« Ministère d’Etat
Château de Saint-Germain-en-Laye
Bureau de l’architecte
Paris, le 15 janvier 1859
A Son Excellence le ministre d’Etat
Monsieur le Ministre,
Pour me conformer à vos ordres du 6 courant concernant le logement sollicité dans le château de Saint-Germain-en-Laye par l’ancien aumônier du pénitencier militaire, j’ai dû visiter l’édifice et me livrer aux recherches prescrites. Le pavillon de l’angle sud-ouest, déjà habité par le commandant et le régisseur, devrait encore, je crois, être choisi pour l’habitation dont il s’agit. L’on risquerait peut-être, en adoptant une autre partie du château, de voir les visiteurs s’égarer et l’on donnerait peut-être aussi à ces visiteurs un trop facile accès dans toutes les parties du monument qui nous occupe.
L’entresol et le premier étage du pavillon de l’angle sud-ouest sont déjà entièrement occupés et conformément à ce qui a été prescrit par Votre Excellence. Le troisième étage, qui n’est qu’un deuxième entresol très bas, presque inhabitable, est occupé par les domestiques du général de Girardin, et aussi par le général lui-même, qui a pris possession d’un vaste magasin sis directement au-dessus de son habitation.
A l’entresol près l’appartement du régisseur, il existe cependant encore deux ou trois pièces dans le bâtiment près le pavillon, mais ces pièces sont en partie occupées provisoirement par le régisseur et pour y disposer un logement, il faudrait d’ailleurs peut-être modifier le cabinet d’aisances établi dernièrement dans cet étage.
Mes recherches devaient alors se porter au troisième étage, au-dessus de l’entresol, qui comprend aujourd’hui deux logements médiocrement distribués. Cet étage, qui a environ 3 m. 75 de hauteur sous plafond, est carrelé en terre cuite dans toutes ses parties. De mauvaises cheminées délabrées se trouvent dans toutes les pièces mais les conduits en maçonnerie se trouvant seulement dans les murs extrêmes, l’on a été contraint de rejoindre les coffres par des tuyaux en métal (qui manquent actuellement en partie) et qui viennent déshonorer la plupart des pièces de ces logements.
J’ai l’honneur de vous adresser, Monsieur le Ministre, dans la feuille n° 1, un plan dans lequel j’ai tracé la distribution actuelle du 3e étage au-dessus de l’entresol de ce pavillon.
Les renseignements que vous avez bien voulu me donner sur la demeure qui est sollicitée par l’ancien aumônier du pénitencier ne formant pas un programme complet, mon embarras était assez grand pour rédiger un projet, et j’ai l’honneur de vous faire parvenir 2 croquis (feuilles 2 et 3) tout en sollicitant de nouveaux ordres à cet égard.
Je ne pouvais, avant d’avoir reçu des ordres formels, faire exécuter des sondages dans les murailles et pour reconnaître si il existe des tuyaux de cheminées en nombre suffisant pour l’établissement des foyers projetés. Le projet compris à la feuille n° 2 pourrait facilement se réaliser, mais je suis à peu près convaincu qu’on serait obligé d’ériger un tuyau neuf dans la hauteur du bâtiment et pour la cheminée de la chambre à coucher dans le cas où Votre Excellence approuverait les dispositions de la feuille n° 3. L’on éprouvera quelques difficultés, je crois, pour l’établissement d’un cabinet d’aisances et peut-être sera-t-on entraîné dans quelques modifications de la conduite de chute des étages inférieurs. Pour établir un logement convenable, l’on aura, ce nous semble, à effectuer quelques travaux de gros-œuvre assez délicats peut-être, eu égard au mauvais état de la construction. Les cloisons sont construites en bois sur tous les points et des modifications seront inutiles pour diminuer les chances d’incendie du vieux et respectable château. Bien des poutres des planchers sont brisées et quelques recherches devraient être faites peut-être dans l’épaisseur des planchers et avant d’y établir des poêles et des cheminées.
Je suis avec un profond respect de Votre Excellence le très humble et très obéissant serviteur.
Eug. Millet »