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Description archivistique
Napoléon III Cérémonies diplomatiques
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Récit par la reine Victoria de sa visite du château de Saint-Germain-en-Laye

« [p. 119] We started at half-past eleven for the Forêt de Saint-Germain, with the whole party but Lord Clarendon, who could not go – we, with the Emperor and Vicky in our carriage. We drove from the garden door en poste through the park of Saint-Cloud. […]
We next came to Marly, or at leat to La Machine de Marly on the Seine, along which the road goes. It is very pretty, and there are many country houses here. At Marly another arch, and bouquets and an address presented. Soon after this we entered La Forêt de Saint-Germain, innumerable avenues, which at [p. 120] certain parts of the forest meet in a sort of cross, from which a great number of roads branch off up other avenues. This is very like the Forêt d’Eu, near Eu, which the poor King took us to, and was so fond and proud of, having lately bought it ! It was dreadfully dusty, the soil being very sandy (this is the case everywhere here, and makes it very healthy). The sun had came out, and altogether it became oppressive.
We arrived at about half-past one, or a little before, at La Muette, small rendez-vous de chasse with a few rooms in it, which were again all ready and prepared for us. […]
[p. 122] After luncheon, and talking together some little time, we went into the front room or hall, where we sat down, and I sketched a little and listened to the music, which was very pretty. The Emperor was very gay, and danced with the children. We left again about half-past three, drove along through the fine forest, and along the terrace of Saint-Germain, which commands a most beautiful and extensive view, and where we stopped for one moment to look at a sketch a man was making. We drove straight up to the old Palace of Saint-Germain used originally to live, and the early kings also had their residence. Mdlle de La Vallière lived here, and also our James II, who died here, and is buried in the church, which, however, we did not go to see. The palace has latterly been used as a barrack and a prison. We got out and went up to see it, particularly the rooms of James II and La Vallière. The Emperor has lately recovered the property, and intends to try and do something with it ; but he was much disgusted when he saw the state of ruin and filth in which it is.
From here we retunerd direct to Saint-Cloud, by quite another road, through Chatou. […]
[p. 153] Before I close the account of this ever memorable and delightful visit I will just add a few remarks about the principal Palaces, which ought to have been in the proper place, but which, from multitudinous interruptions, I omitted. […]
[p. 154] Versailles was an ancien hunting lodge, built by Louis XII. Louis XIV, when he left Saint-Germain (the ancient palace of the kings, and where Charles IX and Louis XIV were born, and Louis XIII died), built the splendid palace. »

Victoria

Précisions sur la visite de la reine Victoria à Saint-Germain-en-Laye

« La petite presse à sa sœur aînée la presse parisienne
A propos de quelques erreurs dans les relations du voyage de S. M. la reine d’Angleterre à Saint-Germain
Il y avait une fois un journaliste chargé de rendre compte d’une grande représentation annoncée depuis longtemps à l’un des théâtres de Paris. Il avait assisté à plusieurs répétitions générales et, se croyant sûr de ce qu’il aurait à dire, avait, sauf erreur ou omission, préparé son article, qui n’attendait plus pour voir le jour que les quelques détails sur les faits de la représentation du soir. Or il advint que, le jour même, quelques amis du critique vinrent le débaucher pour une partie de campagne improvisée ; l’offre, faite avec un certain charme, séduisit assez le pauvre esclave ordinaire des faits divers et comptes rendus pour le faire hésiter entre son devoir et l’attrait d’un plaisir tentateur ; d’ailleurs l’article était tout fait, le programme de la soirée était certain, quelques mots ajoutés sur le succès colossal de l’ouvrage, la phrase traditionnelle annonçant que l’heure avancée à laquelle avait fini le spectacle obligeait à remettre au prochain numéro de plus amples détails, complétèrent le compte rendu anticipé, qui fut envoyé à l’imprimerie, pendant que son auteur courait à toute vapeur vers l’endroit choisi pour la joyeuse réunion.
Mais le pauvre diable avait compté sans son hôte, c’est-à-dire sans les accidents de machines et de trucs, sans les enrouements et les indispositions, enfin sans les mille et un empêchements qui surgissent à l’approche d’une grande représentation. Le spectacle n’eut pas lieu et la bande fatale, posée sur l’affiche, annonça que la première représentation de la Biche au bois était remise, pour cause d’indisposition, à un autre jour. Le lendemain matin, le compte rendu détaillé n’en parut pas moins dans les colonnes d’un petit journal de théâtre ; et qui fut bien penaud ? ce fut, on peut le croire, le pauvre critique qui, honteux et confus, jura, mais un peu tard, qu’on ne l’y prendrait plus.
Nos grands confrères, confiants dans le programme official et désireux peut-être d’assister de préférence aux royales pompes de Versailles, ne sont-ils pas tombés dans le même inconvénient à propos du voyage de la reine d’Angleterre à Saint-Germain ? C’est, du moins, ce qui nous paraît résulter des rectifications que nous allons nous permettre de faire à ce sujet.
Dans son numéro du samedi 25 août, la Presse dit que la reine d’Angleterre, qui avait déjà visité le tombeau de l’Empereur, s’est agenouillée dans la journée devant celui de Jacques II. Première erreur, la reine a bien visité, non pas en allant à la forêt, comme nous dit la Presse, mais bien en revenant, le château de Saint-Germain ; mais Sa Majesté n’a rendu aucune visite au tombeau de Jacques II, qui, situé non pas dans la chapelle du château, mais bien à l’église paroissiale, est, dans ce moment, entièrement masqué par les échafaudages nécessaires à la peinture des fresques qu’y exécute le célèbre peintre M. Amaury-Duval.
Le Constitutionnel est encore plus mal informé à propos des renseignements qu’il donne à la date du 26 août. Nous y lisons qu’un arc de triomphe avait été construit à l’entrée de la ville et qu’il était dû aux soins de la municipalité et de la compagnie du chemin de fer. Pour rendre hommage à la vérité, il nous faut constater qu’aucun corps constitué, et encore moins la compagnie de chemin de fer, n’a pris l’initiative en cette occasion. Comme tout le monde le sait, et ainsi que nous avons eu occasion de le dire, cet arc de triomphe a été spontanément construit, sous le patronage et avec l’autorisation de la municipalité, il est vrai, mais par les habitants eux-mêmes, qui se sont partagé le soin de construire l’édifice improvisé et de recueillir en même temps les souscriptions nécessaires. Le même journal dit que le maire a remis à la reine une adresse de félicitations, au nom de la ville de Saint-Germain. Rien de ce genre n’a eu lieu : nous avons raconté que, quelques instants avant l’arrivée de Leurs Majestés, un aide de camp avait fait connaître à M. le maire, présent avec son conseil municipal, qu’il n’y avait lieu de faire, ni de présenter aucun discours. Le régiment des Guides, encore selon le Constitutionnel, était rangé, à pied, en bataille, devant son quartier. Nouvelle erreur. De fréquents détachements des Guides étaient échelonnés sur la route pour servir d’escorte, mais les hommes restés à la caserne étaient groupés çà et là, et selon leur volonté, aux fenêtres, en tenue de dimanche et en bonnets de police ; le lieutenant-colonel était lui-même au pied de l’arc de triomphe, parmi les fonctionnaires qui attendaient le passage de Leurs Majestés. Enfin, pour se rendre à la Muette, le cortège n’a pas traversé la ville, et ce n’est qu’au retour qu’il s’est arrêté à la porte du château, où Leurs Majestés ont visité l’appartement de Jacques II, ceux auxquels une tradition incertaine attribue l’habitation à Mlle de La Vallière, et enfin la chapelle, dont la restauration date du règne de Louis XIII.
Les Débats, mieux renseignés, donnent, à la date du 27 août, un détail exact de la visite royale, seulement ils ajoutent, dans l’erreur commune : « Leurs Majestés sont reparties pour Saint-Cloud, après une visite au tombeau de Jacques II ».
Le Constitutionnel du même jour dit qu’après la visite au château, la reine s’est rendue à l’église paroissiale, où est le tombeau du dernier roi de la race des Stuarts. Les milliers de personnes qui, sur la place, saluaient Leurs Majestés de leurs acclamations peuvent encore donner à son rédacteur l’assurance positive du contraire.
Enfin, le Siècle, après avoir raconté ce fait erroné que la reine a assisté à une chasse dans la forêt, dit positivement que Sa Majesté, en visitant le château, s’est arrêtée dans la chapelle devant le monument où l’on conserve la cervelle et une partie des entrailles de Jacques II (sic). Il n’y a, nous le répétons, qu’un malheur à tout cela, c’est qu’il n’y a pas eu de chasse, que les restes de Jacques II ne sont pas dans la chapelle et que les travaux en voie d’exécution au monument élevé dans l’église paroissiale devaient être et ont été un empêchement à la pleine visite de la reine Victoria.
Nous en avons fini avec toutes ces rectifications, que nous avons cru devoir faire et qui, d’ailleurs nous avaient été demandées autant dans l’intérêt de nos concitoyens, qui revendiquent l’honneur de l’initiative qu’ils ont prises, que dans celui de la vérité d’une foule de petits faits, que la seule présence d’un rédacteur à Saint-Germain aurait permis de relater d’une manière certaine. Un de nos confrères de Versailles, dédaignant de s’édifier de nos propres renseignements, a partagé l’une [p. 90] des nombreuses erreurs des journaux de Paris, et qui probablement se propageront au loin, où notre feuille obscure, mais consciencieuse, ne saurait avoir la prétention d’aller.
Léon de Villette »

Récit du passage de l’empereur et du roi de Sardaigne et de Piémont à Saint-Germain-en-Laye

« Lundi, et sans qu’on s’y attendit, notre ville a eu la visite de S. M. l’empereur, accompagné de son royal hôtel S. M. Victor-Emmanuel, roi de Sardaigne et de Piémont, le fils et l’héritier du trône du vainqueur de Novarre. Au moment de leur passage, vers dix heures du matin, pour se rendre au rendez-vous de chasse de la Muette, Leurs Majestés ont trouvé déjà un assez grand nombre d’habitants réunis devant le pavillon Henri IV et qu’y avait attirés la présence des relais. L’Empereur et le roi de Sardaigne ont déjeuné au château de la Muette, puis ont chassé à tir dans les garennes réservées de Fromainville, Garenne et Conflans, d’où ils sont revenus, vers trois heures et demie, à Saint-Germain, sans s’arrêter de nouveau à la Muette, comme l’ont dit, par erreur, les journaux de Paris. Le temps qui s’était écoulé entre les deux passages avait été mis à profit par notre municipalité provisoire, dont les ordres ont été si bien exécutés qu’au retour, les grilles du Parterre, les fenêtres des maisons et chacun des arbres de la longue avenue du Boulingrin étaient pavoisés d’une multitude de drapeaux où les couleurs sardes disposées à la hâte se mariaient aux drapeaux de la France, unis dans cette circonstance comme les enfants des deux pays, comme les soldats des deux souverains, pour le maintien du repos de l’Europe et la gloire des armées alliées.
Une foule considérable a longtemps stationné à l’extrémité de la Terrasse pour voir revenir Leurs Majestés, mais, tout d’un coup, à la vue d’un courrier qui arrivait par la grolle des Loges, elle a suivi le mouvement qu’ont dû faire les hommes et les chevaux du relais, les rangs se sont trouvés rompus et confondus, et le public a littéralement envahi la voiture jusque sous les roues, pendant les quelques minutes de sa station. De nombreux cris de : Vive l’Empereur ! et de : Vive le roi de Sardaigne ! se sont fait entendre, et l’on a généralement admiré la figure toute martiale du roi de Sardaigne, assis à la gauche de l’Empereur. Une seule voiture, également attelée en poste et dans laquelle se trouvaient M. le colonel Fleury et, nous a-t-on dit, MM. de Toulongeon, Edgard Ney et plusieurs officiers de la suite du roi de Sardaigne, suivait celle de l’Empereur. La chasse avait, dit-on, été très abondante, et on y avait apprécié la justesse de tir du Roi. C’était, comme de coutume, un détachement des Guides qui avait fourni les rabatteurs. Aucune escorte n’accompagnait les voitures qui, vers 4 heures, reprenaient, par les rampes du Pecq, la route de Paris.
Le matin, lors de leur passage sur le territoire de la commune de Chatou, LL. MM. l’Empereur et le roi de Sardaigne avaient trouvé réunis, près du pont, les autorités, des habitants et la subdivision des sapeurs-pompiers, accourus sur ce point au bruit de leur arrivée dans la commune, dont toutes les maisons se sont trouvées, comme par enchantement, pavoisées de drapeaux aux couleurs française et sarde. Un intéressant épisode de ce passage a été la rencontre sur la route de quatre jeunes soldats, mutilés de Crimée, casernés provisoirement à Rueil, et dont les chaleureuses acclamations ont attiré l’attention de l’Empereur, qui s’est empressé de les faire remarquer au roi de Sardaigne, en donnant des marques visibles d’un affectueux intérêt à ces braves jeunes gens, parmi lesquels nous avons cru reconnaître un des anciens élèves de l’institution Ledieu, de notre ville.
A propos de la visite du roi de Sardaigne à Saint-Germain, nous croyons devoir rappeler un souvenir qui peut-être a contribué à augmenter chez ce souverain le plaisir de jeter, en passant, un coup d’œil sur l’antique berceau de Louis XIV. C’est que son aïeule, la reine douairière de Sardaigne, mère ce de Charles-Albert que, comme François Ier, on a aussi appelé le Roi Chevalier, a passé, il y a deux ans, toute une saison à Saint-Germain, sous le nom de princesse de Montléar. Elle habitait alors un des appartements de l’hôtel de la Terrasse, près duquel était disposé, lundi dernier, le relais qui attendait Leurs Majestés, pour les conduire à La Muette. Plusieurs personnes de notre ville ont conservé précieusement le souvenir des relations qu’elles avaient heureusement eues avec cette auguste personne, dont la signature autographe figure sur l’album consacré aux visiteurs de notre bibliothèque. »

Précisions sur la chasse des empereurs Napoléon III et François-Joseph à Saint-Germain-en-Laye

« Chasse à Saint-Germain de LL. MM. les empereurs Napoléon et François-Joseph
Grand Steeple-Chase aux Nouvelles
Nous nous sommes souvent élevés contre les abus de l’empressement de nos grands confrères de la presse parisienne à publier souvent des faits erronés touchant notre localité ou celles environnantes.
Pour nous, qui nous trouvons sur les lieux mêmes, nous avons soin de nous entourer de tous les renseignements possibles, quand parfois nous ne pouvons voir par nos propres yeux. C’est ce qui nous est arrivé à l’occasion de la chasse impériale qui a eu lieu samedi dernier en forêt de Saint-Germain, dans la garenne de Fromainville, et qui avait attiré un très grand nombre de nos citadins, qui pourront apprécier la vérité de nos rectifications.
Empêchés par les soins à apporter au numéro qui paraissait à cinq heures, nous avions prié un de nos amis de nous tenir par envoi d’exprès au courant des différents épisodes de la journée. A quatre heures, nous recevions la note due à son obligeance et un peu plus tard, pendant la distribution du journal, nous apprenions avec regrets de la même personne qu’une erreur s’était glissée dans son rapport quand elle avait constaté la présence des deux archiducs parmi les illustres invités à la chasse. La famille impériale d’Autriche s’était partagée entre deux invitations, et si l’empereur François-Joseph accompagnait notre souverain, ses deux jeunes frères chassaient le même jour à Ferrières, chez M. de Rotschildt.
C’était là une erreur bien involontaire de notre part, mais on va pouvoir juger de celles commises par plusieurs grands journaux de Paris.
C’est d’abord la Presse, qui, dans un article « détaillé » sur la chasse à Saint-Germain, raconte « que les deux empereurs ont d’abord visité le musée gallo-romain, installé dans le château de Charles V et de François Ier, puis la magnifique terrasse établie du côté de la Seine par Henri IV et complétée par Louis XIV ».
Après avoir fait l’éloge de la condition cynégétique de notre forêt de Saint-Germain, qu’il veut bien, par parenthèse, doter de la présence des lièvres, perdrix et bécasses qu’on n’y trouve jamais, le même journal ajoute hardiment que samedi dernier, à l’occasion de cette visite qu’il a rêvée, « les régiments de la Garde, en garnison à Saint-Germain, étaient sous les armes à l’arrivée des empereurs et les maisons de la ville pavoisées aux couleurs de la France et de l’Autriche ».
Le Petit Journal de lundi dernier, dans un de ses entrefilets intitulé : l’Empereur d’Autriche à Paris, contenant les lignes suivantes :
« Hier matin, à neuf heures, l’empereur d’Autriche est parti pour Saint-Cloud, d’où les deux souverains se sont rendus à Saint-Germain.
Après avoir visité le musée gallo-romain et la magnifique terrasse qui domine le cours de la Seine, les deux empereurs sont entrés en forêt, où a eu lieu une chasse à tir. »
Puis les correspondants à Paris expédient en province les nouvelles « détaillées » puisées à la même source. Exemple : « Les princes, dit l’Abeille cauchoise dans sa correspondance particulière du 20 octobre, ont visité le musée des Thermes et l’hôtel de Cluny, le musée gallo-romain à Saint-Germain, où ils ont chassé avec l’empereur Napoléon (dans le musée ?). Les habitants de la ville de François Ier (Oh ! oh !) ont fait une ovation splendide aux deux empereurs ».
Mais le plus fort, le plus incompréhensible, c’est que notre voisine et amie, une feuille estimable, et d’ordinaire bien renseignée, de notre département, du chef-lieu même, l’Union de Seine-et-Oise, qui pouvait s’en rapporter à ce que nous avions écrit samedi soir, instruisait en ces termes, dans son numéro de jeudi dernier, ses lecteurs de Versailles, des faits passés à Saint-Germain :
« Samedi dernier, avant la chasse, les deux Empereurs ont visité le musée gallo-romain installé dans le château de François Ier, et se sont promenés quelques instants sur la magnifique terrasse de Saint-Germain.
Les régiments de la Garde en garnison à Saint-Germain étaient sous les armes. A l’arrivée des deux souverains, les tambours ont battu aux champs et les musiques ont joué l’air national autrichien. Les établissements publics et la plupart des maisons étaient pavoisées aux couleurs de la France et de l’Autriche.
Les habitants de Saint-Germain, qui se pressaient sur le passage de Leurs Majestés, les ont accueillies aux cris réitérés de : Vive l’empereur Napoléon ! vive l’empereur François-Joseph ! »
Le Moniteur du soir a donné, lui, un récit exact de la chasse, il a fait seulement erreur sur le nom de l’inspecteur des forêts de la Couronne à Saint-Germain, M. Fouquier de Mazières, qu’il appelle M. Fauquier ; ce ne sont pas non plus des vignerons, mais bien des horticulteurs de Conflans qui, par l’intermédiaire du maire de leur commune, ont fait, au moment du déjeuner, hommage à la table impériale de paniers de raisins, dont l’excellence et la beauté méritent de partager la faveur du chasselas de Fontainebleau.
Pour rendre justice, du reste, au compte-rendu de la chasse par le rédacteur du Moniteur du soir, M. Louis Noir, nous croyons ne pouvoir mieux faire que d’en reproduire les derniers paragraphes.
« La foule a fait le plus brillant accueil à l’hôte de l’Empereur et de la France ; à chaque instant, des bravos saluaient son incroyable adresse ; S. M. François-Joseph est un des plus habiles tireurs de l’Europe et, aux longues distances, Elle fait des coups merveilleux dont nos plus vieux gardes sont surpris.
Nous ne parlerons pas du prince de la Moskowa, dont la réputation est bien connue, mais nous citerons, parmi les plus adroits, le prince de Liechtenstein, qui a jeté environ cent cinquante pièces.
Vers le soir, on cessa le feu et l’on s’achemina vers le point où les gardes avaient préparé le tableau.
On désigne ainsi l’ensemble des pièces abattues disposées de façon à former un tableau de nature morte.
Nos forestiers montrent beaucoup de goût dans l’arrangement du gibier ; ils composent très artistement des groupes et des scènes d’un aspect souvent remarquable, et l’on croirait qu’un peintre de talent a présidé à l’agencement du tableau.
D’ordinaire les chevreuils forment cadre, et de leur pelage sombre on tire des effets de contraste puissant avec l’éclatant plumage des faisans.
Voici la liste des pièces abattues :
Lapins, 400 ; chevreuils, 50 ; lièvres, 150 ; perdrix, 100 ; faisans (coqs et poules), 1300.
Leurs Majestés quittèrent le tiré au milieu des vivats des spectateurs. Sur leur passage à Maisons-Laffitte, à Colombes, à Courbevoie, les populations se portaient en foule et saluaient les deux souverains de leurs acclamations enthousiastes. »
S’il est à regretter de voir certains journaux de Paris commettre de graves erreurs sur des faits qui se passent à si peu de distance, il n’en faut qu’apprécier si vivement un rapport exact et consciencieux ; c’est à ce titre que nous avons été charmé par la lecture de l’article signé par M. A. Marx sur le sujet en question dans un des numéros du Figaro de cette semaine ; nous le recommandons à ceux de nos lecteurs auxquels il aurait pu échapper, car le spirituel et exact historiographe des fêtes et voyages de la Cour a non seulement fait un récit de la plus grande vérité, mais a encore su décrire parfaitement, et dans leurs moindres détails, cynégétiques et topographiques, les chasses à tir de l’Empereur, et particulièrement celles qui se répètent plusieurs fois pendant la saison, à l’extrémité de la forêt de Saint-Germain.
En somme, avis de la part de leur infime confrère, à certains grands journaux qui, dans le but d’arriver plus tôt que les autres, ressemblent à ce dandy qui voulait que son tailleur l’habillât, non pas à la mode de la veille, ni à la mode du jour, mais à celle de la semaine prochaine.
C’est ainsi que les nouvelles ne sont plus seulement habillées, mais travesties, et malheureusement se répandues beaucoup plus vite et dans un cercle bien autrement vastes que celles données par la presse locale, qui a la faiblesse de se borner à raconter strictement ce qui s’est passé.
Encore une fois, à nos lecteurs de Saint-Germain, à juger et à apprécier et surtout à se défier de certaines annonces qui, comme celles données par plusieurs journaux et notamment par le Petit Journal, ont fait réunir inutilement, pendant plusieurs heures, samedi dans l’après-midi sur le parterre, à la route des Loges et aux abords du château, une foule immense qui espérait et attendait l’arrivée des deux Empereurs, pendant que, suivant le programme arrêté, Leurs Majestés étaient déjà rendues au palais de Saint-Cloud.
Léon de Villette »

Récit de la visite de la reine Victoria à Saint-Germain-en-Laye

« Visite de S. M. la reine d’Angleterre à Saint-Germain
Samedi 25 août, à 6 heures du roi
C’est encore sous l’impression d’une belle et heureuse journée que nous traçons à la hâte ces quelques lignes, pour lesquelles, plus que jamais, nous réclamons d’avance l’indulgence de nos lecteurs, n’ayant d’autres prétentions que de nous faire historiens fidèles de faits qui resteront à jamais gravés dans la mémoire des habitants de Saint-Germain.
Il y a huit jours que Paris tout entier se levait pour saluer l’entrée dans ses murs de la souveraine aimée d’un grand peuple allié de notre belle patrie.
S’il fallait s’en rapporter aux promesses du programme connu, c’était à Saint-Germain qu’était réservé l’octave de cette fête nationale ; cependant, rien de certain, rien d’autrement officiel que l’avis d’un journal anglais, reproduit par la presse française, n’était parvenu à nos magistrats. Les jours se passaient, et l’édilité ne recevait aucun renseignement qui pût régulariser l’impatient élan de la population, entraînée, surexcitée par l’exemple de la grande ville. Ainsi que des enfants dévoués, qui veulent célébrer une fête de famille, nos habitants, d’un commun accord, vinrent demander à l’autorité son patronage pour l’exécution de leurs projets. Il leur fut promptement assuré, et à l’instant, pendant qu’on faisait circuler une liste de souscription, dont on n’attendait même pas le résultat, une sorte de commission s’improvisa, composée d’hommes spéciaux.
Architectes, entrepreneurs, peintres, dessinateurs, ouvrirent un atelier où chacun apporta le concours de son talent, de son dévouement, de ses matériaux ; jeudi matin, on se mit à l’œuvre et bientôt on vit, à l’entrée de la ville, s’élever, grandir et se décorer un portique, arc de triomphe improvisé, bien inférieur sans doute à ces gigantesques et splendides décorations qui font encore l’admiration des Parisiens et des étrangers, mais qui du moins avait le mérite de n’avoir d’autre architectes, d’autres ouvriers, que les citoyens mêmes qui avaient demandé l’autorisation de le construire. Quelques décors fournis par la direction du théâtre, des écussons aux initiales de l’Empereur, de l’Impératrice et de la reine Victoria, une grande figure allégorique de la ville de Saint-Germain, des drapeaux de France, d’Angleterre, de Turquie et de Sardaigne, des arbres entiers, coupés et replantés à la hâte, des guirlandes de feuillages, des massifs de fleurs, une suite de mâts, surmontés d’oriflammes aux couleurs nationales composèrent un ensemble sinon parfait, du moins attestant le goût et le zèle de ceux qui y avaient contribué. Sur une banderole d’azur, flottant en avant du portique, on lisait ces mots, écrits en lettres d’or : Les habitants à Leurs Majestés. Après deux jours et deux nuits de travail, tout était prêt, ce matin, longtemps avant l’arrivée des augustes visiteurs.
Vers onze heures, le maire, à la tête de son conseil municipal, les principaux fonctionnaires, parmi lesquels on remarquait le lieutenant-colonel du régiment des Guides, le curé de la paroisse, le maire d’une des principales villes d’Angleterre, des artistes célèbres vinrent prendre place auprès du portique ; la subdivision des sapeurs-pompiers et un détachement du 48e de ligne formaient la haie et contenaient les flots d’une foule impatiente et compacte. Deux vedettes des Guides en grande tenue gardaient l’entrée de l’avenue, sur laquelle on remarquait aussi le sévère et bel uniforme des gendarmes à cheval de la garde impériale. Un aide-de-camp, en tenue de ville, vint bientôt s’assurer des dispositions prises et prévenir le maire que le désir de Leurs Majestés était qu’aucun discours ne fût prononcé. Bientôt après, à midi et demi, on vit passer les premiers courriers annonçant l’arrivée du cortège impérial et royal.
Puis les voitures arrivèrent : dans la première était la reine Victoria et la princesse royale ; sur le devant, l’Empereur et le prince Albert, tous deux en habit de ville. Les acclamations éclatèrent alors de toutes parts, et, pendant que les chevaux ralentissaient leur allure, la foule put contempler les traits qu’elle était si avide de voir. Dans la seconde voiture étaient le prince de Galles et d’autres personnes, parmi lesquelles, sans pouvoir l’assurer, nous avons cru reconnaître la princesse Mathilde. Des chars-à-bancs découverts, également conduits par les postillons de l’Empereur, contenaient les personnes de la suite de Leurs Majestés et les invités, au milieu desquels se trouvait M. le colonel Fleury. A l’entrée de la ville, M. l’inspecteur des forêts de la Couronne avait pris la conduite du cortège, qui était précédé et suivi d’un peloton de Guides. Après avoir relayé à deux cents pas environ de l’arc de triomphe, les voitures se dirigèrent, par la Terrasse, vers la grille Dauphine, où elles entrèrent en forêt, en marchant vers le pavillon de la Muette, but de la promenade.
Il était près d’une heure lorsqu’on est arrivé au château de la Muette, dont le rond-point était envahi depuis longtemps par une foule d’habitants de la campagne, accourus dès le matin des communes environnantes. Il s’y trouvait encore une innombrable quantité de personnes de distinction, à cheval, en brillants équipages, en voitures de poste, et beaucoup aussi à pied, malgré la longue distance qui sépare ce rendez-vous de chasse de la ville. Une collation avait été préparée dans la salle à manger du château. On avait espéré pouvoir donner à la reine le spectacle d’une chasse à courre, mais le temps a manqué, il a fallu se contenter des fanfares éclatantes des piqueurs de la vénerie, dont les trompes alternaient avec la musique des Guides. Les nombreux chiens de la vénerie, accouplés et tenus en lesse par les valets, ne contribuaient pas peu, par leur impatience difficilement contenue, à donner une couleur locale au spectacle pittoresque qu’offrait en ce moment la verte pelouse.
Après le lunch, l’Empereur et la reine Victoria ont paru dans le salon, dont les portes étaient ouvertes, et le public, tenu à distance, c’est-à-dire au bord du bois, a pu voir facilement ce qui se passait dans le salon. L’Empereur, fumant un cigare, ainsi que tous les hommes invités, se promenait et causait familièrement avec plusieurs personnes, parmi lesquelles nous avons remarqué M. le maréchal Magnan, grand veneur, en costume de chasse, M. Edgard Ney, M. le colonel Fleury, M. Lepic, etc. On a vu aussi avec intérêt Sa Majesté causer quelques instants avec notre grand artiste Lablache, du théâtre italien ; c’est en ce moment qu’une députation de jeunes filles, vêtues de blanc et appartenant, nous a-t-on dit, à la ville de Conflans, a été introduite dans le salon et admise à l’honneur de présenter à la Reine des fleurs et des fruits.
La reine d’Angleterre, vivement impressionnée par la beauté du lieu et enchantée du coup d’œil qu’offrait l’ensemble de la réunion, a pris un crayon et, de sa royale main, a esquissé un croquis destiné à lui conserver le souvenir de sa visite à la forêt de Saint-Germain.
Peu d’instants avant le départ, la musique des Guides exécutait, avec le rare talent que nous lui connaissons, le quadrille des Noces de Jeannette ; on a pu voir alors les jeunes princes, sous le charme de cette entraînante musique, se mettre à danser dans le salon, où d’augustes personnages paraissaient partager leur gaité.
Vers trois heures et demie, le cortège a repris la route de Saint-Germain, en passant par la place Verte, la grille Royale, la Terrasse et le Parterre, dont il a fait le tour, pour sortir par la grille du Débarcadère et s’arrêter sur la place du Château, où attendait une foule immense.
Là, l’Empereur, la reine Victoria, le prince de Galles et la princesse royale ont mis à terre et sont entrés, avec une partie de leur suite, au château, où, reçus par les autorités et conduites par M. l’architecte, nouvellement nommé, et le commandant du Génie, avec une conversation dont les destinées futurs de l’antique et royale demeure ont probablement été le sujet. On a pu voir ensuite, pendant quelques instants, les augustes voyageurs paraître au balcon, du côté nord du château, d’où l’on jouit d’une si admirable vue sur le Parterre, la Terrasse et son immense horizon ; quelques minutes après, l’Empereur et ses royals hôtes remontaient en voiture et traversaient au pas la foule qui encombrait la place et qui faisait retentir l’air des cris mille fois répétés de : Vive la reine d’Angleterre ! Vive l’Empereur !
Un dernier épisode a marqué d’une manière touchante la sortie de la ville : c’est aujourd’hui la saint Louis, fête patronale des ouvriers maçons de Saint-Germain. Selon leur usage, ils avaient, après avoir présenté le pain béni à l’Eglise, parcouru la ville au son de musiques guerrières, venue tout exprès de l’école de Saint-Cyr. A l’angle des rues de la Verrerie et de Paris, le cortège de ces braves ouvriers se rencontra avec les voitures impériales ; l’Empereur fit arrêter, prit quelques renseignements, et l’on vit alors le syndic de la corporation s’approcher du marche-pied, adresser quelques mots à l’Empereur, qui lui répondit avec bienveillance et accepta de sa main, pour la reine et pour lui, un bouquet et une énorme brioche ; la même offrande fut également acceptée à la seconde voiture par le prince de Galles. Puis le cortège reprit sa marche pour sortir de la ville, traverser la place Royale et s’engager dans les rampes du Pecq, retournant à Saint-Cloud par Chatou et Rueil, et laissant, derrière lui, toute une ville émue de sentiments de joie et de reconnaissance pour cette bonne visite dont elle gardera un long souvenir.
Le maire du Pecq et le conseil municipal s’étaient rangés à l’entrée du pont, sur le passage de l’Empereur et de la reine d’Angleterre. Les autorités des autres communes avaient suivi cet exemple et, sur plusieurs points du parcours, on avait élevé des mâts pavoisés et des arcs de triomphe. Nous devons citer enfin la façon élégante et riche dont une noble anglaise, lady Trotter, habitant depuis quelques années sa charmante propriété de la Rocheville, situ »ée vers le milieu de la côte, avait décoré l’entrée et la façade de sa maison. Des faisceaux de drapeaux, de riches tentures et des écussons aux armes de France et d’Angleterre annonçaient dignement la demeure d’un sujet dévoué de Sa Majesté britannique et d’un hôte reconnaissant de la nation française, qu’elle sut honorer en partageant ses sympathies pour le chef que la Providence et le vœu unanime lui ont donné dans l’auguste personne de l’empereur Napoléon III.
Léon de Villette »