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Marie de Modène Français
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Liste des salaires et pensions payés par la reine d’Angleterre à Saint-Germain-en-Laye

« Above staires :
Duchess of Tyrconnel, lady of the Bed Chamber : 1029 l.
Countesse di Almont : 1029 l.
Lady Sophia Bulkley : 1029 l.
Mrs Turenne, Bed Chamber woman : 592 l.
Lady Waldegrave : 592 l.
Mrs Strickland : 592 l.
Madam Molza : 592 l.
Mrs Turenne, as laundresse : 257 l.
Mrs Delabadie, sempstresse and stanckesse : 129 l.
Mrs Galley, necessary woman : 117 l.
Mr Strickland, vice Chamberlain : 649 l.
Mr Caryll, secretary : 592 l.
Mr Meridesh : 163 l.
William Waldegrave, physician : 977 l.
Mr Nevill, gentleman usher of the Privy Chamber : 240 l.
Mr Crane, gentleman waiter : 189 l.
Mr Forster : 189 l.
Mr Barry, Queen’s waiter : 112 l.
Mr Turrenne : 112 l.
Mr Hyde, groome of the Privy Chamber : 232 l.
Mr Smith, page of presence : 175 l.
Mr Riva, roabe’s : 257 l.
Mrs Noble : 175 l.
Mr Dufour, page of the Bed Chamber : 257 l.
Mr Horne : 257 l.
Mr Abell : 257 l.
Mr Lavery : 257 l.
Mr Peirepoint, groome of the Great Chamber : 117 l.
Mr MacDonnel : 117 l.
Mr Bowesy : 117 l.
Roger Physwick, for cleanseing the drawroom : 24 l.
Father Galley, confessor : 257 l.
Mr Ronchy senior, almoner : 257 l.
Mr Ronchy junior : 206 l.
Mr Innes : 206 l.
Father Ruga, chaplain : 175 l.
Mr Sachelli : 175 l.
Father La Croix : 175 l.
Father Naish : 175 l.
Ralph Norton : 87 l. 15 s.
Laurence Delatre : 46 l. 16 s.
Below stairs :
Mr Chilton : 386 l.
Mr Conquest : 386 l.
Mr Lesserture, master cooke : 232 l.
Mr Thomas : 232 l.
Monsieur Detroe, cooke : 102 l. 7 s.
Mr Simpson, yeoman of the pantry : 117 l.
Mr Lepointy, yeoman of the wine cellar : 146 l. 5 s.
Mr Harrison, apothecary : 234 l.
Stables :
Mr Leyburne, equerry : 476 l.
Mr Persico, page of honour : 189 l.
Mr Buckenham, yeoman rider : 309 l.
Mr Devereux, purveyor : 58 l. 10 s.
Walter Dormer, coachman : 351 l.
Thomas Hooper : 292 l. 10 s.
Charles Belgard : 292 l. 10 s.
John Humpston : 292 l. 10 s.
Peter Bandore, footman : 117 l.
John Lewin : 117 l.
John Stapleton : 117 l.
Timothy Clarke : 117 l.
George Peirson : 117 l.
Alexander Hamilton : 117 l.
John Bevan : 117 l.
Anthony Moore, chaireman : 102 l. 07 s. 6 d.
Benjamin Cotton : 102 l. 07 s. 6 d.
Joseph Conner, farrier : 58 l. 10 s.
John Bailey, bottleman : 102 l. 07 s. 6 d.
Thomas Arnold, groome : 160 l. 17 s. 6 d.
John De Vere : 160 l. 17 s. 6 d.
Prince’s side :
Mrs Stafford : 720 l.
Madam Nurse : 386 l.
Mrs Delabadie, dry nurse : 360 l.
Doctor Betham, preceptor : 343 l.
Mr Codrington, sub-preceptor : 175 l. 10 s.
Father Constable, chaplain : 175 l. 10 s.
Monsieur Faure, dancing master : 200 l.
Christopher William, writing master : 75 l.
Mrs Simms, rocker : 257 l.
Mrs Waldegrave : 257 l.
Mrs Chappell : 257 l.
Mrs Delatre : 257 l.
Mrs Chilton, laundresse : 257 l.
Mrs Lesserture, sempstresse : 87 l. 15 s.
Mrs Clarke, necessary woman : 117 l.
Balthazar Artema, page of the backstairs : 234 l.
William Lonon : 234 l.
Edmund Johnson, footman : 117 l.
Bryan O’Bryan : 117 l.
Princesse’s servants :
Mrs Martinash, wett nurse : 386 l.
Mrs Rougé, rocker : 257 l.
Mrs Lavery : 257 l.
Mrs Griffith : 257 l.
Mrs Buckenham : 257 l.
Mrs Nevill, sempstresse and starchess : 117 l.
Mrs Beddingfield, laundresse : 257 l.
Mrs Ashton : 146 l. 05 s.
Mrs Carney, necessary woman : 117 l.
Daniel Fulham, page of the back stairs : 234 l.
John Wilkie : 234 l.
Mrs Irwin : 146 l. 05 s.
Pentions :
Lord bishop Ellis : 500 l.
Lord Dumbarton : 250 l.
Lady Strickland : 600 l.
Mr Caryll : 292 l.
Mr Ronchy : 206 l.
Mr Codrington : 58 l. 10 s.
Father Maxwell : 604 l.
Mr Benyon : 375 l.
Mrs Sackvill : 250 l.
Mrs Withrington : 250 l.
Mr Riva : 257 l.
Monsieur Fedé : 234 l.
Monsieur Dupuy for little Mr Ashton : 250 l.
Father Saunders for Lady Lucy Hebert : 100 l.
Lady Edmond Butler : 150 l.
Mrs Bointon : 100 l.
Mrs Ramsay : 100 l.
Monsieur Garangée : 150 l.
Mrs Naish : 60 l.
Mrs Plunkett : 60 l.
Lady Brittas : 100 l.
Lady Innescheling : 100 l.
Mrs Arthur’s elder daughter : 100 l.
Mrs Arthur’s youngest daughter : 50 l.
Lady Mayo : 100 l.
Mrs Van Colster : 100 l.
Mrs Umfreville : 100 l.
Mrs Ingram : 100 l.
Mrs Staniers : 60 l.
Mrs Gifford : 60 l.
Mrs Coleman : 81 l. 05 s.
Mrs Christina Plunkett : 96 l.
Mrs Mackensey : 60 l.
Mrs Baggot : 50 l.
Mrs Barrett : 50 l.
Mrs O’Birne : 72 l.
Mrs O’Neale : 100 l.
Lady Murray : 100 l.
Mrs Creiton : 75 l.
Mrs Arthur : 50 l.
Mrs Simms for her sonne : 50 l.
Mrs Burke att the Blew Nuns : 36 l.
Mr Barry for hissonne : 50 l.
Lady Scot for her neice : 50 l.
Monsieur le vicaire de Saint Germain : 375 l.
Doctor Davis : 46 l.
Mr Simms for his sister : 60 l.
Mr Codrington for charity money : 866 l. 01 s.
Mr Sachelli for his brother halfe a yeare coming last of december : 351 l.
Mademoiselle Collo : 100 l.
Lodging money :
Mr Crane : 36 l.
Mr Forster : 36 l.
Mr Barrey : 36 l.
Mr Turenne : 36 l.
Mr Conquest : 36 l.
Mrs Nevill : 36 l.
Mrs Lesserture : 36 l.
Mr Merideth : 36 l.
Mr Hyde : 36 l.
Mr Dufour : 36 l.

The Queen’s servants : 18989 18 06
Prince’s servants : 4626 15 00
Princesse’s servants : 2519 05 00
Pentions and charity money : 8220 01 00
Lodging money : 396 00 00
For all : 346561 19 06
497 05 00
[Total :] 35149 04 06
Mademoiselle Collo : 100
[Total :] 35249 04 06 »

Administration du roi d'Angleterre à Saint-Germain-en-Laye

Récit du décès de Jacques II à Saint-Germain-en-Laye

« [p. 369] Vous attendez, sans doute, un détail de la maladie, de la mort et du convoy de Jacques II, roy d’Angleterre ; il faut vous satisfaire sur tout cela.
Depuis un anthrax que ce prince eut il y a deux ans, qui suppura fort peu, et quelques légers mouvemens de goutte, sa santé parut fort ébranlée ; mais [p. 370] cela devint beaucoup plus sensible après une attaque d’apoplexie imparfaite, qui fut suivie de la foiblesse de tout un côté, et de la paralysie de quelques doigts, arrivée au Carême dernier. Ses forces estoient fort diminuées, il maigrissoit de jour en jour, et contre son ordinaire il paroissoit plus pesant et plus assoupi. A tous ces accidens, il estoit survenu, il y a quatre mois, un crachement de sang, fort léger dans son commencement et qui devient par la suite plus sensible.
S. M. B. estoit dans cet estat le vendredy 2 de septembre qu’il luy prit une grande foiblesse, dont Elle revint par le secours des cordiaux. Dans ce moment, la fièvre s’éveilla avec l’assoupissement [p. 371] qui a conduit ce prince jusqu’au tombeau.
Le dimanche, troisième jour de son mal, une seconde foiblesse le mit dans un estat si pressant que l’on eust d’abord recours aux derniers sacremens. Le pouls luy revint un peu après un vomissement d’un sang retenu depuis quelque temps dans l’estomac, comme il paroissoit à la couleur et à l’odorat. Le pouls néanmoins, qui estoit resté embarassé, se trouva dégagé par une pareille évacuation procurée par le moyen d’un remède que M. Fagon luy fit donner. Ce remède, posé à propos, le fit un peu reposer et donna quelque espérance.
Le lundy, quatrième jour de [p. 372] son mal, et cinquième du mois, un léger purgatif luy fit rendre beaucoup de sang retenu.
Le même jour après midy, le Roy alla le voir. Sa Majesté britannique le supplia de trouver bon qu’Elle fust enterrée dans l’église paroissiale de Saint Germain en Laye. Le Roy en parla à la reine d’Angleterre, et l’on ne jugea pas à propos de répondre à ce qu’une profonde humilité luy faisoit dire. Ce prince recommanda ce jour là au Roy les regimens irlandois qui sont à son service.
Il demeura assez tranquille le mardy.
Le mercredy, apres l’usage de quelques remedes propores à arrester l’hemorragie, cet accident [p. 373] cessa absolument, et la fievre diminua de beaucoup.
Le jeudy se passa dans redoublement. Il survint un flux d’urine, ce qui fit concevoir quelque esperance.
Le vendredy, huitieme jour du mal de ce prince, la fievre augmenta, sa langue devint seche, l’assoupissement ne diminua point, et l’on apperçut que le flux d’urine devenoit involontaire et que la paralysie gagnoit la vessie. Un purgatif qui luy fut donné alors fit connoistre que cet engourdissement se communiquoit aux entrailles. On perdit des ce moment toute esperance, les accidens allerent toujours en augmentant, et les remedes furent sans effet.
[p. 374] Ce prince se trouva si mal la nuit du 12 au 13 qu’on craignit qu’il ne mourust avant qu’elle fust passée. Sa Majesté demanda le viatique pour la seconde fois, et le reçut sur les cinq heures du matin avec une piété exemplaire. On luy avoit donné l’extrême onction trois heures après midy en même temps que le viatique. Le prieur curé de Saint Germain s’acquitta de toutes ces fonctions d’une manière très édifiante.
Le même jour 13, après midy, le Roy alla voir pour la dernière fois ce prince mourant, et déclara proche de son lit, et en présence de la reine et de plusieurs seigneurs des deux Cours, que si Dieu disposoit de Sa Majesté [p. 375] britannique, il reconnoistroit et traiteroit monsieur le prince de Galles comme roy d’Angleterre, d’Ecosse et d’Irlande. Sa Majesté britannique, qui estoit dans un grand assoupissement, n’en fut point tirée par les mouvemens que ces paroles causerent dans la chambre, ou peut estre qu’estant toujours en meditation, en attendant le moment de la mort, Elle ne voulut pas interompre, pour les choses de ce monde, le sacrifice qu’Elle faisoit alors de son âme à Dieu. Tous les milords, en fondant en larmes, se jetterent aux genoux du Roy pour le remercier. Ils reconduisirent Sa Majesté en cet état, avec des acclamations qui témoignoient [p. 376] leur reconnoissance et leur affliction, et le mélange de joye et de tristesse qui paroissoit sur leur visage, ayant quelque chose d’aussi vif pour la joye que pour la douleur, on ne scavoit si l’on devoit se réjouir ou s’affliger avec cette Cour, qui pour trop sentir, ne pouvoit bien démeller elle-même ce qu’elle sentoit. La nuit du 13 au 14, on crut que ce prince alloit expirer, les redoublemens estans devenus plus frequens et plus dangereux. On reïtera plusieurs fois la recommendation de l’âme, ce qui fut fait alternativement par les aumôniers de Sa Majesté britannique et par le curé de Saint Germain. Cependant, Sa Majesté conservoit une connoissance parfaite [p. 377] qui continua jusques aux derniers momens ;
Madame la duchesse de Bourgogne alla le voir le 14 à trois heures après midy. Ce prince la remercia avec beaucoup de présence d’esprit et la pria de passer chez la Reine, à cause de la mauvaise odeur qui estoit dans sa chambre.
Monseigneur le duc de Bourgogne l’alla voir le 15, sur les dix heures et demie du matin. Lorsque ce prince y arriva, on disoit pour la cinquième fois les prières des agonisans. Sa Majesté britannique, après l’avoir remercié de sa visite, le pria de trouver bon que l’on continuast les prières. Madame l’alla voir l’après dinée du même jour, à l’issue [p. 378] de son dîner. Il entroit souvent dans une espèce de létargie, et lorsqu’on le reveilloit de son assoupissement, il répondoit juste et reconnoissoit tout le monde. Il avoit commencé le jeudy au soir à prononcer avec peine.
Le même vendredy 16 que ce prince reçut tant de visites et qu’il avoit ouy la messe dans sa chambre, ainsi que les jours précédens, il tomba dans une douce agonie sur les deux heures et demie après midy, et à trois heures et un quart, il expira sans aucun effort, ayant la bouche riante, ce qui continua d’une manière sensible quelques momens après sa mort. On observa, comme une chose digne de remarque, et dont [p. 379] il y a peu d’exemples, qu’en quinze jours que ce prince avoit passez dans le lit de la mort, aussi tourmenté des remèdes qu’on luy donnoit que de sa maladie, il ne luy estoit pas échapé le moindre mouvement d’impatience, de répugnance ny même d’inquiétude, estant dans une méditation presque continuelle et ne parlant qu’autant qu’il estoit absolument nécessaire et que la charité le demandoit. Sa piété n’avoit rien ny d’austère ny de rude. Je n’entre point dans les choses touchantes et plus édifiantes encore qu’il a dites à la reine pendant les quinze jours qu’a duré sa maladie ; elles sont au dessus de toutes sortes d’expression. La manière dont il a parlé à monsieur le [p. 380] prince de Galles n’est pas moins digne d’admiration, et moins difficile à exprimer. Il luy a fait voir par des discours aussi touchans que chrétiens qu’il ne devoit point mettre la couronne en parallèle avec la religion et l’a conjuré de ne le faire jamais. Il a protesté tout haut qu’il pardonnoit sincérement et de tout son cœur à tous ceux qui luy avoient causé tant de mal, et qu’il prioit Dieu qu’il leur pardonnast, en ajoutant qu’il leur avoit de grandes obligations, puisqu’ils estoient peut estre la cause de son salut qu’il esperoit. Il a tenu ces discours plus d’une fois et les a renouvellez en recevant le viatique. Ce n’est point l’état où il se trouvoit, et [p. 381] l’assurance d’une mort certaine qui l’ont fait parler ainsi, puisque depuis le commencement de ses malheurs jusqu’au moment de sa mort les chagrins qu’il ressentoit, peut estre plus pour sa famille que pour luy, n’ont jamais esté cause qu’il luy soit rien échapé contre les auteurs de tous ses maux. Il s’estoit mis pendant tout le cours de sa vie par une fermeté héroïque au dessus de toutes les disgraces qui luy estoient arrivées, et toutes les fois qu’il s’estoit agy de la religion, il avoit fait voir une constance digne des anciens chrétiens. Il estoit d’une valeur intrépide et il en a donné des preuves en plusieurs batailles, tant sur terre que sur mer, mais ce [p. 382] n’est pas icy le lieu de s’étendre sur des choses qui regardent ceux qui travailleront à son histoire.
Lorsque ce prince fut expiré, M. Desgranges, maistre des cérémonies de France, fit exposer son corps à la vue du peuple. Le clergé de la paroisse de Saint Germain, les recolets qui sont dans le même lieu et les augustins des Loges, au nombre de douze qui se relevoient de temps en temps, formerent deux chœurs, qui psalmodierent toute la nuit, et le matin on commença à célébrer des messes sur deux autels dressez dans la même chambre où estoit le corps.
Le samedy 17, sur les quatre heures après midy, on l’ouvrit et on l’embauma. On luy trouva [p. 383] très peu de sang, et presque réduit en eau, tous les visceres, les entrailles et même le cœur fletris et extenuez. A l’ouverture du crane il sortit une tres grande quantité de serositez et les ventricules du cerveau étoient absolument plein d’eau.
Son corps fut porté le soir, avec peu de cérémonie, aux bénédictins anglois du fauxbourg Saint Jacques, où il doit rester en dépost jusqu’à ce qu’on résolve où il sera inhumé. Son cœur a esté porté au couvent de Sainte Marie de Chaliot, où est celuy de la feue reine sa mère. Son convoy n’étoit composé que de trois carosses. Dans le premier, précédé de quatre gardes du corps qui portoient des flambeaux, étoient [p. 384] un aumônier, qui portoit le cœur du Roy, le père Sandun, confesseur de Sa Majesté, son compagnon, un autre aumônier, deux chapelains et le prieur de Saint Germain. Dans le second estoit le corps de ce prince, et M. du Vinet, exempt des gardes du corps de Sa Majesté Très Chrétienne. Vingt six gards du corps marchoient devant et derrière, avec des flambeaux. Le convoy estoit terminé par un troisième carosse, dans lequel estoient M. le duc de Barwik, Mr Porter, vice chambellan de Sa Majesté britannique, milord Hamilton, Mr Desgranges, Mr Hamilton, maistre de la garde robe, et Mr Ploiden, controlleur de la Maison de [p. 284] Sa Majesté. Mr d’Ingleton, aumônier de la semaine, fit un discours en latin en remettant le corps du roy entre les mains du prieur des bénécitins, qui répondit en la même langue, et ces discours furent trouvez fort touchans. Le corps couvert d’un poele fut mis sous un dais dans une chapelle tenue de noir. Le même cortège qui avoit esté aux bénédictins accompagne le cœur jusqu’à Sainte Marie de Challiot. Le même Mr Ingleton fit aussi un très beau discours en remettant le cœur entre les mains de la supérieure, qui y répondit avec beaucoup d’esprit.
Je dois ajouter icy qu’aussitost que le Roy fut expiré, M. [p. 386] le prince de Conty, qui depuis quelques jours n’avoit point quitté Saint Germain, estant parent de la reine, eut l’honneur de saluer le jeune roy. M. le nonce dit à ce nouveau monarque qu’il avoit ordre de Sa Sainteté de le reconnoistre après la mort du roy son père, et M. l’abbé Rizzini, envoyé de Modène, luy fit le même compliment de la part du duc son maistre.
Le 20, le Roy alla à Saint Germain, et il monta d’abord chez le roy d’Angleterre, qui l’attendit au haut du grand escalier en long manteau et conduisit Sa Majesté dans son appartement en prenant la main gauche. Il se trouva deux fauteuils, et le Roy s’assit dans celuy qui estoit [p. 387] à la droite. La visite fut courte. Sa Majesté britannique conduisit le Roy, qui l’empescha d’aller aussi loin qu’il auroit souhaité. Le Roy alla ensuite chez la reine, qui estoit au lit, et demeura près d’une heure avec cette princesse. Madame la duchesse de Bourgogne arriva pendant ce temps là, accompagnée de madame la Princesse, de madame la Duchesse, de mademoiselle d'Angu’en et des dames du palais de madame la duchesse de Bourgogne. Elles estoient toutes sans mantes, parce que la visite n’estoit pas de cérémonie. Madame la duchesse de Bourgogne alla d’abord chez Sa Majesté britannique, qui la reçut à la porte de sa chambre. Elle y resta peu de temps, et ne [p. 388] s’assit point. Cette princesse alla ensuite chez la reine, où elle trouva le Roy, qu’elle y laissa. Après cette courte visite, cette princesse alla chez madame la princesse d’Angleterre, où elle resta debout. Monseigneur le Dauphin et madame la princesse de Conty douairière y arrivèrent de Meudon une demi heure après. Le Roy, avant que de partir, alla chez madame la princesse d’Angleterre, messeigneurs les ducs de Bourgogne et de Berry, monsieur le duc et madame la duchesse d’Orléans, monsieur le Prince, monsieur le Duc et madame la Duchesse, madame la princesse de Conty et généralement tout ce qu’il y a de personnes de distinction [p. 289] à la Cour ont esté faire des complimens au roy, à la reine et à madame la princesse d’Angleterre.
Le 21, Sa Majesté britannique rendit visite au Roy à Versailles et à madame la duchesse de Bourgogne. Cette princesse étant alors à la messe, Sa Majesté l’attendit dans son appartement. Monseigneur le Dauphin et messeigneurs les ducs de Bourgogne et de Berry estoient partis pour Fontainebleau.
Je ne dois pas finir cet article sans vous dire que tous ceux qui ont vu ce jeune roy en sont charmez. Son air, ses manières et son esprit frapent d’abord également tous ceux qui ont l’honneur de l’approcher. Tout est en [p. 390] ce jeune monarque infiniment au dessus de son âge, et quoy qu’il doive beaucoup au sang dont il est sorti, il ne doit pas moins à son éducation. »

Récit de la mort de la reine d’Angleterre à Saint-Germain-en-Laye

« Le 7, la reine douairière d’Angleterre mourut à Saint Germain en Laye à 7 heures 36 minutes. Cette pieuse princesse ressentit les premières atteintes de la fièvre le jour de saint Jacques, dont le feu roy son époux portoit le nom. Comme elle reste presque toujours à genoux à la paroisse pendant le service et qu’il faisoit une chaleur excessive, elle en sortit fort fatiguée. Elle prit un verre d’eau et alla se promener ensuite sur la terrasse du jardin, d’où elle rentra une demie heure après au château avec une [p. 199] espèce de petit frisson. Elle ne laissa pas de souper légèrement mais, environ une heure après minuit, la fièvr se déclara et redoubla considérablement. La Cour en ayant été informée le matin, le Roy y envoya M. Dodart, son premier médecin, et M. Boudin. Ils la trouvèrent très mal. Depuis ce jour jusqu’au six qu’ils la firent seigner à la gorge, elle enfla extraordinairement. On désespéra alors entièrement de sa guérison. Elle reçut le soir tous ses sacremens après s’être confessée au père Gaillard, jésuite, qui ne la quitta point jusqu’au moment qu’elle expira. Sa résignation parfaite aux volontés de Dieu, sa charité continuement agissante envers les pauvres Anglois qui s’estoient refugiez auprès d’elle dans un royaume étranger, sa constance inébranlable dans les adversitez successivement renaissantes, dont la plus grande partie de sa vie a esté cruellement agitée, une foy des plus vives pour la véritable religion, caractérisent cette reine eu peu de mots, et forment son éloge.
Cette princesse, avant son mariage, avoit fortement sollicité le duc de Modène, son père, à lui permettre de s’enfermer dans un couvent des filles de Sainte Marie, et ce ne fut que par soumission à ses parens qu’elle épousa le duc d’York, qui monta depuis sur le trône d’Angleterre sous le nom de Jacques II, après la mort [p. 200] de Charles II, son frère aîné. Elle a laissé par son testament à S. M. T. C. tout ce qui lui est dû de son douaire et de ses pensions en Angleterre. On peut juger de la douleur extrême de ces infortunez par la perte qu’ils font d’une maitresse si secourable, qui leur servoit à tous de mère et qui agissoit en cette qualité avec eux. »

Notes sur la Cour de la reine d’Angleterre à Saint-Germain-en-Laye

« [p. 73] [17 février 1716] La Cour de Saint-Germain est toute déserte, la reine n’ayant plus à son service que les plus gueux et les plus âges des Anglais et Irlandais. Tous les autres sont passés sur les côtes pour chercher à s’embarquer.
[…]
[p. 253] [13 mai 1718] Le 5 au soir on porta de Saint-Germain-en-Laye à l’église des Filles de la Visitation de Chaillot le corps et le cœur de la reine d’Angleterre suivant ses dernières intentions, sans beaucoup de pompe : vingt gardes et six pages seulement précédèrent le carrosse du corps qui étoit suivi par un petit nombre d’autres carrosses remplis d’officiers, d’Anglais et d’Irlandais. Le 11, le Roi prit le deuil en violet. M. le Régent l’a fixé à trois semaines. On a demandé à Son Altesse si la pension de la Reine serait continuée à Prétendant : il a laissé la question indécise.
[…]
[p. 256] [16 mai 1718] Les dames de la Cour de Saint-Germain sont dans une très sérieuse consternation. M. le Régent leur conserve sur le même pied la pension que leur faisoit la reine ; il n’est point encore décidé si on leur laissera leurs appartements au château. »

Lettre de madame de Sévigné à sa fille concernant l’installation de la reine d'Angleterre à Saint-Germain-en-Laye

« A Paris, lundi 3 janvier 1689
[…] Le roi d’Angleterre a été pris, dit on, en faisant le chasseur et voulant se sauver. Il est à Witehal. Il a son capitaine des gardes, ses gardes, ses mylords à son lever, mais tout cela est fort bien gardé. Le prince d’Orange à Saint James, qui est de l’autre coté du jardin. On tiendra le parlement : Dieu conduise cette barque. La reine d’Angleterre sera ici mercredi ; elle vient à Saint Germain pour etre plus pres du Roi et de ses bontés. »

Lettre de madame de Sévigné à sa fille concernant l’installation de la Cour d'Angleterre à Saint-Germain-en-Laye

« A Paris, lundi 10 janvier 1689
[…] L’abbé Tetu est dans une insomnie qui fait tout craindre. Les medecins ne voudroient pas repondre de son esprit ; il sent son etat et c’est une douleur : il ne subsiste que par l’opium ; il tache de se divertir, de se dissiper, il cherche des spectacles. Nous voulons l’envoyer à Saint Germain pour y voir le roi, la reine d’Angleterre et le prince de Galles : peut on voir un evenement plus grand et plus digne de faire de grandes diversions ? Pour la fuite du roi, il paroit que le prince [d’Orange] l’a bien voulu. Le roi fut envoyé à Excester où il avoit dessein d’aller : il etoit fort bien gardé par le devant de sa maison, et toutes les portes de derriere etoient ouvertes. Le prince n’a point songé à faire perir son beau père ; il est dans Londres à la place du roi, sans en prendre le nom, ne voulant que retablir une religion qu’il croit bonne et maintenir les loix du pays sans qu’il en coute une goutte de sang : voilà l’envers tout juste de ce que nous pensons de lui ; ce sont des points de vue bien differents. Cependant, le Roi fait pour ces Majesté angloises des choses toutes divines ; car n’est ce point etre l’image du Tout Puissant que de soutenir un roi chassé, trahi, abandonné ? La belle ame du Roi se plait à jouer ce grand role. Il fut au devant de la reine avec toute sa maison et cent carrosses à six chevaux. Quand il aperçut le carrosse du prince de Galles, il descendit et l’embrassa tendrement, puis il courut au devant de la reine qui etoit descendue, il la salua, lui parla quelque tems, la mit à sa droite dans son carrosse, lui presenta Monseigneur et Monsieur, qui furent aussi dans le carrosse, et la mena à Saint Germain, où elle se trouva toute servie comme la reine, de toutes sortes de hardes, parmi lesquelles etoit une cassette tres riche avec six mille louis d’or. Le lendemain, il fut question de l’arrivee du roi d’Angleterre à Saint Germain, où le Roi l’attendoit : il arriva tard ; Sa Majesté alla au bout de la salle des gardes au devant de lui ; le roi d’Angleterre se baissa fort, comme s’il eut voulu embrasser ses genoux ; le Roi l’en empecha et l’embrassa à trois ou quatre reprises fort cordialement. Ils se parlerent bas un quart d’heure ; le Roi lui presenta Monseigneur, Monsieur, les princes du sang et le cardinal de Bonzi ; il le conduisit à l’appartement de la Reine, qui eut peine à retenir ses larmes. Apres une conversation de quelques instans, Sa Majesté les mena chez le prince de Galles, où ils furent encore quelque tems à causer, et les y laissa, ne voulant point etre reconduit, et disant au roi : « Voici votre maison, quand j’y viendrai vous m’en ferez les honneurs, et je vous les ferai quand vous viendrez à Versailles ». Le lendemain, qui etoit hier, madame la Dauphine y aller, et toute la Cour. Je ne sais comme on aura reglé les chaises de ces princesses, car elles en eurent à la reine d’Espagne, et la reine mere d’Angleterre etoit traitée comme fille de France : je vous manderai ce detail. Le Roy envoya dix mille louis d’or au roi d’Angleterre. Ce dernier paroit vieilli et fatigué, la reine maigre et des yeux qui ont pleuré, mais beaux et noirs, un beau teint un peu pale, la bouche grande, de belles dents, une belle taille et bien de l’esprit ; tout cela compose une personne qui plait fort. Voilà de quoi subsister longtems dans les conversations publiques. »

Lettre de madame de Sévigné à sa fille concernant l’installation de la Cour d'Angleterre à Saint-Germain-en-Laye

« A Paris, mercredi 12 janvier 1689
Vous etes retirée à cinq heures du roi ; vous avez donc fait vos rois à dîner : vous etiez en fort bonne compagnie, et aussi bonne qu’à Paris. Il ne tiendra pas à moi que l’archevêque [d’Aix] ne sache que vous etes contente de lui ; je le dis l’autre jour à madame de La Fayette, qui en fut fort aise ; elle a resolu que vous ne preniez point tous deux l’esprit ni les pensées de Provence.
Mais parlons du roi et de la reine d’Angleterre ; c’est quelque chose de si extraordinaire d’avoir là cette Cour, qu’on s’en entretien sans cesse. On tache de regler les rangs et de faire vie qui dure avec gens si loins d’etre retablis. Le Roi disoit l’autre jour, et que ce roi etoit le meilleur homme du monde, qu’il chassoit avec lui, qu’il viendroit à Marly, à Trianon, et que les courtisans devoient s’y accoutumer. Le roi d’Angleterre ne donne pas la main à Monseigneur et ne le reconduit pas. La reine n’a point baisé Monsieur, qui en boude ; elle a dit au Roi : Dites moi comment vous voulez que je fasse ; si vous voulez que ce soit à la mode de France, je saluerai qui vous voudrez : pour la mode d’Angleterre, c’est que je ne baisois personne. Elle a été voir madame la Dauphine, qui est malade et qui l’a reçue dans son lit. On ne s’assied point en Angleterre ; je crois que les duchesses feront avec elle à la mode de France, comme avec sa belle mère. On est fort occupé de cette nouvelle Cour.
Cependant le prince d’Orange est à Londres, où il fait mettre des Mylords en prison ; il est severe et il se fera bientot hair. M. de Schomberg est general ds armées en Hollande, à la place de ce prince, et son fils a la survivance : voilà le masque bien levé. »

Lettre de Madame palatine, duchesse douairière d’Orléans, concernant la mort de la reine d’Angleterre à Saint-Germain-en-Laye

« Je vous écris le cœur bien troublé, et j’ai pleuré hier toute la matinée. La bonne et pieuse reine d’Angleterre est morte hier matin à Saint Germain, à sept heures. Assurément elle doit être au ciel. Elle ne gardait pas un liard pour elle, et donnait tout aux pauvres ; elle faisait vivre des familles entières ; elle n’a jamais tenu un propos méchant sur qui que ce soit, et si l’on se mettait à l’entretenir sur le chapitre du prochain, elle disait : « Si c’est du mal de quelqu’un, je vous prie, ne le dites pas ». Elle a soutenu ses malheurs avec une résignation parfaite ; elle était polie et agréable, quoique bien loin d’être belle ; elle était toujours gaie et faisait constamment l’éloge de notre princesse de Galles. Je l’aimais beaucoup ; sa mort me serre le cœur. »

Acte de baptême de Catherine Nagle dans la chapelle du Château-Vieux de Saint-Germain-en-Laye, la reine d’Angleterre étant sa marraine

« Ce jourd’huy quinzieme juin mil six cent quattre vingt treize, a esté baptisée dans la chapelle du chasteau vieil de Saint Germain en Laye par monsieur l’abbé de Ronchy, premier aumonier du roy et de la reine d’Angleterre, Catherine, née le jour precedent, fille de messire Richard Nagle, secretaire d’Estat du roy d’Angleterre, et de madame Jeanne Carné, son espouze, la marainne tres vertueuse et tres excellente princesse Marie d’Est, princesse de Modene, espouze de tres haut et tres puissant monarque Jacques second, roy de la Grande Bretagne, laquelle a signé le tout en presence et du consentement de maistre Isaac Michel, prestre, vicaire de cette parroisse, qui a presenté les saintes huilles revestu de surplis et d’estolle.
J. Ronchi, Maria R.
R. Nagle
Ann Nugent, Tyrconnell
Michel »

Acte de baptême de Marie Anne Baguette dans la chapelle du Château-Vieux de Saint-Germain-en-Laye, la reine d’Angleterre étant sa marraine

« Du mesme jour, a esté baptizée en la chappelle du chateau vieux de ce lieu par monsieur l’abbé Ronchy, aumonier du roy d’Angleterre, Marie Anne, née en legitime mariage le vendredy saint vingtieme jour du present mois, fille de Jean Baguette, gentilhomme ordinaire du roy d’Angleterre, et d’Heleine Goulde, ses pere et mere, la marreinne tres haute et tres puissante princesse Marie d’Est, princesse de Modene et reine d’Angleterre, laquelle a signé en presence et du consentement de maistre Estienne Coppin, l’un des vicaires de cette paroisse, qui a apporté les saintes huiles revetu de son surplis et de son etolle.
Maria R.
P. Ronchi
Coppin, vicaire »

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