Saint-Germain-en-Laye

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Récit par Jodocus Sincerus de sa visite des châteaux de Saint-Germain-en-Laye

« [p. 293] Lorsque tu es à Paris, il ne faut pas négliger de visiter les lieux voisins les plus remarquables. Outre Fontainebleau, que j’ai décrit tout à l’heure, il y a la ville de Saint-Germain-en-Laye, située à cinq lieues. Elle ne manque pas d’une certaine antiquité. Ce fut le roi Charles V qui en commença le château, ou du moins qui le restaura ; mais François Ier, passionné pour la chasse, le fit reconstruire avec plus d’éclat. Cette ville ne fait partie d’aucun diocèse. Elle est contiguë à une forêt de chênes, appelée le Bois de trahison. Dans l’angle qui regarde la ville, on m’a montré une grande table de pierre auprès de laquelle on dit que la trahison fut conçue ; je laisse à d’autres le soin d’expliquer en quoi cette dernière consistait, et qui l’exécuta, ne voulant pas m’égarer dans les choses incertaines. On prétend aussi que les branches des arbres de cette forêt jouissent de cette propriété singulière, de couleur à fond comme les pierres, au lieu de surnager, si on les jette dans la Seine ; mais je n’ai pas expérimenté le fait.
J’ai encore emprunté à Mérula ce passage. Je dirai en outre que le nouveau château est une construction admirable. J’y ai remarqué six galeries et des grottes dans lesquelles l’eau, amenée par des conduits divers, produit des effets mécaniques étonnants : 1° la grotte d’Orphée, [p. 294] où on voit une statue du poète, tenant une lyre sur laquelle il joue, lorsqu’on fait marcher les eaux. Au son de la lyre, différents animaux s’avancent autour d’Orphée, les arbres s’inclinent, et le roi passe avec le dauphin et toute sa suite ; 2° la grotte d’une jeune musicienne que les eaux mettent en mouvement, et qui lève la tête de temps en temps comme si elle regardait réellement ses auditeurs. À ses côtés, des oiseaux exécutent une mélodie suave. Remarque contre la fenêtre une table de marbre bigarré représentant un gracieux paysage. Au milieu est un tuyau d’où l’eau s’échappe, en courant autour d’obstacles qui la forcent à représenter différentes figures. Contre la muraille intérieure on a placé la statue d’un satyre ; 3° grotte de Neptune : lorsqu’on fait marcher les eaux, deux anges sonnent de la trompette, et, à ce bruit, Neptune paraît, armé d’un trident, et traîné dans un char à deux chevaux ; après être resté un instant, il s’en retourne, et les trompettes sonnent encore. Tu remarqueras sur la muraille les forges de Vulcain ; 4° la grotte de Persée : on voit celui-ci délivrer Andromède et frapper le monstre main de son glaive.
Entre les deux premières grottes tu en verras une cinquième, celle où un dragon lève la tête en battant des ailes, et vomit tout-à-coup de larges torrents d’eau, pendant que des rossignols [p. 295] factices font entendre des chantes harmonieux. Outre ces grottes où les eaux jouent de toute part, il faut voir aussi la grotte sèche, qui offre en été une fraicheur délicieuse ; une fontaine avec une statue de Mercure dans l’une des galeries ; et enfin, dans une des chambres du palais, l’image de la France éplorée qui se laisse choir, et que le roi soulève pour la remettre dans son premier état. »

Sincerus, Jodocus

Récit par Joseph Lavallée de sa visite à Saint-Germain-en-Laye

« [p. 13] C’est, comme vous le savez, Monsieur, pour ce Versailles que Louis XIV abandonna Saint-Germain-en-Laye, dont la situation est enchanteresse, et dont la beauté de la vue ne se peut comparer qu’à celle dont on jouit au Mont-Casal, dont nous vous parlerons dans le département du Nord. Mais ce que vous ne saviez pas, c’est qu’une puérile foiblesse entra pour beaucoup dans la détermination de ce Roi. On apperçoit de Saint-Germain le clocher de Saint-Denis. Et le conquérant n’envisageoit qu’en tremblant l’écueil de ses fausses grandeurs. C’est ainsi que Catherine de Médicis abandonna, ou pour mieux dire, suspendit la construction du Louvre, parce qu’un devin lui avoit prédit qu’elle mourroit près de Saint-Germain, et que le Louvre est sur la paroisse de Saint-Germain-l’Auxerrois. Et voilà les maîtres du monde !
Ce séjour de la cour à Saint-Germain rappelle une bouffonnerie de Bassompierre : Marie de Médicis aimoit Saint-Germain, elle disoit au maréchal, « je me plais ici. Quand j’y suis, j’ai un pied à Saint-Germain, [p. 14] l’autre à Paris ». En ce cas, Madame, lui répondit-il, je voudrois être toujours à Nanterre.
Il y avoit jadis de l'aristocratie jusques dans les recueils de bons mon. Il falloit qu'ils fussent émanés ou d'un être noble, ou d'un prince ou d'un flatteur, pour que les compilateurs de pointes les jugeassent dignes d'être transmis à la postérité. Quoiqu’il n'y ait point encore de décret contre cet abus, vous ne trouverez pas mauvais que nous y dérogions en faveur d'un bon laboureur, dont deux réponses, que nous allons vous transcrire ici, valent bien cinq ou six tomes de calembourgs de quelques ci-devant marquis. La scène est encore à Saint-Germain. Un laboureur porte à un receveur des impositions sa quote-part de ce qu’il doit à la patrie. « Comment, lui dit le publicain, vous ! que jadis il falloit toujours attendre, vous venez de vous-même, et vous payez avec joie ? C’est, répond le laboureur, que je donne aujourd'hui ce que vous preniez autrefois.
Le même laboureur tenoit tête à un ex-parlementaire. La morgue magistrale n'avoit pas abandonné cet homme. « Tu ne me parlois pas si haut quand je portois les cheveux longs. – Ce n’étoit pas la longueur de vos cheveux qui m'en imposoit, mais celle de votre robe, qui envahissoit tout. Et quand vous me parliez alors, vous aviez derrière vous le bourreau qui m’écoutoit ».
[p. 15] Le premier château de Saint-Germain fut bâti par Louis VI, dit le Gros. Ruiné depuis par les Angalis, rebâti par Charles V, livré encore au comte de Varwick par un honnête religieux de Sainte-Geneviève, prieur de Nanterre, et nommé Carbonnet, peur la somme de trois cents salus d'or, réparé par François Ier, enfin augmenté par Louis XIV, il est tel aujourd’hui que la planche ci-jointe vous le représente. C’est un pentagone irrégulier.
Henri IV en avoit fait bâtir un autre, que l’on appeloit le château neuf, dont il n'existe plus qu'une partie.
C’est-là que Jacques II, roi d’Angleterre, a terminé ses jours et ses malheurs. Exemple de ta foiblesse des Rois, il perdit pour jamais sa couronne à la bataille de la Boine, en juillet 1690. Cent ans après, à pareil jour, Louis XVI recevoit la sienne des mains du Peuple Français.
Là, froids au souvenir des malheurs mérités d'un roi débilement dévot, nous avons mouillé de nos larmes l’autel de l’amitié, cette passion des cœurs honnêtes. Cet autel est le sarcophage où reposent les cendres de J.-B. Léon du Breuil, et de Jean-Joseph Pechmeja. Tous deux du même âge, la nature avoit placé leur berceau dans la même ville. L’amitié les a couchés dans la même tombe. Ils vécurent ensemble. Ils moururent ensemble. Ils reposent ensemble. Du
Breuil mourut, Pechmeja le suivit. Mort le second, Pechmeja est le premier ! De semblables tombeaux, malheureusement trop rares, consolent d'être homme. [p. 16] L’histoire les oublie pour citer les mausolées des conquérans ! mais les cœurs sensibles sont le livre de vie où s’inscrivent les noms des héros de l'amitié. Une loi défendoit aux Scythes d'avoir plus de deux amis. Inutile loi ! qui peut en avoir deux n’en mérite pas un. Mais l’amitié ! quel homme a chanté ceux qui la connurent. Tel qui lit tes odes de Pindare, sait-il seulement qu'il mourut la tête sur les genoux de son ami.
A travers la superbe forée de Saint-Germain, où se trouvoit le monastère des Loges, on arrive à Poissy. Le dissipateur Brunoi, fils de Paris Mont-Martel, a, dans ses revers, habité quelque tems les Loges. Il dépensa sa fortune en processions. Ses beaux-frères s’enrichirent de ses débris dont ils le dépouillèrent. J’ai vu beaucoup de gens qui se ruinoient avec des filles, le traiter d'extravagant, parce qu’il se ruinoit avec des encensoirs. Une lettre-de-cachet l’enleva à l’amour du Saint-Sacrement. Ces spoliateurs restèrent libres. Ils avoient les vices de leurs protecteurs. »

Lavallée, Joseph

Récit par François Marlin de sa visite à Saint-Germain-en-Laye

« [p. 162] Nous arrivons avant sept heures du matin sur cette terrasse si vantée des Parisiens, et qui, par hasard, se trouve belle en effet. Elle court, à peu près du midi au nord, dans une étendue de plus de deux milles ; on y foule, en cette saison, une tendre pelouse : on y jouit de l’ombre la plus fraîche, du vert le plus doux, et d’un feuillage presque transparent dans son clair tissu. La rivière, sur un lit tortueux, coule entre des prairies, et va découper inégalement le pied des coteaux et la vaste campagne. La vue est grande ; elle touche, elle intéresse ; mais les voyageurs de notre capitale, et les descripteurs de ses environs, ont tort de dire que l’imagination ne peut rien enfanter au-delà. Cette hyperbole, sans diminuer mon plaisir, m’oblige de m’en rendre compte. Je me tourne vers Paris, et je ne l’aperçois [p. 163] pas. Le Mont-Valérien me couvre l’immense cité ; mais si, de la butte du Calvaire, je m’approche de Lucienne, et que, passant sur Marly, je ceintre de l’œil les coteaux qui me ramènent à Saint-Germain, ces paysages boisés, remplis de fabriques, m’occupent agréablement. Je plonge ensuite sur la plaine, les variétés en sont disparues. Les collines nous montrent, à leurs bases et sur leurs croupes, un assez grand nombre de villages et de châteaux, mais les sommets sont peu festonnés : ces hauteurs sont nues et grises ; elles paraissent incultes dans l’éloignement. Est-ce là de ces tableaux qui laissent une impression durable ? Est-ce à ces vues sans accidens, sans ruptures, sans inégalités, que l’âme s’attache ? Votre esprit cherche-t-il à s’égarer dans des vallées profondes ? Voyez-vous le pic d’un mont élevé, surmonté par un autre pic que d’autres surmontent encore ? Entend-on de loin une cascade solitaire ? L’épaisseur d’une sombre forêt qui descend de la pointe d’un morne dans les vallons, vous indique-t-elle avec frayeur le séjour silencieux des bêtes fauves et des oiseaux de proie ? Sentiez-vous quelque part la joie épanouissante de rencontrer ou d’apercevoir, au milieu d’un désert, une cabane habitée ? Entendez-vous avec palpitations le cliqueti d’un moulin répété par les échos ? Non, vos transports [p. 164] sont tranquilles ; vous pouvez marquer de l’œil, parmi des habitations nombreuses, votre hospice pour la nuit qui s‘approche. Votre plaisir est sans trouble ; il est donc faible, et va vous quitter en rentrant dans votre cabinet. »

Marlin, François

Commentaires par un Anglais sur le château de Saint-Germain-en-Laye

« [p. 113] The castle of St. Germain en Laye is curious in the eye of an Englishman, because it was the residence of James the Seconde, and his Court, after his abdication. The situation is very fine, and puts you in mind of Windsor ; the Mall and the Bowling-green, which you find here, were both, I imagine, designed to amuse the last unhappy royal visitor ; the great terrace is considerably more than a mile long, and about eighty of ninety feet wide : you have a distant view of Paris on the side of the river from the castle which the King gave to the Comte d’Artois, who had sold it.
[p. 114] Is it a pleasant excursion to this place by the post ; you must set out early in the morning, and return late, to have the whole day at your disposabl, which is not too much for the object in view. As the Thuilleries are at this moment shut ut, even to the passage of the Deputiers, when you return to town, the coolest place to drive to in an evening, is the Palais Roial, where you are sure to find a seat. »

Récit par Charles-Louis Cadet de Gassicourt de son passage à Saint-Germain-en-Laye

« Notre intention n’étoit pas de nous arrêter à Saint-Germain ; mais en voyage, mon amie, fait-on ce qu’on voudroit faire ? Mon cheval étoit déferré, il falloit bien réparer sa chaussure. Je n’en fus point fâché, j’aime beaucoup Saint-Germain. Sa vue, sa forêt, sa terrasse, le parc de Noailles, excitent toujours mon admiration, et me rappellent avec plaisir le mot de Bassompière. Marie de Médicis chérissoit ce séjour. « Quand j’y suis, disoit-elle un jour, j’ai un pied à Saint-Germain et l’autre à Paris. – En ce cas, Madame, ajoute le galant maréchal, il me seroit doux d’être à Nanterre ». »

Cadet de Gassicourt, Charles-Louis

Description par Johann Jacob Volkmann des châteaux de Saint-Germain-en-Laye

« [p. 485] St. Germain-en-Laye liegt auf einer Anhöhe an der Seine, ohngefähr eine Stunde von Marly. Es ist ein altes bekanntes königliches Lustschloß, welches von dem Walde, ehemals Ledia oder Laya genannt, den Beynamen behalten hat. Die kleine darzu gehörige Stadt ist artig, und gut gepflastert. Die lage des Schlosses ist vortreflich, und die just wegen ihrer Reinigkeit sehr gesund. Ludwig XIV hätte bey diesen Vortheilen hier mit halben Kosten etwas weit vortreslicheres ausführen können, wenn ihn sein Eigensinn nicht bewogen hätte, den [p. 486] platten sumpfigen Boden von Versailles vorzuziehen. Dazu kam, daß man von hier den Thurm von St. Denys sieht, und der große Ludwig wollte den Ort der königl. Begräbnisse nicht immer vor Augen haben, der ihn an seine Sterblichkeit erinnern mußte.
Man trifft hier zwey Schlösser an, das alte und das neue. Das alte ward schon von Ludwig VI als eine Fortresse angelegt, in den folgenden Zeiten aber von den Englandern zerstört. Franz I stellte es wieder her, und Ludwig XIV vergrößerte es mit fünf großen Pavillons. Das neue Schloß liegt etliche hundert Schritte davon, und ward von Heinrich IV aufgeführt. König Jacob II von England wohnte nach seiner Verjagung viele Jahre auf dem alten Schlosse, und beschloß hier auch 1718 sein leben. Von dem neuen sieht man nicht viel mehr, weil der Graf von Artois, dem es gehört, es abtragen, und ein schönes Gebäude aufführen laßt. Die Kapelle des alten Schlosses ist wegen ihrer guten Gemälde merkwürdig. Das heil Abendmahl auf dem Hauptaltare rührt von Poussin her, und in der Sakristey sieht man zwey vom Kardinal hieher geschenkte Stücke, nemlich eine betrübte Maria, von Hannibal Caracci, und Maria, welche dem Kinde die Brust reicht, von Corregio. Neben der Maria bläst ein Kind Kohlen an, darauf ein Suppentopf steht.
Der Garten ist ein Bild der Vergänglichkeit ; die Terrassen, welche nach der Seine hinab gehen, sind gewölbt, fallen aber nach und nach ein. Bey dem alten Schlosse ist ein großes Rasenstück, welches noch von der Henriette d Angleterre, Gemalinn des Bruders von Ludwig XIV herrührt, und der erste Boulingrin ist, welcher als Nachahmung des Englischen Geschmacks in Frankreich angelegt worden. [p. 487] Was aber allein eine Reise nach St. Germain verdient, ist die berühmte Terrasse, vielleicht die größte, und wegen der herrlichen ausgebreiteten Aussicht eine der schönsten in der Welt. Sie ist 1200 Klaftern lang und 15 breit. Auf der einen Seite läuft der Wald von St. Germain hin, welcher 5700 Acker enthält, und dem Könige häusig zur Jagd dient, und auf der andern verfolgt man durch eine unabsehliche Ebene den Laus der Seine, und übersteht eine Menge Schlösser, Landhäuser, Dörfer und Städte in der sruchtbarsten Gegend. Was für Vortheile bot hier die Natur dar, wenn unvernünftige Schmeichler Ludwig XlV nicht beredet hätten, er könne sie zwingen, und die wilde Gegend von Versailles in einen Feen Aufenthalt verwandeln ! »

Volkmann, Johann Jacob

Récit par Arthur Young de son passage à Saint-Germain-en-Laye

« [p. 222] Je me rends à Saint-Germain, dont la terrasse est fort belle. M. Broussonnet me rencontra ici, et nous dinâmes avec M. Breton chez le maréchal de Noailles, qui a une bonne collection de plantes curieuses. Il y a ici la plus belle Sophora [p. 223] Japonica que j’ai vue. »

Young, Arthur

Récit par Sophie von La Roche de sa visite à Saint-Germain-en-Laye

« [p. 546] Wir kamen eben von der beruhmten Terrasse von St. Germain zuruck, die wir nicht nur wegen ihrer Schonheit, sondern auch mit einem gewissen Geist der Wallfahrt, fur das Andenken Heinrich des IV. Der sie auffuhren liess, besuchten, und von welcher man die vortrefliche Ausficht auf Paris, das Thal, die Seine und Marly hat ; ja man sagt : Dieses schone Schloss wurde nie verlassen worden seyn, wenn man Ludwig dem XIV. Die Ausficht auf die Thurme der Abten St. Denis hatte verbergen konnen, weil er nicht Kraft genug in seiner Seele fand, den Begrabnisort seiner Vorfahren mit Ruhe anzusehen. Ludwig der XI. Welcher auch den Tod furchtete, hatte dieses Schloss seinem Leibarzt, vielleicht aus der nemlichen Ursache, geschenkt ; Karl der V. hingegen hatte es, wegen der schonen Lage und [p. 547] gesunden Luft, im Jahr 1370 erbaut, und hatte freylich den Bennahmen des Weisen nicht verdient, wenn er den Gedanken des Todes nicht wie ein Mann getragen hatte. Er mag sich wohl oft bey Erblickung dieser bedeutenden Thurme vorgenommen haben, die Lorbeerkrone eines guten Nachruhms zur Zierde seiner Ruhestatte zu erwerben. KIarl der VI. verlohr St. Germain an die Englander. Sein Sohn kaufte es von einem englischen hauptmann zuruck. Franz der I. dachte darinnen an den Genuss seines Lebens bey der schonen Jagd in dem nahe anstossenden Wald. Man sieht noch an der obersten Fensterreyhe ringsumher im hof den gebrannten Salamander, welcher sein Sinnbild war. Henrich der IV. und Ludwig der XIII. vergrosserten und verschonerten es. Man will jetzo diess Schloss als Beweiss der Verganglichkeit ansehen, weil der Alcove, in welchem Ludwig der XIV. gebohren wurde, nun ein Staubwinkel ist, und die Gallerien, worinnen sich der hofstaat versammelte, Kornboden geworden sind. Ich habe nicht viel gegen diese Abanderung einzuwenden, den Ludwig der XIV. ist jetzo selbst nichts mehr, als eine Hand voll Staub, warum sollte das Zimmer davon befreyt seyn ? und nuzliche Kornmagazine fur das gemeine Wesen entehren, wie ich denke, die Stelle der Hofleute nicht sonderlich. Gerne mochte ich aber, dass der Zufall den lezten grosen Bewohner dieses von seinen Konigen verlassenen Hauses, Jacob den II. Konig von England, welcher seinen Thron verliess, in dem Zimmer hatte sterben lassen, in welchem sein Beschutzer gebohren wurde. Dieser hatte uber Veranderung und Verschiedenheit nachdenken und sprechen konnen. Merkwurdig ists, dass hier in den koniglichen Garten die ersten Springbrunnen im Grosen errichtet wurden, welche der Prasident [p. 548] Moncontis von Lyon erfand. Das Schloss ist ein groses Viereck, dessen angebaute grose Thurme auswarts als breite Vorsprunge, im Hof aber, als runde Thurme erscheinen. Das Ganze ist von dunkelrothen Ziegelsteinen und sehr hoch gebaut. Innen und aussen laufen Gallerien herum, von welchen man die angenehmste Aussicht hat. Der Theil des schonen Waldes, welcher an das Ende der Terrasse fuhrt, ist immer voll Spazierganger von der besten Menschenclasse. Man sahe ihnen an, dass Klugheit, Ruhe und Freundschaft unter ihnen wohnen. Viele angesehene Familien von Paris begeben sich hieher, eine vernunftige Stille und wohlfeilere Lebensmittel zu finden, und dennoch in der Nahe des Hofs von Versailles zu leben, wo sie leicht alles Neue erfahren, und die Gnadenzeit fur sich und die Ihrigen nutzen konnen. Wir gingen auch in die Kapelle, welche von schoner Bauart ist. Die Decke ist voll Gemalde aus der biblischen Geschichte, sehr fein gemalt, und die Einfassungen der Winkel, welche das Gemalde bildet, und die Saulen, welche das Gewolbe tragen, sind alle vortreflich vergoldet. Sie sind aber nicht nur ein Beweiss der alten Pracht, sondern auch der alten Kunst. Denn gewiss, die neuen Vergoldungen werden nicht so lange in ihrer Schonheit dauern. Ich wunschte einen alten Saal des Schlosses zu sehen. Aber er ist ganz verbaut, und wie das Louvre in Paris zu Gnadenwohnungen eingerichtet. Die Vorhöfe sind einsam und mit Gras bewachsen. Von den schonen Grotten, und in Wasserwerken sich bewegenden Gottern und Thieren, sieht man nichts mehr ; aber Leute jedes Alters, mit dem Ausdruck einer stillen Zufriedenheit, finden sich hier unter den Baumen, welches in Paris, dessen Rauchsaulen und Thurmspitzen man erblickt, nicht moglich ist, wo [p. 549] die Menschen vom Ehr und Geldgeitze, von Sorgen und Neugierde umher getrieben warden, und auch der, so in der Kutsche sizt, durch die Gegenstande der Pracht und Kunst, durch den Larmen der Fuhrwerke und Fussgänger aus dem Gleichgewichte gebracht wird. »

La Roche, Sophie (von)

Description par Jacques-Antoine Dulaure des châteaux de Saint-Germain-en-Laye

« [p. 228] Jolie ville, située à quatre lieues de Paris, sur une montagne, dont le pied est arrosé par la rivière de Seine ; fameuse dans l’histoire par son ancien château, et dans tous les tems par la beauté de sa situation, et la pureté de l’air qu’on y respire.
L’ancien château fut d’abord bâti comme une forteresse, par Louis VI. Les Anglois le ruinèrent, et il ne fut rétabli que sous le règne de Charles V. François Ier le fit embellir et augmenter d’un étage. Louis XIV y fit construire, par Jules Hardouin-Mansard, les cinq gros pavillons dont le château est flanqué.
Outre ce château, il en est un autre appellée le Château-Neuf, éloigné du vieux d’environ deux cents toises ; il fut bâti pour Henri IV, par l’architecte Marchand.
Le roi d’Angleterre Jacques II, forcé de quitter son royaume, tint longtemps sa cour dans ce château de Saint-Germain. Un poète fait l’éloge de ce prince, de la manière suivante :
C’est ici que Jacques second,
Sans ministres et sans maitresses,
Le matin alloit à la messe,
Et le soir alloit au sermon.
Ce roi détrôné vivoit des bienfaits de Louis XIV, et d’une pension de 70000 livres que lui faisoit sa fille Marie, reine d’Angleterre, qui lui avoit enlevé sa couronne. Il [p. 229] s’occupoit à converser avec des moines, et à toucher des écrouelles qu’il ne guérissoit pas.
Ce roi mourut à Saint-Germain, le 16 septembre 1718.
Le nouveau château est aujourd’hui persqu’entièrement démoli. M. le comte d’Artois, à qui il appartient, en fait construire un autre à la même place, dont on voit déjà deux belles et grandes terrasses achevées.
Ce qui reste encore de ce château prouve qu’il étoit orné de médaillons et de bustes. Un de ces bustes ressembloit parfaitement au président Fauchet, auteur des Antiquités françoises et gauloises. Cet historien sollicioit depuis longtemps la récompense de ses travaux littéraires auprès d’Henri IV, qui, pour s’en débarrasser, lui dit un jour à Saint-Germain, en lui montrant le buste qui lui ressembloit, M. le président, j’ai fait mettre là votre effigie, pour perpétuelle mémoire. Fauchet, peu content de ce succès, composa les vers suivans :
J’ai trouvé dedans Saint-Germain
De mes longs travaux le salaire :
Le Roi, de pierre m’a fait faire,
Tant il est courtois et humain.
S’il pouvoit aussi bien de faim
Me garantir que mon image,
Ah ! Que j’aurois fait bon voyage !
Je retournerois dès demain.
Viens, Tacite, Salluste, et toi
Qui a tant honoré Padoue ;
Venez ici faire la moue
En quelque coin ainsi que moi.
Henri IV lut ces vers, et donna à Fauchet [p. 230] le titre d’Historiographe de France, avec une pension de six cens écus.
Nous sommes dispensés de faire une plus longue description de ce château. Ce qu’il en reste étant peu de choses, ainsi que les travaux recommencés.
L’ancien château, dont nous avons déjà parlé, est très solidement bâti ; on voit que, pour sa construction et sa décoration, on a employé beaucoup de briques. Sa forme est à peu près celle du vieux château de Chantilli ; ce que l’on n’apperçoit bien exactement que lorsqu’on est dans la cour. Il est entouré de fossés ; on a depuis peu détruit les pont-levis pour en construire en pierre de taile. Le comble de ce château est une voûte en dalles de pierre, qui forme une terrasse, d’où l’on jouit de la vue la plus magnifique.
La partie du château qui est face à l’occident, contient une salle très spacieuse qui sert de salle de bal et de spectacle.
La chapelle est située dans la partie du château qui est en face du midi ; elle renferme ce que la ville de Saint-Germain a de plus rare, et ce qui doit le plus piquer la curiosité des amateurs des beaux-arts.
La voûte de cette chapelle est ornée de peintures à fresque, à la vérité, un peu dégradées, mais qui ne doivent pas moins fixer les regards des curieux, à cause des hommes célèbres qui en sont les auteurs. Le Brun a fourni les dessins de la plus grande partie de cette voûte, Vouet en a fait plusieurs autres et les a peints presque tous, excepté quelques [p. 231] cartouches et médaillons qui sont de la main du célèbre Le Sueur.
Dans la nef, on voit deux grands tableaux de Roselli ; celui qui est sous l’orgue représente Judith rentrant à Béthulie, après avoir coupé la tête à Holopherne ; l’autre, en face de la porte d’entrée, offre le roi David qui vient de couper la tête à Goliath.
Le buffet d’orgue commencé, dit-on, sous Henri II, et fini sous Charles IX, est décoré de colonnes composites cannelées ; l’ensemble est plein d’harmonie ; le dessin en est pur, agréable, et ne ressemble guère à la manière détaillée de ce tems-là.
Dans la chapelle qui est à gauche, en entrant dans le cœur, est un tableau de Stella ; il représente l’éducation de la Vierge.
Le tableau qui est en face, offre Saint Louis, faisant l’aumône. Ce tableau est d’un bon maître, mais il est inconnu.
Le maître-autel est décoré de colonnes composites, dont les futs sont d’un très beau marbre noir, les bases et les chapiteaux de marbre blanc. Ces colonnes, d’une très grande proportion, ressemblent à celles dont le cardinal Mazarin fit présent aux Jacobins de la rue Saint-Jacques.
Le tableau du maître-autel représente la Cène. Il est peint par le Poussin ; nommer ce grand maître, c’est faire l’éloge de l’ouvrage. Ce beau tableau doit être transporté dans le Museum du Louvre.
Au-dessus de ce tableau, dans un attique, est un Sainte Trinité, peinte par Vouet ; aux [p. 232] deux côtés sont deux anges en stuc, grands comme nature, tenant les armes de France ; leurs attitudes est très gracieuse. On les regarde comme un des plus beaux ouvrages de Sarazin.
Dans la sacristie, on voit deux tableaux de moyenne grandeur, au milieu desquels est placé un crucifix d’ivoire. Celui qui est à gauche représente une Vierge donnant à tetter à son enfant ; un autre enfant souffle le feu d’un réchaud, sur lequel est placé un vase de bouillie. Les figures de la Vierge et de l’Enfant Jésus sont pleines de noblesse et de grâce ; tout est peint avec la plus grande vérité. C’est un ouvrage du Corrège.
Le tableau qui fait pendant est une mère de pitié. Cet ouvrage, plein d’expression, est d’Annibal Carrache.
Le Christ d’Ivoire est, dit-on, de Michel-Ange, quoique très-beau, on peut douter qu’il soit de ce grand maître.
Ces trois précieux morceaux ont été donnés par le cardinal Mazarin.
En sortant du château, on arrive au Boulingrin, pièce de gazon, ainsi nommée pour la première fois en France, par Henriette d’Angleterre, femme de Monsieur, frère de Louis XIV ; la terrasse qui l’avoisine est de la plus grande beauté ; la vue dont on y jouit est étonnante par son étendue et sa variété ; l’imagination ne peut rien enfanter de plus merveilleux.
De-là, on arrive à une autre terrasse, qui est peut-être la plus magnifique et la plus longue qu’il y ait au monde ; elle est l’ouvrage [p. 233] de Le Nostre, et a douze cents toises de longueur sur quinze de large ; d’un côté, la forêt de Saint-Germain l’ombrage dans toute son étendue ; de l’autre, une forêt qu’on voit presqu’en plan, la rivière de Seine, des campagnes, des châteaux, un lointain immense, offrent le tableau le plus agréable et le plus sublime.
Près de là est le jardin nommé de Madame la Dauphine, parce qu’elle s’y promenoit souvent.
Plusieurs rois et reines de France ont fait de longs séjours à Saint-Germain ; il fut même question d’y construire un palais propre à la résidence ordinaire des Rois ; mais on préféra, à la magnifique situation de Saint-Germain, le local sauvage de Versailles, et cette préférence est attribuée à la volonté particulière de Louis XIV.
On prétend que la vue du clocher de Saint-Denis épouvantoit l’âme de ce grand roi. Saint-Germain, en présentant sans cesse le terme de sa gloire et lieu de son tombeau, l’auroit maintenue dans des idées lugubres et affligeantes ; c’est pourquoi Saint-Germain ne fut point préféré.
Une autre foiblesse avoit été cause autrefois que Catherine de Médicis n’habitoit point ce beau séjour. Un devin lui avoit prédit qu’elle mourroit proche Saint-Germain, c’est pourquoi elle fuyoit cette ville avec le plus grand soin ; elle voulut habiter le Louvre, mais, se rappellant qu’il étoit de la paroisse [p. 234] de Saint-Germain-l’Auxerrois, elle abandonna les constructions qu’elle y avoit fait commencer.
Le terrein de la forêt de Saint-Germain est très sablonneux ; c’est ce qui fait que l’on peut y chasser en tout tems, et que le roi y vient ordinairement prendre ce plaisir pendant la mauvaise saison ; elle est une des plus belles du Royaume, et contient cinq mille sept cens quatorze arpens. »

Dulaure, Jacques-Antoine

Récit par Anna Francesca Cradock de sa visite à Saint-Germain-en-Laye

« [p. 22] À neuf heures, nous partions dans notre chaise de poste. Le beau temps n'a pas peu contribué à tout embellir sur notre chemin. Nous avons revu le pont de Neuilly. De là à Marly, c'est une suite de vignes, de vergers, de champs de blé, de luzerne, de jardins potagers cultivés avec un soin extrême. À Marly, nous vîmes la machine qui fait monter l'eau de la Seine jusqu'à l'aqueduc et alimente ainsi le parc de Marly et celui de Versailles éloigné de trois milles. Nous nous sommes promenés sur la plate-forme et avons admiré de magnifiques ormeaux.
De Marly au château de Saint-Germain, la vue est ravissante ; arrivés au château, nous y sommes montés aussitôt, et avons joui du paysage éclairé par un beau soleil. Après avoir vu, dans la chapelle, un tableau remarquable du Poussin, malheureusement très abîmé, nous descendîmes sur la terrasse. Le château, maintenant divisé en appartements, est tout en pierre ; les fenêtres seules sont encadrées de briques qui ajoutent à la gaieté et à l'élégance de la construction. Saint-Germain est une jolie ville, célèbre par sa salubrité. [p. 23] Nous dînames « Au Prince-de-Galles », et revînmes à Paris par une autre route. »

Cradock, Anna Francesca

Description par André du Chesne des châteaux de Saint-Germain-en-Laye

« [p. 274] Des chasteaux de Sainct Germain en Laye et du village de Nanterre
Saint Germain en Laye est aujourd’huy un lieu de plaisance pour nos roys le plus rare en beauté, le plus gracieux en sejour, et le plus abondant en toutes sortes de delices qui soit guere en France.
Ce lieu bien qu’il face quelque gloire de l’excellence de son antiquité, pour avoir emprunté le plus beau titre de son nom de ce tant celebre evesque d’Auxerre sainct Germain, lequel avec saint Loupe pasteur de Troye, passa en Angleterre pour arracher les espines de l’heresie, qui y suffoquoient les semences de la vraye religion ; si est qu’il n’a point veu son honneur tant relevé que depuis que nos rois y ont fait bastir.
Charles V jetta les premiers fondemens du vieil chasteau, lequel ayant esté pris des Anglois pendant la confusion où s’abimoit le royaume par le foible cerveau de Charles VI, se rendit depuis à Charles VI moyennant certaine somme d’argent, qui fut donnée au capitaine anglois qui le tenoit.
Je ne veux m’arrester ici à monstrer avecque ma baguette, je dis avecque ma plume, les terres, les galleries, les sales, les chambres, antichambres, [p. 275] les courts, les offices, le jeu de paulme, l’eglise, les vignes, les bois, les routes, les montagnes, les valons, les prez, la villette basse au pied ceinte de la riviere de Seine qui va lechant ses bords : je ne veux m’arrester à decrire la forest voisine des murailles de ce chasteau, couverte d’une fueille si espesse et si touffue, que le soleil en sa plus ardente chaleur ne la sçauroit transpercer. Forest où les poetes du temps passé eussent peu dire s’ils l’eussent veue, que c’estoit celle mesme où Pan, ce grand veneur, les faunes, satyres, dryades, hamadryades, et toutes les deitez forestieres avoient accoustumé de faire leur retraite. Forest, dis-je, riche d’un jeu de pail-mail, le long duquel y a des pavillons quarrez faits et massonnez expres pour reposer, ou pour recevoir l’assemblée des regardans. Seulement je veux dire que nos roys pendant l’honneur et la seureté de la paix ont presque tousjours choisy leur retraite en cette noble maison.
Et à la verité si jamais la majesté des Lis a honoré et reveré lieu de nostre France, je croy que ç’a esté ce chasteau, apres celuy de Fontainebleau, dont nous parlerons cy apres ; François premier s’y plaisoit fort à cause des longues et larges routes des bois voisins faites expres pour plus aysement et avec plus de plaisir courir le cerf à force, le sanglier et le chevreuil : mesme l’embellit de nouveaux edifices, et fit relever ce qui tomboit en ruine. Mais l’accomplissement et la perfection de son ornement, il le doit à nostre roy qui a rendu cette maison de ses predecesseurs vraiment royalle. Il a fait bastir un [p. 276] nouveau chasteau sur ceste croupe de montaigne pratiquée sur les flancs du rocher plus proche de la riviere, auquel il n’a rien espargné de ce qui pouvoit esclairer sa gloire et relever son honneur au plus haut point.
L’escalier, qui est à l’entrée, où sont gravées les images d’Hercule et d’un lyon, les fonteines, les petits ruisseaux frais et argentins qui coulent au fond des petits valons pour rafraichir les plantes et les fleurs des parterres, et compartimens des jardins, y sont admirables : mais sur tout cela les grottes, ausquelles il semble que les plus rares merveilles de la terre ayent resolu de suborner les sens, enyurer la raison, et peu à peu derober l’ame de ceux qui les regardent ou entendent, leur faisant perdre le sentiment, soit de l’œil, soit de l’ouye.
Les anciens avoient ignoré l’industrie de faire eslever et remontre les eaux plus haut que leur source, et nous et les nostres fussions demeurez en ceste ignorance, sans l’ingenieuse et hardie invention de Claude de Monconnis, president des Finances en la generalité de Lyon, qui le premier en a fait preuve avec admiration premierement aux fontaines de ce nouveau chasteau de Saint Germain en Laye, et depuis aux maisons du marechal de Rets à Noisy, et du premier president de Paris à Stim.
Par le moyen de cette eslevation, et à la faveur des secrets efforts de ces eaux remontantes, l’industrie humaine nous y fait voir aujourd’huy de belles et rares pieces dans les grottes tant hautes que basses. Et premierement quant aux hautes, [p. 277] elles sont si artistement pavées et encoustées partout de divers rancs de coquilles d’ouistres et de moules, que l’assemblée des regardans se sent plus tost mouillée qu’elle ne s’apperçoit d’où peut proceder l’accident. Dedans la premiere est une table de marbre, où par l’art d’un entonnoir s’eslevent en l’air des coupes, verres, et autres vaisseaux bien formez de la seule matiere de l’eau. Pres de là y a une nymphe eslevée à demy bosse, en face riante, belle et de bonne grace, qui laissant emporter ses doits au branle que luy donne l’eau fait jouer des orgues, je dis de ces instrumens organiques, qui furent premierement en usage aux eglises de France sous Louys le Debonnaire, fils de nostre grand Charles. Il y a un Mercure pres la fenestre, qui a un pied en l’air, et l’autre planté sur un apuy, sonnant et entonnant hautement une trompette. Le coucou s’y faict entendre et recognoistre à son chant.
Sortant de là pour entrer en l’autre partie se rencontre un fier dragon, lequel bat des aisles avecque grande vehemence, et vomist violemment de gros bouillons d’eau par la gueule. Dragon accompagné de divers petits oysillons, que vrayement l’on diroit non pas peints ou contrefais, mais vivans et branlans l’aile, qui font retentir l’air de mille sortes de ramages : et sur tous les rossignols y musiquent à l’enuy et à plusieurs cœurs.
On void de l’autre costé un bassin de fonteine enrichy de mille petits animaux marins, les uns en coque, les autres en escaille, les autres en peau, tous entortillez par le reply des vagues [p. 278] et des flots courbez et entassez l’un sur l’autre : et semble à voir ces troupes escaillées que ce soit un triomphe marin. Sur l’une des faces entre ces petits animaux, s’eslevent deux tritons par dessus les autres, qui embouchent leurs coques, tortillées et abouties en pointe, mouchetées de taches de couleur, aspres et grumeleuses en quelques endroits. Ils ont la queue de poisson large et ouverte sur le bas. Au son de ces coques s’avance un roy assis en majesté sur un char, couronné d’une couronne de joncs mollets meslez de grandes et larges fueilles qui se trouvent sur la greve de la mer. Il porte la barbe longue et herissée de couleur bleue, et semble qu’une infinité de ruisseaux distillent de ses moustaches allongées et cordonnées dessus ses levres, et de celles de ses chevaux. Il tient de la main dextre une fourche à trois pointes, de l’autre il guide et conduit ses chevaux marins galopans à bouche ouverte, ayans les pieds dechiquetez et decoupez menu, comme les nageoires de poissons : ils ont la queue entortillée comme serpens. Les routes de ce char sont faites de rames et d’avirons, assemblez pour fendre et couper la tourmente, et l’espaisseur des flots comme à coups de ciseau. De l’autre face sont des mareschaux en leurs habits de forgerons, la face noire de crasse et de suye, lesquels battent du fer sur une enclume à grands coups de marteau. Si c’estoient des cyclopes, je dirois qu’ils forgeroient des armes à nostre grand Henry, comme ils en sont forgé chez les poetes au vaillant Achille, et au pieux Enée. Et ce qui est de plus plaisant et qui semble fait pour faire rire, [p. 279] c’est que l’eau se lance à si gros bouillons contre ceux qui se tiennent aux fenestres, qu’en un moment ils sont tous mouillez.
Au dessous et un peu plus bas se void une autre grotte, que vous diriez d’un rocher ridé, caverneux, et calfeutré de mousse espaisse et delicate, comme s’il eus testé tapissé de quelque fin coton. Là vous voyez les bestes, les oyseaux, et les arbres s’approcher d’Orphée touchant les cordes de sa lyre, les bestes allonger les flancs et la teste, les oyseaux tremousser les aisles, et les arbres se mouvoir, pour entendre l’armonie de ce divin chantre. Là est un Bacchus assis sur un tonneau, tenant une coupe en main ; là sont des deesses admirables en forme de demy colosses, et plusieurs autres pieces merveilleuses, que je laisse pour la curiosité de ceux qui voudront en contenter leurs yeux.
Au lieu où le rocher est le plus haut, et tout devant le chasteau, vous remarquerez une belle et admirable fontaine, qui surgissant à gros bouillons se divise en plusieurs tuyaux, qui serpentent et arroussent non seulement les jardins, mais aussi fournissent d’eau à toutes ces petites merveilles artificielles.
Le roy faict encore travailler tous les jours à l’embellissement de ce chasteau, et poursuit ce qu’il a si richement commencé. La royne estant arrivée à Paris, il la mena à Saint Germain pour luy faire voir ses bastimens. Et monseigneur le dauphin, premier fils de la premiere couronne du monde, ayant veu la lumiere, il luy destina ceste maison pour sa premiere nourriture. Là les deputez [p. 280] du Dauphiné de tous les ordres du pays luy vinrent rendre les premiers devoirs de leur subjection, et le recognoistre pour souverain seigneur, par un bufet entier de vaisselle richement elabouré et embelli de diverses figures de dauphins.
A une lieue de ce chasteau, tirant vers la ville de Paris, nous avons un bois taillis, au milieu duquel y a un chemin passant, dont d’un costé prenez une branche, elle flotera sur l’eau, ainsi que tout autre bois, de l’autre prenez une autre branche, elle ira au dessouz de l’eau comme une pierre : et l’appelle le commun peuple pour ceste cause, le bois de la trahison ; disant que pour une trahison qui y avoit esté autrefois commise Dieu l’avoit voulu chastier de ceste façon. Quelques historiens tiennent que ce fut de ce Ganelon, qui trahit la maison des Ardennes, les pairs de France, et les plus belliqueux capitaines de Charlemaigne. Et void on encore dans ce bois une grande table de pierre, sur laquelle ils content que fut conceue et formée l’infortune de cette journée tant memorable de Roncevaux. »

Duchesne, André

Récit par Thomas Blaikie de son passage au château du Val à Saint-Germain-en-Laye

« Dimanche 14 went to St. Germain to deside a plantation for a vue from the Gardens of the Prince de Beauvau at Lavalle a House he has between St Germains and Maison ; those Gardens are Layd out under the Derections of Mr Robert one of the first Landskape painters in France yet however fine his ideas is upon canvas yet upon the ground they are without judgement as it is not astonishing he knows nothing of the effects of trees nor there color after a feu years’ growth ; his walks are much in the same confused crooked way and although all has been planted methodically according to the rules of painting yet the whole is real confusion ; this prooves that a great painter may not know how to take a vue to the best advantage when done but despossing of those plantations requires judgement and experience ; this Gardin stands upon a rising ground bordered on the one side by the forest of St Germains ; to the right side is a tolerable vue upon the Rever Seine. »

Blaikie, Thomas

Description par Thomas Nugent des châteaux de Saint-Germain-en-Laye

« [p. 135] S. Germains, commonly called S. Germains en Laye, is a small town of the isle of France, in the district of Mantois, situated on a high hill, at the foot of which runs the Seine, about twelve miles to the westward of Paris, and one from Versailles. It is remarkable for the royal castle or palace, which was begun by Charles V and enlarged and beautified by succeeding princes, but especially by Lewis XIV who was born here. The palace is built in the form of a castle, and [p. 136] surrounded with a dry ditch. A magnificent stone gallery runs round the middle of the whole structure, which is of an oval figure, and the roof is covered with thin flat free-stone instead of tiles. The chapel is remarkable for an excellent altar-piece, representing the Lord's Supper, by Poussin. The prospect from the castle is admirable, especially towards the river and the plains, having Paris, S. Denis, and Marli, within sight. There is a curious mall in this castle, with square pavilions built all along, for the conveniency of the players and spectators. Among the improvements made to this place by Lewis XIV he added the terrass of above three thousand paces in length, the grand parterre, and the valley-garden. There are abundance of dry grottos, which afford pleasant retreats in the summer, and several wet ones, with curious water-works, and artificial birds, which make an agreeable sound. In one of the grottos there is a virgin playing on the organs, whose eyes are so artificially moved, that she seems to be alive; in another place there is an Orpheus playing on the lute, and keeping time, while the beasts, birds, woods and rocks seem to follow him, with several representations of the like nature, all put into motion by water. The adjacent forest contains upwards of five thousand acres, and is cut through with an infinate number of large ridings, well replenished with game, which renders it a most agreeable situation for hunting. It was in this castle that the late king James resided with his court during his exile, and here he died in 1701. His body was afterwards interred in the monastery of the English Benedictins in Paris.
The town of S. Germains is well peopled, which is owing to the goodness of the air, and the privileges they enjoy. The houses are high [p. 137] and well built. There are some squares, with several hotels; among the rest, that of the duke of Noailles, which is neatly furnished, and has some handsome gardens. The town has only one parish, an hospital, and some convents, which are those of the Recollects, the Ursuline Nuns, and the bare-footed Augustinians, who live in the forest. »

Nugent, Thomas

Récit par Hester Lynch Thrale de son passage à Saint-Germain-en-Laye

« I should have mentioned seeing the Castle of St Germain in the Morning as the French it is plain thunk highly of it, and praise the Prospect from the Garden Terras as we praise Windsor. The manifest Inferiority charmed me, and to see the Man shewing off a Royal Pleasure Ground not twice as big as our own Kitchen Garden, with little trimmed Hedges and small Shrubberies which he called a Forest, [p. 90] was comical beyond Expression. »

Thrale, Hester Lynch

Description par Hébert des châteaux de Saint-Germain-en-Laye

« [p. 59] Germain en Laye (Château royal de), à quatre lieues de Paris, et à deux par-delà Versailles, sur une montagne bordée par la rivière de Seine, [p. 60] se divise en Château vieux, et en Château neuf.
Architecture.
Les Anglois ayant démoli le Château vieux bâti en forteresse par Louis VI, dans le douzième siècle, il a été rétabli dans le quatorzième par Charles V, et augmenté par François I, qui y a aussi fait faire une terrasse d'où l'on découvre un très vaste pays. Louis XIII y fit faire des embellissemens, et Louis XIV des augmentations fur les desseins de J. H. Mansart. La grande salle qui sert aux divertissemens, est une des plus grandes du Royaume. Henri IV commença à faire bâtir le Château neuf sur les desseins de Marchand, que Louis XIV fit continuer, en faisant faire une grande partie de la façade qui règne le long de la rivière, par J. H. Mansart, ainsi que les deux terrasses, et surtout la troisième qui, soutenue par une galerie percée d'arcades, forme par leur belle distribution le plus riche amphithéâtre qui soit au monde, tant par la situation du terrein, que par tout ce que l'art a pu tirer d'avantages du voisinage de la
Seine. André le Nôtre a aussi montré son habileté par la belle terrasse de 1200 toises de long sur 15 de large, terminée [p. 61] par le parc aux lièvres. Les deux jardins fur les côtés de ce Château, nommés, l'un, le Jardin de Madame la Dauphine, et l'autre le Boulingrin, ont chacun une terrasse, dont les vues en rendent la promenade très agréable. Le petit Parc percé de routes, et la Forêt de S. Germain, qui a vingt-cinq portes, contiennent ensemble plus de six mille arpens.
Peinture et sculpture.
La Cène, chef-d’œuvre du Poussin, sur l’autel de la Chapelle : au dessus, une sainte Trinité, par Simon Vouet, accompagnée de deux Anges de stuc, grands comme nature, tenant les Armes de France, par Sarazin. Dans la Sacristie, une Mère de pitié, et une Vierge et l'enfant Jésus.
Le plat-fond de la chambre à coucher du Roi est décoré de quatre tableaux allégoriques, peints par Simon Vouet, représentans le premier, la Victoire assise sur un faisceau d'armes ; le deuxième, une autre tenant une palme ; le troisième, la Renommée tenant une couronne de laurier ; et le quatrième, Venus essayant un dard. »

Hébert, ?

Description par Jean-Aymar Piganiol de La Force des châteaux de Saint-Germain-en-Laye

« [p. 444] Saint-Germain-en-Laye. Il y a un château qui est un des plus beaux séjours qui soit en France, tant pour la beauté de ses appartemens et de ses jardins, que par la forêt qui les joint. L’air y est fort sain, et on a remarqué que l’on y vit longtemps. Cette maison royale a été occupée dans ces derniers temps par le roi de la Grande-Bretagne et par la cour d’Angleterre. Le roi y logea le feu roi Jacques en 1689, lorsqu’après la dernière révolution d’Angleterre, il se vit obligé de se retirer en France, et ce prince y est mort saintement le 16 de septembre de l’an 1701. Son corps fut transporté à Paris, et mis en dépôt chez les bénédictins anglois, près le Val-de-Grâce. Marie Stuart, sa fille, et Joseph-Marie d’Est, sa femme, y sont mortes aussi, la première le 18 d’avril 1712, et la dernière le 7 de mai de l’an 1718.
[p. 445] Le roi Charles V fit jetter les premiers fondemens de ce château, l’an 1370. Il fut pris par les Anglois pendant les troules que causa dans le royaume la maladie du roi Charles VI. Le roi Charles VII le retira des mains d’un capitaine anglois, moyennant une somme d’argent, et Louis XI fit don à Coictier, son médecin, non seulement du château de Saint-Germain, mais encore de Trielle et de tout ce qu’on appelloit alors la châtellenie de Poissi, et les Patentes de cette donation furent expédiées au Plessis-lès-Tours au mois de septembre de l’an 1482.
Le gout que François premier avoit pour la chasse, lui en donna beaucoup pour le séjour de Saint-Germain. Il fit relever l’ancien bâtiment, et en fit construire de nouveaux. Henri IV fit bâtir le Château neuf sur la croupe de la montagne la plus proche de la rivière. Il étendit les jardins jusqu’aux bords de la Seine, et les fit soutenir par des terrasses élevées avec une dépense somptueuse. Le roi Louis XIII l’embellit de plusieurs ornemens, et enfin Louis XIV, qui y étoit né le 5 septembre de l’an 1638, fit ajouter au vieux château cinq gros pavillons qui en flanquent les encoignures. Il fit encore embellir les [p. 446] dehors. Le grand parterre, la grande terrasse, la maison et le jardin du Val, et quantité de routes qu’il fit percer dans la forêt, dont des ouvrages dont il a donné le dessein, et des magnificences de son règne.
La ville de Saint-Germain-en-Laye, Sanctus Germanus in Ledia silva, est à quatre lieues de Paris, et dans la même situation que le château. On croit qu’elle a pris son nom d’un monastère que le roi Robert y fit bâtir, il y a environ sept cens ans. Cette petite ville est fort peuplée, les maisons y sont hautes et bien bâties, les rues grandes et bien percées. Elle est encore ornée de plusieurs beaux hôtels, que différens seigneurs ont fait bâtir dans le temps que le roi y faisoit son séjour ordinaire. Il n’y a qu’une paroisse, et les couvens des Récollets et des Ursulines. Il y a une prévôté et une maîtrise des Eaux et Forêts, qui s’étend non seulement sur les forêts et bois de la châtellenie de Saint-Germain, mais encore sur les villes, ponts, terres et châtellenies de Poissi et Sainte-James, sur les bois de la châtellenie de Pontoise et des bailliages de Mantes et de Meulan.
L’aspect du château est admirable, [p. 447] principalement du côté de la rivière et des plaines. Son point de vue s’étend sur Paris, Saint-Denis, Marly, etc.
Le parc qui joint le château, est agréable, et son étendue est de trois cens cinquante arpens.
La forêt en contient cinq mille cinq cens cinquante, trente et une perche et trois quarts. Elle est percée de plusieurs belles et larges routes, pleines de toutes sortes de bêtes fauves, qui en font un lieu charmant pour la chasse. »

Piganiol de La Force, Jean-Aymar

Description par Antoine-Nicolas Dezallier d’Argenville des châteaux de Saint-Germain-en-Laye

« [p. 156] Le château de Saint Germain, situé à quatre lieues de Paris, est élevé sur une montagne, au pied de laquelle coule la rivière de Seine. Cette situation [p. 157] et la salubrité de l’air le rendent un des plus agréables séjours de la France. Il se distingue en Château vieux, et en Château neuf.
Le Château vieux, bâti par Louis VI comme une forteresse, ayant été ruiné par les Anglois, demeura en cet état jusqu’au règne de Charles V, qui le fit rétablir sur ses anciens fondemens : il a été ensuite augmenté d’un étage par François I. Le haut est entièrement couvert de dalles de pierre, et forme une terrasse d’où l’on jouit d’une très belle vue. Louis XIII fit plusieurs embellissemens à ce château, et sous le règne de Louis XIV, J. H. Mansard éleva les cinq gros pavillons qui en flanquent les encoignures.
La face sur les jardins est la plus grande des cinq faces de ce château. Elle renferme l’appartement du Roi, dégagé en dehors par un balcon de fer qui règne à l’entour. Cet appartement est démeublé, et n’offre rien de remarquable depuis que Sa Majesté ne fait plus de séjour à Saint Germain. Du côté du couchant est la grande salle servant aux bals, comédies et opéra ; elle passe pour une des plus spacieuses du royaume.
[p. 158] Du côté du midi est une belle chapelle dédiée à S. Jean-Baptiste. Le tableau d’autel représenté la Cène ; c’est un excellent ouvrage du Poussin. On voit au-dessus la Sainte-Trinité peinte par Vouet et accompagnée de deux anges de stuc, grands comme nature, placés à la hauteur du premier ordre, et tenant les armes de France. Ils sont dus à Sarazin. La croix, les chandeliers, les vases pour les fleurs, et la lampe sont de vermeil et d’un poids considérable : on les a volés deux fois. Le jubé est spacieux, et renferme un beau buffet d’orgues.
On conserve dans la sacristie deux moyens tableaux, l’un d’une Mère de pitié qui tient le corps de N. S., l’autre d’une Vierge donnant à manger à l’Enfant Jésus.
Le Château neuf commencé sous Henri IV par Guillaume Marchand, n’est éloigné du vieux que de deux cens toises. Son portail est décoré de colonnes toscanes, dont le fût est revêtu de bossages alternatifs ; elles forment un péristile, dont le dessus est une terrasse entourée de balustrades qui portent la devise de Henri IV.
Le plan de la cour est très ingénieux : [p. 159] des pilastres toscans en règlent l’architecture. Aux deux côtés de la salle des Gardes sont les grands appartemens : à droite est celui de la reine Marie de Médicis terminé par une galerie, et à gauche est celui du Roi. Au plafond de la chambre à coucher sont quatre tableaux de Vouet ; savoir, une Victoire assise sur un faisceau d’armes, une autre armée d’une palme, la Renommée tenant une couronne de laurier, et Vénus essayant un dard. Sur les côtés de ces appartemens sont les basse-cours pour les offices et logement des officiers. On y voyoit des volières remplies de toutes sortes d’oiseaux rares ; il n’y a plus que de paons.
En sortant de la grande salle à l’orient, on se trouve sur une terrasse de la même étendue que le palais, et terminée par deux galeries qui conduisent à deux pavillons. On descend de cette terrasse par deux rampes, dont le milieu est occupé par un morceau d’architecture d’ordre ionique et d’un très bon goût.
Deux autres rampes vous conduisent à la seconde terrasse. Le mur qui la soutient est percé d’arcades, dont le [p. 160] dessous fait une galerie couverte. Le milieu est d’ordre dorique et d’une belle proportion. Tous les murs des rampes sont ornés de chaînes de refend, avec des panneaux de brique en compartimens. Sous cette terrasse étoient les grottes de Neptune et de la Nymphe jouant des orgues, par le moyen des eaux qui faisoient mille effets surprenans.
On descend de cette deuxième terrasse sur une troisième. On y voyoit les grottes d’Orphée, de Persée, et celle dite des Flambeaux, parce qu’elle ne pouvoit être vue qu’aux lumières. Dans cette dernière étoit un grand théâtre avec différentes décorations plus agréables les unes que les autres. Toutes ces grottes étoient incrustées de coquillages et de pierres précieuses, et ornées de figures de marbre, de lustres et de girandoles. L’eau seule faisoit mouvoir des ressorts secrets qui donnoient du mouvement aux figures, et leur faisoient rendre des sons enchanteurs. Henri IV et Marie de Médicis n’avoient rien épargné pour la perfection de ces ouvrages. Ils avoient fait venir de Florence le célèbre Francine, habile dans les méchaniques [p. 161] et dans l’hydraulique. Ces magnifiques grottes ont subsisté jusque vers l’an 1643, tems de la minorité de Louis XIV. Les différens troubles qui l’agitèrent, firent négliger l’entretien des terrasses, sous la chute desquelles les machines ont été abimées.
Le mur qui soutient cette troisième terrasse, est percé d’arcades qui forment une galerie, dont le milieu est décoré d’un ordre toscan. Ainsi cet ordre sert de base aux deux autres, qui forment ensemble le plus bel amphithéâtre qui soit dans l’univers. Joignez à cela que la Seine roule ses eaux à ses pieds, comme pour rendre hommage à tant de beautés. Il y a de plus deux terrasses de plein pied, voûtées et terminées par deux pavillons carrés. Jules Hardouin-Mansart a élevé la plus grande partie de cette façade sous Louis XIV.
Sur les côtés du Château neuf il y avoit deux jardins auxquels les galeries communiquoient. A droite est le Boulingrin, ainsi nommé par Henriette d’Angleterre, première femme de Monsieur, frère de Louis XIV. On l’a ouvert plus qu’il n’étoit alors, pour découvrir la vue de Marly qui n’existoit [p. 162] point encore. La terrasse régnant dans toute la longueur, est une de ses principales beautés, et la vue qu’on y découvre en rend la promenade des plus agréables. L’autre jardin du côté du parc, nommé de madame la Dauphine, parce qu’elle s’y promenoit fort souvent, est soutenu d’une terrasse pareille à celle du boulingrin. A côté de ce jardin, à la gauche du château, il y a une orangerie.
Il ne reste plus à voir que la grande terrasse, qui est en même tems un monument et de la magnificence de Louis XIV, et du mérite de Le Nostre. Elle a 1200 toises de long sur 15 de large ; son mur est solidement bâti, avec un beau bastion qui la termine au Parc aux lièvres. Il y a vers son milieu une demi-lune, plantée d’ormes et de charmilles.
Le petit Parc, contigu aux jardins et à la grande terrasse, contient 416 arpens, et est percé de routes.
La forêt de Saint Germain, une des plus belles du royaume, a 5714 arpens, suivant l’arpentage fait en 1686. On l’a nommée la forêt de Laye à cause de la quantité de sangliers qui l’habitoient. Comme son terrein est sablonneux, [p. 163] on peut y chasser en tous tems ; ce qui fait que le roi y prend le divertissement de la chasse dans les plus mauvaises saisons. Il y a vingt-cinq portes aux passages des grands chemins.
Le château du Val est un petit bâtiment situé à une des extrémités du petit Parc, au bout de la grande terrasse. Ce n’étoit autrefois qu’un simple pavillon où les rois faisoient quelquefois des retours de chasse ; mais Louis XIV l’a fait rebâtir d’un autre goût par J. H. Mansard. Il y a au milieu du bâtiment un grand salon carré et voûté en dôme : ce salon sépare deux appartemens bas, fort commodes pour toutes les saisons, y ayant des poêles placés dans l’épaisseur des murs qui échauffent plusieurs chambres à la fois.
Le monastère des Loges est aussi enclavé dans la forêt. Il est au bout de la grande route en face du Château vieux, dont il termine le point de vue. La reine Anne d’Autriche y fit faire un petit pavillon où elle alloit fort souvent, étant à S. Germain.
L’hôtel de Noailles, appartenant à M. le duc d’Ayen, mérite la visite [p. 164] du voyageur. Le bâtiment élevé par J. H. Mansard se présente à gauche en entrant, avec un vestibule formé de colonnes doriques. On voit au raiz de chaussée une galerie ornée de seize tableaux de moyenne grandeur, peints par Parrocel d’Avignon, et représentant l’histoire de Tobie.
Les jardins sont grands et plantés avec goût. Il y en a un pour les plantes médicinales, avec une serre chaude, et une fleuriste orné de deux théâtres et terminé par la serre des orangers. »

Dezallier d’Argenville, Antoine-Nicolas

Récit par David Garrick de son passage à Saint-Germain-en-Laye

« [p. 102] The town of St. Germain-en-Laye had boasted a royal castle since the time of Louis le Gros. The first fortress [p. 103] was destroyed during the wars with England, and Charles V began the present structure, which has been enlarged and beautified by succeding princes, especially by Louis XIV who was born here.
The palace has the form of a castle, surrounded by a dry ditch. A magnificent stone gallery runs around the middle of the whole structure, which is of an oval figure. The view towards river and plains is admirable – Paris, St. Denis and Marly are all in sight. »

Garrick, David

Récit par Georg von Fürst de sa visite à Saint-Germain-en-Laye

« [p. 207] Zu einer andern Zeit ritten wir nach S. Germain en Laye, welches auch ein Königliches Lust Schloß ist, und 6 Meilen von Pariß lieget. Es sind allhier 2 Königliche Häuser, welche beide auf einem Berge erbauet seyn. Das alte ist ein groß Gebäude, so meistens von Ziegelsteinen aufgeführet. Es hat ein ovales Ansehen, und macht eine wunderliche Figur. In drei Ecken des Hoffes stehen hohe Thürme, in welchen man biß oben auf das Dach steigen kan. Auf dem Dache liegen grosse steinerne Platten, welche so geleget seyn, daß das Wasser darauf abschießt. Und auf den Seiten befinden sich schöne Seulen, welche das ganze Gebäude umgeben, und einen vortreflichen Altan machen. Man kan sich weit und breit darauf umsehen, und ein groß Stücke Landes [p. 208] betrachten. Gegen Mitternacht ist ein Lust-Garten welcher mit schönen Quartieren und Gängen ausgeziehret ist. Nächst daran stößt ein dicker Wald, oder Thier Garten, welcher etliche Meilen groß ist, und rings herum mit einer Mauer umgeben. Man nennet diesen Wald das Holz der Verrätherey. In einer Ecken stehet ein steinerner Tisch, daran ehemahls diejenigen gesessen, welche eine gro Verrätherey angerichtet, und sich deswegen einander verschworen haben. Von diesem Holße ist merkwürdig, daß es von der Zeit an teine Früchte getragen. Wenn man einen Ast von einem Baume abschneidet, so verdorret er, und bringt keine Blätter mehr hervor. Der Ast selbst zu Grunde, wie ein Stein, wo er in die vorbeyflüßende Seine geworffen wird. Man meynet, daß Gott dadurch feinen Zorn anzeige, welchen er gegen die Verräther gefasset, die an diesem Orte ihre Gottlosigkeit beschlossen haben. Das neue Hauß liegt ohngefehr 200. Schritte von dem alten, und ganz an der Ecke des Berges. Es ist zwar nicht so weitläufftig, hoch und groß, als das vorige, aber viel schöner, ordentlicher und künstlicher gebauet. Man kan aus einem Zimmer in das andere gehen. Das ganze Gebäude ist gleichsam in zwei Quartiere eingerheilet, eins vor den König, und das andere vor die Königin. Wie denn auch auf beyden Seiten die Zimmer einerley seyn. Bey diesem Berge ist ein schöner Platz zusehen wo auf beyden Seiten vortreffliche Grotten gemachet seyn. In der esten funden wir einen runten Tisch von schwarzen [p. 209] Marmor, welcher in der Mitten ein Röhrgen hatte. Auf daßelbe steckte der Kunst Meister unterschiedne Instrumente, durch welche das Wasser auf unterschiedne Weise sprunge. Insonderheit gefiel uns eine Art wohl, da das Wasser eine Gestalt vorstellete, als wenn man ein Kelch Glaß von dem schönsten Christall sähe An der Wand faß eine Nymphe, welche auf der Orgel schlug, und das Haupt darzu bewegte. Mercurius aber stund bey dem Fenster auf einem Fusse, und machte ein lustiges Stückgen mit seiner Trompete. Auf der andern Seite sahe man einen Guckug, welcher auf einem Baume saß, und seine Stimme so natürlich hören ließ, als wenn er lebendig wäre. In der andern Grotte wurden wir einen Drachen gewahr, welcher aus seiner Klufft hervor kam. Er schlug mit seinen Flügeln um sich, regte den Kopf, streckte ihn hoch in die Höhe, und spiehe viel Wasser von sich Um ihn befanden sich viel Vögel, welche ihre Stimmen erhuben, und eine angenehme Mufique machten. An der andern Seite stund ein großer Trog, welcher von Muscheln und Meersteinen sehr künstlich verfertiget war. Neptunus kam auf einem Wagen hinein gefahren, welcher von zwei Meerwundern aus einer Klufft gezogen wurde. Es regte sich alles, als wenn es lebendig wäre. Wie er sich nun in dem Troge mit seinem Wagen umgewendet hatte, so fuhr er wieder in seine Klufft hinunter. Von diesem Orte giengen wir auf einen andern Platz, wo wir ebenfalls schöne Grotten antraffen. In der ersten sahen wir auch einen grossen Trog, welcher [p. 210] mit Wasser ganz angefüllet war. Wie wir hinzukamen, so war nichts darinnen zu finden. Bald aber regte sich allmehlich ein großer Drache. Er kam aus dem Wasser hervor, breitete die Flügel aus, hub den Kopf in die Höhe, und verursachte ein wunderlich Geräusche. Endlich spiehe er viel Wasser von sich, daß wir uns kaum retiriren konten. Auf der andern Seite stund ein Berg, daran sich Wind und Wasser Mühlen befanden, die ordentlicher Weise herum giengen. Dabey sahe man allerley Handwercks Leute, welche anfiengen zu arbeiten, und sich an allen Orten bewegten. An dem äussersten Ende der Grotte saß Orpheus mit seiner Leyer und um ihn stunden viel Thiere und Vögel So bald er nun anfieng zu leyern, sogleich wurde auch alles rege, und sprung um ihn herum. In allen diesen Grotten muß man sich wohl in acht nehmen, wenn man nicht will bade naß werden. Denn ehe man sichs vermuthet, so springet das Wasser aus der Erden, aus den Wänden, und auch aus der Decke. Es ist lustig anzusehen, wenn es uns nur nicht selber betrifft. Hier hielt sich der König in Engelland, Jacob der II. auf, und beweinte mit seiner Gemahlin die grosse Thorheit, welche er in Engelland begangen. Sein Vater, Carl der I. vergriff sich an dem ersten Grund Gesetze und wollte aus eigner Macht dem Volcke Contributionen aufflegen. Darüber verlohr er sein Königreich, und auch seinen Kopff darzu. Hieran hätte sich sein Sohn spiegeln sollen, und desto behutsamer regieren. Allein er griff das andere Grund [p. 211] Gesetze an, und wolte neue Gesetze machen, ohne das Parlament darum zu befragen. Hierüber büßte er seine drey Kronen ein, und muß allhier das Gnaden Brod essen. Doch was können nicht die Papistischen Rathgeber anrichten, wenn sie einen Regenten überreden wollen, daß er wider alle Grund Gesetze handeln, und seine Evangelische Unterthanen mit Gewalt zum Pabstthum zwingen dürffe. »

Fürst, Georg (von)

Récit par Virginio Orsini de son passage à Saint-Germain-en-Laye

« Je suis passé ensuite à Saint-Germain et j’ai admiré surtout la beauté du site. J’[y] ai trouvé Francini, encore abbé de nom, mais je promets à Votre Altesse qu’il a fait et fera des choses galantes. On ne peut nier qu’il ne cherche à imiter Pratolino, mais il le fait avec tant de grâce qu’on peut lui pardonner. »

Orsini, Virginio

Commentaires de Joachim Christoph Nemeitz sur les châteaux de Saint-Germain-en-Laye

« [p. 562] Saint Germain, surnommé en Laie, n’est pas loin de Marli, c’est le château de plaisance où Louis XIV vit le premier jour de sa vie en l’an 1628. Le roi Charles V en fit jetter les premies fondemens l’an 1270. François I fit relever l’ancien bâtiment, et en fit [p. 563] construire de nouveaux, et Louis XIV a fait ajouter au vieux château 5 gros pavillons. Mais Henri IV a fait bâtir le Château neuf qui est sur la croupe de la Montagne, plus proche de la rivière. Il est environné d’un païsage fort divertissant et un peu élevé ; quoiqu’il soit bâti à l’antique, comme on le peut remarquer encore aux allées obscures et étroites, qui sont dans le château, et à la chapelle. Le toit est couvert en partie de plomb ; en partie de gros carreaux, en façon de platte forme, de sorte qu’on se peut promener là-dessus. Saint Germain fut ci-devant la résidence de feu le roi d’Angleterre Jacques II et de sa famille. Feue la reine douairière, son épouse, y a passé le reste de ses jours, et le prétendu prince de Galles, son fils, y a fait son séjour ordinaire, lorsqu’il étoit en France, savoir tant qu’on l’y reconnoissoit pour roi d’Angleterre. La dite reine demeuroit pour la plûpart du tems au couvent de Chaillot, qui n’en est pas loin, où elle faisoit sa dévotion, parce que le cœur de [p. 563] son mari est en dépôt dans cette église. Le corps du dit roi est couché dans un cercueil revêtu de velours noirs, et placé dans l’église du couvent aux bénédictins anglois au fauxbourg Saint Jâques à Paris, où la princesse sa fille repose dans un cercueil de la même façon, à coté de son père. Ce château de plaisance n’est pas trop spacieux, de sorte qu’on le peut parcourir en peu de tems. L’on y voit encore quelques chambres et apartemens, et dans le parc les fontaines et statues. Mais qu’on ne s’arrête pas longtemps dans les auberges qui sont aux environs de ce château, autrement cette race vous vuidera tout net, parce qu’ils sont affamez au gain, faute de pratique. D’ailleurs on peut bien voir ce château, avec celui de Marli et la Machine, en un seul voiage. »

Nemeitz, Joachim Christoph

Récit par Niccolò Madrisio de sa visite à Saint-Germain-en-Laye

« [p. 324] Il luogo insigne per le fasce di Lodovico Decimo quarto è San Germano detto in Laja dalla vicinanza d’una selva di questo nome, principiato gia da Carlo Quinto, proseguito poi dagl’Inglesi, che ne furono qualche tempo Padroni, posto tra Parigi, d’onde è discosto qualche dodici miglia, e Poissi picciola città natalizia di San Luigi, e famosa per la conferenza seguita tra i Cattolici, e i Protestanti di Francia alla presenza di Carlo Nono, e di Catterina de’ Medici all’ora Reggente ne’ primi torbidi, che successer colà della Religione. A riguardo dell’onore, che ha avuto il Castello di San Germano di veder nascer Lodovico XIV, vi si recita ogn’anno li 5 Settembre nella Regia Capella un Panegirico in lode di Sua Maestà, de’quali se n’avra una seria omai di settanta, non essendo, come ben si può credere, tutti d’ugual bellezza, ne tutti corrispondenti al grand’ argomento, che trattano. Francesco Primo, che si dilettava oltra modo di caccie, ristabili in grazia delle medesime con qualche mutazione il vecchio Castello qual ora si vede girar attorno il Cortile in forma della lettera D, figura, ch’egli li fece dare per alluder al nom d’una Dama da lui amata, il quale principiava in tal lettera. Il nuovo Palagio fu fatto fabbricar [p. 325] da Enrico Quarto ; le sei Galerie, le numerose scale, le grotte sotterranee, i compartimenti del Giardino, o più tosto de’ vari Giardini, che s’incontrano nella discesa da quell’erto Colle sono opera di Lodovico Decimo Terzo, al che tutto il Monarca presente ha dati poi quegli ultimi delicati abbellimenti, c’han reso altre volte San Germano il più celebre di tutti i luoghi Reali. La Natura vi ha contribuito tutto per far il sito amenissimo, la vista aggradevole, e piena di tutti gl’immaginabili privilegi. In un gran tratto di paese, che di piena vaghezza si domina da quell’altezza veramente straordinaria, vi si scopre assai bene così lontano, ch’egl’è, lo stesso Parigi. Ciascuno de’ Giardini, e delle grotte accennate teneva già qualche giuoco curioso d’acqua con varie figure, che si moveano, le quali all’ora faceano una gran parte di queste delizie. Nella grotta, che ancora porta il nome da lui, v’era un’ Orfeo, che nell aprirsi dell’acqua suonava delicatamente la lira accorrendo da vari siti molte sorti d’animali ad udirlo : Diverse altre statue rappresentanti il Re, il Delfino, et la Corte s movevano a veder lo spettacolo, e gli arbori si piegavano alla loro comparsa. Vi era in altra Grotta un Perseo, che volava per aria a liberar Andromeda, ed un Dragone levatosi dibatteva strepitosamente le ali vomitando dalla bocca un gran fonte, attorno il quale molti Rosignoli, e Canarini disposti negli alberi facean la melodia, ch’è lor propria. Sorpasserò [p. 326] un popolo d’altre figure minori che bello stesso tempo maneggiavano ogn’altra sorta di musicali strumenti, e rappresentavano tutti i mestieri dell’arti correndo une spesa si grande nel mantenimento di tante macchine, e giuochi, che dicono che rottasi una volta una corda al violino d’Orfeo non costasse a Lodovico XIII meno di 300 scudi il rimetterla. V’avean pure delle Grotte asciutte, che col mezzo di certo moto secreto dell’acque producevano un venticello freschissimo, il quale in oltre animava Organi, e simili strumenti pneumatici. V’eran molt’altri ingegnosi scherzi non men d’acqua, che d’aria, i quali seccatisi i fonti dopo che il Re ha fermate le sue applicazioni a Versaglie, si son tutti guastati, rimasi inselvatichiti i Giardini della discesa suddetta, e sepolte nell’erba tutte quelle logge, e quelle, altre volte si magnifiche scale in guisa che sono divenute impraticabili, e mettono una formal compassione. Quando io fui colà vi latrava in quelle Galerie una Mandra di cani, che il Re Giacomo d’Inghilterra vi tenea rinserrati per uso delle sue caccie. Il vecchio Castello solo serviva all’abitazione di questo Re, e della sua Corte, come pure per di lui servigio si teneva aggiustata, e culta l’unica parte del Giardino superiore in cima del Colle, e s’era anzi accresciuta di non peche bellezze. San Germano all’ora, ciò che differ gli Storici del Palagio di Teodofico, si potea chiamar un rigido Monastero, ed una vera scuola morale nel soggiorno di [p. 327] quest’ esule coronato, e dell’ incomparabil Maria d’Este sua Moglie non solo perchè rappresentava la maggio peripezia di fortuna, che si sia mai veduta ai di nostri, ma anco per le tante virtù Cristiane, ed Eroiche, nelle quali ambidue incessantemente s’impiegavano avendo destinato per ciascun giorno della settimana qualche particolar esercizio della loro esemplarissima Divozione. »

Madrisio, Niccolò

Description dans Les délices de la France des châteaux de Saint-Germain-en-Laye

« [p. 356] S. Germain
Je ne prétends pas mettre icy, ny qui est le fondateur de ce lieu de plaisance, ny le motif qui a obligé Charles V, dit le Sage, qui a esté le I qui y a bâti, de faire icy une si superbe maison ; mon dessein n’est autre que de faire en peu de mots la description d’un si beau palais. Je dis donc en I lieu, qu’on conte jusques à 63 chambres dans ses corps de logis, dont les ornemens et les meubles surpassent tout ce que Rome pourroit avoir de plus superbe et de plus riche dans ses maisons. Il y a un jeu de mail, le long duquel sont des pavillons quarrés faits exprès pour la commodité des joueurs et des assistans, et on voit au dessus les grôtes et l’endroit où l’on tient les bêtes rares et curieuses. Il y a un quartier de ce beau bâtiment, fait par Henry IV, dans lequel il y a une gallerie avec cet emblème : Duo protegit unus ; c’est à dire, qu’un seul roy gouverne deux royaumes ; sçavoir celuy de France et de Navarre. On voit sur la porte le château de Fontaine Belle-eau, et à côté les villes qui suivent Hux, Veniez, Prague, Namur, Mantoue, Adem en Arabie, Compiègne, Sion en Suisse, Moly, Tingis, Stafin en Afrique, Terracine, Ormus en Perse, Bellitri, Werderberg en Westphalie, Nimegue avec cette inscription, ville du fondateur de l’Empire : parce que Charlemagne la fit impériale, Passauv, Mastricht, Thessala ou Tempe et Florence. Deux beaux degrés de pierre de taille d’une structure admirable, servent à cette [p. 357] illustre maison pour voir ses riches appartemens, et pour descendre dans les plus beaux jardins qui soient en Europe. La I chose qui se présente à la veue, à côté de la maison, est un bois taillis, au milieu duquel il y a une grande table, laquelle est cause qu’on appelle ce même bois, le bois de trahison : parce qu’on convint de l’exécuter en ce lieu. La 2 chose qui mérite d’être veue, ce sont les grôtes, que j’estime les plus belles qu’on puisse jamais voir ; quoy qu’en disent les Italiens, et Messieurs du Bruxelles, et qui sans contredit passent pour telles dans le sentiment des étrangers. Vous devés sçavoir qu’il y en a de deux sortes, les unes qui sont sèches, et les autres qui sont humides ; pour ce qui regarde les premières, je n’en diray rien, parce qu’elles ne servent qu’à donner du frais en esté : mais je m’attacheray aux dernières comme étant admirables. Voicy ce qu’il y a de plus rare et de plus merveilleux. La I de ces grôtes a un dragon qui hause la queue et remue ses ailes, vomissant de l’eau en abondance, tandis que les rossignols et les cocus artificiels, qui sont à l’entour, font entendre leurs fredons et leurs ramages avec une mélodie admirable. On voit aussi à costé deux statues de marbre noir, qui sont très agréables, lesquelles jettent aussi une grande quantité d’eau.
La 2 fait voir un serpent sur la porte qui jette de l’eau, et beaucoup de rossignols aux environs qui gazouillent à ravir : mais surtout une belle fille qui joue admirablement bien des orgues, et qui cependant tourne les yeux d’un côté et d’autre avec tant d’agréement que les assistans [p. 358] ont de la peine de discerner, si c’est un effet de la nature ou de l’art. Il y a une belle table de marbre noir, du milieu de laquelle sort un tuyau qui jette de l’eau de plusieurs façons et en diverses figures. C’est icy où l’on voit beaucoup d’autres curiosités merveilleuses dont je ne fais pas de mention, pour faire remarquer une table de beau marbre de diverses couleurs, qui est près de la fenêtre, les miriors, les coquillages, &c mais surtout un dauphin très bien représenté, lesquelles choses sont toutes admirables. Je prie le curieux de prendre garde à soy quand il entrera icy ; parce qu’autrement il pourroit y être attrapé.
La 3 expose un Neptune avec un globe couronné, lequel est porté par les eaux, dont les goûtes représentent les Perles et les Diamants. Il y a aussi la fournaise de Vulcain, des moulins à papier, des rossignols qui fredonnent, deux anges à côté qui jouent de la trompette, et qui ouvrent la porte du côté où leur trompette résonne, et un Neptune armé de son trident, assis sur un char de trionfe, tiré par deux chevaux blancs, qui sort d’une caverne, lequel après s’être un peu arrêté, rebrousse chemin, et r’entre dans le même endroit d’où il est sorty, faisant entendre un bruit extraordinaire de trompettes et de cors. Il y a encore un banc qui semble être mis expressément en ce lieu pour ceux qui veulent se reposer : mais ce n’est que pour attraper les personnes, et afin de les faire bien mouiller quand ils ne sçavent pas conduire le clou qui est au dessous : que si on a cette adresse, on se préserve : [p. 359] mais aussi on verra à même temps que le pavé donnera mille petits jets d’eau qui sont imperceptibles, et lesquels mouillent les assistans dans un moment.
La 4 (qui est sans contredit la plus belle de toutes) a une entrée tout à fait difficile ; parce qu’un regorgement d’eau en interdit le passage quand on n’y met pas ordre. On n’y est pas si-tost entré, qu’on y voit paroître un Orphée jouant de sa lire et remuant sa tête et son corps, selon la cadence de son instrument, lequel ravit en admiration tous les assistans : mais ce qui est encore plus surprenant c’est de voir un assemblage de toute sorte de bêtes qui le suivent, enchantées des doux accords de sa lire, et une infinité d’oyseaux, qui chantent ; des rochers, des arbres et des plantes qui s’inclinent devant luy pour luy marquer son respect. On y voit encore les 12 figures du Zodiaque qui roulent et font leur cours avec une armonie merveilleuse. Il y a en outre un Bachus, qui est assis sur son throne, tenant un verre en main, et on y a enfin si bien représenté le Paradis, l’Enfer, la mer, des navires de guerre, les IV éléments, le château de St. Germain, le roy, les princes et sa cour qui voguent d’un autre côté sur l’eau, qu’il est impossible de le croire. Mr. le Dauphin paroît aussi avec des Anges qui decendent du Ciel. Cet ouvrage est si bien fait, qu’on l’estime un miracle de l’art. On y remarque encore un Neptune, un Mercure, un Jupiter, et beaucoup d’autres belles choses qui surpassent infiniment l’attente et la croiance des hommes : on y voit surtout la [p. 360] représentation des 4 vertus cardinales, de marbre blanc, qui ont appartenu autrefois aux PP. jesuistes. Enfin il y a une chose remarquable dans ce lieu, c’est que tout y est miraculeux et capable de ravir toute la nature : de quoy il ne faut pas s’estonner ; puisque c’est une maison destinée pour les délices du plus grand roy de l’Europe, sans en excepter pas un. Je me souviens qu’il y a près de cette belle maison un bois dont j’ai desjà parlé, qui s’appelle le bois de la trahison, au milieu duquel il y a un chemin, dont les arbres d’un côté s’enfoncent dans l’eau comme une pièce de fer quand on la jette dans la Seine, tandis que les autres qu’on a pris de l’autre côté du chemin nagent comme du liège sur l’eau, ce qui est un prodige étonnant. On dit bien davantage, que les arbres ne reviennent jamais plus quand on les a une fois coupés, par une espère de malédiction, à cause que Ganellon sieur de Hauteville, dont le nom est odieux à toute la France, convint icy avec ses détestables associés, de faire mourir les Messieurs d’Ardennes, et les ducs et pairs du royaume : ce qu’ils exécutèrent cruellement du temps de Charles-magne lequel les fit brûler dans ce même lieu. »

Description par Johannes Pakenius des châteaux de Saint-Germain-en-Laye

« Necdum abibamus Urbe ; et tamen abibamus qot hebdomadis in viciniam, Regiis Ducalibusq ; aedificiis circum septam. Nunc ad S. Germanum oppidum ab arce Regoa, salubri aere et amoeno in monte situ juxta Sequanam nobile. Fundator arcis Carolus V. Franciscus I restaurator : Henricus IV augmentator. Fabrica ex latere cocto passim F.F.F.F. signata : conclavia sexaginta tria. Porticus symbolo Henrici IV conscripta, duo protegit unus, unus scilicet Henricus duo Regna Gall. et Nav. Regium ad portam sacellum : area ovalis : hanc prope duorum milliarum vivarium. »

Pakenius, Johannes

Récit de la venue de Bernin à Saint-Germain-en-Laye

« [p. 15] M. Colbert est venu le lendemain, jour de la Fête-Dieu, prendre le Cavalier, comme il l'avait dit. Les seigneurs Paule et Mathie, l'abbé Butti et moi sommes entrés dans son carrosse. Il y avait un carrosse de la suite du Roi pour les gens du Cavalier. L’on est arrivé à Saint-Germain à neuf heures du matin. M. Colbert a été descendre chez lui, au vieux château, et y a été quelque temps avec le Cavalier, puis il l'a mené au château neuf, où est le logement de S. M. et des Reines. En entrant dans l'antichambre, l'on a appris que le Roi n'était pas encore habillé. M. Colbert est entré dans la chambre, et, après en être ressorti, il nous a fait faire le tour et a mené le Cavalier dans le cabinet de S. M., où étaient MM. les maréchaux de Gramont, du Plessis et autres personnes de haute qualité. Là, il s'est entretenu avec eux. Le Roi étant tout habillé, M. Colbert a fait entrer le Cavalier dans la chambre, et lui a fait saluer S. M., qui s'était mise à la croisée d'une fenêtre, avec le premier gentilhomme de sa chambre et le maître de la garde-robe. Le maréchal de Gramont y était aussi. Le Cavalier a fait son compliment au Roi avec une honnête hardiesse, et a dit à S. M., comme il avait fait à M. Colbert, les sujets qui l'avaient principalement engagé de venir en France. Après, venant au sujet du bâtiment du Louvre : « J'ai vu, Sire, a-t-il dit à S. M., les palais des empereurs et des papes, ceux des princes souverains qui se sont trouvés sur la route de Rome à Paris, mais il faut faire pour un roi de France, un roi d'aujourd'hui, de plus grandes et magnifiques choses que tout cela. » Puis, se tournant vers ceux qui faisaient cercle autour du Roi, il a ajouté : « Qu'on ne me parle de rien qui soit petit. » A cela, le Roi a pris la parole et a dit qu'il avait quelque affection de conserver ce qu’avaient fait ses prédécesseurs, mais que si pourtant l'on ne pouvait rien faire de [p. 16] grand sans abattre leur ouvrage, qu'il le lui abandonnait ; que pour l'argent il ne l'épargnerait pas. S. M. ensuite lui a fait toute sorte de bon accueil. Puis M. Colbert l'a ramené au vieux château. L'on avait tendu dans les cours les tapisseries de la couronne pour la procession du Saint-Sacrement (car c'était le jour de la Fête-Dieu) celle des Actes des Apôtres, les Triomphes de Scipion et les autres du dessin de Jules Romain. Après que le Cavalier les a eu considérées et trouvées fort belles, il m'a prié de le mener à la chapelle, où il est demeuré longtemps en prière, et, après la cérémonie, il a diné au chambellan avec M. Colbert et nous autres aussi. Il s'est, au sortir de table, allé reposer à la mode d'Italie, dans l'appartement de M. de Bellefonds. Sur le soir, M. Colbert l’aramené à Paris. »

Fréart de Chantelou, Paul

Récit par Sebastiano Locatelli de sa visite au château de Saint-Germain-en-Laye

« [p. 169] Devant aller à Saint-Germain où était la Cour, je priai le Seigneur Abbé Louis Vigarani, chanoine de la cathédrale de Reggio en Lombardie et frère du Seigneur Charles, grand architecte de Sa Majesté, qui logeait à la Cour, d'avoir la bonté de m'accompagner, afin qu'il me fût plus facile de voir toutes les beautés du château et surtout du jardin de Sa Majesté. Il y consentit ; nous arrivâmes à Saint-Germain vers les vingt-deux heures, car nous étions partis tard et à pied, et il fallut bien trotter. Dès les premiers moments, nous sentîmes le parfait accord de nos caractères : aussi causâmes-nous toujours, et fîmes-nous avec plaisir et sans nous en apercevoir cette route de cinq lieues bien longues, tantôt en plaine, tantôt entre de petites collines délicieuses.
Saint-Germain-en-Laye est une fort belle petite ville à cinq [p. 170] lieues de Paris. Charles V et François Ier, attirés par les belles chasses des environs, firent reconstruire le château, et entourer la vaste forêt d’une chaîne de fer pour empêcher les bestiaux d'y pénétrer. Dans un coin de cette forêt se voit encore une grande table de marbre d’un seul morceau, près de laquelle on complota autrefois de trahir le Roi ; c'est là l'origine du nom de cette partie de la forêt. Louis XIII ajouta au château un très bel appartement accompagné de six galeries et de deux grandes ailes avec des portiques, pour servir de quartier aux gardes pendant le séjour de la Cour qui passe à Saint-Germain environ trois mois par an pour jouir du bon air. Ce que
je trouve de plus beau est le jardin. Nous demandâmes au concierge, M. de Queri, à le voir; mais comme le Roi s'y trouvait, il répondit qu'il ne savait comment faire pour nous le montrer, si nous n'avions le courage de revenir chez lui au point du jour, avant que personne de la Cour ne fût éveillé. Il fut entendu avec lui que nous viendrions à cette heure.
Étant logés au château, nous arrivâmes le lendemain plus tôt même qu'il n'aurait voulu, car il dut se lever pour nous introduire. Je parlerai des choses principales, et laisserai à l'imagination du lecteur le soin de se faire, d'après le peu [p. 171] que je dirai, une idée digne de ce jardin, le plus beau et le plus délicieux de tous ceux de ce genre appartenant à Sa Majesté. À un bon demi-mille du palais se trouvent cinq grottes souterraines renfermant diverses figures mises en mouvement par l'eau, et des oiseaux artificiels que le vent fait chanter Dans la première grotte, Orphée, en jouant de la lyre (mais toujours sur la même corde), fait sortir des animaux sauvages de toute espèce qui s'arrêtent autour de lui en poussant chacun son cri particulier. Les arbres, dont les rameaux forment comme un dais au-dessus de ces figures merveilleuses, s'inclinent en passant devant le Dieu ; puis vient le Roi tenant le Dauphin par la main, et tous les personnages s'inclinent devant Sa Majesté. Dans la seconde, une bergère chante par un fort bel artifice, en s'accompagnant de divers instruments, pendant que de nombreux oiseaux font entendre leur ramage accoutumé ; un rossignol de bois s'envole ensuite sur un arbre, et chante en battant des ailes et en ouvrant le bec si gracieusement qu'on le dirait vivant. Dans la troisième, on voit Persée frapper un monstre marin de son épée et délivrer Andromède ; les Tritons soufflent à grand bruit dans leurs conques, placent les amants sur deux chevaux marins et les emmènent. Dans la dernière, un dragon vomit des torrents d'eau en agitant la tête et les ailes ; Vulcain et Vénus se promènent sur cette eau dans une coquille argentée. Derrière cette grotte, il y en a une autre si fraîche en été qu’on y gèlerait, je crois, si on y restait une heure entière ; nous nous y arrêtâmes le temps [p. 172] d'un miséréré sans pouvoir supporter la rigueur du froid. Après nous avoir montré les grottes, et fait marcher devant nous toutes ces merveilles à l'aide de clés et de manœuvres secrètes, le valet du jardinier nous quitta. Le Seigneur Charles, bien qu'étant de la Cour, lui donna un franc.
En revenant par des galeries couvertes de verdure au moment où le soleil se levait, nous trouvâmes sous une tonnelle de laurier Mademoiselle de la Vallière la plus spirituelle de toutes les dames de Paris et devenue, grâce à son esprit, la favorite du Roi. Elle était en compagnie de quelques demoiselles et de cavaliers, occupée à se coiffer. A notre vue, elle resta aussi étonnée que nous, car elle croyait n'être surprise par personne, et attendait son Roi qui n'était pas loin. En nous apercevant, Sa Majesté qui se trouvait avec le Maréchal de [p. 173] Grammont, nous fit de la main signe de venir. Aussitôt l’Abbé, devenu plus pâle encore que moi, alla bien vite se jeter à ses pieds. Après avoir plié devant lui le genou suivant l'usage et baisé le bord de son bas, il se leva sur un signe de Sa Majesté, qui lui demanda comment il se trouvait là et qui était avec lui. Sa réponse entendue, le Roi me fit signe de venir aussi ; je m'approchai aussitôt, et après avoir imité mon compagnon que j’avais observé attentivement, je répondis de mon mieux en français aux questions de Sa Majesté. C'est en cette langue que je devrais rapporter notre dialogue, mais comme je ne pourrais y réussir, je l’écrirai en italien.
Le Roi. – D’où êtes-vous, Monsieur ?
Sébastien Locatelli. – De Bologne, pour servir Votre Majesté.
Le Roi. – Vous êtes d’un méchant pays.
S. L. – Comment ? Bologne n'est donc pas la mère des études, le palais des religieux, la patrie de nombreux saints, parmi lesquels on adore le corps incorruptible de sainte Catherine (à ce nom, Sa Majesté ôta son chapeau), aux pieds de laquelle Catherine de Médicis, Reine de France, déposa la couronne et le sceptre de son royaume ?
Le Roi. – C'est une chose difficile que vous entreprenez en voulant défendre un pays où les hommes sont les bouchers des autres hommes.
[p. 174] A ces mots, je restai muet et le visage couvert de rougeur. Le Roi nous tourna le dos en riant gracieusement. Ainsi congédiés, nous allâmes à la petite porte par laquelle nous étions entrés. Le concierge pensa mourir de chagrin en apprenant notre aventure. Il lui était expressément défendu de laisser entrer personne, afin que la Reine ne se doutât pas de la présence de sa rivale qui logeait chez lui ; aussi craignait-il une punition sévère ; mais le Roi ne dit rien, à notre connaissance du moins. »

Locatelli, Sebastiano

Récit par Edward Browne de sa visite à Saint-Germain-en-Laye

« We dined at Rueil and in the afternoon we cross’d the Seine twice and came to St. Germaines. Wee entred a great Court Yard and left a Chasteau well ditchd on the left hand, and a Teniscourt on the right (this is the Kings house), wee went forward to the house, of which the front is supported with noble round pillers.
Here was no Entrance for us and we despairing to get in, by great fortune there came two Capucins, under whose conduct wee saw the house. The Hangings were taken downe, but the roomes were nobly guilt and Painted, the roofe especially. Of two Galleries the one [was] hang’d with very rarey painted pieces and the other with the Mapps of great Cities. Out of these Galleries you have the noblest Prospect hereabouts. We went out on the other side of the house and so descended by those three stately cloisters, which stand one above another, supported with vast Pillers, and made pleasant with waters workes, and makes a noble showe a great way before you come at the house. Afterwards you descend into a Garden, and so lower into a Medow, till you come at the Water side from whence the house stands a great height, and is seen all about the Coutrey. Wee lodged this night at Le Pec a little town by the river sid and [vide]. »

Browne, Edward

Récit par Thomas Platter de sa visite aux châteaux de Saint-Germain-en-Laye

« [p. 212] Le 28 novembre, je quittai Paris avec plusieurs personnes et j'arrivai par le village de Roully au port de Nelly ; la Seine a deux bras en cet endroit, nous les avons traversés tous les deux. Nous sommes arrivés au bourg de Nanterre, et nous avons [p. 213] retrouvé le fleuve au village du Pecq, où nous avons traversé de nouveau les deux bras de la Seine. Enfin, en gravissant là une colline, nous sommes arrivés à la ville ou au bourg de Saint-Germain-en-Laye, et nous sommes descendus à l'hôtel de l'Image de Notre-Dame. La ville est située à quatre lieues de Paris.
Saint-Germain-en-Laye est une ville ou un bourg où il n'y a rien de remarquable à voir, à l'exception de ses deux magnifiques châteaux royaux, le vieux et le neuf, et c'est pour les voir que j'y suis allé ; ils sont tous deux à proximité de la Seine.
Le 29 novembre au matin, car nous étions arrivés la veille, fort tard dans la soirée, nous avons visité le vieux château, que le roi n'habite plus, mais qui n'en est pas moins un château royal.
Le toit est garni de grosses pierres de taille et est tout à fait plat ; les quatre façades sont en briques.
A l'intérieur, il y a un bel escalier tournant qui est très vaste, et on y voit de jolies salles. Autour du château se trouve un beau jardin, dans lequel sont des faisans, des pigeons indiens, des poules étrangères et toute espèce de volaille exotique. Il y a, près du château, un jeu de paume et un parc de deux lieues de long, qui s'étend jusqu'au château neuf.
Nous sommes allés ensuite visiter le château neuf, qui n'est pas fort éloigné du vieux. La partie postérieure de l'édifice est attenante à un vignoble, tandis que la partie antérieure touche au vieux château. Dans la grande salle, il y a beaucoup de beaux tableaux ; on y remarque notamment un petit cadre accroché au mur et peint des deux côtés ; quand on regarde du bas ce petit tableau, il représente une chasse, mais si on le regarde dans une glace, qui est adossée au plafond, on voit deux amoureux qui s'embrassent. C'est un tableau peint avec beaucoup de talent ; il en est de même du reste de tous les objets d'art qui se trouvent dans cette salle. Le château a deux étages ; le roi a, m'a-t-on dit, l'habitude de loger à l'étage inférieur, où les salles communiquent entre elles. Si on avait élevé plus haut la construction, on aurait eu à craindre le vent, le château se trouvant sur une haute montagne. Le toit, autant que je puis m'en souvenir, est recouvert avec des ardoises de peu d'épaisseur.
En sortant du château par la porte de derrière, j’ai vu une galerie magnifique, qui conduisait par deux larges escaliers de pierre au parc d'agrément, que l'on peut parcourir tant à cheval qu’en [p. 214] voiture. Tout au haut de l'escalier se trouve un balcon, qui donne accès au château, et d’où on a non seulement une belle vue sur le paysage environnant, mais d'où on embrasse également d'un coup d'œil les fontaines et les jets d'eau de la cour et du parc. Sous ce balcon et cet escalier se trouve un souterrain construit avec beaucoup d'art, au milieu duquel a été élevée une fontaine avec des coquillages et des coraux ; un griffon projette l'eau, et des rossignols, mus également par l'eau, chantent très agréablement. Sur le côté droit, on nous conduisit dans une grotte, où on a installé plusieurs jets d'eau avec beaucoup d'ingéniosité et comme je n'en avais jamais vu auparavant. Ces jets d'eau sont recouverts tant en haut que sur les côtés d'ambre fondu, que l'on a fait venir de la mer et des mines. On y voit toutes sortes de coquillages, des moules bizarres, des coraux, mêlés à de belles pierres. Lorsqu'on fait marcher les jets d'eau, l'eau sort du rocher et de toutes les statues, qui y ont été placées avec beaucoup de goût, en sorte que le spectacle est fort pittoresque et fort curieux. Le sol est pavé, autant que je m'en souviens, de petits cailloux de couleur ; il se compose d'une foule de petits tuyaux, qui élèvent l'eau jusqu'à la voûte, d'où elle retombe sur le sol sous forme de forte pluie, en sorte qu'on ne peut rester ni en haut ni en bas sans se mouiller.
Les murs ont beaucoup de cavités où l'on a placé de nombreuses figures en métal, en marbre, en coquillages et autres ; presque toutes lancent des jets d'eau. Il y a beaucoup de personnages qui se meuvent ; ainsi on voit des forgerons courir et frapper sur une enclume, des oiseaux chanter, tout en remuant la tête et les ailes, on voit aussi des lézards, des grenouilles, des serpents et autres animaux posés par-ci par-là sur les pierres et lancer de l'eau, en faisant des mouvements quelconques. Si je ne me trompe, il y a au milieu de la grotte un Neptune, dieu de la mer, avec son trident, qui sort de l'eau, debout sur un char. On le voit paraître à la surface, en sortir, tourner de nouveau sur lui-même pour disparaître encore.
[p. 215] Sur le côté gauche de l'escalier ou balcon, on construit encore une autre voûte ou grotte pour y placer un orgue. Dans un mur on a disposé des roses jaunes, en coquillages, qui se détachent sur un fond noir. En somme, il y a tant de belles choses à voir qu'il ne m'était plus possible de tout noter en si peu de temps. On m'a montré également une grande quantité d'ambre, de coquillages, de coraux et de plantes, que le grand duc de Florence a envoyés à Sa Majesté pour décorer encore d'autres grottes.
En sortant de ces grottes, nous vîmes dans la cour une fontaine superbe qui lançait l'eau avec une telle force qu'elle s'élevait en un seul jet à la hauteur de deux hommes. L'eau faisait tant de bruit en tombant que l'on croyait entendre un coup de mousquet. Plus haut, il y avait aussi deux fontaines qui n'étaient pas encore terminées. Le roi a fait venir spécialement pour ce travail un Italien qui a construit ces grottes et ces fontaines, et on peut dire qu'il a fait de fort belles choses. On voit notamment, dans la grotte où est l'orgue, une table de l'intérieur de laquelle sort l'eau sous forme d'une potence, et ainsi qu'une épée, elle retombe à [p. 216] l’endroit d’où elle était sortie. Cet architecte doit construire également, avec un goût extraordinaire, dans le jardin, une grotte sans eau.
Le jardin qui y attenait par derrière n'était autrefois qu'une prairie coupée par de belles allées et ornée de belles plantes. D'après ce que j'ai entendu dire, le vignoble, jusqu'à la rivière, doit être réuni au jardin. »

Platter, Thomas

Description par Hieronymus Welsch des châteaux de Saint-Germain-en-Laye

« [p. 338] S Germain en Laye, ist ein offen Orth. In dem gewaltigen Koniglichen alt und newen Schloß, alld a pflegt der Konig, sowol umb deß gesunden lieblichen Luffts, und seiner Bequemlichkeit willen, als auch, daß es nur 5 Stund von Paris gelegen, offimalen, sonderlich zu Winters-Zeiten, zu residiren ; das alte hat Konig Carl 5 und Franciscus I. das newe aber Henrich 4 erbawen lassen. Es hat in denselbigen, sonderlich un newen, vil schone gemahlte Zimmer, und Gallerien, Badstuben und Vogelhauser.
[p. 339] Die Wasserkunst ligt in der Grotten auff die s o. Staffel tieff unter der Erden, ist ohnaußsprechlich schon und kunstreich gemacht, dann da hort und sihet man im furnemsten Gewold den Orpheum hervor kommen, und musiciren, auch die Vogel lieblich singen, die ohuvernunfftige Thier kommen herben, und neigen sich die Baum, Item
Die zwolff himmlische Zeichen.
Das Paradeiß.
Die Holl.
Das Meer.
Ein Kriegs-Schiff.
Die vier Elementen.
Der Bacchus.
In einem audern Orth gegen uber ist ein Schiff, dar auff der Konig mit seinem Hofgesind, wie auch der Dauphin, so sambt einem Engel von Himmel herab steigt.
Das Schloß S. Germani.
In einem andern Gewolb wird geschen.
Der Neptunus. Ein Papier-Muhlen.
Zween Engel, so blasen.
Abermal in einem sondern Gewolb
Ein Jungfraw, so lieblich die Orgel schlagt.
Ein Drach, so sich auß dem Wasser erhebt, zu dem der Perseus hinunter kombt.
Sambt einem schwarken Lisch in der Mitten, darbey allerley Wasserwerck zu schen.
Noch in einem absonderlichen Orth.
Sihet man auch einen Drachen, so gar vil Wasser fasst, und umb sich außwirfft, man horet die Nachtigal singen, den Guguck schreyen, und vil anders.
Es seyn alle dise Gewolber von wunderlichen Steinen, Meer-Gewachsen, Schnecken, Muscheln, Perlenmutter, une dergleichen seltzamen Sachen auff das allerkunstlichste und zierlichste angefullet.
[p. 340] Wie ich nun etlich malen die Wacht an disem Orth gehabt, so hab ich auch solches manchmalen (wann man ohne das frembde Herren das hin gefuhrt) ohne Kosten schen moden.
Ich habe gleicher gestalten (als oben vermeldt) allhier geschen, wie der Konig die Leut, so bose Geschwar am Hals haben, so etliche Kropff, andere aber den Außsatz nennen, geheilt, une ein ander mal, wie er seine Mußqueton in die drey Stund lang selbsten exercirt, aber so artig und kunstlich, daß die gemeine Kriegs Exercitia gar fur nichts dargegen zu achten seyn. »

Welsch, Hieronymus

Description par Peter Heylyn des châteaux de Saint-Germain-en-Laye

« [p. 60] Two leagues from Ruel, is the Kings house of St. Germain en Olay, a house seated on the top of a hill just like Windsore. The town of St. Germain lyeth all about it, the river Seine (of the same breadth as the Thames is at the place mentioned) runneth below it; and the house by reason of the site, having a large command upon the country round about it. The town is poor and hath nothing in it remarkable but the name, which it took from St. Germain, bishop of Auxerre, who, together with St. Lupus, bishop of Troyes, sailed into Britain to root out Pelagianism. The castle or seat Royall is divided into two parts, the old and the new; the old, which is next unto the town, is built of bricks, and for forme is triangular : founded it was at the first by [p. 61] Charles V, since strengthned and beautified by the English when it was in their possession. Francis I added to it the upper story and the battlements, and in memoriam facti hath left a capitall F upon every of the chimnies. The new house, distant from the old about a surlong, and to which you descend by a handsome green court, was built by Henry IV. It consisteth of three severall parts, all joined together, the two outermost quadrangular, that un the middle almost round and in the fashion of a Jewish synagogue. Here we saw the volatory full of sundry forain birds, and in one of the lower rooms great store of outlandish conies; but these were accessories. The principall was the majesty of the house, which is, indeed, worth the observation. The palace of the Louvre, so much famed, is not to be named in the same day with it. The rooms are well ordered, and high roofed, gorgeously set out with the curiosities of the painter. In some of the chambers they shewed us some poeticall fictions expressed by the pencil in the windows and on the wainscot, and seemed to glory much in them. I confesse they might have plentifully possessed my fancy, had I not seen the window of Gerrambury gallery, belonging to the Right Honorable Francis, Viscount St. Albans; a window in which all the Fables of Ovids Metamorphosis are so naturally and lively dissembled, that is ever art went beyond itself, it was in that admirable expression.
Let us now take a view of the water-works, and here we shall see in the first water-house, which is a stately large walk vaulted over head, the effigies of a dragon, just against the entrance; an unquiet beast that vomiteth on all that come nigh it. At The end toward the right hand is the statua of a nymph sitting before a paire of organs. Upon the loosing of one of the pipes, the nymphs fingers began to manage the keyes, and brought the instrument to yield such a musick, that if it were not that of an organ, it was as like is coule be, and not be the same. Unto the division of her fingers, her head kept a porpotionable time; joiting from one shoulder to the other, as I have have seen an old fidler at a wake. In the same proportion were the couterleits of all sorts of mils, weh before very eagerly discharged their functions: [p. 62] but upon the beginning of this harmony, they suddenly stood still, as if they had had ears to have heard it. At the other end towards the left hand, we saw a shop of smiths, another of joiners, and a backside full of sawyers and masons, all idle. Upon the first command of the water, thet all fell to their occupations, and plyed them justily; the birds everywhere tinging, and so saving the artificers the labour of a whistling. Besides, upon the drawing of a wooden courtain, there appeared unto us, two tritons riding on their dolphins, and each of them with a shell in his hand, which interchangeably and in turns served them instead of trumpets. A very happy decorum, and truly poeticall.
Caeruleum tritons vocat, conchaque sonanti
Inspirare jubet,
As Ovid of him.
Afterward followes Neptune himself, sitting in his chariot, drawn with four torroyses, and grasping his tricuspis or three scepter in his hand: the water under them representing all this wile, a sea somewhat troubled. 36 steps from the front of the house we descended into this waterhouse; and by 60 more we descended into a second of the same fashion, but not of an equall length with the other. At the right hand of this, is the whole story of Perseus, Andromeda and the whale lively acted; the whale being killed, and the lady unloosed from the rock very perfectly. But withall, it was so cunningly managed, and that with such a mutuall change of fortune, on the parties of both the combatants, that one who had no known the fable, would have been affraid that the knight would have lost the victory, and the lady her life. At the other end there was shown unto us,
Orpheus in sylvis postus, sylvaque sequentes.
There appeared unto us the resemblance of Orpheus, playing on a treble vial, the trees moving with the force of the [p. 63] musick, and the wilde beasts dancing in two rings about him. An invention which could not but cost K. Henry a great sum of money; one only string of the sidle being by mischance broken, having coste King Lewis his son 1500 livres. Upon the opening of a double-leaved door, there were exhibited to us divers representations and conceits, which certainly might have been more gracefull, if they had not so much in them of the puppet play. By some steps more we descended into the garden, and by as many more into a green, which opened into the waterside; in which the goodliest flower and most pleasing to my eyes, and the statua of an horse in brasse, of that bignesse, that I and one of my companions could stand in the neck of him. Bat dismounting from this horse, we mounted our own, and so took our leaves of St. Germain. »

Heylyn, Peter

Description par Martin Zeiller des châteaux de Saint-Germain-en-Laye

« [p. 82] Ein offnes Stättlein 4 oder fünff Frankösische Meylen von Pariß gelegen ; allda der Lufft trefflich gesund ist ; unnd daher die Könige gern sich allhie auffgehalten, unnd werden auch die Konigliche Kinder offtmals zu erst allda erzogen. Hat ein Adeliches NonnenCloster, in welches aber nicht Jedermann, solches zu sehen, gelassen wird. Das vornemste, so an diesem Ort zu besichtigen, ist das Königliche Schloß, oder Lusthause ; so von Theils, sonderlich der Wasserwercke halber, dem obbeschriebnen Schloß Fontaine-bleau vorgezogen werden wil. Ligt auff einem Berglein, und wird in das alt, une newe, abgetheilet. Das Alte solle König Carl der Fünffte entweder erbauet, oder das vorige wider auffgeführet, und ernevert haben. König Franciscus der Erste hates verbessert ; dessen die Camin von Ziegelsteinen Zeugnuß geben, an denen allenthalben, wann man zu dem obersten Tach hinauff steiget, der Buchstaben F. zusehen. Der Zimmer, so weit seyn, werden 63. Gezehlet, schlecht gewest seyn. Zur rechten deß Thors, ist die Capell, auch fast nur von Ziegelsteinen erbauet. [p. 83] Ausserhalb dieses alten Schlosses, ist ein Thiergarten, so in der Länge 2 Meylen begreifft, darinn ein Pallemaille, oder so genanter Spilplatz mit kleinen Kugeln, auff dessen seiten, nach der Länge, man gute Gelegenheit, demselben Spil zuzusche, oder da zu ruhen, hat. Unden im Graben werden die Hirsch, und seltzame Vögel, verwahret. Das new Schloß, oder Lusthause, ist viel prächtiger, und vom König Henrico IV erbauet. Die Cammeren, und Gallerien, oder gewölbte Gänge, seyn für den König, und die Königin, getheilet : deß Königs Galleria hat zu oberst das emblema : Duo protegit unus ; namlich die beyde Königreich, Galliae, et Navarrae, beschützt ein König. Uber der Thür stehet obbesagtes Schloß Fontainebelleau. Auff den seiten seyn underschiedliche Stätte. Der Königin Galler ist mit gar grossen gemahlten Taflen, auß dem Ovidio, und andern, geziehret. Es seyn auch sonsten noch 4 Gallerien allda. In den Camern sein die Camin von dem schwärtzesten Marmel ; darinn man, bey heitern Himmel, die Lands Gelegenheit umb S. Cloud, sehen kan. Es seyn da Königlicher Bäder, und was darzu gehört ; Item, 2 Vogelhäuser, und allerhand Königlicher Zeug zum Vogelstellen. Von dannen gehet man zu de Grotten, oder cryptis substructis, zwey steinerne Stiegen hinab, deren die eine 45 die ander 36 Staffel hat.
Die Frantzosen wolle, daß diese schone un künstliche, mit Meerschnecke, Muschlen, seltzamen Meer : und andern Gewachsen, und Steinen, außgesetzte Gewolbe und sonderlich das Wasserwerck, alle andere in Europa ubertreffe : wiewol die Brabanter, das Wasserwerck zu Brüssel, diesem zu S. Germain, vorziehen wollenmit welchen es aber Goltnitzius nicht helt ; sondern hierinn den Frantzosen beystimmet, als der auch das zu Brüssel, und die in Italia, gesehen hat. Der besagte Grotten allhie, zu S. Germain, seyn funff, deren eine drucken ; allda man sich im Sommer erkülen, und auff halte kan : die andern viere seyn Wasserreich ; in deren Ersten ein Drach, so den Kopff, und Flügel, beweget, und gar viel Wasser außspeyet ; allda auch ein Nachtigal, und Guckuck, singen, une mit einander streiten thun. Auff den seiten feyn 2 Bilder von schwartzem Marmel, die auch Wasser außschütten. In der andern Grotte ist, gleich bey der Thür, ein Schlang, die auß dem Munde Wasser gibt. Eine Jungfraw bewegt das Haupt, und wendet die Augen hin, und her, als ob Sie die Zuhörer, und Frembde, ansehen thette, und schlägt gar lieblich auff einer Orgel. In der mitten stehet ein Lisch von schwartzem Marmel, auff welchen man ein Rohr steckt, unnd darzu underschiedliche Instrumenten nimbt, und damit allerley verwunderlich, und künstliche Sachen vorstellet. Beym Fenster ist ein Lisch von Marmel, unterschiedlicher Farben ; Item, hin, unnd her, Spiegel, unnd Muschlen, auch ein Meerschwein ; unnd hat man, wann man auß solcher Grotte, oder Grufft, gehet, die neben seiten in acht zunehmen. Die dritte ist dem Neptuno zugeeygnet ; allda ein Krantz auff einer Kugel, so von dem Wasser herumb gedrahet wird, und tröpflein, wie die Perlein, von sich wirfft. Es ist da auch ein Schmitten ; Item Papir-Mühlin ; ein Nachtigal, so singet ; Item, zween Engel auff den Seiten ; wann die mit jhren Posaunen blasen, so kompt Neptunus, mit seinem Scepter, auff einem Wagen, den 2 weißlechte Pferde ziehen, sitzend, durch eine Thür, so sich auff thut, herfür, helt wenig still, und begibt sich darauff wider in seine Höhle : und wann die Thür zugehet, so höret man die Posaunen wider. Es ist, in dem man dieses besichtiget, nahend ein Stuel, welcher wan man sich nicht mit Vortheil darauff setzet, einen hauffig bespritzen thut. So gibt auch der mit Steinlein eingelegter Boden Wasser genug von sich ; Die vierte Grotte, Grufft, od Crypta, ist etwas nidriger, aber die allerschönist, und künstlichste.
Wann man hinein gehet, kompt einem gleich das Wasser entgege : der Orpheus, [p. 84] auff der Either spilend, und das Haupt bewegend, tritt herfür ; so anmütig zu schen, und lieblich zu hören. Von beyden seiten stehen umb ihn her underschiedliche wilde Thier, die mit Ihme fort gehen ; dar zwischen die fruchtbare Bäum sich neigen, oder bucken, unnd die Felsen mit Zweigen, dar auff Vögel, so quitzern, sitzett, gezieret seyn. Man sihet auch die zwölff Himmlische Zeichen, die in richstiger Drönung fortgehen. Es sitzet da der Bacchus auff dem Faß, so in der Hand einen Becker hält : Item, seyn zu schen, das Paradeitz, die Höll, dz Meer, Kriegsschiffe, die viere Element ; Item, dieses Schloß S. Germain, und an dessen einer seiten, wie der König, mit den Fürsten, unnd Auffwartern, auff einem Schiffe fähret, und, auff der andern, ein Delphin, und Engel, so vom Himmel herab steiget. Bald folgen Neptunus, Mercurius, unnd Jupiter ; und anders verwunderliches Ding mehr. Es seyn auch da die vier Haupt-Lugenden von weissen Marmel, so vorhin vor dem Palais zu Pariß gestanden. Es schreibet Andreas du Chesne, das die Alten nicht gewust haben, das Wasser höher zu treiben, als sein Vrsprung is, und weren wir, sagt Er, und unsere Nachkomlinge, in dieser Vuwissenheit verblieben, wann nicht Claudius von Monconis, Praesident bey de General-Einnehmer Ampt der Königlichen Gefäll, zu Lyon, durch seine sinnreiche, und kühne Erfindung, die er am ersten bey den Brünnen detz newen Schlosses allhie zu S. Germain de Laye ; unnd hernach in der Häusern deß Mareschal von Retz, zu Noisy ; und deß Obristen Parisischen Praesidenten, zu Stim, probirt, den Weg darzu gezeigt hette. »

Zeiller, Martin

Récit par Louis Huygens de sa visite aux châteaux de Saint-Germain-en-Laye

« Ou on entre le premier c’est le vieux chasteau qui est bastij par François I de brique mais fort singulierement. C’est icij où loge le le Roij d’à present car le defunct estoit dans le chasteau neuf qui est en bas et bastij par Henri 4.
Il ij a dans ce vieux bastiment une chapelle assez belle où il ij a des orgues. Au reste, les appartemens du Roij et de la Reijne et la salle des comediens ij sont assez mediocres et mal entretenus, encor que le Roij ij vienne assez souvent. Elle est du reste fort grande, et on dit mesme qu’il ij [a] plus de 500 chambres logeables et encor n’ij a t il qu’une court. A costé gauche de la maison il ij a des parterres qui sont bien jolis et au delà d’autres grand jardins. Derriere il ij a premierement une grande court et au delà le chasteau neuf, qui est assez estendu en largeur mais aussij bien bas. L’architecture n’en est pas tout à fait à la moderne mode. Le corps de logis consiste principalement aux appartemens du Roij et de la Reijne. Cestuij cij est peint mais pas trop bien. Celuij du Roij est beaucoup meilleur et le plancher tout doré et lambrissé. On nous monstra icij la chambre où il est mort. A chaque appartement il ij a une longue galerie voutée toute peinte. Dans l’une des deux il ij a plusieurs villes assez mal representée, entre autres Maestricht et Nimwegen et Werrdenbirgh en Westphalie où ils ont mis dessous Werdenbroch, ville de Wespallon. Derriere cette maison, il ij a une grande terrasse, de laquelle on descend par des grands degrez dans les jardins qui viennent jusques à la riviere, mais sont tres mal entretenus, tous les degez abattus et toutes ces fameuses grottes, qui ont tant cousté autrefois, en desordre. Le chasteau vieux est toute couvert de grosses pierres de tailles au lieu d’ardoises. Quand on ij est monté dessus, on descouvre une fort belle campagne et Paris fort distinctement. »

Huygens, Louis

Récit par Elie Brackenhoffer de sa visite à Saint-Germain-en-Laye

« [p. 11] Le jeudi 13 octobre, en compagnie de M. Offmülner et de son majordome, ainsi que d’un Suisse, j’ai fait une excursion à Saint-Germain-en-Laye. Nous sommes partis en voiture à 7 heures du matin, et à 10 heures nous sommes arrivés. La journée était belle et claire, mais le vent froid. Le chemin était agréable ; nous y avons vu une grande quantité de villages et de bourgs, qui étaient un charme pour les yeux. Devant Saint-Germain, s’étend une grande île, que le grand chemin traverse, sur plus d’une lieue de long ; des deux côtés il y a des ponts à péage. Cette île, assez vaste (comme on l’a dit) est plein de cerfs, de chevreuils, de lièvres et de lapins ; comme il est interdit, sous les peines les plus sévères, de les tuer ou de leur faire du mal, ils sont si familiers, qu’ils n’ont pas peur des voyageurs ou des passants ; au contraire, ils accourent. Cette île est entourée par la Seine ; elle est pleine d’arbres et de bois, et chaque année, à [blanc, pour la Saint-Hubert], les princes et les plus grands personnages de la cour y font une grande chasse, après laquelle on donne un fin banquet en l’honneur de ce saint, patron des chasseurs. Cette année, Mons. Monbason, grand veneur de France, présenta un cerf, [p. 12] en présence des ducs d’Orléans, d’Anguien et d’autres grands personnages assemblés.
Saint-Germain est un peu sur la hauteur (il faut mettre pied à terre deux fois) ; pour ce motif, il y a une plus belle vue sur la campagne et les localités environnantes que dans toutes les autres résidences royales. Elle est à 4 milles de Paris. On la divise en vieux et nouveau château. Le vieux, bâti par Charles V, et restauré pour la première fois par François Ier, est petit, et tout en brique. Son toit est revêtu de carreaux, presque comme à la Bastille, à Paris ; on peut s’y promener et regarder très loin autour de soi. Sur les cheminées de ce château, on voit partout F.F., ce qui signifie que François Ier l’a restauré. Il est très haut ; il y a 63 appartements, mais pas particulièrement magnifiques. La chambre du roi, où il réside parfois en hiver, paraît un peu sombre ; à ce moment elle n’était pas meublée. On nous a aussi montré la salle où se joue la comédie ; au-dessous de la scène, des deux côtés, on a peint un escalier de six ou huit marches environ avec tant d’art, qu’on s’y trompe, et que nous ne pouvions pas croire qu’il fût peint, avant de nous en être approchés et de l’avoir touché de nos mains.
La cour est presque ovale ; elle est de grandeur moyenne ; à droite de l’entrée, se trouve une chapelle, qui est toute dorée, et décorée à profusion de belles peintures et d’autres ornements. L’autel est orné de colonnes de marbre noir et d’ouvrages dorés. L’orgue, également doré, est superbe et d’un grand prix. Ce château est entouré d’un fossé profond, mais sans eau. Aussi, pour entrer, on passe sur un pont, muni d’un pont-levis.
A gauche du château, il y a un beau parterre, sur lequel [p. 13] donne la chambre du roi, et qui a une belle vue. Au bout de ce parterre, commence un beau parc, un bois, long de deux lieues, dans lequel on peut voir un long jeu de mail, muni de pavillons quarrez en maçonnerie, où l’on peut se reposer ou bien où peuvent se mettre les spectateurs, sans être gênés. Devant le château, il y a une grande et large basse-court, dans laquelle sont les écuries et autres communs. De là, on accède à droite dans une très grande et belle cour, divisée en deux par une cloison, par laquelle nous parvînmes tout droit au château neuf.
Il a été bâti par Henri IV ; il est donc encore assez neuf. On y montre : 1° L’antichambre du roi. 2° Chambre où est mort Louis XIII. 3° Cabinet. 4° Galerie du roi, au haut de laquelle on voit cet emblème : Duo protegit unus, ce qui veut dire qu’il possède à lui seul deux royaumes, la France et la Navarre. Au-dessus de la porte, est représenté le château de Fontainebleau ; des deux côtés, sont très joliment peintes à la détrempe, en assez grande dimension, les villes suivantes : Huy, Venize, Prague, Namur, Mantoua, Aden en Arabie, Compaigne, Heureuse, Sion en Suisses, Moly, Tingu, Stafin en Afrique, Teracina, Ormus en Perse, Bellitry, Werderboch en Westphale, Numegen, avec cette inscription : Ville du fondement de l’empire, car Charlemagne a voulu faire de ces villes des villes impériales. Passau, Mastrich, Thessala Tempe, Florence.
5° L’antichambre de la reine. 6° Sa chambre, dans laquelle est né Louis XIV, le roi actuel. 7° Le cabinet de la reine. 8° Sa galerie, ornée de grands panneaux avec des scènes tirées d’Ovide. Ces appartements sont égaux en dimensions et en beauté ; tous en effet, sont ornés de belles dorures et de sculptures ; égaux aussi en vue, car ils ont la même exposition, étant tous dans le corps de bastiment qui donne sur le jardin. Dans les deux appartements, il y a encore [p. 14] quelques autres pièces pour les officiers et les gardes, dont la Française est d’un côté et la Suisse de l’autre.
Sous la galerie et la chambre du roi, on montre encore quelques chambres basses, ou bien plutôt écuries, dans lesquelles se trouvaient les oiseaux et les quadrupèdes suivants : un castor ; des corneilles des Pyrénées, environ de la grosseur d’un pigeon, tout entières d’un noir intense, comme du charbon ; elles ont des becs rouge sang, et des pattes sans plumes ; des outardes, ou oies sauvages ; des petits chevaliers de la mer, petits oiseaux marins ; un aigle ; un perroquet de toutes les couleurs, extraordinairement grand et beau ; un mouton du pays de More, qui est haut, et qui a un cou et des pattes longs et rudes, un museau pointu ; un mouton turc ; un bouquetin femelle ; le mâle a été détruit après la mort de Louis XIII, parce qu’il avait fait beaucoup de mal et endommagé des gens ; on montre encore ses cornes, elles sont extraordinairement grandes et admirables en cela. La femelle est loin d’avoir d’aussi grandes cornes ; elles sont cependant plus grandes, plus larges et plus incurvées que les ordinaires ; son poil est aussi d’autre couleur que les ordinaires, il est épais, gris et a un aspect bien sauge. Un mouton de la Barbarie, qui a une queue, large en haut presque comme deux mains, et qui par le bas se réduit à rien ; elle n’est pas particulièrement longue, mais elle est épaisse et grasse, et en bas elle est toute blanche et molle de graisse ; il se met à beugler quand on lui tire ou lui prend la queue.
Un chat de l’ile du Canada, autrement dit une civette ; il est beaucoup plus grand qu’un chat domestique, mais il en a presque la forme et le poil. Dans une cour, devant, il y avait beaucoup de canards et d’oies des Indes, une grande quantité de poules d’eau des Indes, quelques cygnes, des faisans et autres gallinacés.
De là, nous sommes descendus dans les jardins, [p. 15] pour voir les grottes. Il y avait à vrai dire cinq grottes naguère, savoir une grotte seiche, dans laquelle on prenait le frais en été et on se garantissait de la grande chaleur ; la grotte de Neptune ; des orgues ; de Persée ; et d’Orphée ; mais il ne reste que les deux dernières, les autres s’étant écroulées en 1643, avec de grands dommages et de grosses pertes, après avoir été bâties à grands frais. Ces grottes passaient, disent quelques-uns, pour supérieures à toutes celles de France, d’Allemagne et d’Italie, mais la plupart affirment qu’elles égalaient celles d’Italie, sans toutefois les surpasser.
Avant que nous visitions les grottes, le fontainier exigea de nous une pistole, pour faire jouer les eaux, sous ce prétexte qu’il était obligé d’y employer 50 torches ; et comme il s’obstinait dans sa prétention, il fallut bien en passer par là, car nous ne voulions pas être privés du meilleur morceau de notre excursion. Dans la grotte de Persée, il y avait, tout à l’entrée, un grand bassin, dans lequel se trouvait un grand dragon ; au-dessus de lui était juché Persée ; sur le côté il y avait une montagne, près de laquelle était sculptée Médée, le tout en cuivre. Persée presque de grandeur naturelle se précipitait de la hauteur vers le dragon, il avait en mains un bouclier et une épée, et quand il fut près du dragon, il donna quelques coups ; [p. 16] le dragon, qui était grand, horrible et épouvantable, se dressa avec un grand fracas, battit des ailes en l’air, ouvrit la gueule et grinça des dents, de si terrible manière, qu’en raison de la soudaineté, on en était presque épouvanté. Le dragon laissa retomber ses ailes, calma sa fureur, et à ce moment l’eau du bassin s’épandit plus abondante, submergeant presque le dragon ; il paraissait mort, et avoir été tué par Persée. Et alors Persée revint à sa place. C’est une belle pièce, qui mérite bien d’être vue.
Dans la même grotte, à gauche, il y a une montagne, où se trouvent quantité de forges, de papeteries et de moulins à blé en bois, qui sont tous mis en mouvement par des appareils hydrauliques. De même, quelques chapelles ou églises, dont l’eau faisait sonner les cloches. Tout cela est très gentil et très beau. Devant cette grotte, l’eau joua aussi comme si de tous les bouts et de tous les coins était tombée une pluie chassée par le vent, de sorte que tous ceux qui ne se retirèrent pas de côté furent complètement trempés.
De là, nous nous rendîmes à l’autre grotte. Dans celle-ci était assis Orphée, presque de grandeur naturelle ; il jouait du violon, remuant les mains et frottant l’archet sur le violon, mais à l’intérieur, par un habile jeu des eaux, une position était introduite qui donnait d’elle-même le ton du violon. Autour, se dressaient beaucoup d’arbres, sculptés en bois, qui remuaient et dansaient ; un rossignol était perché sur un arbre et chantait. Des deux côtés, accoururent toute sorte de bêtes sauvages qui écoutèrent Orphée, puis l’une après l’autre rentrèrent. Un coq d’Inde se tenait non loin d’Orphée, se tournait et se trémoussait, et se posait comme s’il dansait. Un singe était assis, qui portait constamment une pomme à sa gueule. Parmi tout cela, coulaient les rigoles, giclaient les tuyaux venus d’un bassin devant lequel était assis Orphée.
Après cela, dans une grande fenêtre ou trou carré, qui s’étendait loin en arrière en perspective, de toutes parts [p. 17] garnie de lumières, un jeu d’eau produisait l’effet suivant : les sept planètes, faites d’une sorte de bronze et peintes, se mirent en mouvement ; une partie, savoir le soleil, la lune et Mercure en haut, les autres par terre, et il est impossible de voir avec quoi ni comment ils sont tirés. Puis, apparaissent aussi les douze figures du Zodiaque, les quatre éléments. Item, le jeune roi s’avance aussi, avec son frère le duc d’Anjou, escortés par les Suisse. On représente encore la mer, avec ses grandes vagues, et des bateaux qui y naviguent. On représenta également l’enfer, plein de feu, et si artistiquement fait qu’on croit voir tout brûler réellement ; et on y voit des figures représentées par une tête, sur laquelle s’acharne la fureur du feu ; les yeux de cette tête sont rouge feu. Devant l’enfer, se tient Acharon, l’infernal nocher ; un autre tient Cerbère enchaîné.
Il y a aussi une représentation analogue du paradis, et beaucoup d’autres choses, qu’à cause de leur multitude je n’ai pas toutes pu retenir et décrire. Dans cette grotte, à droite, Bacchus est assis sur un tonneau ; il a une coupe en main, si pleine qu’elle déborde, et que l’eau en tombe goutte à goutte.
Il y a aussi les quatre vertus cardinales en marbre blanc ; on dit qu’elles se trouvaient naguère à la pyramide des Jésuites, qui était près du palais.
Ces deux grottes sont carrés, bien voûtés, joliment pavées de petits cailloux vernissés, pour le reste, de toutes parts ornées de coquillages et de toute sorte de colimaçons, ainsi que de cristal, de merveilleuses pétrifications, de minéraux et autres ornements. A remarquer qu’on ne voit pas de murailles ni de mortier, ni sur les côtés, ni en haut. Le pavé (formé, comme on l’a dit, de petites pierres et d’ardoises de dimensions égales) représente des roses et d’autres figures, ainsi que des coquillages et des colimaçons, [p. 18] assemblés non sans un art consommé, et formant toute sorte de dessins.
Quant aux jardins, il semble à vrai dire qu’ils ont dû être superbes et charmants, mais maintenant ils sont à l’abandon ; en effet, dans le voisinage de l’eau, on ne voyait pas trace du moindre canal ; à vrai dire, à en juger par le cuivre, il devait y en avoir cinq ou six, mais ils étaient complètement envahis par la végétation. De même, dans le verger voisin, tout était ravagé et en désordre. Il y a cinq jets d’eau, mais l’eau ne jaillissait pas de tous.
De ces jardins, l’un est plus haut que l’autre : on en a une très jolie vue sur l’île voisine, et par les temps clairs, on distingue fort bien de là Paris et beaucoup de petites villes, de bourgs et de villages. Pour la jolie vue, ces jardins surpassent de beaucoup toutes les autres résidences de plaisance royales. »

Brackenhoffer, Elie

Description par John Evelyn des châteaux de Saint-Germain-en-Laye

« [p. 52] Accompanied with some English gentlemen, we took horse to see St. Germain-en-Laye, a stately country-house of the King, some five leagues from Paris. […] [p. 54] The first building of this palace is of Charles V., called the Sage ; but Francis I. (that true virtuoso) made it complete ; speaking as to the style of magnificence then in fashion, which was with too great a mixture of the Gothic, as may be seen in what there is remaining of his in the old Castle, an irregular piece as built on the old foundation, and having a moat about it. It has yet some spacious and handsome rooms of state, and a chapel neatly painted. The new Castle is at some distance, divided from this by a court, of a lower, but more modem design, built by Henry IV. To this belong six terraces, built of brick and stone, descending in cascades towards the river, cut out of the natural hill, having under them goodly vaulted galleries ; of these, four have subterranean grots and rocks, where are represented several objects in the manner of scenes and other motions, by force of water, shown by the light of torches only ; amongst these, is Orpheus with his music, and the animals, which dance after his harp ; in the second, is the King and Dolphin ; in the third, is Neptune sounding his trumpet, his chariot drawn by sea-horses ; in the fourth, the story of Perseus and Andromeda ; mills ; hermitages ; men fishing ; birds chirping ; and many other devices. There is also a dry grot to refresh in ; all having a fine prospect towards the [p. 55] river, and the goodly country about it, especially the forest. At the bottom, is a parterre ; the upper terrace near half a mile in length, with double declivities, arched and balustered with stone, of vast and royal cost.
In the pavilion of the new Castle are many fair rooms, well painted, and leading into a very noble garden and park, where is a pall-mall, in the midst of which, on one of the sides, is a chapel, with stone cupola, though small, yet of a handsome order of architecture. Out of the park you go into the forest, which being very large, is stored with deer, wild boars, wolves, and other wild game. The Tennis Court, and Cavallerizzo, for the menaged horses, axe also observable. »

Evelyn, John

Description par Giovanni Francesco Rucellai des châteaux de Saint-Germain-en-Laye et récit des moments suivant la mort de Louis XIII

« [p. 122] San Germano en l’Aye
Villa Regia con un bellissimo parco, e grandi stradoni, e lungo giuoco di maglio, et un serraglio pieno di tutte le sorte d’animali il castello che chiamano vecchio è assai comodo con un bel cortile di mattoni con loggie, et una bella cappella di li si passa al castel nuovo per un gran prato quale è fabbrica bassa assai, ma però comoda di habitatione con un cortile ovato, e di là dalla sala appuntellata nella prima camera grande fu posto il corpo del Re morto in un letto di velluto rosso trinato d’oro vestito di una camiciuola lina e quattro guardie attorno, e sacerdoti che salmeggiavano, e dirimpetto al letto erono posti tre altari dove la mattina si celebravono messe. Il posto di questo nuovo castello cominciato dalla Reg. Caterina e poi finito da Enrico 4. è bellissimo facendo una superba vista per venir da Parigi perchè dalle [p. 123] radici della collina che è assai bene alta sino al' estremitâ dove egli è posto sono scalinate, ringhiere, e grotte con nicchie di pietre, pilastri, e cornicioni diversi, che pare tutta una facciata seguita ; sotto le scale sono quantità di scherzi di acqua, e fra un piano, e l’altro bellissimi parterri, e spartimenti e da lontano come dissi apparisce una vastissima mole : si esce dalla porta S. Honorato, e si passa tre volte la Senna sopra tre gran ponti, et il primo si chiama il ponte a Nouilli, et è lontano dalla città cinque leghe.
[…]
[p. 188] Il Re morto esposto a S. Germano
Dicono nel havere sparato il Re haver ritrovato lo stomaco pieno di vermi, e fra l’altre uno grandissimo che l’attraversava tutto che per ciò sentiva in vita grandissimi dolori. Fu sempre in questa malattia, come si è detto, devotissimo e faceva ogni mattina dire la messa in camera sua, e si comunicava.
Il Lunedi 18 di Maggio sentendo che ancora a S. Germano stava esposto il corpo del Re per la moltitudine del popolo che andava a vederlo si risolse il sig. Amb. con le ssig. Camerate trasferirvisi, dove arrivato, e passato per il Castello vecchio, nel quale S. M. era stata lungo tempo malata, e dal quale un mese avanti la morte era uscito, e fattosi portare nel Castello nuovo. Un tiro di archibuso lontano dal vecchio, [p. 189] dove passata la sala del puntello nella quale erono alcune guardie si entrava in una gran camera parata di bellissimi arazi d' oro, e seta, dove era il corpo di S. M. posto in un gran letto di velluto rosso trinato d’oro, il quale stava a diacere tenendo sotto il capo due gran cuscini coperto con le lenzuola come se fussi stato malato ; ma però scoperto dalla cintura in su, e vestito d’una camicivola bianca, et un berrettino da notte in capo bianco con giglietti, e con un Crocifisso fra le mani, e per essere egli nella lunga malattia assai estenuato li havevano dipinto il viso che pareva sano con le basette aricciate, e la sua zazzera molto bene accomodata ; il letto era tutto aperto per lasciare libera la vista al popolo che numeroso da Parigi, e d’altrove concorreva e non volle il Re essere trattato come è di costume dei Re e persone grandi della Francia prohibendolo espressamente per suo testamento cioè di tenere il corpo del Re morto, o l’effigie sua al naturale, in un simile letto con gran pompa per spatio di 40 giorni continui, servendolo a tavola, e di tutti gli altri ministerij come si fussi vivo, come seguì pochi mesi sono al cadavero del Cardle di Richelieu. Volse dunque il Re esser trattato privatamente e nè meno esser vestito col manto Reale, nè con Corona, o scettro. A piedi del letto era una gran Croce d’oro ritta, con 12 candellieri similmente d’oro con candele accese, et a i quattro angoli del letto erono da capo due guardie scozese dette del corpo, con la loro sopra veste ricamata, coperta [p. 190] di velo nero, con le loro partigiane, e da piedi due Araldi d’arme con le loro sopra veste di velluto con gigli d’oro coperta del medesimo velo nero, si come una maza ancora d’argento che tengono in mano, erano a dirimpetto al letto tre Altari, dove continuamente la mattina si celebravano messe, et intorno al letto erano accomodate alcune panche per comodità di molti Padri di diverse Religioni che salmeggiavano assistendovi ancora alcuni Vescovi, e Prelati.
Allato a questa camera ne era un altra non troppo grande, dove mori S. M. Si riscontrorono nel ritorno per la strada molte compagnie di cavalli che andavano a S. Germano per accompagnare il cadavero del Re a S. Dionigi il giorno seguente, come segui accompagnato ancora da fanteria in sul farsi notte con solo trecento torcie e privatamente. »

Rucellai, Giovanni Francesco

Description par Louis Coulon des châteaux de Saint-Germain-en-Laye

« [p. 236] Ce lieu, bien qu’il se puisse vanter d’avoir emprunté son nom d’un saint prélat, aposte d’Angleterre et evesque d’Auxerre, il n’a jamais neantmoins eu [p. 237] tant d’esclat, ny tant de reputation que depuis que les roys l’on fait bastir pour un palais de la Majesté, où messieurs leurs enfans sont elevés, et où ils passent eux mesme la plus agreable partie de leurs beaux jours. Charles V jetta les premiers fondemens du vieil chasteau, qui ayant esté pris par les Anglois durant les troubles de l’Estat causés par les desreglemens du cerveau de Charles VI, se rendit depuis à Charles VII moyennant une notable somme d’argent, qui fut donnée au capitaine anglois, qui le gardoit. François I le fit rebastir comme en font foy les FF couronnées, qui sont peintes sur les manteaux des cheminées.
Ce prince s’y plaisoit fort à cause des longues et larges routes de boys voisins, faites expres pour courir avec plus de plaisir le cef, le sanglier et le chevreul ; mais l’accomplissement et la perfection de cet ouvrage estoit deue à Henry IV, qui n’avoit des pensées et des desseins qe proportionnés à la grandeur de son courage et de son nom. Il fit bastir un nouveau chasteau sur cette croupe de montagne pratiquée sur les flancs du rocher plus proche [p. 238] de la rivière, auquel il n’a rien espargné de ce qui pouvoit relever son honneur, et sa mémoire. Si je voulois m’arrester à descrire tout par le menu, les galleries, les sales, les chambres, les antichambres, les cours, les offices, le jeu de paume, l’eglise, les vignes, les boys, les routes, les montagnes, les valons, les prez, et la petite ville bastie au pied, que la riviere de Seine arrouse de ses eaux, il me faudroit entreprendre un gros volume, qui fut au delà du temps et des occupations d’un voyageur.
Le roy et la reine y ont leurs departemens separés. Dans la galerie du Roy, ce ne sont que plans et descriptions des premieres villes du monde, avec les emblemes et les devises du grand Henry, deux sceptres en sautoir croisez d’une espée, dont l’ame porte, Duo protegit unus. Qu’une espée en la main d’un si grand prince est capable de garder deux royaumes, la France et la Navarre. La galerie de la reine est une vraye metamorphose, ce qu’Ovide a descrit dans ses vers, le peintre l’a icy representé par ses couleurs. Tout y est rare et excellent ; mais qui dit, les grottes de Saint Germain, semble avoir [p. 239] exprimé toutes les inventions de l’art.
Les anciens ont esté nos maistres en plusieurs choses, et nous ne bastissons que sur leurs fondemens ; neantmoins ils ignoroient le moyen de faire monter l’eau plus haut que sa source, et quiconque eust ouvert cette proposition à ces fameux mathematiciens de la Grece, il eus testé rejeté, comme un homme ignorant des premieres maximes de la science. Mais depuis que le sieur de Maconis, president des Finances en la generalité de Lyon, nous en a descouvert les secrets, nous ne sommes plus en l’erreur de nos ancestres, qui croyoient que l’art et l’industrie s’estant d’autrefois espuisez à faire des miracles, ne produisent plus rien de nouveau, et qu’il n’y avoit que la nature, qui eust cette avantage d’enfanter tous les jours de nouveaux monstres.
Par le moyen de cette elevation d’eau, les grottes hautes et basses pavées et encroustées d’huistres, et de coquilles sont si plaisamment et innocemment trompeuses que les regardans se sentent plustost mouillés, qu’ils n’ayent veu les nuées. Dans la premiere est une table de marbre, ou par l’artifice d’un entonnoir s’elevent en l’air [p. 240] des coupes, des verres, et autres vaisseaux bien formez de la seule matiere de l’eau. Proche de là vous voyez une nymphe de bonne grace, et d’un visage riant, qui laissant aller ses doigts au mouvement que l’eau leur donne, fait jouer des orgues avec autant d’harmonie et de concert, que ceux qui les mirent les premiers en usage dans les eglises de France sous Louis le Debonnaire. Il y a pres de la fenestre un Mercure, qui a un pied en l’air, et sonne d’une trompette, comme s’il avoit changé de naturel pour s’accommoder à l’humeur guerriere du prince qui l’a receu dans son chasteau, et qu’il animast les François au combat, luy qui ailleurs porte les marques de la paix en sa main, et les traités en sa bouche.
Si vous entrés dans un autre, vous rencontrés d’abord un dragon qui, battant des aisles, jette des torrens d’eau de la bouche, il n’a point d’autre venin. Autour du dragon vous avez une quantité d’oyseaux, que vous jureriez estre naturels et sans artifice, qui sont un ramage plus agreable que celuy des forests, surtout le rossignol se tue d’emporter le dessus, comme s’il vouloit charmer ce dragon [p. 241] par la douceur de son chant. D’un autre costé, vous avés le plaisir de considerer dans le bassin d’une fontaine l’appareil d’un triomphe marin, mille poissons les uns en escailles, les autres en coquilles, repliés et entortillés les uns dans les autres, comme les flots qui les portent, et au milieu de cette troupe, s’eslevent deux tritons, qui jouent de leur trompe, devant le chariot d’un Neptune qui le suit en posture de roy, la couronne de jonc en teste, le trident en une main, les resnes de ses chevaux en l’autre, qu’il manie et gouverne en maistre. Vous voyez aussi des forgerons, le visage tout crasseux, et barbouillé de suye, qui battent le fer sur une enclume à grands coups de marteau. On pouroit dire que ce sont des cyclopes, qui forgent des armes au roy, comme ils en ont forgé chez les poetes pour Achille et pour Enée.
Un peu plus bas se void une autre grotte, qui est la sale d’Orphée, où ce chantre anime les bois, les rochers, les bestes et les oyseaux, et leur inspire un certain mouvement de joye, qui leur fait allonger les flancs et la teste, tremousser des ailes, hausser et abbaisser les branches, et danser [p. 242] à la cadence, comme dans un balet. Les douze signes du zodiaque y marchent avec les mesmes regles que les estoilles au ciel. Bacchus assis sur son tonneau, et tenant le verte en main, convie les assistans à bois à la santé du prince ; mais fort peu luy font raison, car ses caves ne sont pleines que d’eau. »

Coulon, Louis

Description par Claude de Varennes des châteaux de Saint-Germain-en-Laye

« [p. 191] Estant à Paris, il faut aller voir les lieux les plus remarquables qui en sont proches. Outre Fontainebleau, dont nous avons desja parlé, Saint Germain, qui n’en est qu’à 5 lieues, doit estre visité. Le premier bastiment est deub au Roy Charles V, dit le Sage. François I, qui se plaisoit fort à la chasse, remit ce chasteau, ou maison royalle, qui est tres belle et d’un fort bon air. Il y a un beau bois taillis, complanté de chesnes, et en un coing, qui regarde le bourg, se montre une table de pierre fort grande où fut traittee quelque trahison, qui faict que le bois en est appellé le bois de trahison. Le nouveau bastiment est fort magnifique et royal. On y void six galeries et 4 ou cinq grottes sousterraines. Un Oprhée avec sa lyre faict sortir toutes sortes de bestes sauvages qui s’arrestent à l’entour de luy, et les arbres flechissent et s’enclinent : le Roy suit avec le Dauphin et autres personnes. Secondement, une fille joue d’une instrument [p. 192] de musique par l’artifice et mouvement des eaues, et plusieurs oyseux artificiels chantent fort melodieusement. 3. Un Neptune fort armé de son trident, et assis sur un char au son d’une trompette sonnée par deux anges : le char est trainté par deux chevaux. 4. Persée delivre Andromede, et frappe un monstre marin de son espee. 5. Un dragon mouvant ses ailes leve sa teste, et l’abbaissant vomit et jette quantité d’eau, pendant que les rossignols artificiels chantent fort doucement. On y void aussi une grotte seiche, pour y prendre le frais pendant les chaleurs de l’esté. Les galeries et chambres sont ornées d’autres statues et peintures. »

Varennes, Claude (de)

Description par Paul Merula des châteaux de Saint-Germain-en-Laye

« Inter Possiacum et Lutetiam Fanum est D. Germano consecratum, quod vulgo S. Germain en Laye : Opidum nonnullius antiquitatis. Arcis fundamenta jecit, vel saltem, ut quidam volunt, Arcem restauravit Karolus V Francorum Rex. Restituit etiam Franciscus I, Venationibus addictior. Superat omnes Regias Domos ; Aeris saluberrimi. Nullius censetur Dioecesios. Silva adjacet caedua, Quercubus consita ; que vulgo Le Bois de Trahison. In ejus angulo, qui opidum ipsum respicit, Mensa Lapidea mihi monstrata praegrandis, ad quam Proditio fertur concepta : quae qualis fuerit et a quibus facta, malo ab aliis explicari, quam in re fatis dubia et incerta errare. Quod quidam narrant Silvae ramos, si in Sequanam projiciantur, statim, Lapideum instar, fundum petere, non ego sum expertus : ideoque nihil temere volo adserere. »

Merula, Paul

Récit par un jeune gentilhomme morave de sa visite à Saint-Germain-en-Laye

« Die… 5 vel 15 transivimus Argenteuil 1 mil. Inde Sainct Germain 3 mil… jentavimus et vidimus aedificia pulchra quae demum extruuntur. Praeterea fontem artificiosum ex conchis, cochleis et aliis pretiosis materiis ornatum. In medio est draco ex quo undique profluit aqua : quando effluit aqua, canunt aves. Alium fontem in quo, ex omnibus partibus infra et supra fluit aqua. Elegans palatium, variis picturis ornatum, ubi ab una parte alia est imago : ab altra est etiam alia, et tales sunt 7. Inter alia, ab una parte est virgo, ab altera diabolus. Cubiculum in quo est depicta Gallia aegrotans quam venit modernus Henricus 4 consolaturus. In integrum, re titubante (sic) ducit ad manum, habens in capite coronam, in manus aliam gerens impositurus Gallias convalescenti. Deinde ab altera parte sed et Rex depictus in sua majestate, tenens in dextra scipionem justitiae, in sinistra vero Regnum sceptri. »

Description des locaux utilisés par les gardes du corps du roi à Saint-Germain-en-Laye, comprenant le château

« [p. 361] Le château servit, en 1815, de quartier à un corps anglais de dix mille hommes qui trouvèrent moyen de s'y caserner. Depuis il reçut une des compagnies des gardes du corps du Roi.
L'extérieur du château conserve encore un aspect imposant par sa masse. Il occupe une superficie d'un hectare cinquante-cinq ares seize centiares. La face du côté du parterre est gâtée par une avance en pierre de taille, qui renferme des lieux d'aisance. Celle sur la place dite du Château, bâtie par François Ier, est en pierre, et en conséquence d'une décoration différente du reste du bâtiment, partout ailleurs en pierre et en brique. De vastes fossés l'enferment, un balcon de fer, placé en 1668, et faisant le tour de l'édifice à la hauteur du premier étage, en est un des plus utiles ornemens.
Plusieurs écrivains assurent que la forme d'un pentagone irrégulier a été donnée à la cour du château par une galanterie de François Ier, qui voulait qu'elle ressemblât à un D gothique, première lettre du nom de Diane de Poitiers. Cette supposition n'a rien de fondé. Au lieu de chercher de la finesse et de la galanterie jusque dans une masse de pierres, il est bien plus naturel de présumer qu'on a multiplié les faces du château, peut-être dans un but stratégique, ou pour augmenter les points de vue, qui sont de tous côtés admirables.
On retrouve encore aujourd'hui, à travers plusieurs constructions plus ou moins nouvelles, des parties de la forteresse bâtie par Louis-le-Gros. A deux étages de profondeur sous la cour, on découvre [p. 362] les restes d'un escalier, avec les fondemens et les premières assises d'une tour qu'il desservait.
C'est tout ce qui en subsiste. Quant aux preuves que François Ier a fait travailler au monument qui nous occupe, elles se montrent dans les chiffres et les salamandres sculptés en divers endroits, et particulièrement sur les cheminées.
Du reste, les réparations que nécessitent les diverses destinations du bâtiment font disparaître tous les jours les témoignages de son antiquité. Une balustrade en pierre, avec des pilastres de distance en distance, existait sur la terrasse supérieure et régnait autour ; comme elle exigeait de grandes réparations, on a jugé à propos de la supprimer lors de l'établissement de l'école de cavalerie, et de la remplacer par un mur d'appui. Le clocher, renversé entièrement par la foudre, en 1683, ne fut point relevé sur le modèle de l'ancien, il fut établi en charpente et recouvert en entier en plomb.
Les distributions intérieures ont été si souvent changées, d'abord par Louis XIV, qui y fit de grands embellissemens, ensuite par les divers gouvernemens qui se sont succédé depuis 1789, qu'on n'y reconnaît que très peu de chose de celles qu'avait ordonnées François Ier. On retrouve cependant encore à l'ouest la grande salle qui servait pour les bals et les spectacles de la cour. Cette pièce, de cent quarante et un pieds de longueur sur quarante de largeur, est éclairée par huit grandes croisées, quatre sur la cour et quatre sur la place en face de l'église neuve. On voit encore sur la cheminée une [p. 363] salamandre en relief et les armes de François Ier. Elle sert aujourd'hui de salle pour l'appel des gardes du corps, lorsque le mauvais temps ne permet pas de le faire dans la cour.
Les appartemens royaux établis par Louis XIV, qu'on aimerait tant à reconnaître, à parcourir, et qui seraient aujourd'hui pour nous remplis de tant de souvenirs, ont été à leur tour, malgré le nom puissant qui semblait devoir les défendre, tellement divisés et subdivisés, qu'il est impossible de reconnaître même l'emplacement de la plus grande partie. Il est certain que toute la face de l'est était occupée par les pièces principales et d'apparat, telles que la salle du trône, celle des ambassadeurs, etc., et que les appartemens particuliers du monarque étaient à l'ouest.
L'appartement d'Anne d'Autriche était situé au premier étage, dans le pavillon du fond à l'est, ayant vue sur le parterre et la terrasse. Le salon sert aujourd'hui de salle de théorie pour les gardes du corps ; le conseil de la compagnie tient ses séances dans la chambre à coucher de la reine qui est à la suite. Dans ces deux pièces on retrouve encore les marbres des cheminées tels qu'ils étaient autrefois, mais c'est tout ce qui reste de leur ancienne magnificence. Les tableaux et peintures qui les décoraient, ainsi que ceux des autres appartemens, et même de la chapelle, ont été transportés à Paris, en 1802, par ordre du ministre de l'intérieur.
Le boudoir est encore garni des boiseries du temps. Les placards d'armoires de chaque encoignure contiennent [p. 364] la bibliothèque des gardes du corps. Une partie des livres qui la composent a été donnée par le ministre de la guerre, et l'autre par M. le duc de Gramont.
La dauphine Marie Anne Christine Victoire de Bavière, femme de Louis de France, habitait l'entre-sol, dans le pavillon de l'Horloge : c'est celui qui est le mieux conservé. Les sculptures dorées, les corniches ornées de dauphins, les marbres précieux des cheminées, en brèche et en sérancolin, sont en très bon état, à l'exception des fleurs de lys qu'on a fait disparaître. Les anciennes boiseries dorées du boudoir, sur les panneaux desquelles on voit encore les chiffres A. M. V., sont un peu dégradées. Un petit oratoire qui y communique a conservé aussi son ancienne décoration : dans la niche où était le prie-Dieu, on retrouve, sculptés sur bois, les attributs de la passion.
On prétend que Jacques II, pendant son séjour en France, occupa le logement de la dauphine. Cette allégation n'est pas juste, car tous les auteurs du temps disent que les appartemens de Louis XIV étaient-devenus ceux du roi d'Angleterre, et que ce dernier donnait ses audiences dans les salles du trône et des ambassadeurs.
Une des pièces de cet appartement sert de salle de réunion à la compagnie des gardes du corps, et les autres sont occupées par un maréchal des logis.
Au troisième, dans le pavillon de l'est, au fond de la cour, était l'appartement de madame de Montespan, dans lequel on voit encore les anciennes [p. 365] cheminées en bon état. Le boudoir, garni de boiseries dorées, est très bien conservé. Un petit escalier dérobé, qui conduit aux étages inférieurs, paraît être celui par lequel Louis XIV parvenait chez sa favorite.
L’appartement de madame de Montespan est généralement désigné comme ayant été celui de madame de La Vallière. C’est une erreur qu’il est facile de démonter : il est placé dans l’un des pavillons construits en 1680 ; or, madame de La Vallière, qui prit le voile de novice le 2 juin 1674 et prononça ses vœux le 4 juin de l’année suivante, ne put l’occuper six à sept ans avant qu’il fut construit. Comme toutes les filles d’honneur, elle logeait dans les combles ; et si on voulait trouver sa chambre, il faudrait la chercher dans celles situées dans ces parties, à l’une des deux encoigneures de la face du parterre. Effectivement, il y a aux fenêtres donnant sur la terrasse supérieure du château des grilles qui paraissent être du temps où madame de Navailles reçut ordre d’en faire placer aux fenêtres de toutes les filles d’honneur.
Par suite de la même erreur, on ajoute qu’il y avait au plafond du boudoir une trappe s’ouvrant sur la terrasse du château, par laquelle on prétend que le roi s’introduisait chez madame de La Vallière. Ce conte se réfute parce ce que nous venons de dire, ensuite la voûte a peut-être en cet endroit quatre à cinq pieds d’épaisseur, et est surmontée par un comble en charpente couvert en tuiles et en ardoises. Jamais il n’y a eu de trappe en cet [p. 366] endroit, et ce qu’on nombre comme en étant l’emplacement n’est que celui d’un tableau de plafond.
Dans toutes les constructions féodales, il existait une de ces redoutables prisons d’état, connues sous le nom d’oubliettes, et dans lesquelles un malheureux une fois descendu était perdu sans retour. Celles de Saint-Germain, aussi anciennes que le château, ou qui datent au moins de François Ier, étaient adossées à l’épaisseur d’un pilier en pierre qui supporte les retombées des voûtes d’une partie du pavillon dit de l’Horloge, qui n’était autrefois qu’une tour flanquant les ailes nord et ouest de l’édifice. Ces oubliettes, dont une partie existe encore, avaient six pieds carrés, descendaient à dix pieds au-dessous du niveau des caves qui ont deux étages l’une sur l’autre, et s’élevaient jusqu’au premier étage du bâtiment. La hauteur en a été interrompue au niveau du rez-de-chaussée par les constructions faites sous Louis XIV. Les murs qui environnent ces oubliettes ont jusqu’à vingt pieds d’épaisseur, par suite des additions qu’il a fallu faire pour joindre le pavillon au corps de l’édifice.
L’entrée de ce gouffre, dans lequel ne pénétrait pas même l’espérance, était fermée de deux portes ; l’une, de six pouces d’épaisseur et doublée en fer, a été détruite lors de l’établissement de l’école de cavalerie ; la deuxième fut conservée. A cette époque, les oubliettes furent comblées jusqu’à la hauteur du sol des caves. Quelques marches qui existaient encore et qui servaient à descendre dans cette fosse, [f. 367] indiquaient à quel funeste usage elle était employée.
Sur les murs de ce souterrain, on remarquait avec douleurs des armoiries grossièrement sculptées par des mains inhabiles. Ces ouvrages étaient les délassemens de quelques malheureux prisonniers à qui il ne restait que ce moyen de faire connaître à leurs successeurs dans ce lieu sépulcral, qu’ils y avaient gémi avant eux et y avaient subi la mort qui les y attendait.
Plusieurs grilles, placées à diverses hauteurs dans le mur principal du puits de descente, fermaient autant de cachots obscurs qui ne recevaient d’air que par l’ouverture du gouffre. Depuis Louis XIV, ces cachots ont été transformés en de vastes caves qui communiquent aux fossés du château.
La chapelle, de construction dite improprement gothique, fait partie de la masse du château et ne s’élève qu’à la hauteur de son second étage. Elle est entourée de corridors et d’escaliers qui y communiquent par des portes inaperçues de l’intérieur. Elle a environ quarante pieds de hauteur, trente de largeur et soixante-dix de longueur. La voûte est soutenue par des piliers ornés de fuseaux du même style que le reste du bâtiment et qui se croisent dans tous les sens. La coupole du chœur se distingue par sa légèreté ; des rosaces en pierre, fort bien sculptées, et laissant apercevoir une tête couronnée au centre de leur assemblement, servent de clefs aux différens arcs de la voûte. L’intérieur de ce temple est éclairé par des ouvertures garnies de [f. 368] trèfles en pierre et surmontées d’ogives en fuseau.
Nous avons vu comment Louis XIII prit à l’orner un soin tel que son fils, malgré son goût pour les constructions et les embellissemens, n’y trouva rien à faire. La chapelle resta donc comme elle était, et fut soigneusement entretenue quand la cour eut été transportée à Fontainebleau. D’anciens habitants, qui se rappellent encore sa splendeur passée, n’en parlent qu’avec enthousiasme.
Lors de la tourmente révolutionnaire, l’autel fut démoli, les colonnes furent renversées et transportées plus tard au musée des Petits-Augustins à Paris, où on les voyait encore il y a quelques années. Les boiseries du chœur furent brisées, les grilles vendues, les parquets arrachés, les carreaux en marbre de la nef mutilés et détruits, et des inscriptions cachées depuis des siècles aux yeux des hommes furent mises à découvert. Rien ne fut épargné de ce qu’on aperçut et de ce qu’on put atteindre.
Les peintures de la voûte échappèrent cependant comme par miracle à cet affreux désastre. La poussière qui s’échappait des débris qu’on s’empressait d’accumuler forma, en s’élevant, un voile épais qui les déroba aux yeux des destructeurs. Malgré cela, ces peintures n’en sont pas moins perdues en partie pour nous : oubliées pendant quarante ans, l’humidité les endommagea, et nous voyons périr journellement ces chefs-d’œuvre que la faux du temps et les passions humaines, plus cruelles encore, avaient jusqu’ici respectés.
[p. 369] Les descendans de saint Louis ne pouvaient laisser dans l’abandon un monument tout plein encore du souvenir de leurs aïeux. Sa Majesté Charles X accorda environ cinquante mille francs pour faire les réparations les plus urgentes, et mettre l’intérieur dans un état de décence tel qu’on y pût célébrer les offices divins. En 1826, M. Meunier, ingénieur militaire, fut chargé de la surveillance des travaux, sous la direction du commandant en chef du génie de la Maison du Roi ; et le 6 janvier 1827, jour de l’Epiphanie, la chapelle fut bénite en présence des autorités civiles et militaires et de l’élite de la population de Saint-Germain.
Nous n’examinerons pas s’il eût été mieux de n’avoir aucun égard aux constructions faites sous Louis XIII, qu’on a tâché de mettre en harmonie avec les travaux modernes ; peut-être eut-il été préférable de prendre pour point de départ les constructions antiques et de conserver à l’édifice son caractère primitif. Nous nous contenterons de dire quelques mots sur cette dernière restauration.
Le maître autel a été replacé sur ses anciens piédestaux qu’on a relevés ; les colonnes en pierre qui l’accompagnent ont été peintes en marbre ainsi que leur couronnement, et rehaussés de dorures et de décors distribués avec goût, les chapiteaux des colonnes dorés en entier, de même que leurs bases. On a restauré les deux tribunes latérales, rétabli les anciennes balustrades de la nef, refait la tribune du fond en la rattachant à ces balustrades que l’on a redorées. Sous cette tribune, où il y avait [p. 370] autrefois six colonnes qui produisaient un bel effet, on n’en a replacé que deux, ce qui nous semble moins heureux. On a refait la boiserie du chœur seulement, d’après les données qu’ont pu fournir les débris des anciennes. On a remplacé par des mitres entourées de guirlandes les décorations des quatre portes du chœur, et on les a peintes pour leur donner le ton de la boiserie neuve. Cette peinture était nécessaire sans doute, mais elle empêche de reconnaître de suite la beauté du travail et force l’observateur à la chercher.
Le bénitier paraît être aussi ancien que la chapelle, et peut-être date-t-il de l’époque de sa construction : il est en marbre et a la forme d’une coquille ouverte. Ce n’est pas l’objet le moins intéressant pour ceux qui aiment à remonter dans les siècles écoulés et à chercher dans les objets qui les ont traversés le souvenir de ceux qui les illustrèrent.
On regrette que les niches latérales du chœur soient restées vides, et qu’on n’ait rien placé sur chaque groupe des colonnes de l’autel, où étaient autrefois les deux anges adorateurs. Les vitraux, qui étaient en verre ordinaire, ont été remplacés par des panneaux avec bandelettes en verre de couleur, dont les reflets produisent un effet avantageux sur les bordures des piliers. Une grille simple et de bon goût sépare le chœur de la nef, dont les murs ont été peints en marbre blanc, mais avec moins de talent que le maître autel, où la vérité d’imitation laisse peu à désirer. Le chœur est planchéié et la nef pavée en carreaux de marbre [p. 371] noir et de pierre de liais. On a cherché à marier les dorures neuves qui vont jusqu’au-dessus des tribunes avec les anciennes dorures des voûtes.
Quant aux tableaux de la nef dont nous avons parlé, et qui se détériorent tous les jours davantage, on les a raccordés çà et là par quelques coups de pinceaux qui sont loin de leur rendre leur beauté primitive. On a senti combien il était important de restaurer cette partie intéressante. M. Abel Pujol, à qui ce travail a été proposé, demandait, pour l’exécuter, plus d’argent qu’il n’en avait été accordé pour la réparation entière de la chapelle ; il a fallu y renoncer.
Au-dessus du maître autel, on a placé une copie du chef-d’œuvre de Poussin, au lieu de l’original qu’on y admirait autrefois.
Telle qu’elle est du reste, la chapelle du château de Saint-Germain est bien faite pour exciter la curiosité, et elle ne manquerait pas de captiver l’attention, si on lui rendait un jour son ancien éclat.
Ruines du château neuf. Louis XIV ayant établi sa cour dans le vieux château, le palais bâti par Henri IV ne servait qu’aux réunions des assemblées du clergé de France, qui avaient lieu tous les cinq ans. Bientôt, abandonné entièrement, il ne tarda pas à se dégrader, et on n’y fit aucune autre réparation que de relever une terrasse qui s’était écroulée en 1660. Jaloux de posséder une habitation plus moderne sur le terrain qu’Henri IV avait si bien choisi, et sur le lieu même où était né [p. 372] Louis XIV, monseigneur le comte d’Artois obtint, en 1776, du roi son frère, le château neuf et le boulingrin. Les démolitions furent faites en partie, et on commença des travaux qui, interrompus par les événemens de la Révolution, n’ont point été repris et ne le seront probablement jamais.
C’est à travers des décombres et des voûtes enfoncées qu’il nous a fallu aller chercher des traces de l’ancienne magnificence du château neuf. Il est facile de distinguer les restes des constructions premières de celles faites sur la fin du dernier siècle ; mais sur les terrains aliénés, c’est avec quelque difficulté qu’on parvient à retrouver encore des portions des bâtimens. Nous commencerons notre description par les terrasses inférieures.
Les jardins, qui s’étendaient jusqu’au bord de la Seine, sont aujourd’hui des propriétés particulières, où on ne remarque qu’un pavillon d’un étage surmonté par un comble très élevé couvert en ardoises. Le chemin du Pecq aux vignes sépare ces jardins des grottes ; on voit encore, dans les débris d’un mur de terrasse qui borde le chemin, des pierres circulaires et un petit aqueduc. Au-dessus, et vers le milieu, se trouve un bâtiment décoré de niches carrées surmontées d’une partie circulaire et couronné par un autre renfoncement orné de médaillons. Au milieu sont trois arcades donnant entrée à une grande salle, décorée de pilastres portant des arcs doubleaux dont les entre-deux sont revêtus de briques. On voit encore une espèce de réservoir communiquant avec le haut par un soupirail [p. 373] destiné sans doute à la conduite des eaux qui alimentaient les jets placés à l’intérieur.
Dans un enfoncement, en suivant la pente gauche qui conduit au bâtiment dont nous venons de parler, il existe une pièce voûtée en arc de cloître, qui devait être richement décorée. Elle est en assez bon état de conservation, sa partie basse seulement est comblée par un amas de démolitions. Des arcs doubleaux en pierre et des tableaux garnis de coquillages et de nacre portent sur une corniche chargée de moulures. La frise est ornée d’enroulemens où se trouvent des fleurs de lys. Au milieu de chaque face on distingue encore un chiffre composé des lettres M H et de deux palmes croisées. On remarque dans les doubles niches de la nacre et des coquilles qui forment des dessins. A droite et à gauche sont des cariatides. Cette salle offre de l’attrait à la curiosité.
Un avant-corps avec pilastres toscans et piédestaux se rencontre à l’endroit où se termine la pente douce. Le mur soutenant la terrasse est décoré d’arcades entre lesquelles sont des tables saillantes en pierre. Le revêtement extérieur des six dernières est tombé et laisse la maçonnerie à découvert.
Plusieurs pièces de gauche, dont les jours sont en partie bouchés, se trouvent assez bien conservées. Quant à celles de droite, il n’en existe plus rien.
Les pentes douces, ainsi que les terrasses où elles aboutissaient, étaient pavées de petites pierres carrées [p. 374] parfaitement taillées. On en remarque encore plusieurs parties d’une grande beauté.
Sur la sixième terrasse, défoncée en plusieurs endroits par la chute des voûtes inférieures, s’élève un grand bâtiment en pierre qui a été reconstruit pour soutenir la partie qui s’était écroulée sous Louis XIV. La façade est décorée de niches circulaires et terminée par deux avant-corps, d’où partent des rampes sur lesquelles s’appuient les pentes douces qui descendent du haut. Une corniche ornée de consoles d’un assez beau caractère le couronne. L’intérieur est élevé de quatre marches au-dessous du sol ; il se compose de plusieurs pièces où on remarque des stalactites en pierres sculptées. L’extérieur paraît n’avoir jamais été terminé.
Les murs qui s’élèvent au-dessus pour soutenir les jardins sont d’une grande hauteur ; ils sont bâtis en pierre et en brique, mais leur dégradation est telle, dans la partie supérieure, qu’on ne peut en reconnaître le couronnement. A l’extrémité à droite, du côté des vignes, on remarque un petit aqueduc disposé par étages et qui devait communiquer avec ceux qui se trouvaient dans le jardin au-dessus et dont il reste des vestiges. Ce mur est interrompu dans le milieu de sa longueur par un passage qui conduisait au château même.
On voit de même à droite un pavillon carré à deux étages, couvert en dôme. L’extérieur, décoré d’assises, de tableaux en pierre et remplissage en brique, avec une corniche de bon style, produit [p. 375] encore un bel effet. Le rez-de-chaussée renferme une salle dont la voûte est enjolivée de coquillages, de nacre et de petites figures en relief. Un escalier conduit au premier étage qui forme la chapelle du château. On y trouvait, il y a peu d’années, de très beaux restes des ornemens qu’on y admirait autrefois. Ce pavillon ayant été loué par bail emphytéotique, on a voulu en faire une maison d’habitation, et pour y parvenir on a coupé la chapelle sur sa hauteur par un plancher, et divisé le bas en un petit appartement. Malheureusement ces travaux ont fait disparaître ce qu’il pouvait y avoir de curieux. Le Domaine, rentré depuis peu dans cette propriété, va établir dans les constructions faites par le locataire les bureaux d’un architecte attaché à son administration.
On peut encore voir, à gauche de la chapelle, une baie pratiquée dans un mur de soutènement qui donne entrée à un caveau octogone bien conservé et parfaitement sec, quoique couvert de plus de six pieds de terre.
La partie gauche, qui correspond à ce que nous venons de décrire, était en tout semblable à celle-ci pour l’ensemble des constructions ; devenue depuis longtemps une propriété particulière, la distribution intérieure ne présente plus rien de ce qui existait.
Les bâtimens qui font face au parterre et à la grande terrasse ont été élevés sur les fondations de ceux du château neuf. Le rez-de-chaussée de la maison dite Hôtel du vieux château a subi peu de [p. 376] changemens, et le pavillon qui est situé dans la même propriété est un des six qui bordaient la cour principale.
Voilà tout ce qui survit de tant de grandeur et de magnificence, d’un palais bâti par Henri IV et dans lequel est né Louis XIV ! On ne trouve plus que des morceaux de décombres que le temps assiège et disperse.
Hôtel des gardes du corps de la compagnie de Luxembourg. Ecuries, manèges etc. affectés aux deux compagnies
L'hôtel situé rue de Versailles a été construit en 1823 et années suivantes, par le Génie militaire de la Maison du Roi, pour contenir environ les deux tiers des gardes du corps de la compagnie de Luxembourg. Il est élevé de cinq étages, et dans une position si heureuse qu'on l'aperçoit de deux à trois lieues.
L'ensemble présente une façade de cent trente-cinq pieds, et une profondeur de quarante-trois. Il est placé perpendiculairement aux grandes écuries, et forme la partie latérale de la carrière de manœuvre. On construit en ce moment, rue de Versailles, un bâtiment qui doit servir de succursale à celui-ci, et offrir les salles nécessaires à l'instruction de la compagnie, le logement des officiers inférieurs, les cuisines, etc. A l'extrémité on doit établir une grille qui sera l'entrée principale de l'hôtel neuf, du côté de la rue de Versailles. Ces constructions ont beaucoup embelli ce quartier de la ville.
L’Abreuvoir, qui est à gauche sur la rue de Paris, [p. 377] avait été fait sous Louis XIV, pour en remplacer un ancien existant alors place du Château, il fut reconstruit en 1820, dans l'alignement des écuries de la compagnie de Luxembourg. Le Génie militaire proposa aux autorités municipales d'entrer pour un tiers dans la dépense, et de le rendre commun à la Ville et à la Maison du Roi. On ne sait pourquoi une pareille proposition n'a pas été accueillie avec empressement.
Cet abreuvoir a cent douze pieds de long sur quarante-cinq de large ; il est alimenté par le trop plein d'un réservoir placé intérieurement dans les grandes écuries, et qui approvisionne toute la maison. Un canal dans lequel peut passer un homme, a été pratiqué pour l'évacuation des eaux, et s'étend jusqu'au Pecq, en traversant les écuries, la grande côte de Paris et une propriété particulière. Il a été construit en même temps que le réservoir dont il est la décharge.
Le long de l'abreuvoir est une auge d’environ cent pieds de long, portée sur des dés. Deux bornes d'extrémité en font le principal ornement.
La grille placée en face, et qui a environ cent pieds de large, produit un fort bel effet.
Les Écuries, situées rue de Paris, au coin de la place royale, et qui sont destinées à la compagnie de Luxembourg, étaient celles de la reine : elles sont dénommées actuellement Écuries du roi. Elles ont été bâties en 1766 et peuvent contenir cent soixante-douze chevaux. Elles sont doubles, ont vingt-quatre pieds de hauteur et les râteliers sont [p. 378] placés au milieu du bâtiment. Les fondations, auxquelles on a donné un soin particulier, reposent sur un bon terrain qu'il a fallu aller chercher vers l'extrémité de la rue de Paris, jusqu'à la profondeur de vingt pieds. Les eaux tombent dans le canal qui passe sous ces écuries par des ouvertures placées de distance en distance, et fermées par des grilles de fer.
Ce qui fait le mérite de cette construction, dont la décoration extérieure est originale, sont les facilités qu'offrent les divers passages pour arriver dans la cour intérieure, qui a cent quarante pieds de longueur sur cinquante environ de large ; ensuite l'abondance des eaux que fournit le réservoir qui contient environ vingt muids.
L'aile qui s'appuie sur la côte de Saint-Germain et qui est en potence, renferme le Pavillon d'état-major et le pied-à-terre de M. le duc de Luxembourg. C'était autrefois le logement du prince Borghèse.
En face de ce pavillon, à l'autre encoignure de la place royale, est l'Hôtel de l'état-major de la compagnie de Gramont : acheté en 1814 pour cette destination, il n'a de remarquable que le jardin qui en dépend. On y a masqué avec art les bâtimens adjacens et les anciens murs de soutènement du château neuf. Il réunit une brillante collection de fleurs rares, et une innombrable variété de roses.
A l'angle nord-est du sommet de la grande côte du Pecq, la Maison du Roi fit, en 1814, l'acquisition de terrains pour la construction d'un grand [p. 379] manège couvert nécessaire à l'instruction des gardes du corps, qui n'avaient à leur disposition que l'ancien jeu de paume, insuffisant pour les deux compagnies. Le 11 juillet 1816, M. le duc de Gramont posa la première pierre de cet édifice. Une médaille fut frappée à cette occasion, et un discours analogue à la circonstance fut prononcé par M. le chevalier Carette, capitaine au corps royal du Génie, chargé, avec M. le comte du Moncel, chef de bataillon de la même arme, de la direction des travaux.
Ce bâtiment a cent cinquante pieds de long sur cinquante de large. La charpente du comble est très soignée, et construite à la manière de Philibert de Lorme. Une coupole, formant tribune à l'extrémité du manège, sert aux personnes qui veulent assister aux manœuvres sans descendre dans l'intérieur. Les croisées qui éclairent cette coupole, espacées symétriquement sur une demi-circonférence, dominent toute la côte du Pecq.
Vis-à-vis le grand manège, entre l'avenue du boulingrin et la rue de Paris, se trouve la grille de sortie des anciennes grandes écuries du roi, qui complètent aujourd'hui, sous la dénomination d'Écuries des gardes du corps du roi de la compagnie de Gramont, le casernement de cette compagnie. L'entrée principale est sur la rue de la Verrerie.
Elles sont composées de deux corps de bâtiment élevés dans un vaste manège découvert, l'un du côté de l'hôtel du Maine, l'autre formant un côté de la rue de Paris, depuis la rue de la Verrerie [p. 380] jusqu'à la côte. Les extrémités ont été construites en même temps que la côte de Saint-Germain et la place circulaire qui annonce l'entrée de la ville. La distribution intérieure est en tout point vicieuse : les pièces sont, les unes basses, les autres élevées, les unes petites et pouvant à peine loger cinq chevaux, d'autres vastes et susceptibles d'en recevoir cinquante. Malheureusement l'état des choses est tel qu'il est impossible d'y remédier.
Pendant la Révolution, et jusqu'à l'installation de l'école spéciale de cavalerie du château, ces bâtimens, et le jeu de paume dont on fit un manège, servirent à la troupe lorsqu'il y en avait en garnison. Depuis cette époque, ils furent soumis à la même administration que le château, dont ils étaient une dépendance.
La grande cour est d'une utilité majeure pour la cavalerie. Elle offre une superficie d'environ treize cents toises.
En suivant la rue de la Verrerie depuis le chenil jusqu'à la rue de Paris, il n'existait autrefois que l'hôtel du Maine ; mais une portion en ayant été vendue pendant la Révolution, il n'est resté que les écuries, rétablies en 1814, et une partie du terrain sur lequel on construit, aux frais de la Liste civile, de nouvelles écuries.
Le Jeu de Paume, bâti sous Louis XIV pour l'amusement des seigneurs de sa cour, a soixante pieds de long sur vingt-cinq de large : les croisées qui l'éclairent sont à vingt-cinq pieds du sol. Du côté du nord, il est mitoyen avec une maison occupée [p. 381] autrefois par le contrôleur des Bâtimens royaux, maintenant l'Hôtel des Étrangers ; derrière était une vaste cour de cinquante toises de longueur sur trente de largeur. Au sud, le Jeu de paume s'appuyait sur une dépendance du Chenil, remplacée en 1818 par une maison où sont établis les bureaux du Génie militaire.
Le Jeu de paume sert actuellement de manège pour le dépôt de la compagnie de gardes du corps qui est de service, le grand manège étant réservé pour celle qui tient garnison dans la ville.
Parterre
François Ier fit abattre, autour du vieux château, les arbres qui masquaient le point de vue. Ils furent remplacés, vis-à-vis de la façade nord-ouest, par un jardin de peu détendue que
Louis XIV fit agrandir en 1674 et planter en parterre, sur les dessins de Le Nôtre. Il se composait de deux grandes pièces de buis, où étaient des bassins de quarante pieds de diamètre placés l'un en face de la Surintendance, vis-à-vis le pavillon du château dit de l'Horloge, et l'autre vis-à-vis du pavillon de l'est. Ils étaient environnés de plates-bandes garnies de fleurs de toutes les saisons, et séparés par une allée de dix toises de largeur se dirigeant vers les Loges, et au bout de laquelle on voyait un troisième bassin de quatre-vingts pieds de diamètre. Ce jardin, entouré de contre-allées de tilleuls et de marroniers d'Inde , qui fournissaient une délicieuse fraîcheur, était séparé de celui de la dauphine par un bosquet charmant, [p. 382] par quatre rangs d'ormes et par une orangerie garnie des arbrisseaux les plus rares. Une vaste allée de marroniers conduisait de l'extrémité du parterre à la grande terrasse.
La façade du château avait été mise en harmonie avec ces plantations : un perron de quatre-vingts pieds de large régnait sur toute la largeur du jardin. A la place de la grille qui fait face à la route des Loges, était un perron de cent soixante pieds de longueur, surmonté de deux autres de vingt pieds chacun.
Ces plates-bandes et ces perrons n'existent plus ; les bassins et jets d'eau avaient besoin de réparations, on les a comblés en 1750 ; les buis et le bosquet ont été arrachés; l'orangerie a été démolie à la même époque ; le jardin de madame la Dauphine a aussi disparu : une partie des grilles qui le fermaient a été placée en face de l'avenue des Loges, et le reste fut donné au duc d'Ayen pour son hôtel. On a caché par une haie le mur qui sépare le parterre de la forêt ; entre cette haie et ce mur il existe un espace dans lequel se trouvent un jardin assez mal entretenu et deux glacières qui dépendent du domaine royal.
On doit au maréchal de Noailles, long-temps gouverneur de Saint-Germain, les grilles principales du parterre et celles qui séparent la ville des issues de la forêt.
Le Parterre, qui ne devrait plus porter ce nom, puisqu'on y chercherait en vain une fleur, est cependant encore une très belle promenade. Sa superficie [p. 383] est de douze hectares dix-neuf ares trente centiares. Le long des fossés du château s'étend en pente un terrain plus élevé que le sol ; au bas, se trouvent deux pièces de gazon formant une vaste pelouse, terminée à gauche par des maisons particulières et par une allée de tilleuls; à droite, par une allée semblable, au-dessus de laquelle domine majestueusement la cime des marroniers ; à l'extrémité est une grille. Au bout de la pelouse à droite, s'ouvre une magnifique allée placée parallèlement au château, et aboutissant à la petite terrasse qui se trouve entre le château neuf et la place Dauphine : c'est le lieu de réunion et la promenade favorite des fashionables de la ville.
De la grande allée au vieux château, est un vaste quinconce planté de jeunes tilleuls et entouré d'allées doubles. Au centre on a réservé une place autour de laquelle sont plusieurs bancs de pierre.
Il y avait une entrée du Parterre qui venait de la rue du Château-Neuf, passait près des fossés du château, et conduisait à une superbe avenue de marroniers parallèle à la terrasse et correspondant à une grille sur la forêt. On ne sait trop pourquoi ce chemin est coupé par un jardin dont on laisse la jouissance à un particulier : c'est un abus manifeste, qui enlève aux promeneurs l'effet admirable que produisent les allées et contre-allées plantées dans cette direction, et qui d'ailleurs intercepte le chemin de ronde du château.
Terrasse
Cette magnifique promenade, construit [p. 384] en 1676 par Le Nôtre, s'étend, sur une longueur de douze cents toises et sur une largeur de quinze, depuis le château jusque une des portes de la forêt qu'elle longe dans toute son étendue. La partie qui touche à la futaie, plantée en 1745 d'une ligne de beaux arbres et d'une charmille, donne un agréable ombrage aux promeneurs. La partie opposée, appuyée dans toute sa longueur sur un mur de soutènement et bordée d'un garde-fou en bois, offre une perspective immense dont la variété de ses aspects fait un des plus beaux points de vue de la France et peut-être de l'Europe.
D'un côté, le spectateur découvre entre le coteau et le lit onduleux de la Seine qui se déroule à ses pieds comme un ruban d'azur, le château de Maisons, les villages et hameaux du Mesnil, Vaux, Carrières-sous-Bois, le Belloi, le Pecq, le château et la ville de Saint-Germain, le Port-Marly, la pompe à feu, et l'imposant aqueduc qui semble suspendu dans les nuages, l'île de la Loge, Prunai, Louveciennes, Voisin-le-Bois, la Celle, Bougival, la Chaussée, la Jonchère, Ruel, Nanterre, la Malmaison et le Mont-Valérien.
De l'autre côté du fleuve, et vis-à-vis le Mesnil, les yeux se reposent sur les villages d'Herblai,
Montigny, la Frette, Cormeil, Sartrouville, Houille, Montesson, le bois du Vésinet, Croissy, Chatou, Argenteuil, les tours de l'antique abbaye de Saint-Denis, et dans le lointain s'élève le dôme doré des Invalides, étincelant des feux du soleil. Sous les yeux, et tant que la vue peut s'étendre, se déploie [p. 385] une multitude de cultures aussi riches que variées, animées par une population partout en mouvement.
Tel est ce superbe point de vue dont on pouvait tirer un si beau parti, que Louis XIV dédaigna ou ne sut pas apprécier, et dont les étrangers viennent admirer la majesté imposante.
La Terrasse n'est pas le seul endroit de Saint-Germain d'où l'on jouisse d'un coup d'œil magnifique : du côté de la rue des Ursulines et de celle de Mantes, le paysage est très varié, et orné de tableaux gracieux. Si, en ménageant une ouverture pour la grande côte, on eût prolongé la Terrasse depuis le château neuf jusqu'à l'extrémité de la rue de la Grande-Fontaine, de manière à ce qu'elle embrassât toute la partie sud et sud-ouest, il est certain que cette ville eût possédé une promenade plus susceptible encore d'étonner le voyageur. »

Goujon, Abel

Description par Louis Le Laboureur du petit appartement du roi au Château-Vieux de Saint-Germain-en-Laye

« [p. 1] Mademoiselle,
Je ne veux point vous surprendre, preparez vous [p. 2] à lire une grande lettre ; mais si le discours en est long, la matiere en est belle. Avec cela c'est une piece que l’on a souhaitée de moy ; et en voicy l’histoire en peu de mots. Nous avons eté ces jours passez voir de petits cabinets que le Roy s’est fait faire depuis peu à Saint Germain. O la belle chose ! un de vos amis qui se trouva tout proche de cet admirable lieu, et qui y entra avec nous, veut que je vous en fasse la description. Pour moy je ne say [p. 3] pas à quoy il pense. Il auroit bien meilleure grace de faire luy meme ce qu'il conseille aux autres ; et j’ai vingt raisons pour l'en convaincre, dont la moindre est qu’il a cent fois plus d'esprit que moy. Mais il n’importe, la chose est resolue ; je lui veux obéir, et vous montrer à tous deux en cette occasion que rien ne m'est impossible quand il s’agit de vous satisfaire.
Vous savez bien que ce chemin si clair
Qu’on voit au ciel pendant la nuit obscure,
Meine au Palais du grand dieu Jupiter,
Comme un auteur digne de foi l'assure ;
[p. 4] C’est Ovide, et cela suffit.
Mais vous ne savez pas peut estre
Qu’à Saint Germain, tant le jour que la nuit,
Depuis deux ans on en voit apparaître
Un autre en l’air qu’a voulu qu’on y fît
Monsieur Colbert, des Bâtiments le Maître.
Il est si beau, si belle en est la vue,
Qu'en y passant, les yeux sont eblouis !
Et ce chemin meine et sert d'avenue
Aux cabinets de notre grand Louis.
C’est un haut et magnifique balcon que l’on a fait au vieux château, le long des appartements du Roy et de la Reine, du côté qui regarde le nord. Cette piece apporte tant d’ornement et tant de commodité à ce palais, qu’on la croit aussi ancienne que [p. 5] tout le reste du bâtiment. On se persuade qu’elle y a toujours été, parce qu’elle y devoit toujours etre ; et c'est ainsi que l’on est surpris tous les jours en voyant le succez des ordres de ce genie universel qui prend le soin de ces choses, et qui sait si bien donner la dernière perfection à tout ce qui dépend de son ministere.
Toute la cour donne le nom de terrasse à ce balcon ; et en effet, il est assez large pour meriter qu’on l’appelle ainsi. Vous pouvez [p. 6] juger, apres la promenade que vous avez faite ici pendant la saison des cerises, si nous devons nous connoitre en belles vues : quoy qu’il en soit, Mademoiselle, je vous dis maintenant en prose qu’il n’y en a point de plus riche au monde ni de mieux variée que celle qui se presente devant la terrasse dont je vous parle. De là on a le plaisir de se promener des yeux dans les jardins du Roy et à plus de quatre lieues aux environs, dans des valons et sur des coteaux [p. 7] qui font une perspective admirable.
Tant de si doux objets ; une découverte si avantageuse ; le voisinage d’une grande foret et d'une grande riviere ; la pureté de l'air, et je ne say combien d'autres belles choses qui se rencontrent heureusement ensemble à Saint Germain en font aimer le sejour au Roy, et sont cause que le vieux château l’emporte aujourd'hui sur tous les modernes. Voilà ce que c'est que d’avoir eu du commencement la nature [p. 8] favorable ! Cela fait bien voir que ce n’est pas la belle architecture qui rend les palais agreables et qui les fait habiter.
Admire qui voudra la pompe de cet Art ;
La charmante nature a des graces à part
Qui touchent davantage et les yeux et les ames.
On ne peut m’opposer de valables raisons.
Nature fait les belles femmes
Et les belles maisons.
C’est elle qui donne les belles scituations et les beaux paisages ; et comme elle ne fait pas de semblables liberalitez à tous ceux qui batissent, il arrive de là aussi qu’on voit assez de riches bâtiments [p. 9] et peu de belles maisons.
Monsieur Le Brun, avec qui nous avions fait la partie, nous mena d’abord sur cette terrasse : la compagnie fut surprise et charmée d’une veue si accomplie ; et il n’y eut personne qui ne s’imaginât estre passé dans l’ancienne Assirie ou dans l’ancienne Egypte par la machine de quelque songe, et se trouver dans ces jardins suspendus, dont on a fait tant de bruit. Cette vision n’etoit pas si hors de raison qu’on diroit bien, et vous le connoitrez par [p. 10] la suite. On peut de cette terrasse aller à la chambre du Roy, qui s’habilloit alors :
En ce lieu neanmoins parurent peu de gardes ;
La liberté s’y trouvait comme ailleurs ;
Et le nombre des hallebardes
Le cedoit à celuy des fleurs.
Nous y marchions entre deux rangs de lauriers cerises, de tricolors, de jasmins et de tubereuses, et tandis qu’avec un petit cristal dont je me sers pour allonger ma courte veue, je cherchois notre Montmorency d’où nous etions partis, notre conducteur alla s’assurer de l’ouverture [p. 11] des cabinets, et nous vint rejoindre après avoir obtenu la permission de nous y faire entrer.
Il nous falloit passer devant une porte qui repond de la chambre du Roy sur cette terrasse ; elle etoit ouverte et si fort assiegée de courtisans, qu’il n’y avoit presque point de place pour aller au delà. Le roi etoit alors auprès de cette porte, et c'est d’où venoit une si grande presse. Je tachay de le voir en passant, mais ce fut en vain ; l’eclat de sa personne est si [p. 12] grand que j’en fus frappé, même en ne la voyant pas. J’eus beau avoir recours au petit cristal que je tenois à la main, cela ne servit de rien ; au contraire, mon eblouissement s’accrut au lieu de diminuer ; et j’expérimentay ainsi la verité de ces sages paroles qui disent que celuy qui cherche trop curieusement la Majesté sera opprimé par la gloire.
La terrasse finit à trois ou quatre pas au dessous de cette porte de la chambre du Roy, et c’est à cette extremité [p. 13] que commence de ce côté là le petit appartement que nous allions voir. Il est rangé sur une autre terrasse de plain pied qui regne tout le long d’une autre face du vieux château et qui regarde les cours du château neuf. Il y a, au bout de la terrasse où nous etions, une porte qui nous fut ouverte ; et alors nous entrames dans les lieux tant desirez, où je trouvay encore mille autres sujets d’eblouissement.
En effet, je defie l’imagination [p. 14] la plus riche et la plus heureuse de se former une idée de choses qui puissent montrer tout ensemble tant d’art, tant d’esprit et tant de magnificence. Tous les murs et les plafonds sont revetus de glaces et de miroirs avec des quadres et des ornemens dont l’or fait la moindre richesse. On y marche sur des planchers qui seroient dignes de faire la pompe des plus belles voutes et d’etre au dessus des testes les plus superbes. Ce ne sont que des marbres de [p. 15] toutes les couleurs, des ouvrages en mosaique et des parquets de pieces de rapport. On y voit en tous les coins et en cent autres endroits de grands vases d'argent chargés de fleurs, des pilastres et des termes de meme métal qui portent des filigranes d'or : et tout cela me parut si eclatant que, me ressouvenant de la devise du Roy,
Je crus en verité, sans pousser trop les choses,
Estre, par un miracle à nul autre pareil,
Transporté d’ici bas au palais du Soleil,
Tel qu’on le voit baty dans les Metamorphoses :
Mais le Soleil qui brille en ces lieux enchantez
N’a point ces ardeurs violentes,
Qui font en mille endroits deserter les citez,
[p. 16] Qui noircissent le teint, qui fletrissent les plantes,
Qui dans l’aride sein des plaines languissantes,
S’insinuant de tous cotez,
Vont jusqu’en leurs canaux voûtez
Secher les rivieres naissantes ;
Et n’exposent aux yeux des familles errantes
Que des sablons ingrats de bestes frequentez.
L’astre du ciel où nous etions,
Car d’un celeste nom ces beaux lieux semblent dignes,
Ne repand que de doux rayons
Et des influences benignes
Qui font fleurir ses regions.
Au lieu des chiens brulans, des devorants lions,
Des centaures, des scorpions,
Et de telles bestes malignes
Que l’autre visite en son cours,
Celui cy fait regner les beaux arts en nos jours,
Et son zodiaque pour signes
En ce lieu n’a que des Amours.
Mais ces Amours sont instruits à toutes les belles et grandes choses : ils se jouent avec les lions et les léopards ; [p. 17] ils batissent, ils travaillent, ils vont à la chasse, ils manient les armes, et se montrent capables de tout. On en voit de toutes parts qui sont peints sur des glaces, et dont les différentes postures font autant de douces emblemes. Mais ce qui est singulier en tous ces tableaux, c'est qu’étant peints derriere les miroirs, les premiers traits que le pinceau y a couchez forment la figure telle qu’on la voit ; au lieu que dans la peinture ordinaire ce sont les derniers coups [p. 18] de pinceau qui l’achèvent et qui la finissent.
Monsieur de Pellisson, qui etoit au lever du Roy et qui se trouva sur la terrasse comme nous passions, entra avec nous dans ce beau palais des amours. Nous nous y reconnumes tous deux avec autant de surprise que de joye ; les premieres paroles que nous nous dimes furent de vous, et c’est lui qui m'a conseillé de vous faire le recit de tant de belles choses.
Mais pour m'en acquitter avec honneur, il faudroit [p. 19] que je pusse me ressouvenir icy de tout ce que j’en entendis alors dire à monsieur le comte de Nogent. Vous connoissez la modestie de monsieur Le Brun, qui n’est pas moins admirable que ses ouvrages. Il ne parle bien volontiers que des choses qu'il n’a point faites ; et comme celles que nous regardions viennent toutes ou de ses mains ou de sa tête, il se contentoit de nous les montrer sans nous en faire remarquer l’esprit. Monsieur le comte de Nogent, [p. 20] qui nous a fait la grace de nous aimer un peu, et qui voulut bien alors nous venir joindre, y supplea merveilleusement. Il nous expliqua toutes choses, mais avec un esprit qui luy est singulier et à ceux de son nom ; en sorte, Mademoiselle, que si vous trouvez quelque endroit qui vous plaise dans la description que je vous fais, vous luy en devez avoir toute l’obligation.
Jusqu’icy, je ne vous ay parlé que confusement de tout cet admirable bijou ; [p. 21] mais pour vous en donner une idée plus distincte, il faut que je tache d’imiter le bel ordre que vous gardez dans tous les recits que vous faites. Ces cabinets, car je les nomme ainsi, tant à cause qu’ils tiennent peu de place que parce qu’ils sont joints à la chambre du Roy, qu’ils accompagnent ; ces cabinets, dis je, font entr’eux un petit appartement entier par les pieces qui le composent. Aussi le Roy appelle cela sa chambre particuliere, pour en faire la diference [p. 22] d'avec l’autre, qui est ouverte à toute sa cour.
Je vous ay fait entendre que nous y entrames par une porte qui est au bout de la terrasse où nous etions venus d'abord ; mais je vous y veux donner une autre entrée pour vous faire voir chaque chose en son rang, et c’est par la chambre du Roy. Admirez un peu le credit que je me donne icy. Le premier lieu qui se presente de ce coté là est une antichambre, dont les lambris sont tout de miroirs enrichis d'or : il y en a partout, comme je vous ay dit, et jusqu'aux plafonds.
Au milieu du plafond qui est sur l'estrade à l’entrée que je vous ay promise, est le portrait d’une beauté accomplie qui tient une pomme d'or ; et à la voute, qui est au delà de l’estrade et qui est enfoncée d’une maniere d’architecture fort riche, il y a au fond la figure de Junon qui tient un sceptre et qui a un paon auprès d'elle.
De ces tableaux incomparables
L’un, par sa pomme d'or et ses charmes connus,
Represente aux regards ce qu’ils aiment le plus,
Ce juste arrangement de choses agreables,
Ces yeux brillans et bien fendus
Cette bouche, ce nez, ces cheveux admirables,
Ces roses, ces lis répandus
Qui cachent de doux homicides ;
Tous ces pieges enfin subtilement tendus
Où l’on a veu tomber les dieux et les Alcides,
C’est la Beauté.
Et l’autre qu’on a peint sur le meme modelle,
Cette Junon pleine de majesté,
Est la supreme autorité,
Altiere et jalouse comme elle.
Cette dernière figure toute royalle est accompagnée de diverses emblemes qui sont rangées alentour, dans les pans de l’enfoncement de la voûte. Vous ne doutez pas, Mademoiselle, que ces emblemes ne soient [p. 25] peintes avec toute l'excellence de l'art ; mais vous ne savez pas ce qu’elles représentent, et je vais vous l'apprendre. Ce sont les inclinations du Roy. Cela devoit être touché d'une façon poetique qui fut aussi agreable que judicieuse et spirituelle. C’est ce que l'on a fait, et vous l'allez voir.
Comme les diferentes inclinations que l’on a pour les choses sont, à les bien entendre, autant de diferents amours qui y portent les hommes dès leur [p. 26] plus tendre jeunesse, on ne pouvoit pas mieux, ce me semble, figurer celles du roi, toutes sérieuses et toutes grandes qu’elles sont, que par de petits amours appliquez attentivement à ces memes choses. Aussi monsieur Le Brun, qui est un excellent poete en toutes ses peintures, n’y a pas manqué en celles cy. Il s'est tout à fait bien servi de ces petits symboles dans un dessein si vaste, et cela produit le plus agreable effet du monde.
Il a consideré diferemment [p. 27] les inclinations du Roy, les unes comme luy venant de la nature, et les autres comme luy étant données par la raison. Les premieres, telles que la chasse, la musique et la danse, n’ont pour objet que le seul plaisir ; et les autres, comme le commerce et la guerre, regardent le bien et la gloire de l’Etat. Pour representer ces différentes choses, monsieur Le Brun s’est servi partout de memes acteurs, mais qui font de diferentes actions et qui sont toutes [p. 28] proportionnées à leur age, ce qui rend la fiction tout à fait agreable.
Ainsi l’on y voit avec grand divertissement un de ces petits amours chasseurs qui s’est passé la tête dans un cor, qui l’embarrasse ; et un autre qui, aimant la musique, touche une viole de ses doits, et prete en meme temps l’oreille fort attentivement, comme si le son que l’on tire de cet instrument avec la main seule pouvoit estre bien harmonieux.
[p. 29] Surtout je pris plaisir à voir
La posture diverse
De ces jeunes enfants qui marquent le commerce,
Occupez de tout leur pouvoir,
Comme negociants d’un notable savoir,
A tenir leurs journaux, les lire,
Charger, rayer, chifrer, ecrire,
Conter argent, payer et recevoir.
D’autres, pour qui la gloire a de plus nobles charmes,
Dans un quadre opposé cherchent d'autres emplois :
L’un prend l'epée, un autre endosse le harnois ;
Et faisant tous l’essay de quelques pieces d'armes
Montrent qu’ils ont le cœur françois,
Qu’ils aiment les fameux explois
Et qu’ils craignent peu les alarmes.
Mais le peintre savant,
Voulant montrer que bien souvent
Tel se met en campagne et commence la guerre,
Qui ne peut à son gré la terminer après,
En a figuré tout exprès
Un d’entre eux que son casque serre,
Et qui de ses deux bras, trop foibles et trop courts,
Ne pouvant plus l’oter de sa tête enfantine.
Semble appeller à son secours
[p. 30] La troupe voisine
Des autres amours.
De là, à main gauche, est une chambre destinée au repos du Roy, où l’on voit dans l’enfoncement de la voute, qui est faite en coupe, trois petits amours qui sont peints d’une manière inimitable. Ils tiennent tous trois de toutes leurs mains un meme lustre avec un empressement merveilleux ; et quoiqu’ils paroissent fort empeschez à en soutenir le poids, qui est trop grand pour la petitesse de leur corps, la peinture [p. 31] est si artistement faite qu'on apperçoit neanmoins à leurs yeux et sur leur visage la joye qu’ils ont à eclairer le Roy avec ce lustre.
Il y en a quatre autres autour d’eux dans le fond de la coupe ; mais ils ne leur ressemblent pas. Je n’ay jamais rien veu de si opposé : ils ne respectent aucune puissance, et n’epargnent ni les heros ni les dieux memes.
Le premier, pour faire voir qu’il exerce son empire jusque dans les cieux, [p. 32] tient, ce me semble, un cygne et un aigle dont il contraignit autrefois Jupiter de prendre la figure.
Le second, voulant montrer que les enfers n’ont pas moins ressenti aussi son pouvoir, arbore, pour marque de la victoire remportée sur Pluton, le sceptre fourchu de ce dieu, qui, d'ailleurs, representant la richesse, donne par sa defaite un double triomphe à l’amour.
Le troisieme, qui n’est guere moins fier, se rit de la force guerrière, et se [p. 33] fait un trophée des armes de Mars.
Le dernier ne traite pas mieux la force héroïque : il se joue de la depouille d'Hercule ; et, non content de montrer la massue de ce domteur de monstres jettée à ses pieds avec une quenouille, le petit emporté prend encore la peau du lion : il se la met sur la teste et s’en coeffe plaisamment comme s’il en vouloit faire une mascarade.
Sur les cotez de la coupe, on voit les divertissements [p. 34] du Roy qui sont representez par ses maisons de plaisance ; et l'on y remarque entre autres Saint Germain, Versailles et Fontainebleau. Mais, parce que le Roy a bien montré qu’il fait aussi ses plaisirs des travaux de la guerre, on n’a pas oublié d'en peindre une petite image auprès de cette derniere maison, par la representation du camp qu’il y a fait faire autrefois.
Au plafond de l'alcove, qui est entourée de force jeunes amours peints sur [p. 35] les glaces du lambris, on voit le tableau d'une deesse qui n’etalle pas seulement tous les charmes de la beauté sur son visage, mais qui repand aussi de ses mains toutes sortes de pieces d’or et d’argent, et qui a encore derriere elle une corne d'abondance dont il sort quantité d'autres richesses.
Il n’est pas besoin, Mademoiselle, de vous dire que cette nymphe represente la magnificence ; vous devinez des enigmes qui sont bien plus dificiles ; [p. 36] mais que vous semble de la scituation que monsieur Le Brun luy a donnée ? Ne trouvez vous pas qu'il l’a placée bien judicieusement dans le voisinage de tous ces petits audacieux ?
N’en deplaise à tous les amours
Que tant de victoires couronnent,
Cette belle qu’ils environnent,
Prete aux amants de grands secours.
Il y a sur l'estrade un lit à la romaine, dont les rideaux, qui etoient retroussez, sont d'un tissu d'or et d'argent qui me parut un ouvrage aussi nouveau qu’il est riche. Le dossier [p. 37] du lit est un relief d’argent à jour, où l’on voit au coté droit un petit amour qui conte curieusement les dents d’un lion, et un autre de l’autre coté qui tient doucement un leopard au cou. Il y en a un troisieme au dessus d’eux qui est assis sur un aigle au milieu du dossier, d’où il menace tout le monde d’une fleche qu’il tient couchée sur son arc.
Comme les princes et les souverains n’ont point de plus seure garde que l’amour, je m’imagine que [p. 38] celuy là est en faction, et qu’il veille à l’entour du lit du Roy ; mais tandis qu’il est ainsi à l’erte, on en voit quantité d’autres aux glaces du lambris de l’alcove qui sont dans une posture paisible, et qui invitent au repos ceux qui les regardent.
Celuy cy, le doit sur la bouche,
Semble imposer silence à tous ;
Celuy là, fatigué de tirer trop de coups,
Ote son carquois et se couche.
Un, que le grand jour effarouche,
Eteint de son flambeau les feux cuisans et doux.
Un autre enfin, qui n’est ni peureux ni jaloux,
S’endort et fait bien voir qu'aucun soin ne le touche.
Ainsi tous ces amours promettent le repos ;
Et je n’en vis qu’un seul, dans un coin de l’estrade,
[p. 39] Qui se tenoit en embuscade,
Et decochoit un trait dispos.
Mais ce trait est un coup de ùaître,
Que l’illustre Le Brun fait là bien à propos :
Sa pensée est d’instruire, et de faire connetre
Que l’amour est un petit traitre ;
Qu’il s’en faut defier de loin comme de près,
Et qu’en quelque etat qu’on puisse etre,
Il est bien mal aisé d’echapper à ses traits.
Mais ce jeune avanturier n’est pas encore si dangereux ni si formidable que celuy dont je vais vous parler ; il y a bien à dire. Il n'est auprès de lui tout au plus que,
de la plebe degli Dei,
pour me servir des termes de l’Aminte du Tasse ; et l'autre, bien au contraire,
[p. 40] E tra grandi e celesti il piu potente.
En voicy la raison. C'est que le premier n’a qu’un but et qu’une visée, au lieu que cet autre tient au bout de sa fleche quiconque est si hardi que de le regarder. On a beau changer de place et se tourner de tous cotez, on est toujours à sa mercy, toujours à la pointe de son trait ; et y eut il cent personnes à le voir, il les mire tous ensemble et chacun en particulier. D’ailleurs, il n'épargne ni l’habit ni la profession ; et je vous nommeray [p. 41] des gens de notre compagnie qui me parurent tout embarrassez de voir qu’il donnoit sur eux aussi bien que sur les autres.
Pour voir ce mauvais garçon, il faut entrer dans un cabinet qui tient à la chambre que je viens de vous montrer, et qui est la dernière piece de l'appartement. Il est pris dans une petite tour voisine qui fait le coin des deux terrasses dont nous avons parlé : sa figure est octogone, et l’on y voit des miroirs dans tous les lambris, [p. 42] et des filigranes d'or et d'argent rangées sur la corniche qui regne tout autour, comme dans les deux autres pieces precedentes. Il y a encore dans ce cabinet deux grandes figures d’argent, qui sont si hautes et si bien faites, qu’on en demeure tout surpris en entrant.
L’une represente Apollon,
Lors que, dans l'aimable vallon
Où serpente le doux Penée,
Joignant la nymphe qui le fuit,
Il n’a de sa course obstinée
Rien que des feuilles pour tout fruit.
C’est de cette belle fugitive qu’est venu en ligne directe [p. 43] le jeune laurier qui est dans votre jardin, et dont vous m’avez promis une couronne quand il sera plus grand.
L’autre figure est aussi belle,
J’eus bien longtemps les yeux dessus ;
Mais de dire comme on l'appelle,
Excusez moi, de grace, il ne m’en souvient plus.
Le terrible assaillant que je vous ai tant vanté est au plafond de ce cabinet ; et comme ses coups sont inevitables, on ne voit aussi partout sur les glaces du lambris que des emblemes qui ne parlent que de ses prises et de ses conquestes.
[p. 44] Le cœur fidelle qui est representé par une colombe qu’un petit amour tient à la main ; l’humeur altière et la causeuse qui sont figurées par de jeunes amours qui tiennent l'un un paon et l'autre une pie ; enfin, je ne sais combien d’autres diferents symboles de diferents amours sont peints là de toutes parts, comme autant de prisonniers de guerre qui ont eté faits par ce victorieux.
Ne croyez pas, Mademoiselle, qu’il n’ait point d’autre fleche à tirer que [p. 45] celle qu’il presente ; on lui en appreste à tous momens de nouvelles : et c’est pour cela sans doute que l’on voit dans le meme lambris un autre petit amour à l’ecart, qui est occupé à eguiser et afiler des traits. Il est merveilleusement attentif à son travail, et, pour moy, je pense que c’est un officier des plus experts à qui le prince qui est au plafond a donné particulierement cette charge dans sa maison.
Il y a dans l'ouverture de la cheminée un grand vase [p. 46] d’argent qui fait cent petites fontaines jaillissantes à discrétion ; et cela sert, quand on veut, à rafraichir agreablement le lieu en eté. Au manteau de cette cheminée, on voit les quatre elements en quatre figures separées qui composent un quarré ; et dans le milieu est un amour triomphant, qui, avec toutes ces figures elementaires jointes ensemble, tient un portrait merveilleux dont il tire toute sa gloire et toute sa puissance.
[p. 47] Tout fier de tenir cette image,
Il insulte aux plus grands vainqueurs,
De ce qu’ils n'ont autre avantage
Que d’accroistre leur héritage
Par la force et par les rigueurs
Que Bellone met en usage ;
Au lieu qu’au seul aspect de ce charmant visage,
Il est maitre absolu des plus rebelles cœurs,
Qui viennent tous luy rendre un volontaire hommage.
Là, tel qu’il fut jadis quand de l'affreux Chaos,
Faché de voir le trouble enorme,
Il chassa de la masse informe
La haine et le desordre enclos ;
On le voit gouverner l’air, le feu, l'eau, la terre,
Et de ces ennemis adoucissant la guerre,
Donner à l’univers la paix et le repos.
Avouez, Mademoiselle, que vous etes eblouye de tant de belles choses, et que vous seriez bien aise de trouver maintenant [p. 48] quelque grotte où vous pussiez vous delasser, et prendre un peu de rafraîchissement. Je me doute que cela ne vous deplairoit pas. He bien, vous allez estre servie à point nommé ; il y en a une icy tout proche, où vous verrez, entr’autres choses, un jet d'eau de plus de dix pieds de hauteur, et la plus charmante cascade qu’il y ait au monde. Il ne faut que repasser dans l'antichambre, par où je vous ay fait entrer de la chambre du Roy.
Vous ne me croyez pas ; car quelle apparence qu’on puisse trouver une grotte, avec des jets d’eau et des cascades, sur un balcon ? Mais il falloit cela aussi pour achever l’enchantement. Venez donc, s’il vous plaist, et faites moi l'honneur de me suivre jusqu'à l'autre bout de ce petit palais.
Au delà de l'estrade de l'antichambre, à main droite, vis à vis des beaux lieux que je viens de vous faire voir, se trouve cette admirable grotte, où, du [p. 50] milieu du plancher qui est d’un marbre de toutes couleurs, il sort un gros jet d'eau qui va jusqu’au plafond attaquer un petit amour qui tient un foudre.
A voir cet amour au travers de l’eau qui le couvre, on diroit qu'il s’offense de l’insulte que luy fait son ennemie, et meme, dans le mouvement de l’eau, il semble qu’il se tremousse, comme s’il vouloit lacher la foudre qu’il tient toute preste sur elle. Mais cette eau se moque de sa colere et de ses menaces ; [p. 51] et, non contente de luy porter son bouillon jusques dans le nez, elle fait encore passer la figure de son jet au travers des glaces du plafond, et forme ainsi un second jet au dessus de ce petit foudroyant, qui, par cet agreable prestige, a l’affront encore de paroitre enfermé entre deux eaux jalissantes.
Au coté le plus apparant de la grotte, contre un mur tout revetu de marbre, et justement au milieu de ce mur, il y a le relief d’un Neptune qui est representé [p. 52] sur son char tiré par des chevaux marins. Cette figure, qui est d’argent, deploye de tous cotez quantité de petites nappes d'eau les plus agreables du monde, et fait ainsi la belle cascade que je vous ay promise.
Mais ce n'est pas la seule figure qui soit dans cette grotte ; j’y en vis quatre autres qui ne luy cedent nullement, ni pour la matiere, ni pour la forme. Ce sont des amours que je n’ozerois appeler petits comme les autres, parce [p. 53] qu’ils me parurent d’une taille assez grande. Ils portent chacun sur leur teste une corbeille chargée de fruits, qui font une infinité de jets d’eau ; mais le jet du milieu de la corbeille, comme le plus haut et le plus fort, domine sur tous les autres, qui se contentent de noyer ces fruits et de faire une douce pluye à l'entour de ces jeunes enfants.
Chacun d’eux est dans une grande coquille, assis cavalierement sur un dauphin qui jette aussi de l'eau ; [p. 54] et ces divers jalissemens se rassemblant dans cette coquille, qui est soutenue par de petits tritons dorez, toute l’eau se repand de là en meme temps dans des bassins de marbre blanc, et fait, en tombant, comme une menue grille d'argent qui emprisonne ces petits dieux marins.
Tous les autres ornements sont de même ; on n’a jamais veu encore un si beau coquillage ; et ce n’est pas seulement à cause qu’il est enrichy de quantité de branches de corail de toutes [p. 55] couleurs, mais aussi parce qu’il est arrangé avec tout l'art imaginable. L'ouvrier s’est aquité en cela tout à fait bien de son devoir.
Ce ne sont que festons, arcs, fruits, pampres, raisins,
Et la peinture encore animant ces rocailles,
Y figure partout à l'entour des murailles
Mille petits Amours marins,
Les uns assis sur des ecailles,
Et les autres sur des dauphins.
Mais ce n'est pas tout encore : cette grotte en produit plusieurs autres, et cela se fait par les miroirs qui sont aux lambris et aux plafonds des chambres, qui representent tous [p. 56] cette grotte à l’envi l’un de l'autre ; en sorte que lorsqu’on luy donne l'eau, on voit aussitot cent cascades pour une, et infinis jets qui se reproduisent de tous cotez. Chaque glace renvoye aux autres la figure des objets qu’elle reçoit ; et ce que l’une n’a pas directement, elle l’emprunte de quelqu’une de ses voisines. Ainsi, rien ne se perd dans ces miroirs, et l’œil y retrouve presque partout l’image de bien des choses qu’il a veues reellement en ces lieux, mais qui ne se [p. 57] peuvent plus voir de la place où l’on est. En voicy un exemple.
On ne saurait voir de l’estrade de l'antichambre le veritable Neptune qui est dans la grotte, parce qu’il est derriere un mur qui le cache. Cependant, on ne laisse pas d’en trouver la figure dans les miroirs de cette estrade, et cela vient d’une seule glace assez eloignée que ce Neptune regarde de coin, laquelle, après en avoir receu l'image, la distribue ensuite à toutes les autres glaces.
[p. 58] Il y a meme quantité d’arbres des jardins d’alentour qui se viennent mirer aussi dans ces chambres par les fenestres qui repondent sur le balcon ; ce qui fait autant de tableaux, de paisages qu’il y a de miroirs. Je vous donne à penser, Mademoiselle, si de tels tableaux sont naturels et si ces arbres sont bien representez.
Nous nous vimes sous leur ombrage,
Et vimes aussi des oiseaux,
Qui passoient dans la cour entre les deux Chateaux,
Peindre dans ces miroirs leur vol et leur plumage.
Voicy bien d’autres choses que j’ay à vous dire, [p. 59] et c'est où j’aurois grand besoin de votre secours pour les exprimer dignement. Agreez donc, s’il vous plaist, que je vous invoque en cet endroit comme la maitresse du Parnasse, et que je vous prie de me preter votre plume pour un moment. Encore une fois, j’en aurois grand besoin, et ce seroit afin de pouvoir vous dire avec toute la force et la delicatesse de notre langue que le Roy vint en ces beaux lieux comme nous etions si fort occupez à les admirer, et [p. 60] qu’il nous fit voir dans ce temps là celuy qui est le mieux fait de tout son royaume. Il etoit seul et ne fut jamais vetu plus simplement ; cependant, il effaçoit la pompe et la magnificence meme.
Alors, je vis en sa personne
Tout ce riche appareil de gloire et de splendeur
Qui peut accompagner une vaste couronne,
Et par le saint respect que la Majesté donne,
Fait la véritable grandeur.
Je vis dans ses regards, sur son front, en son geste,
Parmi les graces, les appas,
Tout ce qu'on peut voir icy bas
De fort, d’auguste et de celeste.
Je ne m’etonnay plus de ses divins explois,
De ses succès, de ses conquestes ;
Et je dis alors plusieurs fois :
Louis est un miracle, il est le Roy des Roys.
[p. 62] Il est né pour ranger l’Univers sous ses loix,
Et mettre sous son joug les plus superbes testes.
Avec luy l’allegresse entra dans tous ces lieux,
Et soudain les miroirs, avides
De faire le portrait de ce Victorieux,
Quitant tout autre objet, eures leurs glaces vuides,
Pour ne plus figurer qu’un Louis à nos yeux.
Je ne vis plus alors que ce Roy glorieux ;
Son image partout me parut eclatante,
Et ravi de la voir si belle et si frequente,
Moi qui brule pour luy d'un zele ambitieux,
Je crus voir du Ciel radieux
Descendre autour de moy la machine roulante,
Et me trouver parmi les Dieux.
Après que le Roy s’en fut allé et que j’eus un peu recueilly mes esprits, que sa presence avoit mis en desordre, je vins à faire reflexion sur son merveilleux naturel à propos du bel endroit [p. 62] où nous etions. Je ne pouvois assez le louer, de la force qu’il a dans ses affaires, et de la delicatesse qu’il montre dans ses divertissemens. J’admirois que, dans les grands desseins qu'il medite pour le salut et la gloire de son Etat, il put encore penser à toutes les belles choses, et les ordonner avec une connoissance si parfaite et si universelle.
En effet, il se partage en cent occupations diferentes, et il est tout entier à chacune. Il regle ses finances, il assure le repos à ses [p. 63] sujets, il assiste ses alliez, il reprime les infidelles, et, au milieu de tout cela, il ne laisse pas de cultiver les arts et les sciences. Faut il qu'il fasse la guerre, il en dresse le plan dans son cabinet ; il l’execute aussitot luy meme à la campagne, malgré les ardeurs de l’eté et les glaces de l'hiver ; et c’est, Mademoiselle, ce qui vous l’a
fait appeler si heureusement le Heros de toutes les saisons.
Est il sollicité par ses voisins de faire la paix, il arrete, à leurs prieres, le torrent [p. 64] de ses armes, que nulle force etrangère ne pouvoit ni retenir, ni soutenir. Il donne seul la paix à toute l’Europe ; et après avoir joint des provinces entieres à son royaume, non seulement il essaye de l’enrichir par l’etablissement du commerce et des manufactures, mais il travaille encore tous les jours à l'orner par les palais et les maisons qu'il y fait batir ou qu'il embellit.
Ces nobles divertissemens meritent des louanges aussi bien que les travaux [p. 65] les plus serieux. Il est beau de se jouer quelque fois de la sorte, et les rois n'ont que trop d'illustres exemples qui les y invitent.
Ainsi, la haute intelligence
Qui gouverne cet ynivers,
Apres tant d'ouvrages divers,
Tant d’astres, de fleuves, de mers
Qui montrent sa toute puissance,
Veut bien, pour recreer les yeux,
S’exercer encore en tous lieux
A cent autres petits ouvrages.
Tantot sur des moules nouveaux
Faits de ses mains doctes et sages,
Elle se plaist, le long des eaux,
A former divers coquillages.
Tantot elle descend jusqu’en nos Jardinages
Pour y peindre toutes les fleurs ;
Et dans les champs et les bocages,
Enseignant aux oiseaux de diferens ramages,
On la voit de mille couleurs
Distinguer encor leurs plumages.
[p. 66] Mais c’est assez de vers et de prose ; je prends un peu trop l’essor : il est temps de me reposer, et de finir cette lettre, qui vous assurera de mes respects et que je suis,
Mademoiselle,
Vostre tres humble et tres obeissant serviteur,
Le Laboureur
De Montmorency, ce 4 septembre 1669. »

Le Laboureur, Louis

Arrêté établissant un hôpital des maladies contagieuses dans le château de Saint-Germain-en-Laye

« [p. 540] Du 21 ventôse
Le gouvernement de la République, sur le rapport du ministre de l’Intérieur,
Arrête :
Art. Ier. Il sera formé, dans les bâtimens du château de Saint-Germain, département de Seine-et-Oise, un hôpital civil pour le traitement des indigens attaqués d’ulcères, gale, scorbut et généralement de toute espèce de maladie contagieuse.
Il y sera fait les dispositions nécessaires pour y recevoir environ huit cents lits.
[p. 541] II. Les malades de l’hôpital Saint-Louis, faubourg du Temple, consacré au traitement de ces maladies, seront évacués sur le nouvel établissement.
III. L’hôpital des malades contagieuses recevra tous les malades affectés de ces maladies dans l’arrondissement du tribunal d’appel de Paris. La dépense sera acquittée sur les octrois qui se trouvent établis dans l’arrondissement, dans la proportion qui sera déterminée par le ministre de l’Intérieur.
IV. Le ministre de l’Intérieur est chargé de l’exécution du présent arrêté, qui sera inséré au Bulletin des Lois.
Le premier consul, signé Bonaparte
Par le premier consul, le secrétaire d’Etat, signé Hugues B. Maret
Le ministre de l’Intérieur, signé Chaptal »

Ministère de l'Intérieur

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