenus du roi

« [p. 139] Compte general des revenus tant ordinaires qu’extraordinaires du Roi pendant l’année 1202
Anno Domini M° CC° secundo
Præposituræ. De primo tertio [anni], mense Novembri
[…]
[p. 142] Pissiacum. De dimidio anno usque ad. Natale Domini IIIc l.
[…]
Odo forestarius IX l.
[…]
[p. 145] P. Præpositi Breevallis. De I° tertio. IIIIxx & VI l. & XIII s. & IIII d.
[…]
Monachi S. Germaini V s.
[…]
[p. 151] P. Alelmi
[…]
Pro vino Altissiod’ et pro glande Sancti Germaini et Roboreti C l.
[…]
[p. 171] Pissiacum
[…]
Pro culcitris Sancti Germani in Loya emptis X l.
[…]
[p. 175] Anno Domini M° CC° secundo, mense Februario
[…]
[p. 189] Anno Domini M° CC° tertio, mense Maii
[…]
[p. 192] Laudunum & Best’. IIIc l.
[…]
Pro avenis Best’ colligendis, & pro venatione ducenda apud S. Germanum in Loya XXI s.
[…]
[p. 193] Pissiacum. IIIc l., de dimidio anno usque ad. S. Johannem.
[…]
Forestarius IX l.
[…]
P. S. Leodegarii. IIIIxx & XVI l. & XIII s. & IIII d.
[…]
Pro duobus ferratis monachorum S. Germani XLV s.
[…]
[p. 195] Anno Domini M° CC° tertio, mense Maio
[…]
[p. 198] Recepta Godardi
[…]
De corilis S. Germani XVIxx l. »

Chambre des comptes

Certificat pour la livraison de sel pour la provision du roi à Saint-Germain-en-Laye

« Nous les maistres d’ostel du Roy nostre sire certiffions a qui il appartiendra qu’il a esté pris ou grenier et chambre a sel a Ponthoise le nombre et quantité de deux septiers de sel, mesure de Paris, pour la provision et despence de la maison du Roy, dont n’a esté payé que le droit du marchant seullement. Fait a Sainct Germain au bureau le VIIe jour de decembre l’an mil cinq cens vingt six.
Henry Bohier, des Ruyaulx »

Délibération communale mentionnant la décision du roi d’interdire les manœuvres de ses gardes sur le parterre de Saint-Germain-en-Laye

« Le maire de Saint-Germain-en-Laye, ancien colonel de cavalerie, chevalier de l’ordre royal et militaire de Saint-Louis,
Après avoir pris communication de la lettre que lui a fait l’honneur de lui écrire monsieur le comte Bozon de Talleyrand, gouverneur du château royal dud. lieu, le 28 août dernier, ainsi que de l’ampliation du rapport incluse en lad. lettre,
Considérant que ces deux pièces dignes du plus grand intérêt pour les habitants doivent être transcrites au registre des actes administratives pour en consacrer l’existence et qu’ensuite elles doivent être déposées aux archives de la mairie,
Arrête la transcription au présent registre des susd. pièces dont la teneur suit :
Monsieur le Maire,
M. le duc de Luxembourg m’ayant fait la demande d’une autorisation pour que messieurs els gardes du corps pussent faire du parterre du château de Saint-Germain un terrein de manœuvre, j’ai cru devoir prendre les ordres du Roi avant de me décider, et vous trouverez dans sa réponse une nouvelle preuve de sa bonté paternelle pour votre ville. Le Roi m’a donné ordre de refuser. En conséquence, vous voudrez bien surveiller à ce que les mesures soient prises pour que les chevaux ne puissent point passer sur la promenade et que ce lieu, ainsi que la terrasse, soient réservés à l’agrément des habitants. J’espère, Monsieur le Maire, en vous envoyant la copie du rapport que j’ai mis sous les yeux de Sa Majesté, vous prouver l’intérêt que je porte à vos administrés.
Recevez, Monsieur le Maire, l’assurance de ma parfaite considération.
Signé : le comte Bozon de Talleyrand
Paris, ce 28 août 1817

Château de Saint-Germain
Rapport au Roi
Sire,
M. le duc de Luxembourg, dont la compagnie est en quartier à Saint-Germain, m’a demandé une autorisation pour faire du parterre du château un terrain de manœuvre.
Sire, ce parterre, qui fait le principal agrément de cette ville, est entretenu à ses frais depuis que les rois vos prédécesseurs ont bien voulu en permettre l’usage comme promenade publique, et je pense que cette autorisation aurait le double inconvénient de mécontenter les habitants et de donner lieu [f. 113v] à une demande en indemnité de la part de la ville, car un jardin devenu terrein de manœuvre n’est bientôt plus qu’une terre labourée.
Par ces considérations, j’ai cru devoir prendre les ordres de Votre Majesté.
Signé : comte Bozon de Talleyrand
Refuser l’autorisation
Louis
Par le Roi »

Ville de Saint-Germain-en-Laye

Convention entre la ville de Saint-Germain-en-Laye et la compagnie du chemin de fer de Paris à Saint-Germain

« Entre
La société anonyme du chemin de fer de Paris à Saint-Germain, dont le siège est à Paris, rue Saint-Lazare, n° 124, représentée par M. Emile Pereire, son directeur, demeurant à Paris, rue d’Amsterdam, n° 5, et M. Auguste Thurneyssen, l’un des administrateurs demeurant à Paris, rue de la Chaussée-d’Antin, n° 22, d’une part
Et M. Jean Quentin de Villiers, demeurant à Saint-Germain-en-Laye, maire de la dite ville, stipulant en cette qualité à l’effet des présentes, d’autre part,
A été dit :
La ville de Saint-Germain-en-Laye a voté en 1844, au profit de la compagnie du chemin de fer de Paris à Saint-Germain, pour le prolongement du chemin de fer jusque sur le plateau du territoire de Saint-Germain, une subvention de deux cent mille francs, payable par annuités de vingt mille francs.
La compagnie ayant demandé le paiement des deux premières annuités, dont le montant figurait au budget de la ville pour mil huit cent quarante-six et mil huit cent quarante-sept, le conseil municipal crut devoir le refuser, en se fondant sur ce que la première annuité ne devait être payable qu’à dater du moment de la mise en activité du chemin de fer.
Après des pourparlers, les parties se sont entendues et, par suite, d’un commun accord, arrêté ce qui suit :
Article 1er
La ville de Saint-Germain paiera immédiatement à la compagnie du chemin de fer la somme de vingt mille francs votée au budget de mil huit cent quarante-six pour la première annuité de la subvention de deux cent mille francs consentie pour l’exécution du prolongement du chemin de fer jusque sur le plateau du territoire de Saint-Germain.
Article 2e
A l’égard des vingt mille francs, montant de la seconde annuité portée au budget pour mil huit cent quarante-sept, il ne sera payé par la ville à la compagnie du chemin de fer, sur cette somme, que celle de dix mille francs, et au premier avril prochain seulement.
Quant aux dix mille francs restant, la compagnie du chemin de fer les recevra par huitième, d’année en année, en même temps que chaque annuité à écheoir, qui se trouvera ainsi portée à vingt et un mille deux cent cinquante francs.
Article 3e
Le paiement des annuités de vingt et un mille deux cent cinquante francs ci-dessus fixées sera fait par la ville de Saint-Germain-en-Laye à la compagnie du chemin de fer le premier avril de chaque année.
En conséquence, la première annuité de vingt et un mille deux cent cinquante francs sera exigible le premier avril mil huit cent quarante-huit.
Fait double à Paris le vingt-quatre février mil huit cent quarante-sept.
Approuvé l’écriture ci-dessus
Quentin de Villiers
Approuvé l’écriture
Emile Pereire
Approuvé l’écriture
Au. Thurneyssen »

Rapport sur l’installation d’un pénitencier militaire au château de Saint-Germain-en-Laye

« Notes sur le projet d’établir dans le château de Saint-Germain une prison centrale de détention militaire
Sous le rapport de l’étendue des bâtimens dont se compose le château de Saint-Germain, il est rigoureusement possible d’y établir une prison militaire qui comprendrait les quatre divisions indiquées par le programme.
La disposition des lieux ne permettra pas de procurer à ces divisions l’isolement dont il serait à désirer que chacun pût jouir. Mais s’il est impossible d’atteindre compléttement ce but, on peut en approcher jusqu’à certain point, au moyen de séparations et de distributions convenables à chaque partie, auxquelles les localités ne se refusent pas.
On droit regarder comme un inconvénient grave que le château n’ait qu’une seule cour, d’une assez médiocre étendue et qui par conséquent ne parait pas susceptible d’être divisée en autant de parties qu’il conviendrait pour procurer à chaque classe de détenus un préau séparé et un promenoir aux malades de l’infirmerie, tout en réservant une cour de service. Mais on pourra diminuer les effets de cet inconvénient en établissant le préau des prisonniers au régime de correction dans une partie du fossé du château et le promenoir de l’infirmerie dans une autre partie de ce même fossé, en prenant la précaution de surélever convenablement dans ces deux points le mur du fossé du côté de la ville.
On donnera ici le projet de l’emploi des différentes parties du château à affecter aux quatre divisions en indiquant les distributions propres à chacune par des lettres rapportées aux quatre plans ci-joints.
1° Administration
N. Corps de garde pour 30 hommes et un officier
O. Geôle
P. Greffe et logement du greffier
Q. Pièce de dépôt
R. Logement du surveillant principal
S. Salle de visite
T. Salle de bains pour les entrans
U. Concierge
V. Salle d’attente
X. Parloir
Y. Chapelle
A. Boulangerie
BB. Magasins
C. Cuisine
D. Dépense
E. Cantine
OO. Bains pour les détenus
G. Salle du conseil et archives
H. Logement de l’inspecteur
I. Logement de l’agent comptable et de ses employés
K. Ecole
Au 3e étage du pavillon I, greniers et magasins
Les caves de l’administration à l’étage soutérain des pavillons 1, 2 et 5
2° Infirmerie
L. Pharmacie
M. Tisannerie
N. Cuisine de l’infirmerie
P. Salle pour les blessés et vénériens
Q. Logement des officiers de santé et des infirmiers
R. Salle pour les fiévreux
S. Salle pour les maladies contagieuses
Au 3e étage du pavillon 2, lingerie etc.
3° Détenus au régime de correction
AA. Ateliers
B. Réfectoire
D. Entresol, G. 1er étage, K. 2e étage, 41 cellules de détenus
E.F. Entresol, H. 1er étage, L. M. 2e étage, 5 détenus gradés
Rez-de-chaussée, 1er étage, 2 surveillants
Les cellules ténébreuses et de réclusion à l’étage souterrain du pavillon 3, celles de punition simple au 3e étage de ce pavillon
4° Détenus au régime commun
Rez-de-chaussée
FF. Réfectoires
T et U. Ateliers pour les ouvrages à marteau
X. 4 gardiens
Entresol. 171 cellules de détenus tant simples que gradés, 4 gardiens
1er étage. 108 cellules de détenus, 4 gardiens
YY. Ateliers
Z. Magasins
2e étage. 144 cellules de détenus, 4 surveillants
En tout, 423 cellules de détenus
Les 32 cellules de punition simple au 3e étage des pavillons 4 et 5
Les 8 cellules ténébreuses à l’étage souterrain du pavillon 4
L’état matériel des bâtimens est en général satisfaisant quant aux constructions en maçonnerie. Mais il n’en est pas de même de la charpente des planchers et de comble ainsi que de la couverture.
Presque toutes les poutres sont ruinées à leurs abouts. Il sera indispensable d’en remplacer le plus grand nombre avant de les charger du poids des cellules. Ce sera l’objet d’une très grande dépense, qui devra être augmentée de celle nécessaire pour un second plancher que l’on pourrait construire à mi-hauteur dans le cas où les emplacemens désignés pour ateliers seraient jugés insuffisants.
Le remplacement des poutres ne dispensera pas d’établir des poteaux de fond en comble pour en augmenter la résistance.
Malgré ces précautions, il sera convenable de donner la plus petite épaisseur possible aux cloisons des cellules. Il est à désirer que cette épaisseur puisse être réduite à 10 centimètres afin d’obtenir un minimum de charge pour les planchers.
Les couvertures, dont on a depuis longtems négligé l’entretien, exigeront d’assez fortes réparations. On en dira autant de plusieurs parties des carrelages et de beaucoup de croisées et de portes intérieures.
Il n’existe dans tout l’établissement qu’une grande fosse de latrines, répondant au bâtiment du centre entre les pavillons 4 et 5. Il sera indispensable d’en construire 3 autres en rapport 1° avec le pavillon I de l’administration, 2° avec le pavillon 2 de l’infirmerie, et 3° avec le pavillon 3 des détenus au régime de correction.
L’état de la dépense à faire pour l’appropriation du château pour l’objet que l’on a en vue ne peut en ce moment être donné que par approximation. IL faudrait un projet préalablement arrêté pour être en état de présenter avec quelque précision les détails et l’ensemble de cette dépense. En attendant, en voilà l’apperçu en ce qui concerne les choses principales :
Réparations des couvertures : 6000 f. 00
Réparations intérieures (portes, croisées, enduits, carrelages) : 8500 f. 00
Charpentes pour remplacement des poutres des planchers et de plusieurs pièces du comble, ainsi que pour la construction d’un escalier au milieu du bâtiment entre les pavillons 2 et 3, et les poteaux à établir pour le soutien des planchers : 60000 f. 00
Construction des cellules : 150000 f. 00
Portes de cellules ferrées et peintes : 27000 f. 00
Fer pour armature des planchers, grilles des fenêtres etc. : 15000 f. 00
Construction de 3 fosses de latrines : 20000 f. 00
Fourneaux des cuisines, des bains et de la tisannerie : 5000 f. 00
Plomb pour tuyaux de distribution des eaux : 2000 f.
S’il devenait nécessaire, dans l’hypothèse indiquée ci-dessus de construire un second plancher dans le salon de Mars, il faudrait ajouter pour cet objet : 45000 f. 00
[Total :] 338500 f. 00
Pour les choses imprévues : 11500 f. 00
[Total :] 350000 f. 00
Il n’est pas hors de propos de faire observer que l’établissement de la prison centrale dans le château de Saint-Germain entrainera nécessairement le déplacement du service des vivres qui en occupe une partie. La perte des dépenses faites en 1831 pour la manutention serait donc la conséquence de l’exécution du projet dont il s’agit. Les fours, il est vrai, pourraient être conservés pour la boulangerie de la prison. Mais il n’en faudrait pas moins recommencer sur nouveaux frais la formation d’une autre manutention dans un emplacement que le département de la Guerre devrait acheter ou prendre à loyer. Car les recherches qui ont été faites précédemment et dont il a été rendu compte dans le tems ont fait connaître qu’il n’existait à Saint-Germain, soit parmi les bâtimens militaires, soit parmi ceux de l’Etat, aucun local qui pût être affecté au services des vivres.
Versailles, le 28 mars 1833
Le lieutenant-colonel du Génie »

Délibération du conseil municipal de Saint-Germain-en-Laye demandant l’installation d’un réservoir au château

« Département de Seine et Oise
Administration municipale de Saint Germain en Laye
Liberté, égalité
Extrait du registre des délibérations de l’administration municipale de Saint Germain en Laye
Séance publique du 29 messidor l’an cinquième de la République française, une et indivisible
Sur les différentes plaintes faites à l’administration par les officiers du seizième régiment en station en cette commune à raison de l’insuffisance de l’eau distribuée dans les différents établissemens militaires et particulièrement au vieux château, où le quartier est établi, après avoir parcouru tous ces établissemens, il a été reconnu qu’il n’y avait d’autre moyen, pour assurer le service de l’eau dans ledit vieux château, que celui d’y établir une bâche provisoire de huit à dix muids auprès de la fontaine, laquelle bâche, recevant continuellement le peu d’eau qu’on introduit dans cette maison, supléerait à l’insuffisance de cette même conduite dont l‘eau se perd à mesure qu’elle arrive,
Considérant qu’il existe dans les magasins nationaux de cette commune une quantité de plomb plus que suffisante pour établir la bâche dont il s’agit,
Considérant qu’il est possible de la faire par économie, en chargeant de cette opération le citoyen Desmarais, l’un des inspecteurs des Domaines nationaux, de cette commune, chargé de la surveillance dud. magasin,
Considérant que cet établissement, qui est on ne peut plus urgent, ne peut occasionner qu’une très médiocre dépense et qu’attendu les circonstances et la nécessité de s’occuper sans délai de la construction de la bâche dont il s’agit, on ne peut sans inconvénient faire la marche d’une adjudication au rabais qui entrainerait du tems et des délais pendant lesquels la troupe continuerait d’être privée d’eau,
Oui le commissaire du directoire exécutif,
L’administration invite le département à donner son autorisation pour que le citoyen Desmarais, second inspecteur et garde magasin des Domaines nationaux de Saint Germain, puisse faire construire sur le champ et par économie, sous la surveillance de l’administration municipale, une bâche de huit à dix muids dans le vieux château de Saint Germain, d’y employer le plomb nécessaire qui se trouvera dans les magasins, et faire au surplus la dépense qui sera jugé indispensable pour confectionner la dite bâche, laquelle dépense l’administration estime ne pouvoir excéder trois cents francs au delà des plombs et fers qui seront pris dans les magasins. »

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