Affichage de 80 résultats

Description archivistique
Louis XIV France
Aperçu avant impression Affichage :

Récit de la célébration de la Toussaint par la famille royale à Saint-Germain-en-Laye

« De S. Germain en Laye, le 2 novembre 1674
Hier, feste de tous les saints, Leurs Majestez, avec lesquelles estoit monseigneur le Dauphin, entendirent en la chapelle de ce chasteau la grande messe, celebrée par l’evesque de Cisteron, et chantée par la Musique. L’apres dinée, Elles entendirent au mesme lieu une docte et eloquente predication de l’abbé de Clermont, puis les vespres aussi chantées par la Musique. Ensuite, la Reyne alla continuer l’exercice de sa devotion, en l’eglise de la parroisse. »

Récit de la célébration de Noël par la famille royale et de la première communion du Dauphin à Saint-Germain-en-Laye

« De S. Germain en Laye, le 28 decembre 1674
[…]
Le 24, Leurs Majestez et monseigneur le Dauphin entendirent dans la chapelle du chasteau les vespres chantées par la Musique du Roy.
Le soir, Leursdites Majestez assisterent aux Matines et ensuite Elles entendirent apres minuit trois messes : le lendemain, jour de Noel, la grand’messe celebrée pontificalement par l’archeveque de Bourges, et l’apres disnée le sermon de l’abbé de Clermont, nommé à l’evesché de Frejus.
Le meme jour, monseigneur le Dauphin fit sa premiere communion dans la mesme chapelle, par les mains de l’ancien evesque de Condom, son precepteur, qui luy avoit donné depuis longtemps, avec une extreme application, toutes les instructions necessaires pour le disposer à bien reconnoistre l’importance de cette action. Le prince de la Roche sur Yon et le duc de Montausier, son gouverneur, tenoyent les deux bouts de la nape, et monseigneur le Dauphin s’approcha de cet auguste sacrement avec une modestie exemplaire et avec tous les temoignages possibles de religion et de pieté.
La Reyne a donné, tous ces saints jours, par une pratique continuelle d’actions chretiennes et de bonnes œuvres des temoignages ordinaires de sa devotion exemplaire.
Le Roy alla le 27 à son chasteau de Versailles, prendre le divertissement de la promenade, et mena monseigneur le Dauphin seul avec luy, dans son carrosse. »

Lettre du marquis de Saint-Maurice, ambassadeur de Savoie, donnant des nouvelles de la cour à Saint-Germain-en-Laye

« De Paris, le 2 mars 1668
[…]
[p. 184] La comtesse de Saint Maurice fut lundi à Saint Germain ; il y eut quantité de princesses et de duchesses qui attendaient la Reine dans sa chambre pendant qu’elle dînait ; le Roi y entra le premier et, saluant les dames, commença par madame la princesse de Carignan, puis il alla droit à la comtesse de Saint Maurice ; la Reine lui fit aussi l’honneur de la mener promener dans son carrosses. Elle nous témoigne mille bontés et je sais qu’elle a de l’estime pour Votre Altesse royale et qu’elle aime Madame Royale. »

Lettre du marquis de Saint-Maurice, ambassadeur de Savoie, concernant sa réception à Saint-Germain-en-Laye

« De Paris, le 6 mai 1667
Monseigneur,
Hier, M. Giraud me vint avertir qu’il me viendrait prendre aujourd’hui dans les carrosses du Roi et de la Reine pour me mener à Saint Germain. Nous sommes partis ce matin à six heures ; tout ce qu’il y avait ici de personnes de qualité de Piémont et de Savoie ont pris la peine d’y venir et tous en habits neufs et très lestes.
Nous sommes arrivés à Saint Germain à neuf heures ; nous avons trouvé à la descente du carrosse M. de Bonneuil, introducteur, qui nous a conduits à la chambre où l’on attend l’heure du Roi ; à dix heures et demie, j’ai été conduit à l’audience et j’ai su par M. de Bonneuil que je pouvais parler d’affaires au Roi, parce qu’il veut se décharger d’embarras, croyant de partir bientôt.
[p. 19] J’ai été conduit dans la chambre du Roi dans la manière accoutumée. Je l’ai trouvé assis dans sa ruelle, le chapeau sur la tête, vêtu d’un justaucorps de velours noir, une demi veste de dorure, et une canne à la main. Il y avait dans le balustre le duc de Bouillon et le comte du Lude, et dehors, à l’entrée, M. de Lionne et M. de Charost, capitaine des gardes, et la chambre était si pleine que j’ai eu peine à passer. J’ai fait une profonde révérence au Roi, il a levé son chapeau, puis l’a remis ; je lui ai fait les compliments de Votre Altesse royale et lui ai remis sa lettre. Il me semble qu’il n’avait point sa fierté accoutumée, mais un visage fort doux ; il m’a dit : « Il y a longtemps que je suis persuadé de l’amitié de M. le duc de Savoie, je voudrais bien pouvoir lui témoigner celle que j’ai pour lui et la passion que j’ai pour son service », puis qu’il avait bien été fâché de la [p. 20] mort de feu M. le comte de La Trinité, mais qu’il avait bien de la joie de me voir. Je lui ai après fait les compliments de Madame Royale ; il y a répondu avec de grandes marques d’estime. Il m’a demandé l’état de santé de Votre Altesse royale et de monseigneur le prince. Après lui avoir répondu qu’elles étaient parfaites, je lui ai expliqué fort au long le sujet pour lequel Votre Altesse royale m’a envoyé à lui et lui ai fait une grande déduction des affaires de Genève ; je n’y ai pas oublié une circonstance et je lui ai dit à peu près les mêmes choses que je dis à M. de Lionne quand je le vis. Le Roi ne m’a [p. 21] jamais interrompu et m’a écouté attentivement plus d’un quart d’heure, puis m’a dit qu’il ferait sur ce sujet tout ce que vous désireriez de lui, mais qu’il lui semblait que vous souhaitiez un aimable. Je lui ai dit que Votre Altesse royale ferait tout ce qu’il vous conseillerait pourvu que votre réputation fût à couvert ; il m’a expliqué qu’il songerait aux moyens pour vous faire donner les satisfactions qui sont dues à Votre Altesse royale et que pour tout ce que j’aurais à lui expliquer de la part de Votre Altesse royale, que je n’avais qu’à parler à M. de Bonneuil pour l’avertir et qu’il m’écouterait toujours volontiers. Je me suis congédié de lui et, en quittant, il m’a chargé de bien assurer Madam Royale de son amitié et de son estime. Je lui ai présenté les gentilshommes qui étaient avec moi, puis je me suis retiré à la chambre où j’avais mis pied à terre. M. le marquis de Cœuvres m’y est [p. 22] venu entretenir, et après lui M. le marquis de Bellefonds. Ce sont deux des hommes les plus accrédités à la cour pour leur sagesse et pour la guerre et tous deux bons et véritables serviteurs de Votre Altesse royale.
Nous avons dîné à la table de M. de Bellefonds, puis j’ai été conduit à l’audience chez la Reine. Je lui ai fait les compliments de Votre Altesse royale, remis sa lettre et celle de Madame Royale. elle les a reçus avec joie, elle m’a témoigné grande estime pour Vos Altesses royales et passion de les servir, et, si je ne me trompe, elle a amitié pour vous deux ; c’est une princesse accueillante et qui est belle.
A cause du prompt voyage de la cour, M. Giraud m’a conseillé de présenter aujourd’hui le tambour, si bien qu’allant à l’audience chez monsieur le Dauphin, où j’y ai trouvé les gardes sous les armes et l’officier des gardes qui les commande à la porte, et lui assis et couvert, il a levé son chapeau. Je lui ai fait la révérence et compliment de la part de Votre Altesse royale ; il s’est puis levé, le chapeau à la main, et madame [p. 23] la maréchale de La Mothe a répondu comme en l’instruisant de ce qu’il devait dire. Je lui ai après présenté le tambour, il en a été ravi, il a fallu le lui pendre au col, lui expliquer tout ; il en est empressé tout à fait et le présent a été trouvé le plus beau, le plus galant, le mieux inventé et le plus riche qui se puisse voir ; chacun court chez monsieur le Dauphin pour le voir ; l’on admire aussi les vers. Monsieur le Dauphin est un beau prince, [p. 24] un esprit vif, parle bien, mais il est opiniâtre et ne craint que le Roi ; il porte les chausses et la perruque.
De là, j’ai été conduit chez la petite Madame ; elle est tout à fait belle et bien nourrie. J’ai adressé ma parole à madame la maréchale de La Mothe et, après les compliments, parlant de sa santé et de sa beauté, je lui ai dit que nous serions bienheureux en Savoie et en Piémont si la petite Madame prenait l’inclination pour ces pays là qu’avaient mesdames Marguerite et Chrétienne, toutes deux Filles de France. Elle m’a répondu [p. 25] qu’elle souhaiterait fort des choses pareilles comme avantageuses à Madame.
Au sortir de là, nous sommes montés en carrosse et arrivés ici à sept heures. Je solliciterai à avoir mes audiences de Monsieur et de Madame d’Orléans, puis de Madame, la douairière.
[…]
[p. 28] Je viens de savoir d’un de mes amis qui vient de Saint Germain qu’après mon départ monsieur le Dauphin, conduit par madame la maréchale de La Mothe, a porté le tambour dans le Conseil, que le Roi et les ministres ont été plus de demi heure à le considérer et qu’ils l’ont admiré. Chacun demeure d’accord que l’on ne peut rien faire de plus mignon à Paris. »

Acte de naissance du duc d’Anjou à Saint-Germain-en-Laye

« Le mardy 14e de juin 1672, à douze heures et un quart apres minuict, fut né et ondoyé dans le chasteau vieil de Saint Germain en Laye monseigneur le duc d’Anjou, fils de tres puissant monarque Louys 14e, roy de France et de Navarre, et de tres haulte et religieuse princesse Marie Therese, reyne regente en France pour l’absence dud. seigneur Roy son mary, et l’ondoyement faict par Son Eminence cardinal de Bonzi, grand aumosnier de lad. dame Reyne, M. le curé l’assistant et estant present revestu de son surplis et l’estolle au col, et de son consentement. »

Acte de naissance du duc d’Anjou à Saint-Germain-en-Laye

« Le 5e jour d’aoust 1668, fut les 8 heures trois quarts du matin, nasquit dans le chasteau vieil de Saint Germain en Laye le second fils de France monseigneur le duc d’Anjou, et sa naissance suivie et accompagnée de acclamations et resjouissances publicques apres le Te Deum et chanté en l’eglise parroissialle, par ordre de M. le curé, en action de graces à Dieu, et le soir en furent aussi faicts les feus de joye par toutes les rues avec chandelles mises par toutes les fenestres. »

Acte de mariage du prince et de la princesse de Conti dans la chapelle du Château-Vieux de Saint-Germain-en-Laye

« Ce jourd’huy seizieme janvier mil six cens quatre vingts, a esté fait et solemnisé en face de Sainte Eglise en la chapelle du chasteau vieil de ce lieu par eminentissime monseigneur Emmanuel Theodoze de La Tour d’Auvergne, cardinal de Bouillon, grand aumonier de France, le mariage de tres hault et puissant prince Arman Louis de Bourbon, prince de Conty, prince du sang, pair de France, filz aisné de deffunts tres hault et puissant prince Arman de Bourbon, prince de Conty, prince du sang, pair de France, gouverneur lieutenant general pour Sa Majsté en la province de Languedoc, et de tres haulte et puissante princesse Anne Marie Martinozzy, son espouse, d’une part, et tres haulte et puissante princesse madmoiselle Marie Anne de Bourbon, fille naturelle et legitimée du Roy, d’autre part, apres la publication des deux premiers bans et dispence du troizieme de monseigneur l’archevesque en datte du treizieme janvier du mesme mois au prosne de la grande messe parroissiale de cedict lieu et des eglises parroissiales de Saint André des Arts et de Saint Eustache à Paris ainsi qu’il apert par les certificats des sieurs curés desdictz parroisses aussi en datte du neufvieme et quinzieme du present, qui sont demeurez entre nos mains, et les fiançailles faictes audict chasteau en l’appartement de Sa Majesté le jour de hier par mondit seigneur cardinal, ledict mariage fait en presence et sous le bon plaisir de Sa Majesté, de tres haulte, tres puissante et tres excellente princesse Marie Thereze, par la grace de Dieu reyne de France et de Navarre et epouze de Sad. Majesté, de tres hault, tres puissant et tres excellent prince monseigneur Louis, dauphin de France, de tres hault et tres puissant prince monseigneur Philippe de France, frere unique de Sadicte Majesté, duc d’Orleans, de tres haulte et tres puissante princesse madame Elizabeth Charlotte, epouse de Son Altesse royale, de tres hault et puissant prince Louis, duc de Bourbon, premier prince du sang, premier pair et grand maistre de France, duc d’Anguien, Chasteauroux et Monmorency, oncle et tuteur honnoraire, ledict mariage fait du consentement de monseigneur François de Chamvalon, archevesque de Paris, duc et pair de France, commandeur des ordres du Roy, et en presence de moy curé soubsigné revestu de mon surpelis et estole, lesquels ont signé à la reserve de monseigneur le Dauphin, de Monsieur, frere unique du Roy, de madame Elizabeth Charlotte son epouse, lesquels n’ont signé, leur rang ayant esté remply par inadvertence ; approuvé par le Roy.
Louis
Marie Terese
Louis de Bourbon
Louis Armand de Bourbon
Marie Anne de Bourbon, l. de France
Cagnyé
[…]
Ce jourd’huy seizieme janvier mil six cens quatre vingts, sur les onze heures du roi, au chasteau neuf de ce lieu, a esté faicte la benediction du lict de tres hault et puissant prince Arman Louis de Bourbon, prince de Conty, prince du sang, pair de France, filz aisné de deffunts tres hault et puissant prince Arman de Bourbon, prince de Conty, prince du sang, pair de France, gouverneur lieutenant general pour Sa Majesté en la province du Languedoc, et tres haulte et puissante princesse Anne Marie Martinozzy, son espouse, et tres haulte et puissante princesse madmoiselle Marie Anne de Bourbon, fille naturelle et legitimée du Roy, en l’appartement que Sad. Majesté avoit fait preparer pour cest effect, par eminentissime monseigneur Emmanuel Theodoze de La Tour d’Auvergne, cardinal de Bouillon, grand aumosnier de France, en presence de tres hault, tres puissant et tres excellent prince Louis quatorzieme, par la grace de Dieu roy de France et de Navarre, et tres haulte, tres puissante et tres excellente princesse Marie Thereze, par la grace de Dieu reyne de France et de Navarre et epouse de Sad. Majesté, et de tres hault, tres puissant et tres excellent prince monseigneur Louis, dauphin de France, de tres hault, tres puissant prince monseigneur Philippe de France, frere unique de Sad. Majesté, duc d’Orleans, et de tres haulte, tres puissante princesse madame Elizabeth Charlotte, epouse de Son Altesse royale, et de moy curé subsigné revestu de mon surplis et estole.
Louis
Cagnyé »

Acte de mariage du duc de Guise et d’Élisabeth d’Orléans à Saint-Germain-en-Laye

« Le 4e jour de may 1667, furent supplées les ceremonies du saint sacrement de baptesme à Louys, né du premier jour de juillet 1666 et ondoyé par M. le curé de ce lieu de Saint Germain en Laye (avec la permission de M. d’Orleans, grand vicaire en ce mesme lieu) dans le chasteau neuf, lieu de sa naissance, et lesd. ceremonies administrées dans la chapelle du chasteau vieil par M. l’abbé de [vide], aumosnier du Roy, avec la permission et consentement dud. sieur curé, y present en son habit d’eglise avec l’estolle au col, et led. Louys fils de noble homme [vide] et de dame [vide], nourrisse de monseigneur le Dauphin, Fils aisné de France, le parrein tres puissant et magnanime prince Louys XIIII du nom, tres chrestien roy de France et de Navarre, present, et qui a donné son nom aud. baptisé, la marreine damoiselle [vide], fille de haut haut et puissant seigneur Philippes de La Motte Houdancourt, vivant duc de Cardone, pair et mareschal de France, et de madame Louyse de Prie, son espouse, et à present sa veufve, gouvernante de mond. seigneur le Dauphin, de Madame royalle et des autres Enfants de France. »

Acte de baptême de Louise-Marie-Thérèse de Melun d’Epinoy dans la chapelle du Château-Vieux, le roi étant son parrain

« Ce jourd’huy quatorzieme janvier mil six cent soixante et seize, ont esté supplées en la chapelle du chasteau viel de ce lieu par Son Altesse monseigneur le cardinal de Bouillon, grand aumosnier de France, les ceremonies du baptesme à Louise Marie Thereze, aagée de neuf à dix ans, fille de tres puissant seigneur Alexandre Guillaume de Melun, prince d’Epinoy, chevalier des ordres du Roy, et de dame dame Louise Anne de Betune, ses pere et mere, le parein tres hault et tres puissant prince Louis quatorzieme de Bourbon, roy de France et de Navarre, la mareine tres haulte et tres puissante princesse Marie Thereise d’Autriche, reyne de France, lesquels ont signé en presence de moy curé soubsigné, revestu de mon surply et estolle, ondoyé avec la permission de monseigneur de Paris le vingt huitieme mars mil six cent soixante et six par mons. le vicaire de Saint Eustache de Paris.
Louis
Marie Terese
Cagnyé »

Acte de baptême de Louis d’Auneau du Vizé dans la chapelle du Château-Vieux de Saint-Germain-en-Laye, le roi étant son parrain

« Ce dix neufviesme decembre mil six cent soixante et dix neuf, ont esté supplées les ceremonies du baptesme en la chapelle du chasteau vieil de ce lieu par Son Altesse eminentissime monseigneur Emmanuel Theodoze de La Tour d’Auvergne, cardinal de Bouillon, grand aumonier de France, à Louis, né le quatrieme fevrier de l’année [vide] et ondoyé par monsieur le curé de Saint Germain l’Auxerrois de Paris avec la permission de monseigneur l’archevesque du quinzieme du mesme mois et de la mesme année, filz de messire Gaspard d’Oneau du Vizée, si devant lieutenant des gardes du Roy et presentement premier maistre d’hotel de la Reyne, et de dame dame Marie Madelaine du Vizée, ses pere et mere, le parain tres hault, tres excellent et tres puissant prince Louis quatorzieme, par la grace de Dieu roy tres chrestien de France et de Navarre, la mareine tres haulte, tres excellente, tres puissante princesse Marie Thereze d’Austriche, reyne de France, en presence de moy curé soubsigné revestu de surplis et estole, et ont signé.
Louis
Marie Terese
Cagnyé »

Acte de baptême de Louis d’Aubusson de La Feuillade dans la chapelle du Château-Vieux de Saint-Germain-en-Laye, le roi étant son parrain

« Ce jourd’huy dix huittieme novembre mil six cents soixante et quatorze, ont esté suplées par monseigneur Jacques Benigne Bossuet, antien evesque de Condon et precepteur de monseigneur le Daulphin, en la chapelle du chasteau vieil de ce lieu, les ceremonies du baptesme à Louis, fils de François d’Obusson, duc de La Feuillade, colonel du regiment des gardes françois, et de dame Charlotte Goufier, ses pere et mere, le parein tres haut et tres invincible monarque Louys quatorzieme, roy de France et de Navarre, la mareine tres haulte et tres illustre princesse Marie Thereise d’Autriche, reyne de France, en presence et du consentement de moy curé soubsigné, revestu de mon surply et estolle.
Cagnyé »

Acte de baptême de Louis du Bouchet de Sourches dans la chapelle du Château-Vieux de Saint-Germain-en-Laye, le roi étant son parrain

« Ce jourd’huy vingt neufvieme janvier mil six cent soixante et dix huit, ont esté supplées les ceremonies du baptesme en la chapelle du chasteau viel de ce lieu par monseigneur de Quaslin, evesque d’Orleans et premier aumosnier de Sa Majesté, à Louis, aagé de douze ans ou environ et ondoié par un des prestres de Saint Sulpisse de Paris, fils de Louis François de Bouschet, marquis de Sourches, provost de l’hostel du Roy et grand provost de France, et de dame dame Marie Geneviefve de Chambez, ses pere et mere, le parrein tres haut et tres puissant prince Louis quatorzieme, roy de France et de Navarre, la marreine tres haute et tres puissante princesse Marie Thereise d’Autriche, reyne de France, lesquels ont signé, le tout en presence et du consentement de moy curé soubszsigné.
Marie Terese »

Acte de baptême de Louis de Rohan-Soubise dans la chapelle du Château-Vieux de Saint-Germain-en-Laye, le roi étant son parrain

« Ce jourd’huy dix huittieme novembre mil six cents soixante et quatorze, ont esté suplées par monseigneur Jacques Benigne Bossuet, antien evesque de Condon et precepteur de monseigneur le Daulphin, en la chapelle du chasteau vieil de ce lieu, les ceremonies du baptesme à Louis, fils de François d’Obusson, duc de La Feuillade, colonel du regiment des gardes françois, et de dame Charlotte Goufier, ses pere et mere, le parein tres haut et tres invincible monarque Louys quatorzieme, roy de France et de Navarre, la mareine tres haulte et tres illustre princesse Marie Thereise d’Autriche, reyne de France, en presence et du consentement de moy curé soubsigné, revestu de mon surply et estolle.
Cagnyé »

Acte de baptême de Louis de Beauvais dans la chapelle du Château-Vieux de Saint-Germain-en-Laye, le roi étant son parrain

« Ce jourd’huy septieme may mil six cens quatre vingts, ont esté supplées les ceremonies du bapteme en la chapelle du chasteau vieil par monseigneur Benigne Bossuet, ancien evesque de Condon, precepteur de monseigneur le Dauphin et premier aumonier de madame la Dauphine, Louis, né le dixieme avril dernier passé, environ l’heure de midy, et ondoyé par monsieur le curé de Saint Paul de Paris avec la permission de monseigneur l’archevesque en datte du onzieme dud. mois d’avril, fils de messire Louis de Beauvais, chevalier, baron et seigneur de Geantilly, et de dame Anne Berthelin, ses pere et mere, le parain tres hault, tres puissant, tres excellent prince Louis quatorzieme, par la grace de Dieu roy de France et de Navarre, la mareine tres haulte, tres puissante et tres excellente princesse Marie Thereze d’Austriche, reyne de France, lesquels ont signé en presence de moy curé soubsigné revestu de surpelis et estole.
Louis
Marie Terese
J. Benigne, a. e. de Condom
Cagnyé »

Acte de baptême dans la chapelle du Château-Vieux de Saint-Germain-en-Laye de Louis-François de France, duc d’Anjou

« Le mardy 1er jour de novembre 1672, furent supplées les ceremonies du saint sacrement de baptesme à Louys François, troisiesme fils de France, duc d’Anjou, fils de tres haut et puissant monarque Louys de Bourbon, roy de France et de Navarre, et de tres devote et religieuse reyne Marie Therese d’Austriche, son espouse, le parrein tres hault et puissant prince Louys de Bourbon, prince de Conty, la marreine madame la mareschalle de La Motte, gouvernante des Enfants de France, lesd. ceremonies supplées par Son Eminence monseigneur le cardinal de Bouillon, gran aumosnier de France, M. le curé present et revestu de son estolle par dessus le surplis, les saintes huilles par luy presentées pour lesd. ceremonies faictes en la chapelle du chasteau vieil de Saint Germain en Laye. »

Récit signalant les places occupées par Louis XIV et ses favorites dans la chapelle du château de Saint-Germain-en-Laye

« Le Roi vivait avec ses favorites, chacune de son côté, comme dans une famille légitime : la Reine recevait leurs visites ainsi que celles des enfants naturels, comme si c’était pour elle un devoir à remplir, car tout doit marcher suivant la qualité de chacune et la volonté du Roi. Lorsqu’elles assistaient à la messe à Saint-Germain, elles ses plaçaient devant les yeux du Roi, Mme de Montespan avec ses enfants sur la tribune à gauche, vis-à-vis de tout le monde, et l’autre à droite, tandis qu’à Versailles Mme de Montespan était du côté de l’Evangille et Mlle de Fontanges sur des gradins élevés du côté de l’Epître. Elles priaient, le chapelet ou leur livre de messe à la main, levant les yeux en extase, comme des saintes. Enfin, la Cour est la plus belle comédie du monde. »

Primi Visconti

Récit par le maître des cérémonies Nicolas Sainctot de l’audience donnée par le roi à Soliman Aga, ambassadeur du sultan, au Château-Neuf

« [f. 124] Le 5e [décembre], le sieur de Berlise, introducteur des ambassadeurs, estant venu prendre Soliman dans les carosses du Roy et de la Reine, ils entrerent dans celuy du Roy avec les sieurs de la Giberti, l’interprete et l’aumonier. Ils dinerent à Chatou, où l’on amena les chevaux de la grande ecuirie qu’ils enharnacherent à leur mode [f. 124v] et qu’ils renvoyerent au Pec. Ils decendirent de carrosse et monterent sur les chevaux qui les attendoient, se mettant en marche deux à deux, ayant le sieur Giraud à leur teste.
Soliman marchoit entre le sieur de Breslise et le sieur de la Giberti, ayant son interprete devant luy. Une des circonstances qui est plus à remarquer est que les Turcs estoient sans armes et que Soliman n’avoit pas meme de sabre. Ils entrerent en cet ordre dans la cour du chateau neuf, où ils trouverent des bataillons formez par les compagnies des regimens des gardes françoises et suisses et des escadrons formez par les mousquetaires. Les chevaux legers, les gendarmes, les gardes du corps, les gardes de la porte, les archers du grand prevost, les Cent Suisses estoient en haye depuis la porte de la petite cour jusqu’au haut du perron. Soliman mit pied à terre dez l’entrée de la petite cour, n’estant pas suffisante pour contenir le nombre de chevaux qui l’accompagnoient, et marcha à pied dans le mesme ordre qu’il estoit venu, passant au travers de la garde ordinaire des gardes du corps qui se trouverent sur le perron dans la salle des gardes. De là, il passa dans plusieurs chambres superbement tendues et se rendit ainsy dans la grande galerie [f. 125] où le Roy l’attendoit.
Cette galerie estoit parée de plusieurs belles tapisseries de la Couronne. Tout le parterre etoit couvert de tapis de pied et les deux costez de la galerie estoient remplis de grands vases d’argent elevez sur des pies destaux aussy d’argent. Au bout de la galerie estoit un trone elevé sur huit marches orné de pareils vases et de caisses d’argent dont le prix estoit de plus de vingt millions. Monsieur, M. le Prince et M. le duc d’Enguien estoient à ses costez, vestus de tres superbes habits, et tous les seigneurs de la cour, qui estoient en si grand nombre qu’ils formoient un triple rang le long de la galerie, estoient aussy tres magnifiquement habillez.
Lorsque Soliman entra dans la galerie, le bruit qui s’y faisoit auparavant cessa d’une manière si surprenante, au seul signal que Sa Majesté fit, qu’il a declaré depuis avoir esté surpris du profond respect que les courtisans rendent au Roy.
Quelque temps quant Soliman entrast dans cette galerie, il tira la lettre du Grand Seigneur d’une toilette qui estoit renfermée dans un sac de brocard de la longueur d’un pied et la tint dans ses mains, elevée de la hauteur de sa barbe, marchant toujours entre les sieurs de Berlise et de la Giberti jusques au pied du trosne, faisant avec tous ses gens le mesme nombre de reverences que le sieur Giraud qui estoit à leur teste.
Soliman, estant arrivé au pied des degrez du trone, fit une profonde reverence et commença son compliment, qui fut expliqué par son interprete en ces termes : Sire, Soliman Aga dit à Vostre tres haute et tres puissante Majesté imperiale que le tres haut et tres puissant empereur ottoman sultan Mahomet Han, quatrieme du nom, son maitre, l’envoye à Vostre tres haute et tres puissante Majesté imperiale luy porter cette lettre et luy dire que les deux empires ont toujours esté en tres bonne intelligence, qu’il en souhaite la continuation et que, pour cet effet, il a retenu M. de la Haye Ventelet, ambassadeur de Vostre Majesté imperiale à la Porte et souhaite à vostre tres haute et tres puissante Majesté imperiale toute sorte de bonheur, de felicité et de prolongation de vos jours. A quoy le Roy repondit qu’il avoit toujours eu bien de la joye [f. 126] de voir l’intelligence qui estoit entre les deux empires, que de son coté il contribueroit toujours à l’entretenir et qu’il pouvoit remettre sa lettre entre les mains de M. de Lionne. L’interprete ayant fait attendre à Soliman la reponse du Roy, Soliman dit à Sa Majesté que le Grand Seigneur, son maitre, luy ayant commandé de remettre sa lettre entre les mains propres de Sa Majesté, il la supplioit de luy faire cet honneur. Sa Majesté luy ayant accordé volontiers cette grace, il monta les degrez du trone, tenant toujours sa lettre elevée. Estant au dernier degré, et voyant Sa Majesté ne se lever pas pour recevoir la lettre, il dit que, lorsque le Grand Seigneur, son maitre, la luy avoit donné, il s’estoit levé en signe d’estime et d’amitié pour Sa Majesté, qu’il la supplioit de vouloir la recevoir de la mesme manière qu’il la luy avoit donnée. Le sieur de Lyonne, ayant appris par l’interprete le dessein de Soliman, lui demanda qui pouvoit estre garand de ce qu’il advançoit, ce qui neantmoins ne lui fut point interpreté, le Roy dans le moment s’estant tourné vers le sieur de Guitry, grand maitre de la garde robe, qui s’estoit autrefois trouvé à la Porte à l’audiance de M. de la Haye, luy [f. 126v] demanda si le Grand Seigneur s’estoit levé lorsque son ambassadeur luy avoir rendu sa lettre. Le sieur de Guitry luy ayant repondu que non, dit tout haut que, puisque le Grand Seigneur en recevant ses lettres par les mains de ses ambassadeurs ne se levoit pas, il ne se leveroit pas, aussy qu’il n’avoit qu’à donner sa lettre. La volonté du Roy estant connue à Soliman, il baisa le sac où estoit la lettre et, après l’avoir fait toucher à son front en faisant une profonde reverence, il la presenta au Roy qui la prit et la donna à M. de Lionne, qui appella les interpretes, le sieur Delacroix et le chevalier Dervius.
Dans le temps que les interpretes lisoient la subscription qui estoit sur un parchement et qui fermoit l’entrée du sac et qu’ils expliquoient au Roy les qualitez que le Grand Seigneur lui donnoit, Soliman descendit au bas du trone apres avoir fait une reverence, où estant, et branlant la teste, il dit tout haut que le Grand Seigneur ne seroit pas satisfait de la manière que le Roy recevoit sa lettre. Sa Majesté s’estant apperceu de ce mouvement de colere, demanda ce qu’il avoit dit, et luy ayant esté expliqué, aussitost dist tout haut et d’un ton serieux qu’il verroit la lettre et qu’il feroit reponse. Soliman, ayant sceu par son interprete ce que le Roy [f. 127] venoit de dire, il se retira en faisant trois reverences, apres lesquelles, ayant voulu tourner le dos à Sa Majesté, le sieur de la Giberti, qui estoit à sa droite, luy fit aussitost tourner le visage jusques à ce que le vuide qui estoit entre le Roy et Soliman fut remply et qu’il ne fut point en estat d’estre apperceu de Sa Majesté. Soliman se retira dans le mesme ordre qu’il estoit venu et remonta à cheval avec toute sa suite hors les portes du chateau neuf. »

Récit par Sebastiano Locatelli de sa visite au château de Saint-Germain-en-Laye

« [p. 169] Devant aller à Saint-Germain où était la Cour, je priai le Seigneur Abbé Louis Vigarani, chanoine de la cathédrale de Reggio en Lombardie et frère du Seigneur Charles, grand architecte de Sa Majesté, qui logeait à la Cour, d'avoir la bonté de m'accompagner, afin qu'il me fût plus facile de voir toutes les beautés du château et surtout du jardin de Sa Majesté. Il y consentit ; nous arrivâmes à Saint-Germain vers les vingt-deux heures, car nous étions partis tard et à pied, et il fallut bien trotter. Dès les premiers moments, nous sentîmes le parfait accord de nos caractères : aussi causâmes-nous toujours, et fîmes-nous avec plaisir et sans nous en apercevoir cette route de cinq lieues bien longues, tantôt en plaine, tantôt entre de petites collines délicieuses.
Saint-Germain-en-Laye est une fort belle petite ville à cinq [p. 170] lieues de Paris. Charles V et François Ier, attirés par les belles chasses des environs, firent reconstruire le château, et entourer la vaste forêt d’une chaîne de fer pour empêcher les bestiaux d'y pénétrer. Dans un coin de cette forêt se voit encore une grande table de marbre d’un seul morceau, près de laquelle on complota autrefois de trahir le Roi ; c'est là l'origine du nom de cette partie de la forêt. Louis XIII ajouta au château un très bel appartement accompagné de six galeries et de deux grandes ailes avec des portiques, pour servir de quartier aux gardes pendant le séjour de la Cour qui passe à Saint-Germain environ trois mois par an pour jouir du bon air. Ce que
je trouve de plus beau est le jardin. Nous demandâmes au concierge, M. de Queri, à le voir; mais comme le Roi s'y trouvait, il répondit qu'il ne savait comment faire pour nous le montrer, si nous n'avions le courage de revenir chez lui au point du jour, avant que personne de la Cour ne fût éveillé. Il fut entendu avec lui que nous viendrions à cette heure.
Étant logés au château, nous arrivâmes le lendemain plus tôt même qu'il n'aurait voulu, car il dut se lever pour nous introduire. Je parlerai des choses principales, et laisserai à l'imagination du lecteur le soin de se faire, d'après le peu [p. 171] que je dirai, une idée digne de ce jardin, le plus beau et le plus délicieux de tous ceux de ce genre appartenant à Sa Majesté. À un bon demi-mille du palais se trouvent cinq grottes souterraines renfermant diverses figures mises en mouvement par l'eau, et des oiseaux artificiels que le vent fait chanter Dans la première grotte, Orphée, en jouant de la lyre (mais toujours sur la même corde), fait sortir des animaux sauvages de toute espèce qui s'arrêtent autour de lui en poussant chacun son cri particulier. Les arbres, dont les rameaux forment comme un dais au-dessus de ces figures merveilleuses, s'inclinent en passant devant le Dieu ; puis vient le Roi tenant le Dauphin par la main, et tous les personnages s'inclinent devant Sa Majesté. Dans la seconde, une bergère chante par un fort bel artifice, en s'accompagnant de divers instruments, pendant que de nombreux oiseaux font entendre leur ramage accoutumé ; un rossignol de bois s'envole ensuite sur un arbre, et chante en battant des ailes et en ouvrant le bec si gracieusement qu'on le dirait vivant. Dans la troisième, on voit Persée frapper un monstre marin de son épée et délivrer Andromède ; les Tritons soufflent à grand bruit dans leurs conques, placent les amants sur deux chevaux marins et les emmènent. Dans la dernière, un dragon vomit des torrents d'eau en agitant la tête et les ailes ; Vulcain et Vénus se promènent sur cette eau dans une coquille argentée. Derrière cette grotte, il y en a une autre si fraîche en été qu’on y gèlerait, je crois, si on y restait une heure entière ; nous nous y arrêtâmes le temps [p. 172] d'un miséréré sans pouvoir supporter la rigueur du froid. Après nous avoir montré les grottes, et fait marcher devant nous toutes ces merveilles à l'aide de clés et de manœuvres secrètes, le valet du jardinier nous quitta. Le Seigneur Charles, bien qu'étant de la Cour, lui donna un franc.
En revenant par des galeries couvertes de verdure au moment où le soleil se levait, nous trouvâmes sous une tonnelle de laurier Mademoiselle de la Vallière la plus spirituelle de toutes les dames de Paris et devenue, grâce à son esprit, la favorite du Roi. Elle était en compagnie de quelques demoiselles et de cavaliers, occupée à se coiffer. A notre vue, elle resta aussi étonnée que nous, car elle croyait n'être surprise par personne, et attendait son Roi qui n'était pas loin. En nous apercevant, Sa Majesté qui se trouvait avec le Maréchal de [p. 173] Grammont, nous fit de la main signe de venir. Aussitôt l’Abbé, devenu plus pâle encore que moi, alla bien vite se jeter à ses pieds. Après avoir plié devant lui le genou suivant l'usage et baisé le bord de son bas, il se leva sur un signe de Sa Majesté, qui lui demanda comment il se trouvait là et qui était avec lui. Sa réponse entendue, le Roi me fit signe de venir aussi ; je m'approchai aussitôt, et après avoir imité mon compagnon que j’avais observé attentivement, je répondis de mon mieux en français aux questions de Sa Majesté. C'est en cette langue que je devrais rapporter notre dialogue, mais comme je ne pourrais y réussir, je l’écrirai en italien.
Le Roi. – D’où êtes-vous, Monsieur ?
Sébastien Locatelli. – De Bologne, pour servir Votre Majesté.
Le Roi. – Vous êtes d’un méchant pays.
S. L. – Comment ? Bologne n'est donc pas la mère des études, le palais des religieux, la patrie de nombreux saints, parmi lesquels on adore le corps incorruptible de sainte Catherine (à ce nom, Sa Majesté ôta son chapeau), aux pieds de laquelle Catherine de Médicis, Reine de France, déposa la couronne et le sceptre de son royaume ?
Le Roi. – C'est une chose difficile que vous entreprenez en voulant défendre un pays où les hommes sont les bouchers des autres hommes.
[p. 174] A ces mots, je restai muet et le visage couvert de rougeur. Le Roi nous tourna le dos en riant gracieusement. Ainsi congédiés, nous allâmes à la petite porte par laquelle nous étions entrés. Le concierge pensa mourir de chagrin en apprenant notre aventure. Il lui était expressément défendu de laisser entrer personne, afin que la Reine ne se doutât pas de la présence de sa rivale qui logeait chez lui ; aussi craignait-il une punition sévère ; mais le Roi ne dit rien, à notre connaissance du moins. »

Locatelli, Sebastiano

Récit par Niccolò Madrisio de sa visite à Saint-Germain-en-Laye

« [p. 324] Il luogo insigne per le fasce di Lodovico Decimo quarto è San Germano detto in Laja dalla vicinanza d’una selva di questo nome, principiato gia da Carlo Quinto, proseguito poi dagl’Inglesi, che ne furono qualche tempo Padroni, posto tra Parigi, d’onde è discosto qualche dodici miglia, e Poissi picciola città natalizia di San Luigi, e famosa per la conferenza seguita tra i Cattolici, e i Protestanti di Francia alla presenza di Carlo Nono, e di Catterina de’ Medici all’ora Reggente ne’ primi torbidi, che successer colà della Religione. A riguardo dell’onore, che ha avuto il Castello di San Germano di veder nascer Lodovico XIV, vi si recita ogn’anno li 5 Settembre nella Regia Capella un Panegirico in lode di Sua Maestà, de’quali se n’avra una seria omai di settanta, non essendo, come ben si può credere, tutti d’ugual bellezza, ne tutti corrispondenti al grand’ argomento, che trattano. Francesco Primo, che si dilettava oltra modo di caccie, ristabili in grazia delle medesime con qualche mutazione il vecchio Castello qual ora si vede girar attorno il Cortile in forma della lettera D, figura, ch’egli li fece dare per alluder al nom d’una Dama da lui amata, il quale principiava in tal lettera. Il nuovo Palagio fu fatto fabbricar [p. 325] da Enrico Quarto ; le sei Galerie, le numerose scale, le grotte sotterranee, i compartimenti del Giardino, o più tosto de’ vari Giardini, che s’incontrano nella discesa da quell’erto Colle sono opera di Lodovico Decimo Terzo, al che tutto il Monarca presente ha dati poi quegli ultimi delicati abbellimenti, c’han reso altre volte San Germano il più celebre di tutti i luoghi Reali. La Natura vi ha contribuito tutto per far il sito amenissimo, la vista aggradevole, e piena di tutti gl’immaginabili privilegi. In un gran tratto di paese, che di piena vaghezza si domina da quell’altezza veramente straordinaria, vi si scopre assai bene così lontano, ch’egl’è, lo stesso Parigi. Ciascuno de’ Giardini, e delle grotte accennate teneva già qualche giuoco curioso d’acqua con varie figure, che si moveano, le quali all’ora faceano una gran parte di queste delizie. Nella grotta, che ancora porta il nome da lui, v’era un’ Orfeo, che nell aprirsi dell’acqua suonava delicatamente la lira accorrendo da vari siti molte sorti d’animali ad udirlo : Diverse altre statue rappresentanti il Re, il Delfino, et la Corte s movevano a veder lo spettacolo, e gli arbori si piegavano alla loro comparsa. Vi era in altra Grotta un Perseo, che volava per aria a liberar Andromeda, ed un Dragone levatosi dibatteva strepitosamente le ali vomitando dalla bocca un gran fonte, attorno il quale molti Rosignoli, e Canarini disposti negli alberi facean la melodia, ch’è lor propria. Sorpasserò [p. 326] un popolo d’altre figure minori che bello stesso tempo maneggiavano ogn’altra sorta di musicali strumenti, e rappresentavano tutti i mestieri dell’arti correndo une spesa si grande nel mantenimento di tante macchine, e giuochi, che dicono che rottasi una volta una corda al violino d’Orfeo non costasse a Lodovico XIII meno di 300 scudi il rimetterla. V’avean pure delle Grotte asciutte, che col mezzo di certo moto secreto dell’acque producevano un venticello freschissimo, il quale in oltre animava Organi, e simili strumenti pneumatici. V’eran molt’altri ingegnosi scherzi non men d’acqua, che d’aria, i quali seccatisi i fonti dopo che il Re ha fermate le sue applicazioni a Versaglie, si son tutti guastati, rimasi inselvatichiti i Giardini della discesa suddetta, e sepolte nell’erba tutte quelle logge, e quelle, altre volte si magnifiche scale in guisa che sono divenute impraticabili, e mettono una formal compassione. Quando io fui colà vi latrava in quelle Galerie una Mandra di cani, che il Re Giacomo d’Inghilterra vi tenea rinserrati per uso delle sue caccie. Il vecchio Castello solo serviva all’abitazione di questo Re, e della sua Corte, come pure per di lui servigio si teneva aggiustata, e culta l’unica parte del Giardino superiore in cima del Colle, e s’era anzi accresciuta di non peche bellezze. San Germano all’ora, ciò che differ gli Storici del Palagio di Teodofico, si potea chiamar un rigido Monastero, ed una vera scuola morale nel soggiorno di [p. 327] quest’ esule coronato, e dell’ incomparabil Maria d’Este sua Moglie non solo perchè rappresentava la maggio peripezia di fortuna, che si sia mai veduta ai di nostri, ma anco per le tante virtù Cristiane, ed Eroiche, nelle quali ambidue incessantemente s’impiegavano avendo destinato per ciascun giorno della settimana qualche particolar esercizio della loro esemplarissima Divozione. »

Madrisio, Niccolò

Récit par John Sanderson de son passage à Saint-Germain-en-Laye

« [p. 231] We now went two leagues and a half further to St. Germain, and walked upon its elegant Terrace. The [p. 232] Pretender is buried here, and several of the little Pretenders ; and in going along we looked at the Machine de Marli, which desires to be remembered to the Falls of Niagara. The water is climbing up an immense hill by dribbles to supply the little squirting Cupids at Versailles.
St. Germain was once the seat of the pleasures and magnificence of the Grand Monarch. He left it, because St. Denis, standing upon a high eastem eminence, overtopped his palace, a memento mori amidst the royal cups. Kings do not choose that these telltales of mortality shall look in at their windows. »

Sanderson, John

Récit de la venue de Bernin à Saint-Germain-en-Laye

« [p. 15] M. Colbert est venu le lendemain, jour de la Fête-Dieu, prendre le Cavalier, comme il l'avait dit. Les seigneurs Paule et Mathie, l'abbé Butti et moi sommes entrés dans son carrosse. Il y avait un carrosse de la suite du Roi pour les gens du Cavalier. L’on est arrivé à Saint-Germain à neuf heures du matin. M. Colbert a été descendre chez lui, au vieux château, et y a été quelque temps avec le Cavalier, puis il l'a mené au château neuf, où est le logement de S. M. et des Reines. En entrant dans l'antichambre, l'on a appris que le Roi n'était pas encore habillé. M. Colbert est entré dans la chambre, et, après en être ressorti, il nous a fait faire le tour et a mené le Cavalier dans le cabinet de S. M., où étaient MM. les maréchaux de Gramont, du Plessis et autres personnes de haute qualité. Là, il s'est entretenu avec eux. Le Roi étant tout habillé, M. Colbert a fait entrer le Cavalier dans la chambre, et lui a fait saluer S. M., qui s'était mise à la croisée d'une fenêtre, avec le premier gentilhomme de sa chambre et le maître de la garde-robe. Le maréchal de Gramont y était aussi. Le Cavalier a fait son compliment au Roi avec une honnête hardiesse, et a dit à S. M., comme il avait fait à M. Colbert, les sujets qui l'avaient principalement engagé de venir en France. Après, venant au sujet du bâtiment du Louvre : « J'ai vu, Sire, a-t-il dit à S. M., les palais des empereurs et des papes, ceux des princes souverains qui se sont trouvés sur la route de Rome à Paris, mais il faut faire pour un roi de France, un roi d'aujourd'hui, de plus grandes et magnifiques choses que tout cela. » Puis, se tournant vers ceux qui faisaient cercle autour du Roi, il a ajouté : « Qu'on ne me parle de rien qui soit petit. » A cela, le Roi a pris la parole et a dit qu'il avait quelque affection de conserver ce qu’avaient fait ses prédécesseurs, mais que si pourtant l'on ne pouvait rien faire de [p. 16] grand sans abattre leur ouvrage, qu'il le lui abandonnait ; que pour l'argent il ne l'épargnerait pas. S. M. ensuite lui a fait toute sorte de bon accueil. Puis M. Colbert l'a ramené au vieux château. L'on avait tendu dans les cours les tapisseries de la couronne pour la procession du Saint-Sacrement (car c'était le jour de la Fête-Dieu) celle des Actes des Apôtres, les Triomphes de Scipion et les autres du dessin de Jules Romain. Après que le Cavalier les a eu considérées et trouvées fort belles, il m'a prié de le mener à la chapelle, où il est demeuré longtemps en prière, et, après la cérémonie, il a diné au chambellan avec M. Colbert et nous autres aussi. Il s'est, au sortir de table, allé reposer à la mode d'Italie, dans l'appartement de M. de Bellefonds. Sur le soir, M. Colbert l’aramené à Paris. »

Fréart de Chantelou, Paul

Rapport du marquis d’Antin concernant l’état des châteaux de Saint-Germain-en-Laye

« [f. 17] Sire,
Je fus visiter mercredy dernier une partie des pépinières de Morlet […]
[f. 17v] J’ay été à Saint Germain, lequel est en bon état en tout ce qui dépent du sieur de Ruzé et autres officiers. J’ai veu une chose qui m’a fort scandalizé : c’est la chambre dans laquelle est née Votre Majesté. Il n’est pas permis qu’elle soit abandonnée comme elle est. J’ay osé, Sire, pour la seule fois de ma vie, ordonner sans votre participation qu’elle fût rétablie incessamment et décorée comme il convient. Tous vos sujets, Sire, doivent respecter un lieu comme celuy là ; jugez de ce que je panse à mon particulier.
[Annotation du roi :] Bon
M. de Ruzé a vendu à Ober, charpentier, le vieux manège du roy d’Angleterre la somme de 3000 l. [f. 18] C’est en vérité moitié plus qu’il ne vaut, mais il m’a assuré qu’il avoit ancore été paié plus grassement quand il avoit été construit.
[Annotation du roi :] Bon
J’ay été au Val, que j’ai trouvé très bien soigné, les espalliers et les vergers en très bon état. Il n’y a quasi point de fruit cette année. Il y a quelque petite réparations à faire aux parquets, qui ne méritent pas de vous en importuner.
[Annotation du roi :] Bon
[…]
[f. 19] A Versailles, le 6 de juillet 1708 »

Maison du Roi (Ancien Régime)

Mention d’un don fait par le roi pour la construction du clocher de l’église de Saint-Germain-en-Laye

« L’an 1659, par la solicitation et soins de maitre Pierre Cagnyé, prestre, curé de l’eglise de Saint Germain en Laye, et d’honorables hommes Georges Benoist, escuyer de cuisine bouche du Roy, et François Regnault, marchand boucher, marguilliers de lad. eglise, et par les bienfaicts du roy Louys 14e du nom, pour plus grande decoration et ornement d’icelle, fut par l’ordonnance de noble homme maitre Georges Le Grand, prevost juge de la jusice royalle et du consentement des principaux habitants dud. lieu par assemblée d’iceux faicte sur ce sujet abattu et demoly le cloché qui estoyt basty et eslevé entre les autels de la Vierge et de la charité et continué le bastiment de la tour encommencé hors le corps de lad. eglise quarante ou cinquante ans auparavant pour y mettre les cloches. La 1ère pierre de la continuation de lad. tour bastie et eslevée jusques à la 1ère retraicte fut posée au nom desd. sieurs marguilliers le 31e et dernier jour de juillet dernier passé et celle des pillier qu’il a convenu faire proche ledict autel des Vierges pour ayder à porter les voutes qu’il a fallu faire et continuer en la place dud. cloché fut posée aussi au nom dud. sieur curé le 8e jour du present mois d’aoust en lad. année 1659, tous lesquels ouvrages ont esté faicts et conduicts par honeste homme Claude Binet, maitre maçon tailleur de pierre, natif dud. lieu, et a esté donnée par Sa Majesté la somme de cinq mil livres pour en faire les frais. »

Mention dans le registre paroissial de la célébration d’un Te Deum en présence du roi dans la chapelle du Château-Vieux de Saint-Germain-en-Laye

« Le 2e jour de mars 1649, fut solemnellement chanté dans la chapelle du viel chasteau, M. l’evesque d’Aire y officiant pontificalement, le Te Deum etc. avec les autres prieres en action de graces à Dieu de la paix faicte et arrestée entre l’Empereur et le Roy, où estoient assistants et presents Sa Majesté, accompagnée de la Reyne regente sa mere, M. le duc d’Orleans, M. le prince de Condé, Son Eminence et plusieurs autres princes, seigneurs, evesques et prelats de l’Eglise, de Mademoiselle, de la princesse de Condé, des ambassadeurs de Portugal, de Venise, de Savoye, du chancelier de France, des secrettaires d’Estat et plusieurs autres seigneurs du conseil et officiers de cette cour. »

Lettre du marquis de Saint-Maurice, ambassadeur de Savoie, donnant des nouvelles de la cour à Saint-Germain-en-Laye

« Paris, le 12 février 1672
[…]
[p. 210] Je vis à Saint Germain M. le marquis de Louvois. Je le remerciai, de la part de Votre Altesse royale, de la manière obligeante dont il en avait agi pour ses intérêts et envers moi durant qu’il a eu la direction des affaires étrangères. […]
[p. 245] Un homme qui peut savoir des nouvelles m’assura hier que le Roi a commandé de nouveau au marquis de Villars de faire expliquer la reine d’Espagne, que néanmoins il veut passer le Rhin, [p. 246] qu’il fait faire son équipage, qu’il partira au mois d’avril et que les ministres suivront.
Il n’a pas encore nommé de chancelier ni de garde des sceaux. On croit qu’il n’en fera pas. Il tint lui-même les sceaux samedi et lundi dernier, ce qui dura plus de huit heures en ces deux jours. Il y a dans la chambre, préparée exprès, une longue table ; il est assis au dessus dans un fauteuil, six conseillers d’Etat aux deux côtés, assis sur des pliants et couverts, et qui ôtent leurs chapeaux quand ils rapportent des grâces ou des lettres. Il y a les audienciers et officiers des sceaux. Le Roi opine plus juste qu’aucun des officiers de justice qui sont présents. Il fait apporter de son cabinet par son premier valet de chambre le coffre où sont les sceaux et tire la clef de sa poche pour l’ouvrir. Il a résolu de tenir lesdits sceaux toutes les semaines, il veut connaître les abus qui s’y peuvent commettre pour y remédier, avant que de les remettre à un homme particulier. Bien des gens de qualité y assistèrent ; la Reine même y alla, la grâce du sieur de La Rochecourbon [p. 247] en main ; le Roi dit que la suppliante était d’assez bonne maison pour la lui accorder.
Il retirera auprès de M. le Dauphin les jeunes princes de Conti. Ils mangeront avec lui et n’auront pour gouverneur et précepteurs que ceux de M. le Dauphin. Il a pris le deuil de la princesse de Conti et toute la Cour. Nous avons suivi cet exemple pour nos personnes, mais ce sera pour peu de temps.
L’ambassadeur de Hollande continue ici son séjour. Il voudrait donner des jalousies aux alliés et leur faire croire qu’il traite ici d’accommodement, mais on s’en moque. »

Lettre du marquis de Saint-Maurice, ambassadeur de Savoie, donnant des nouvelles de la cour à Saint-Germain-en-Laye

« A Paris, le 3 février 1670
Quand on est obligé à écrire des nouvelles sur le récit d’autrui, c’est souvent contre la vérité ; il en a été de même de la relation que je fis vendredi au soir à Votre Altesse royale de la retraite de Monsieur de la Cour et de la prison de M. le chevalier de Lorraine pour beaucoup de circonstances, quoique j’eusse su ce que je lui en mandai sur le récit qu’en avait fait M. le comte de Charost et madame la comtesse du Plessis dans le propre logis de Monsieur, au Palais Royal. Voici, Monseigneur, la pure vérité écrite par [p. 389] madame de Montespan à M. le duc de Mortemart, son père, que j’ai sue de madame de Tambonneau, son intime et bien aimée amie. Mais je supplie Votre Altesse royale que personne ne sache que je lui ai nommé toutes ces personnes.
L’abbé de La Rivière, évêque de Langres, avait deux abbayes, de l’apanage de Monsieur. Comme il était vieux et valétudinaire, il y a longtemps qu’il attendait sa mort pour les donner au chevalier de Lorraine ; il le dit au Roi à Chambord, qui lui répondit que ledit chevalier n’étant pas ecclésiastique, sa conscience ne lui permettait pas d’y consentir, qu’outre cela il faisait une vie trop libertine pour posséder des bénéfices. Monsieur l’ayant prié instamment de l’agréer, Sa Majesté lui repartit encore qu’il était impossible, mais qu’à la considération de ce qu’il aimait, quoiqu’il eut peu d’estime pour ledit chevalier, qu’il lui donnerait 40000 livres de pension quand lesdites abbayes viendraient à vaquer. Monsieur ayant rapport tout ceci au chevalier de Lorraine, [p. 390] ils firent cent railleries sur la conscience du Roi à cause des dames, et qu’il a sues. Le Roi accuse aussi le chevalier de Lorraine de l’infâme crime de sodomie avec le comte de Guiche et même des hommes qui ont été brûlés pour cela en Grève.
L’évêque de Langres étant mort jeudi matin, Monsieur dit au Roi qu’il avait donné les abbayes au chevalier de Lorraine ; il lui répliqua qu’il ne le voulait pas. Monsieur lui répondit que c’était une affaire faite ; Sa Majesté lui dit encore qu’il l’empêcherait. Ils s’échauffèrent tous les deux, les assistants s’en aperçurent et qu’il y avait de la mésintelligence, sans en savoir la cause. Le Roi, au sortir de la chapelle, monta en carrosse et alla à Versailles. Monsieur se retira chez lui, fort atterré, s’enferma dans un cabinet avec le chevalier de Lorraine, lui dit ce qui s’était passé et que, puisque le Roi le traitait de la sorte, qu’il voulait à l’heure se retirer de la Cour. Il le pria de n’en rien faire, que cette action nuirait à tous les deux. Monsieur fit appeler M. Le Tellier, lui parla fort atterré, se plaignit du Roi, lui dit que l’on lui avait inspiré les mauvais traitements qu’il lui faisait [p. 391] et s’emporta beaucoup. M. Le Tellier tâcha de le ramener et, voyant qu’il continuait toujours du même ton, il lui demanda qu’il voulait qu’il écrivit au Roi tout ce qu’il venait de lui dire ; Monsieur lui ayant dit qu’il lui ferait plaisir, le ministre alla l’écrire au Roi qui, recevant sa lettre, n’en témoigna rien. M. Colbert étant arrivé à Saint Germain, Monsieur le fit aussi appeler et lui parla avec le même feu qu’il l’avait fait à M. Le Tellier.
A l’entrée de la nuit, le Roi arriva de Versailles et alla à droiture chez madame de La Vallière. Madame la duchesse d’Orléans lui envoya un gentilhomme lui dire qu’elle ne pouvait sortir du château neuf, qu’elle le suppliait de vouloir aller pour chose qui lui importait beaucoup. Sa Majesté s’y rendit à l’abord. Madame le pria de vouloir que le chevalier de Lorraine eût les abbayes ; il lui dit qu’il ne se pouvait ; elle le lui demanda en grâce, il persista dans son refus, lui représentant qu’elle avait oublié tous les mauvais traitements qu’on lui avait faits. Elle lui témoigna qu’elle préférait la satisfaction de Monsieur à ses intérêts, que le chevalier de Lorraine était un [p. 392] jeune homme, qu’il changerait de conduite, le supplia de lui pardonner et, voyant qu’elle ne pouvait rien gagner, elle se jeta aux genoux du Roi, la larme à l’œil, lui témoignant que le plus grand déplaisir qu’elle avait était de se séparer de sa personne mais qu’elle était obligée de suivre Monsieur qui s’en voulait aller.
Le Roi se retira en disant que, puisque son frère se séparer de lui pour cela, qu’il saurait châtier ceux qui en étaient cause et fomentaient leur désunion. Il donna d’abord les ordres pour fortifier la garde de monsieur le Dauphin, qui loge dans le château neuf, et de prendre toutes les avenues. M. le comte de Vaillac s’en étant aperçu, qui est capitaine des gardes de Monsieur, lui en donna avis ; il lui en répliqua qu’il en savait la cause, néanmoins il témoigna quelques peines. M. Le Tellier entra ensuite dans sa chambre et lui dit de la part du Roi que, la nécessité de son service l’obligeant de s’assurer de la personne du chevalier de Lorraine, qu’il serait fâché d’être forcé de le faire arrêter dans son appartement et en sa présence ; il lui répliqua [p. 393] que, puisque le Roi en usait de la sorte, qu’il allait partir pour Villers Cotterets ; ce ministre lui représenta qu’il ne le devrait pas faire mais seulement aller à Saint Cloud, qu’il était aisé de sortir de la Cour de cette sorte mais qu’on ne savait pas quand on y pourrait revenir. Monsieur lui dit fortement qu’il voudrait avoir une maison à trois cents lieues du Roi, qu’il y irait et qu’il ne reviendrait jamais auprès de lui qu’avec le chevalier de Lorraine ; puis, se tournant au chevalier, il l’embrassa, l’assura de la continuation de son amitié et lui dit de suivre M. Le Tellier. Ils sortirent ensemble ; le chevalier lui demanda ce qu’il avait à faire, qu’il était prêt à obéir aux ordres du Roi. M. Le Tellier lui répondit qu’il n’avait rien à lui commander de sa part.
Comme ils furent dans la cour du château vieux, le comte d’Ayen l’arrêta et le chevalier de La Ilhière ; ils lui demandèrent son épée, puis le sortirent de là. Il demanda au comte d’Ayen où il le menait ; il lui répondit : « Dans ma chambre », où, étant arrivé, [p. 394] il souhaita de voir M. le Grand et le comte de Marsan, ses frères ; on lui dit qu’il ne pouvait mais qu’il pouvait écrire à qui il voudrait. Il fit quatre lettres : une à Monsieur, au comte de Marsan, à mademoiselle de Fiennes et à l’intendant de sa maison ; il voulut les montrer au comte d’Ayen, il dit qu’il n’avait pas ordre de les voir ; on croit néanmoins que le Roi les a lues. Il priait Monsieur de lui continuer l’honneur de sa bienveillance et que, s’il avait encore quelque amitié pour lui, il le suppliait de protéger et d’assister mademoiselle de Fiennes. Monsieur lui a fait réponse qu’à sa considération il aurait soin de la demoiselle, qu’il se consolât, parce qu’il courrait toujours la même fortune que lui. Ledit chevalier coucha à Saint Germain, il n’a pas été à la Bastille, on lui demanda combien il voulait de domestiques, qu’il pouvait prendre ceux qu’il voudrait : il choisit deux de ses gentilshommes et deux valets de chambre. Il partit le vendredi dans son carrosse, où il y a un lieutenant des gardes du corps avec une [p. 395] forte escorte ; il doit aller à Pierre Encise, des autres disent à la citadelle de Montpellier et peut être à Collioure sur les frontières de Catalogne.
Monsieur partit samedi d’ici pour Villers Cotterets avec Madame, suivi de douze carrosses à six chevaux ; ils ont laissé ici Mademoiselle et la maréchale du Plessis auprès d’elle ; la maréchale de Clérembault, qui a été nommé par le Roi pour la gouvernante, se trouvant en Poitou, Monsieur lui a dépêché un courrier pour qu’elle ne vienne pas ; il dépêcha un courrier en Angleterre, et, à ce que l’on dit par Paris, un autre en Piémont, ce que je ne crois pas. Le maréchal du Plessis, comme officier de la Couronne et peut être pour voir s’il trouverait jour à quelque accommodement, demanda au Roi congé de suivre son maître, qui lui répliqua : « Eh quoi ! Monsieur partir ? » Le maréchal répliqua que oui. Sa Majesté lui répondit : « Qu’il aille, et vous le pouvez suivre ».
Quoiqu’en apparence l’affaire des abbayes soit la cause de cette querelle ci aussi bien que la fermeté et résolution de Monsieur, on dit que le roi d’Angleterre avait prié Sa Majesté Très Chrétienne [p. 396] d’ôter d’auprès de Monsieur le chevalier de Lorraine, qu’il était cause des mauvais traitements que recevait sa sœur, à moins de quoi il serait obligé de la retirer à Londres.
Le Roi a paru fort chagrin et triste depuis cette affaire, quoiqu’il affecte le contraire, puisqu’il continue à faire des loteries et que demain on dansera le ballet ; néanmoins, il appréhende des brouilleries et qu’il ne se forme quelque parti en faveur de Monsieur, car, dans le fond, si la chose ne s’accommode bientôt, Monsieur s’ennuiera à Villers Cotterets, son dépit et sa rage augmenteront, et il se trouvera forcé à accepter des partis qu’on ne manquera pas de lui offrir du dehors. »

Lettre du marquis de Saint-Maurice, ambassadeur de Savoie, donnant des nouvelles de la cour à Saint-Germain-en-Laye

« A Paris, le 31 janvier 1670
Bien que j’aie su dès le point du jour et même avant que de commencer cette lettre que M. le chevalier de Lorraine avait été hier soir arrêté prisonnier à Saint Germain et que Monsieur en était parti à l’heure, très mal satisfait, néanmoins je n’ai pas cru le devoir faire savoir à Votre Altesse royale que je n’en susse au vrai toutes les circonstances et les causes, ce que j’ai eu de la peine à débrouiller parce qu’on en parle bien différemment à Paris, mais à la fin j’ai su ce [p. 384] qu’Elle verra dans le mémoire ci-joint de ma main, que je n’ai pas le temps de faire copier parce qu’il est fort tard.
Relation de ce qui s’est passé à Saint Germain la nuit du 30 janvier 1670
Le Roi fit donner une petite revue à ses gardes du corps pour avoir prétexte de les assembler et donner ordre à M. le comte d’Ayen, fils de M. le duc de Noailles, capitaine de quartier, et à M. le comte de Lauzun, marquis de Péguilin, d’en prendre quatre cents à l’entrée de la nuit et de se rendre maîtres de toutes les avenues du château neuf, ce qui ne se put faire sans que Monsieur, qui y avait son logement, n’en fût averti, dont il fut fort surpris et en peine. M. Le Tellier entra d’abord dans sa chambre et lui dit que le Roi était fâché d’être forcé, pour le bien de ses affaires, de s’assurer de M. le chevalier de Lorraine, qu’il croyait qu’il y donnerait les mains de bonne grâce puisque Sa Majesté lui avait donné l’ordre de l’assurer de la continuation de son amitié et de son estime. Monsieur lui répartit que, quels traitements que le Roi fît à ce chevalier, [p. 385] qu’il l’aimerait toujours parfaitement et qu’il lui donnerait toute sa confiance mais que, puisque le Roi le traitait de la sorte, qu’il allait partir à l’heure même pour se retirer à Villers Cotterets. M. Le Tellier lui voulut représenter qu’il ne fallait pas aller si loin, que ce serait assez de se retirer à Saint Cloud ; Monsieur lui répliqua qu’il voudrait avoir une maison à trois cents lieues de La Cour pour s’y aller consoler.
M. Le Tellier, voyant entrer le comte d’Ayen dans la chambre, passa en l’appartement de madame la duchesse d’Orléans ; ce comte dit à Monsieur qu’il avait un extrême regret d’être obligé d’exécuter les ordres qu’il avait en sa présence ; il lui répliqua qu’il entendait assez ce qu’il lui voulait dire, il se tourna au chevalier de Lorraine, l’embrassa et se retira dans son cabinet, la larme aux yeux. Le comte d’Ayen fit prisonnier le chevalier de Lorraine avec toute la civilité possible, sans lui ôter son épée, le conduisit dehors de l’appartement de Monsieur, le remit au comte de Lauzun, qui l’amena sur l’heure à la Bastille, dont il est parti aujourd’hui pour être enfermé dans le château de Pierre Encise à Lyon.
[p. 386] M. Le Tellier, qui était passé chez Madame, lui fit le récit de toute la chose et lui demanda ce qu’elle ferait ; elle lui répartit hardiment : ce que Monsieur lui ordonnerait. Ils partirent sur le champ et arrivèrent à Paris environ minuit. Monsieur fit appelée l’ambassadeur d’Angleterre et l’abbé Montaigu, il demeura enfermé avec eux jusques à quatre heures ; on dit qu’il pressa fort ledit ambassadeur d’aller à Saint Germain, qui s’en excusa, et à son refus l’abbé de Montaigu a fait ce voyage là ce matin.
On parle diversement par Paris du sujet de cette détention. On dit que l’évêque de Langres étant mort, qui était cet abbé de La Rivière qui avait tant eu de crédit auprès de feu M. le duc d’Orléans, a laissé vacantes deux abbayes valant de revenu 40000 livres, qu’elles sont dans l’apanage de Monsieur et par conséquent de sa nomination ; que, les ayant données au chevalier de Lorraine et en ayant demandé l’agrément au Roi, il lui répondit [p. 387] que, n’étant pas prêtre, il en avait du scrupule et qu’alors il se passa entre eux quelques paroles d’aigreur. Mais ceux qui savent l’état des choses et qui en jugent sainement croient que le roi d’Angleterre a voulu la prison de ce chevalier, lui imputant les mauvais traitements que reçoit Madame, ceux que l’on a faits à madame de Saint Chaumont et à M. l’évêque de Valence, ses créateurs. En effet, bien que Madame suive Monsieur, elle a de la joie du malheur du chevalier de Lorraine et d’avoir l’avantage de s’être vengée du crédit du roi, son frère, que l’on ne veut pas maintenant fâcher ici.
On dit que Monsieur persiste dans la résolution de partir de Rueil pour Villers Cotterets, quoique MM. Le Tellier et de Lauzun soient venus aujourd’hui de Saint Germain pour lui parler. Il pourrait bien avoir le loisir de s’en repentir : s’il est bien conseillé, il se soumettra aux volontés du Roi ; il ne sera suivi que par ceux de sa maison et s’y divertira mal. Il n’est plus le temps d’autrefois que, quand un Fils de France se retirait de la Cour mal satisfait et était une fois à trois lieues de Paris, l’on croyait le royaume bouleversé et [p. 388] en péril ; chacun armait pour son parti et les mécontents levaient le masque ; présentement personne ne bougera, tout le monde est soumis dans le devoir et dans la crainte, le Roi dans la souveraine puissance, fort en argent et en troupes, maître des parlements, des places et de tout ce qui es dans son royaume. »

Lettre du marquis de Saint-Maurice, ambassadeur de Savoie, donnant des nouvelles de la cour à Saint-Germain-en-Laye

« A Paris, le 22 novembre 1669
[…]
[p. 362] Je n’ai pas pu aller cette semaine à Saint Germain à cause des affaires de Madame ; mais j’y irai dimanche ou mardi et porterai le dessin de la Vénerie royale pour le faire voir au Roi. Vendredi dernier que j’y fus, je vis madame la duchesse de La Vallière à la messe, elle était dans les tribunes d’en haut ; dès que j’y jetai les yeux, j’en reçus un grand salut auquel je répondis par des révérences très soumises. J’ai su que le Roi et elles ont été très satisfaits de ma visite. Je ne saurais les lui continuer parce que personne ne va chez elle, mais chez la Reine et partout où je la trouverai je la visiterai et tâcherai de la bien persuader de l’estime qu’a pour elle Votre Altesse royale et des ordres qu’Elle m’a donnés de lui faire ma cour et de lui rendre dans toutes sortes de rencontres mes fidèles et respectueux services.
Le Roi, sans que personne le sache, a fait préparer [p. 363] de beaux appartements à ces dames dans les Tuileries et s’est enfin résolu de venir faire quelque séjour en cette ville car les fermiers des entrées demandent de grands rabais à cause qu’il demeure si longtemps à Saint Germain. »

Lettre du marquis de Saint-Maurice, ambassadeur de Savoie, donnant des nouvelles de la cour à Saint-Germain-en-Laye

« Paris, le 15 janvier 1672
La pensée de Votre Altesse royale sur le malheur du comte de Lauzun est très judicieuse et ce ne peut être autre chose. Il en voulait à madame de Montespan, parce qu’elle ne lui était pas favorable. Outre qu’il en a dit du mal, on croit toujours qu’il voulait donner moyen à son mari de l’enlever. Elle a encore peur de l’être et de quelque insulte, car elle ne marche jamais sans gardes, pas même pour aller de sa chambre à la chapelle [à] Saint Germain, bien qu’elle en soit tout contre.
[p. 223] Elle est toujours mieux que jamais. On avait dit que le Roi regardait avec un œil passionné la duchesse de Ventadour et que madame de Richelieu travaillait à la lui rendre facile, mais je n’en crois rien, car outre que le Roi aime toujours beaucoup madame de Montespan, c’est qu’elle est amie de la duchesse de Richelieu et lui a fait avoir la charge de dame d’honneur de la Reine. Il y a bien des gens qui croient que le Roi ne marchera qu’après les couches de la Reine pour ne pas s’éloigner des dames qu’il mènera puis à la suite de la Reine. Si cela était, on ne bougerait d’ici qu’au mois de juillet. C’est à quoi je veille, afin de tenir Votre Altesse royale instruite de ce qu’il fera. »

Lettre du marquis de Saint-Maurice, ambassadeur de Savoie, donnant des nouvelles de la cour à Saint-Germain-en-Laye

« A Paris, le 26 février 1670
Je fis savoir par le dernier courrier à Votre Altesse royale que l’on conjecturait le retour de Monsieur à la Cour sur les négociations que la princesse palatine était allée faire à Villers Cotterets. On ne s’était pas trompé car soudain qu’elle fut revenue vendredi au soir, elle fit une dépêche à Saint Germain qui obligea le Roi d’envoyer samedi M. Colbert à Monsieur lui dire qu’il souhaitait le voir, à quoi il se soumit d’abord. Lui et Madame vinrent ici lundi et, le même jour, ils allèrent voir le Roi, qui les reçut très bien et qui les a fait loger dans son grand appartement, parce qu’ils avaient fait démeubler le [p. 402] leur au château neuf. On assure qu’on a envoyé les ordres pour la liberté du chevalier de Lorraine, moyennant qu’il aille faire séjour pour quelque temps à Rome ou à Malte. Le Roi lui donnera dix mille écus de pension, et les abbayes qui avaient fait la cause de son malheur à l’abbé d’Harcourt, son frère. Ainsi voilà une affaire accommodée selon la volonté de Sa Majesté, comme il est très juste.
Le Roi et Madame se sont écrit durant qu’elle a été éloignée de lui. Sa Majesté la raillant sur les ennuis qu’elle devait avoir à la campagne, elle lui fit réponse qu’elle étudiait l’italien, mais qu’elle le priait de ne pas la laisser aller jusqu’au latin, et lui demandait des nouvelles des loteries de Saint Germain, ce qui donna lieu au Roi de lui envoyer quatre cassettes fort riches, feignant que c’étaient des lots qui lui étaient échus par hasard, dans lesquelles il y avait quatre billets de cinq cents louis chacun, quantité de bijoux enrichis de pierreries et entre autres une paire de souliers de campagne propres à se promener par le parc de Villers Cotterets, dont les boucles valent mille louis. On fait monter ce présent à [p. 403] 200000 livres ; on m’a dit néanmoins qu’il en faut rabattre une partie.
Le Roi se trouva hier matin mal des vapeurs, il fut nécessité de se mettre au lit et à prendre des pilules. C’est un effet du dégel. J’y ai envoyé un de mes fils pour en savoir des nouvelles, n’ayant pu y aller pour avoir un peu de fluxion sur un œil. Je ne sais si les fréquentes attaques d’un mal si fâcheux ne feront point changer sa Majesté la résolution qu’Elle avait formée de partir le quatorzième du mois d’avril pour la Flandre, les ordres ayant été donnés pour cela, et les magasins qui faits pour les fourrages nécessaires aux troupes doivent l’escorter, que l’on fait monter à 10000 chevaux. »

Lettre du marquis de Saint-Maurice, ambassadeur de Savoie, concernant une visite à la duchesse de La Vallière à Saint-Germain-en-Laye

« A Paris, le 12 novembre 1669
Je viens de Saint Germain, où j’étais allé exprès pour voir madame la duchesse de La Vallière, M. de Bonneuil m’ayant dit samedi dernier qu’elle recevrait à grand honneur la visite que je lui voulais faire. M. de Bonneuil m’y a introduit d’abord après dîner et, en montant à son appartement, il m’a dit que je n’y demeurasse pas longtemps parce que le Roi l’attendait pour aller au promenoir. Elle m’a reçu avec sa bonne grâce et civilité ordinaires ; je lui ai fait mot pour mort le compliment que Votre Altesse royale m’avait commandé ; elle m’a répondu qu’elle était bien obligée à Votre Altesse royale de l’honneur qu’Elle lui faisait ; [p. 354] qu’elle le recevait avec respect et qu’elle la remerciait des bontés qu’elle avait pour M. le duc de Vermandois, en attendant qu’il fût en âge de l’en aller remercier lui même. Nous avons fait encore quelques compliments réciproques et très obligeants, puis je me suis retiré. Il y avait dans sa chambre mesdames les marquises de La Vallière et d’Heudicourt ; madame de Montespan n’a pas tardé de les joindre, car, comme j’étais au bas de leurs degrés, elles sont descendues, montées en carrosse et allées attendre le Roi à Versailles, qui les a suivies de bien près.
J’ai été fâché de ce voyage, qui est cause que j’ai pu si peu demeurer auprès de cette dam, où je m’aimerais fort. Je l’ai trouvée toujours mieux faite que l’autre ; elle a ce je ne sais quoi qui sait charmer et, si elle avait de l’embonpoint, elle passerait pour très belle. Son appartement est merveilleux autant pour la propreté que pour la richesse. »

Lettre du marquis de Saint-Maurice, ambassadeur de Savoie, concernant une visite à Saint-Germain-en-Laye

« Paris, le 19 octobre 1672
[…]
[p. 425] Toutes ces dépêches m’obligèrent de résoudre un voyage à Saint Germain. Je n’y voulus pas néanmoins aller le lundi, à cause du conseil du matin, qui m’aurait empêché de voir les ministres, et comme il n’y en a le mardi que l’après dîner, je m’y acheminai dès le point du jour, et, lorsque j’y arrivai, je sus que M. de Pomponne était en cette ville, mais qu’il [p. 426] arriverait là pour dîner. Je dis demander à voir M. de Louvois, qui me remit à midi. J’allai chez le Roi, il n’était pas réveillé ; je m’entretins quelque temps dans son antichambre avec monsieur le Prince et M. le maréchal de Villeroy sur les nouvelles qui venaient d’arriver.
Après que le Roi fut habillé et que je me fus entretenu avec bien des différentes personnes, le temps de voir M. de Louvois arriva. Je m’acheminai chez lui. Je lui dis d’abord combien Votre Altesse royale lui savait bon gré de l’amitié qu’elle lui témoignait en toutes sortes de rencontre. Je lui en fis le compliment qu’elle m’a ordonné, qu’il reçut de très bonne grâce ; après quoi je lui dis tout ce que Votre Altesse royale m’a prescrit sur cette envie de surprendre Savone. Il me laissa parler autant que je voulus, et après il me dit que, puisque je ne voulais pas avouer la vérité, il me conseillait de n’en plus parler à personne, même au Roi ni à M. de Pomponne, que c’était une affaire passée dont on ne parlait ni on n’y songeait plus, que ce que j’en pourrais dire ne justifierait pas bien Votre Altesse royale de la pensée que l’on avait de faire remarquer au Roi [p. 427] qu’elle n’avait pas de la confiance en lui en ce rencontre et que cela pourrait porter quelque préjudice à Votre Altesse royale auprès du Roi, qui l’aimait, et qu’ainsi il était mieux que la chose fût tout à fait ensevelie dans l’oubli. »

Lettre du marquis de Saint-Maurice, ambassadeur de Savoie, concernant une visite à Saint-Germain-en-Laye

« Paris, le 4 décembre 1671
Quand je sortis hier matin de cette ville pour aller à la Cour, il n’était pas encore bien jour. Je rencontrai néanmoins M. de Louvois dans le faubourg de Saint Honoré, qui y entrait. Je ne croyais pas qu’il retournât à Saint Germain qu’à la nuit. J’allai, y étant arrivé, droit à la chambre du Roi. Il y parut demi heures après. Je l’abordai et le priai qu’à sa commodité je le pusse entretenir un quart d’heure chez lui. Il me dit : « Tout à cette heure », et me convia d’entrer dans le cabinet de Sa Majesté, lieu où personne n’entre que par grande faveur, où Elle devait bientôt aller négocier. Toute la Cour fut surprise de cette action et moi, qui sais les choses, encore plus que les autres. Jamais favori ni premier ministre ne peut [p. 200] rien entreprendre de plus haut ni de plus hardi. Il est vrai aussi qu’on le considère maintenant comme l’un et l’autre, et l’on ne doute plus que, si les choses continuent de la sorte, il ne soit bientôt seul et le tout puissant.
Quand nous fûmes dans ce cabinet, je le remerciai du rang qu’il a procuré au régiment de cavalerie que Votre Altesse a donné au Roi. Il me répondit que Sa Majesté avait avec plaisir pris cette résolution pour satisfaire Votre Altesse royale en ce qu’Elle souhaitait. Il me dit ensuite que monseigneur le prince en serait mestre de camp et M. le baron de Lucinge colonel lieutenant, avec commandement de mestre de camp. Je lui parlai ensuite des commandements que pourraient avoir MM. Cagnol et Grimaldi ; il me répliqué par leur commission de capitaines. Je lui représentai qu’il faudrait aussi leur donner des commissions de mestre de camp, particulièrement au dernier qui a servi durant si longtemps de lieutenant colonel des régiments des feus comte de [p. 201] Broglie et prince Almeric. Il me dit nettement que cela ne se pouvait pas, qu’il y en avait cent dans la cavalerie aussi anciens au service que lui, qui l’avaient demandé et auxquels on l’avait refusé et que, si on ouvrait cette porte, ce serait un embarras et une confusion qui apporteraient de grands désordres au service du Roi, qu’il n’y pouvait pas avoir de mestres de camp que ceux qui avaient des régiments, mais il m’assura que, contre la coutume observée dans ce service jusques à présent, tous les capitaines de ce régiment commanderaient aux Français à leur tour et par l’ancienneté de leur commission. »

Lettre du marquis de Saint-Maurice, ambassadeur de Savoie, concernant une audience du roi à l’ambassadeur de Hollande à Saint-Germain-en-Laye

« Paris, le jour des Rois de l’année 1672
Samedi, quand le Roi se déclara qu’il n’irait plus en Champagne, il dit au sieur de Bonneuil, l’introducteur, de faire savoir à l’ambassadeur de Hollande qu’il lui donnerait audience le lundi [p. 218] matin, qui y fut. Comme il fut arrivé à la chambre de descente, M. Le Tellier s’y rendit, parce que le Hollandais n’a pas encore les jambes bonnes et ne pouvait pas monter à la chambre du ministre, qui est fort haute. Ils demeurèrent une demi heure enfermée, mais on ne sait pas encore ce qui se passa dans cette conférence. Après quoi l’ambassadeur alla chez le Roi. Il était dans son cabinet, seul, mais il y avait dans un jour au devant, entre lesquels il n’y a pas de porte qui ferme, monsieur le Prince, M. de Turenne, les ducs de Créquy, d’Aumont, de Gesvres et de La Feuillade, M. Le Tellier, et le roi y fit appeler le comte de Castelmeilhor et le marquis d’Estrades, qui étaient dans sa chambre ; après quoi l’ambassadeur entra. Il dit au Roi (à ce qu’une personne m’a dit, qui m’a assuré l’avoir appris de Sa Majesté même) que messieurs les Etats généraux, ses maîtres, ayant été assurés de bien des endroits que le grand armement que faisait Sa Majesté en terre et en mer était pour les attaque, qu’ils ne le pouvaient [p. 219] pas croire, puisqu’ils avaient toujours maintenu bonne amitié et correspondance avec sa Couronne et eu toujours grande estime et déférence pour sa personne, que dans toutes les occasions ils lui avaient rendu des fidèles et importants services, qu’ils les lui continueraient tant qu’Elle les agréerait, que s’ils avaient fait quelque chose qui lui eût déplu, qu’ils l’ignoraient, que si Elle avait la bonté de leur faire savoir, qu’ils se mettraient en toute la posture qu’il souhaiterait pour y réparer et qu’ils étaient prêts de lui donner toutes les satisfactions convenables qu’Elle voudrait exiger d’eux. On dit que le Roi lui répondit succinctement que s’il avait armé, que ce n’était qu’à l’exemple de ses voisins qui avaient eu envie de lui nuire et de l’attaquer, qu’il était en état de ne pas les craindre, qu’il ferait encore bien plus de troupes qu’il n’en avait et qu’alors il ferait tout c que ses intérêts et sa réputation lui dicteraient.
[p. 220] L’ambassadeur de Hollande lui présenta après la lettre de ses souverains ; le Roi lui dit qu’elle était imprimée, qu’elle courait toutes les provinces de l’Europe et qu’il savait ce qu’elle contenait puisqu’il l’avait il y a quinze jours, que néanmoins il ne laisserait pas de la prendre et qu’il aviserait à la réponse qu’il devra leur faire. L’ambassadeur lui répliqua que s’il lui avait donné audience la première fois qu’il la lui avait fait demander et qu’il lui avait plu de la lui faire assigner, qu’assurément il aurait eu ladite lettre auparavant que personne autre que ses souverains en eussent connaissance, mais que, comme il avait cru qu’il aurait eu ladite audience alors qu’on la lui avait fait espérer, qu’il l’avait écrit aux Etats, qu’eux, s’étant figurés que c’était une chose faite, avaient donné des copies de ladite lettre aux ministres étrangers qui étaient auprès d’eux à La Haye, afin que chacun sût la disposition où ils sont de l’honorer et de lui donner toute satisfaction. Après quoi, il se retira, voyant qu’il ne pouvait pas [p. 221] faire déclarer le Roi sur quoi que ce fût ; il ne fut pas avec lui un demi quart d’heure. Il paraît satisfait de cette réponse. Il ne s’en ira pas, comme il souhaitait, les Etats le lui ayant défendu.
Dès qu’il fut sorti d’auprès de Sa Majesté, elle approcha ses messieurs qui étaient en son avant cabinet, leur dit ce qui s’était passé entre elle et cet ambassadeur, puis remit la lettre des Etats à monsieur le Prince, qui la lut tout haut et qui ne contient que ce que leur ministre avait proféré verbalement à Sadite Majesté. Tout cela fait croire qu’Elle ne changea pas de dessein et qu’elle suivra toujours sa pointe et sa résolution, où tout s’achemine également et sans aucune interruption. »

Lettre du marquis de Saint-Maurice, ambassadeur de Savoie, concernant une audience du roi à Saint-Germain-en-Laye

« A Paris, le 7 octobre 1667
Je reçus dimanche l’honneur de la lettre de Votre Altesse royale du 24 septembre dernier et le lundi j’allai à Saint Germain ; j’avais été averti par les introducteurs que Sa Majesté me donnerait une audience. J’y arrivai à neuf heures du matin, quoique l’on ne m’eût averti que pour dix. Le Roi [p. 145] était déjà au Conseil ; il me fit appeler, je lui parlai seul à seul dans son cabinet et lui dis mot à mot le compliment que Votre Altesse royale m’avait chargé de lui faire. Le Roi avait le visage assez riant, il me répondit qu’il était déjà très persuadé de l’amitié qu’Elle a pour lui, que je pouvais assurer Votre Altesse royale de la sienne et que dans les occasions de son service elle en recevrait des véritables marques.
Je lui présentai ensuite le placet et l’arrêt pour les gentilshommes et magistrats, secrétaires d’Etat et contrôleurs des guerres de Savoie qui ont du bien en Bresse et en Dauphiné.
A même temps, je lui présentai aussi la lettre que Votre Altesse royale lui a écrite en faveur de M. Marquisio, avec le placet et le mémoire des services de celui ci et qu’il m’avait remis ; je l’accompagnai de tous les bons offices possibles. Le Roi me répondit qu’il verrait le tout, puis je me congédiai et, comme j’étais déjà à quatre pas de lui, il m’appela en venant à moi et me dit fort obligeamment : « Monsieur, je vous prie de vous ressouvenir d’écrire à monsieur de Savoie ce que je vous ai dit touchant notre amitié, et que ce sont [p. 146] des mouvements du cœur ». Je l’en remerciai et l’assurai des partialités que Votre Altesse royale a pour sa personne et un zèle passionné pour son service.
Il est certain que l’on ne s’est pressé de déclarer monsieur le Prince que pour faire connaître à M. de Turenne que l’on avait d’autres capitaines en France ; il veut tout faire à sa mode et indépendamment de tout le monde ; il est à Enghien, où il ne fait que ruiner le pays.
J’ai reçu la lettre pour madame de Villequier et les ordres pour faire les compliments à messieurs Le Tellier et de Louvois : je croyais, lundi que je fus à Saint Germain, de les exécuter ; comme je vis le Roi et après dîner M. de Lionne qui m’avait donné heure, je croyais après cela de voir ces messieurs, père et fils, mais ils sortirent d’abord qu’ils eurent dîné dans un carrosse à six chevaux ; mais à Saint Germain, la nouvelle était publique des honneurs et des caresses que Votre Altesse royale a faits M. l’abbé Le Tellier ; M. son [p. 147] père, ses frères et ses parents, s’en sont loués hautement et M. le marquis de Villequier, qui est présentement de quartier, m’en parla à la messe du Roi avec des termes d’une reconnaissance très respectueuse. Je lui dis que j’étais en partie là pour visiter messieurs Le Tellier et de Louvois et pour les remercier des témoignages et assurances que cet abbé avait donnés à Votre Altesse royale de leur amitié.
Quand j’arrivai ici, quoiqu’il fût fort tard, j’envoyai chez M. Le Tellier pour savoir s’il était en cette ville ; il se trouva qu’au partir de Saint Germain, il était allé à une maison qu’il a à trois lieues de là. Le lendemain au matin j’eus un page de madame de Villequier, qui vint savoir à quelle heure elle me pourrait trouver et soudain après le [p. 148] dîner elle fut céans ; elle déploya toute sa rhétorique et, l’accompagnant de tous ses charmes, elle me témoigna les obligations qu’elle avait à Vos Altesses royales pour les honneurs que vous avez faits à son frère. »

Lettre du marquis de Saint-Maurice, ambassadeur de Savoie, concernant le retour du roi à Saint-Germain-en-Laye

« De Suresnes, le 26 octobre 1668
Je reçus dimanche la lettre que Votre Altesse royale m’a fait l’honneur de m’écrire le douzième de ce mois, dans laquelle j’ai vu avec joie qu’elle goûtait les délices de la Vénerie royale en parfaite santé pendant ces beaux commencements d’automne. Le Roi arriva le même jour à Saint Germain de son voyage de Chambord, fort satisfait des beautés de ce lieu là, des chasses qu’il y a faites et encore plus, à son arrivée, de voir le Dauphin, qui a fait un notable changement pendant leur séparation. Il fut à la rencontre de Leurs Majestés à la dînée la plus proche de Saint Germain, il leur fit si bien sa cour et les entretint si galammant qu’elles en furent émerveillées, et lui demeura aussi très content des caresses que lui firent et le Roi et la reine. En sortant de carrosses, il appela M. de Montausier, [p. 238] lui dit avec sa gentillesse ordinaire qu’il était fort satisfait du Roi et qu’il l’avait traité fort honnêtement.
Le Roi, le soir avant son arrivée, coucha à Linas, où il fut surpris avec joie lorsque M. de Turenne lui déclara qu’il voulait faire abjuration de sa créance et se réduire dans le giron de l’Eglise romaine, ce qu’il exécuta mardi matin entre les mains de M. l’archevêque de Paris dans la chapelle de l’archevêché, puis alla se confesser, entendre messe et se communier à Notre Dame, et de là à Saint Germain, où le Roi l’embrassa et lui fit toutes les caresses possibles et où toute la Cour le complimenta. […]
[p. 240] Je fus mercredi à Saint Germain pour y faire ma cour au Roi, à son lever. Il y avait si grand monde que l’on ne pouvait se tourner dans sa chambre. J’eus grande peine à m’en approcher, tellement tout le monde s’empresse de se faire voir à lui. Ses courtisans, en pareille rencontre, ont peu de déférence pour les étrangers. »

Lettre du marquis de Saint-Maurice, ambassadeur de Savoie, concernant le fort Saint-Sébastien près de Saint-Germain-en-Laye

« A Paris, le 5 juillet 1669
Mercredi, j’allai au lever du Roi. Messieurs de Turenne, le maréchal du Plessis et le Grand Prieur [p. 319] me dirent que le lendemain il y avait revue générale des troupes de la Maison du Roi, que je ferais plaisir à Sa Majesté d’y aller et d’y mener avec moi M. le marquis de Saint Damien. Comme nous nous préparions hier matin pour y aller, je reçus un billet du maréchal de Bellefonds, qui m’écrivait la même chose, que le Roi dînerait au fort et que si nous nous y trouvions à bonne heure, que nous mangerions avec Sa Majesté. Nous passâmes à Saint Germain, fûmes au lever du Roi et puis nous acheminâmes au camp.
Le Roi, qui va avec sa diligence ordinaire, nous passa en chemin. Il était seul dans sa calèche et, nous rencontrant, nous salua fort civilement. Mettant pied à terre devant ses tentes, nous y trouvâmes le maréchal de Bellefonds. Je lui témoignai que Votre Altesse royale aurait reconnaissance de l’honneur qu’il procurait au marquis de Saint Damien. Il me fit connaître que c’était lui qui l’avait proposé à Sa Majesté, sur ce qu’Elle avait [p. 320] souhaité que l’ambassadeur d’Angleterre et mois dinassions là avec Elle. Quand j’entrai dans la tente où était le Roi, il m’aborda et me dit que nous y aurions chaud ; je lui répondis que l’on le considérait peu quand on avait l’honneur d’être auprès de lui, que je savais combien ses tentes étaient commodes et pompeuses depuis l’avantage que j’avais eu de le suivre en Flandre où, par ses fatigues et ses travaux, il nous avait fait voir qu’il ne fallait pas avoir égard au temps et à ses incommodités quand il s’agissait de la gloire. Il se mit à tire et me dit tout haut que, comme j’étais de ses amis, je le faisais plus brave qu’il n’était. Il me fit l’honneur de m’entretenir le long de tout son appartement de choses indifférentes du fort et que je savais comme il était fait, que j’y avais déjà été dîner avec M. de Chaulnes.
Monsieur arriva, et avec lui l’ambassadeur d’Angleterre. Il demanda d’abord sa viande. Quand on eut servi, je considérai que M. le duc de Guise [p. 321] se tenait fort proche de la personne du Roi. Je voulus observer le parti que prendrait l’ambassadeur d’Angleterre pour se placer, afin que j’en pusse faire de même. Le bon ambassadeur, qui veut disputer le pas à monsieur le Prince, laissa prendre la seconde place audit duc de Guise, qui était à la gauche du Roi, Monsieur à la droite, auprès duquel ledit ambassadeur se mit. Je jugeai qu’il ne me fallait pas mettre auprès de lui. Je me plaçai entre les ducs de Bouillon et de Luxembourg. Ils se retirèrent pour me faire place et M. de Bellefonds me dit de me mettre auprès de M. de Montaigu. Je n’y voulus pas aller et dis tout haut qu’il n’y avait pas de rang à la table de Sa Majesté et que l’on dînerait bien dans tous les endroits. Nous avions tous le chapeau sur la tête, sauf le Roi et Monsieur. Il but la santé du roi de la Grande Bretagne qu’il porta à M. de Montaigu, puis celle de Votre Altesse royale, qu’il me porta ; nous étions vingt à table, tous la burent chapeau bas.
Il monta à cheval une heure après midi et nous allâmes voir ses troupes, qui étaient en bataille sur une ligne. Il y avait plus de deux mille cinq [p. 322] cents chevaux et près de neuf mille hommes de pied en seize escadrons et quatorze bataillons ; l’artillerie était en tête de l’infanterie ; nous vîmes et revîmes les troupes par une chaleur et poussière des plus incommodes. Le Roi parla souvent à M. le marquis de Saint Damien, comme aussi Monsieur, messieurs de Turenne et de Louvois et tous les grands de la Cour.
Comme nous étions dans une halte en attendant la Reine, nous vîmes venir à nous un carrosse en diligence qui s’arrêta à trois cents pas, d’om sortit M. le marquis de Berny. Le Roi ne le reconnaissant pas et demandant qui c’était, je le lui dis. Il alla à lui tout seul au galop. Je m’entretenais pour lors avec l’ambassadeur d’Angleterre. Je lui dis à l’oreille : « Voilà des nouvelles de l’élection d’un roi en Pologne ». Monsieur m’ayant demandé ce que je disais, je lui en fis la répétition. Sa Majesté revint à nous avec un visage assez froid et qui marquait peu de satisfaction, et nous dit que les Polonais avaient élu un de leur pays pour roi, nommé Wisniowiecki et qu’ils l’avaient [p. 323] déjà couronnés. Chacun en raisonne à sa fantaisie avec assez de liberté. On m’en demanda mon sentiment ; je dis que j’aurais fort souhaité que les Polonais eussent choisi monsieur le Prince et que Sa Majesté l’eût nommé en tête de ses troupes ; que ces peuples là, quoiqu’ils eussent agi en cette rencontre contre leurs constitutions, que néanmoins ils avaient considéré de ne désobliger pas les prétendants étrangers et leurs partisans et qu’en cela ils avaient témoigné d’avoir de l’esprit aussi bien qu’à retarder l’élection, puisqu’ils avaient eu le temps de recevoir tout l’argent qu’on leur avait porté de tant d’endroits. »

Lettre du marquis de Saint-Maurice, ambassadeur de Savoie, concernant le fort Saint-Sébastien près de Saint-Germain-en-Laye

« A Paris, le 1er août 1670
[…]
[p. 471] Le Roi agit toujours à son ordinaire tant à l’égard des dames que de son camp ; il va tous les jours voir ses troupes, il les fait mettre en bataille, il les fait combattre, il les divise en deux corps d’armée dont il en commanda un et M. le maréchal de Créquy l’autre. Hier, le Roi fut attiré dans une embuscade et fait prisonnier par le marquis de Villeroy, puis regagné par son armée qui mit [p. 472] l’autre en déroute. Ce sont des jeux et des divertissements qui fatiguent à l’heure de midi et au gros de la chaleur, mais qui stylent à miracle les officiers et les soldats. Jamais il n’y a eu tant de régularité ni de discipline ni jamais armée n’a été si bien réglée que dans ce camp. Entr’autres, les soldats y observent le silence quatre heures tous les jours, les officiers de cavalerie n’y sont jamais sans bottes et toujours en collet de buffle et ceux d’infanterie continuellement en soliers. Votre Altesse royale fera plaisir au Roi et à M. de Louvois si Elle lui en parle avec admiration. »

Lettre du marquis de Saint-Maurice, ambassadeur de Savoie, concernant le départ du roi de Saint-Germain-en-Laye

« Paris, le 27 avril 1672
Je viens d’arriver de Saint Germain. Comme le Roi avait résolu de partir seulement demain, j’y avais conduit M. le comte Cagnol pour faire un peu de cour et nous attentions dans la cour du vieux château l’heure que Sa Majesté dut aller à la messe pour nous faire voir à Elle. Tout d’un coup, on a dit qu’Elle allait partir, sans que personne l’eût pénétré, car Elle n’en avait rien dit à son lever. Elle est soudain descendue à la chapelle pour entendre la messe, puis est montée seule dans une calèche à six chevaux, M. de Duras une autre, accompagnée de dix à douze gardes, et est partie à onze heures pour aller coucher [p. 279] à Nanteuil chez M. le duc d’Estrées et ira demain à Villers Cotterets, où Monsieur et tout ce qui ira joindre le Roi se rendra. Il n’a dit adieu qu’à la Reine et à monsieur le Dauphin ; ceux qui étaient les plus proches de lui lui ont fait la révérence, mais fort à la hâte. Jamais il n’y a eu de pareille surprise à la Cour ; personne n’en a jamais pu pénétrer la véritable cause. On disait bien que ç’a été pour éviter les tendresses qu’il aurait pu avoir en l’adieu des dames. Je ne le crois pas ; en tout cas, si Votre Altesse royale se le persuade, il sera bien de n’en pas parler. Madame de Montespan était sortie de bon matin de Saint Germain, je l’ai rencontrée dans la garenne dans une calèche à six chevaux. Je ne l’ai pas vue, car les rideaux étaient tirés, mais je me suis figuré que c’était elle, à voir derrière son carrosse les gardes qui ont accoutumé de la suivre, et quand j’ai été à Saint Germain, j’ai su que c’était bien elle, et qu’assurément elle était venue en cette ville, bien que je me figurasse qu’elle allait attendre le Roi à Nanteuil. »

Lettre de Philippe d’Orléans concernant l’arrestation du chevalier de Lorraine dans son appartement au Château-Neuf

« Monsieur, à M. Colbert
Villers Coterets, le 2 fevrier 1670
Monsieur Colbert,
Comme depuis quelque temps je vous crois de mes amis, et que vous etes le seul de ceux qui ont l’honneur d’approcher le Roi qui m’en ayez donné des marques dans l’epouvantable malheur qui me vient d’arriver, je crois que vous ne serez pas faché que je vous prie ici de dire au Roi que je suis venu ici avec la derniere douleur de me voir obligé de m’eloigner de lui, ou de demeurer avec honte à sa Cour. Que je le prie de considerer ce qu’on diroit dans le monde si l’on me voyoit gai et tranquille dans les plaisirs de Saint Germain et du carnaval, pendant qu’un prince innocent, le meilleur ami que j’aie sur la terre, et attaché à moi, languit pour l’amour de moi dans une miserable prison ; de plus, la manière dont on l’a pris a eté pour moi le plus sensible affront que je pusse recevoir, ayant eté longtemps incertain si c’etoit à ma personne que l’on en vouloit, ma chambre ayant eté assez longtemps environnée de toutes parts de gardes, tant [p. 462] aux portes qu’aux fenetres, et tous mes domestiques, epouvantés, me vinrent dire qu’ils ne savoient si c’etoit à moi qu’on en vouloit. De plus, le Roi fit demander à ma femme quel parti elle vouloit prendre ; cela marquoit dont qu’il avoit envie d’autoriser qu’elle ne fit pas son devoir à mon egard en me fuyant. Malgré toutes ces raisons, si je m’etois cru utile au service du Roi, je ne l’aurois pas quitté ; mais la manière dont il m’a traité toute sa vie me fait bien croire le contraire. Je sais que dans l’humeur où je suis, je ne pourrois lui etre que desagreable, et qu’il auroit de la peine meme à avoir à tous momens devant ses yeux un frere qu’il a mis dans le derniere desespoir, que cela seroit tres ennuyeux pour lui, et fort honteux pour moi, que je n’ai aucun dessein que de lui cacher ma sensible douleur, jusques à tant qu’il veuille me redonner de la joie. Que si j’osois je prierois le Roi de se mettre à ma place et de songer à ce qu’il feroit dans une pareille occasion, de me donner conseil lui meme, un conseil tel qu’il le croiroit honnete pour moi, et que tout le monde vit qu’il l’a donné à un frere, qui n’a songé toute sa vie qu’à lui etre agreable et à lui plaire. Cependant j’aime mieux vous ouvrir mon cœur qu’à tout autre, parce que je sais que vous etes sincere et de bonne foi, que vous n’avez d’autres interets que ceux du Roi, et que vous savez mieux que personne que mon malheur m’est arrivé dans un temps où je meritois un autre traitement assurement par toutes les choses que je sacrifiois tous les [p. 463] jours au Roi ; que si M. le chevalier de Lorraine etoit coupable, j’aurois eté le premier à l’eloigner d’aupres de moi, mais qu’il n’a jamais songé qu’à pouvoir meriter ses bonnes graces et son estime ; que j’en pouvois repondre, connoissant mieux que personne le fond de son cœur ; qu’enfin je ferois voir, à la honte de mes ennemis, que j’aimois le Roi plus que moi meme, mais qu’il me donnat les moyens d’accorder ma tendresse avec mon honneur, et qu’en cela je le conjurois de songer que j’etois son frere.
Apres cela, je n’ai rien à vous dire, que de vous assurer que je serai toute ma vie, M. Colbert, votre bien bon ami.
Philippe »

Philippe, duc d'Orléans

Lettre de Guy Patin mentionnant l’abandon du fort Saint-Sébastien près de Saint-Germain-en-Laye

« Le Roi a ordonné la dissolution de son camp. On en prend 15000 hommes que l’on envoie à Saint Quentin en Vermandois, d’où ils seront commandés pour le rendez-vous qu’on tient encore secret. Il y a toute apparence que ce sera contre les Hollandais. Ils sont devenus si glorieux depuis leur commerce des Indes que ceux qui traitent avec eux disent qu’ils sont insupportables. Le Roi s’en est cru méprisé et on croit qu’il en garde son ressentiment jusqu’à l’occasion de les en faire repentir. On a envoyé encore 6000 hommes vers Soissons et d’autres ailleurs. »

Lettre de Carlo Vigarani à la duchesse de Modène concernant la réception du grand-duc de Toscane et le petit appartement du roi à Saint-Germain-en-Laye

« Serenissima Altezza,
Dal letto, ove m’ha confinato alucni giorni sono l’excessiva occupatione havuta per le feste fattesi all’arrivo e dimora qui del Serenissimo Gran Principe di Toscana, subito ricevuti i pregiatissimi commandi de L. A. V. Serenissima, ho’ avisato il signore Pouch, acio con la sua destrezza, e in conformita d’essi commandi, dia qualche lume dell’intentione che hanno cuca il partito le persone, che pensano a la compra de le rendite dell’A. V. Serenissima, siche col prossimo ordinario spero potergliene render conto.
Con l’ultima mia avisai l’arrivo a la corte del Serenissimo Gran Principe, e come S. M. lo havesse ricevuto a la prima visita, come per sorpresa, cise ch’essendo S. M. ne la sua camera con il solo duca di Saint Agnan, ora primo gentilhuoma, e con tre o quattr’altri servitori all’entrar di S. A. mostra d’esser sorpreso, e lasciato il capello su la tavola s’avanzo alcuni passi a riceverlo. E di la lo condusse egli stesse da la Regina. Qualche giorno dopo, il Re havendolo contotto a Versaglia ivi lo regalo di musiche, balli, comedie, collationi, giardini illuminati, e fuochi d’artifizio ; tornando il Re a San Germano, e S. A a Parigi ove sta alloggiato in casa del suo residente benche sia sevito da tutti gli ufficiali, carozze e staffieri del Signore duca di Guisa, il che m’haveva da prima fatto credere che fosse anche allogiato in sua casa.
A San Germano dopoi sele e fatta redere una comedia galante framezzata con balletti, e musciha, e con qualche scena : cosa pero di poca importanza, dopo la quale ogni volta sene ritorna a dormir a Parigi, anzi a cena, essendo ben presso a meza notte quando fnisse l’opera, non essendovi stato convito alcuno per anche, ecredo non vene sara. Tutta la casa di Conde e ritirata credo per la discrepannza de titoli e delle precedenze. Li duchi e Pari non l’honna visitato perche non le ha voluto dar la mano. […]
Ha S. M. fatto fare qui due cabinetti nel suo appartamento tutti ricoperti per tutto di specchi incastrati in cornici di legno indorate e sopradipinte, opera richissima del signore Brun, pittore eccelente : sopra gli spechi son dipinti bellissimi comparti d’ornamenti, che fanno un ammirabil vaghezza, ma la pittura e dietro al cristallo tra esso e l’argento vivo ; maniere e studi nuovi a quale vado applicando con la speranza di ripatriare un giorno per godere l’istessa fortuna del Principe nella sua gloriosa servitu alla serenissima casa, e sotto i clementissimi auspizy de L. A. V. Serenissima, a la quale profadamente inchinandom, mi dedico, de L. A. V. Serenissima,
Umilissimo, devotissimo et obligatissimo servitore.
C. Vigarani
Di S. Germano, li 30 Augusto 1669 »

Acte de mariage de François de Bullion, fiancé dans la chapelle du Château-Neuf de Saint-Germain-en-Laye en présence du roi

« Le 16e jour de mars 1649, fut solemnisé en face de sainte Eglise le mariage de messire François de Bullion, chevalier, premier escuyer de la grande escuirie du Roy, seigneur de Montlouet, avec damoiselle Louyse Henriette de Rouault, fille de feu messire Alphonse de Rouault, baron de Thienbrune, l’une des filles d’honneur de la Reyne mere regente, apres avoir esté faictes les fiançailles le jour precedent par M. l’evesque d’Uticq, coadjuteur de Montauban, dans la chapelle du viel chasteau de Saint Germain en Laye, es presences de tres hault, tres puissant et invincible monarque Louis XIIIIe du nom, roy de France et de Navarre, de la Reyne regente sa mere, de mademoiselle Anne Marie Louyse d’Orleans, et de plusieurs grands seigneurs de la cour, led. mariage solemnisé en l’eglise dud. lieu de Saint Germain en Laye avec dispense tant puor le saint temps de caresme que pour les 2e et 3e bans non publiez et proclamez en lad. eglise pour certaines et legitimes causes, lad. dispense obtenue à la requeste de lad. dame reyne de maistre Pierre Cagnyé, prestre, curé et vice gerant pour l’absence de messire Eustache de Lesseville, prestre, docteur de Sorbonne et grand vicaire aud. lieu de Saint Germain touchant le spirituel, la benediction dudict mariage faicte par led. sieur curé es presences d’illustres personnes messieurs le marquis de Souches, grand prevost de l’Hostel et Maison de France, de Comminge, lieutenant des gardes du corps de lad. dame reyne, madame Louise Behon, comtesse de Brienne, madame de Brouilly, dame du Puits, gouvernante desdictes filles d’honneurs, et plusieurs autres parents et amys de l’une et de l’autre part. »

Acte de baptême d’Anne de Comminges dans la chapelle du Château-Vieux de Saint-Germain-en-Laye, le roi étant son parrain

« Le vingt huictiesme jour du mois d’octobre 1648, fut baptisée par maistre Pierre Cagnyé, prestre et curé de l’eglise de Saint Germain en Laye, dans la chapelle du viel château dud. lieu, Anne, fille de messire Gaston Jean Baptiste de Comminges, chevallier et lieutenant des gardes du corps de la Reyne mere regente, et de madame Sibille d’Amalby, sa femme, le parrein qui a donné le nom tres auguste monarque Louys XIIIIe du nom, roy de France et de Navarre, la marreine haulte et puissante princsse madame Claire Clemence de Maillé, espouse de tres hault et puissant prince [vide] de Bourbon, premier prince du sang, grand maistre de la Maison du Roy, grand admiral des mers de France, duc et pair dud. royaume. »

Acte de baptême du fils de la nourrice du dauphin dans la chapelle du Château-Vieux de Saint-Germain-en-Laye, le roi étant son parrain

« Le 4e jour de may 1667, furent supplées les ceremonies du saint sacrement de baptesme à Louys, né du premier jour de juillet 1666 et ondoyé par M. le curé de ce lieu de Saint Germain en Laye (avec la permission de M. d’Orleans, grand vicaire en ce mesme lieu) dans le chasteau neuf, lieu de sa naissance, et lesd. ceremonies administrées dans la chapelle du chasteau vieil par M. l’abbé de [vide], aumosnier du Roy, avec la permission et consentement dud. sieur curé, y present en son habit d’eglise avec l’estolle au col, et led. Louys fils de noble homme [vide] et de dame [vide], nourrisse de monseigneur le Dauphin, Fils aisné de France, le parrein tres puissant et magnanime prince Louys XIIII du nom, tres chrestien roy de France et de Navarre, present, et qui a donné son nom aud. baptisé, la marreine damoiselle [vide], fille de haut haut et puissant seigneur Philippes de La Motte Houdancourt, vivant duc de Cardone, pair et mareschal de France, et de madame Louyse de Prie, son espouse, et à present sa veufve, gouvernante de mond. seigneur le Dauphin, de Madame royalle et des autres Enfants de France. »

Acte de baptême de Louise Picaud dans la chapelle du Château-Vieux de Saint-Germain-en-Laye, le roi étant son parrain

« Ce jourd’huy dix huitieme janvier mil six cens quatre vingts deux, ont esté supplées les ceremonies du baptesme en la chapelle du chasteau vieil par monseigneur Pierre du Cambou de Coelin, evesque d’Orleans, premier aumonier de tres hault, tres puissant et tres excellent prince Louis quatorze, par la grace de Dieu roy de France, à Louise, née le douzieme fevrier de l’année mil six cens quatre vingts un et ondoyé le treizieme dud. mois de fevrier avec la permission de monseigneur l’archevesque de Paris, fille de Pierre Picaud, sieur de la Verdenie, valet de garde robe du Roy, et de Françoise Lefebvre, ses pere et mere, le parain tres hault, tres puissant, tres excellent prince Louis quatorze, par la grace de Dieu roy de France, la mareine tres haulte et tres puissante princesse Charlotte Elisabeth, duchesse d’Orleans, lesquels ont signé en presence de moy curé soubsigné.
Louis
Elisabeth Charlotte
P. du Cambout de Coislin, e. d’Orleans
Cagnyé »

Résultats 1 à 50 sur 80