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Mentions de Saint-Germain-en-Laye dans le Journal des guerres civiles de Dubuisson Aubenay

« [p. 9] [19 février 1648] Le Roi et la Reine vont à Saint-Germain voir la reine d’Angleterre, malade, affligée des mauvaises nouvelles du roi son mari, prisonnier de ses sujets parlementaires en l’ile de Wight.
[…]
[p. 65] [22 septembre 1648] Préparatifs de cour pour s’en aller le lendemain à Saint-Germain-en-Laye.
La nuit d’entre le 22 et le 23, on a enlevé de l’hôtel de Condé ce qu’il y avoit de précieux.
[…]
[p. 66] [23 septembre 1648] Le soir, les prévôt des marchands et échevins sont mandés à Ruel, où la cour demeure.
[…]
La reine d’Angleterre arrive au Louvre, à Paris.
[…]
Ce jour, madame du Plessis s’en va coucher, avec madame la comtesse de Miossens, à Meudon, chez madame de Guénégaud, leur mère. Mais ce soir même, à six heures, madame d’Orléans y arriva avec ses enfants et son train et y coucha, comme aussi le lendemain, et n’en partir que le lendemain, après midi, pour Saint-Germain.
Jeudi 24, que le parlement étant assemblé à Paris, y vinrent au parquet des gens du Roi, les sieurs de Choisy, de Caen, chancelier de M. le duc d’Orléans, et chevalier de Rivière, agent de M. le prince de Condé, chargés d’une lettre chacun, de la part de leurs maîtres […]. Toutes deux prient la compagnie de députer et envoyer le lendemain vendredi 25, dès le matin, pour dîner à Saint-Germain, où cependant Leurs Majestez allèrent de Ruel coucher le jeudi soir, et là conférer sur les affaires présentes. […]
[p. 67] [25 septembre 1648] Le même vendredi, après midi, madame la duchesse d’Orléans partit de Meudon et alla coucher à Saint-Germain.
Les députés du parlement furent à Saint-Germain, où ils furent bien dînés par le contrôleur général de la maison du Roi et y virent seulement les princes, auxquels ils firent trois demandes, et une avant toutes, savoir la continuation du parlement, par la [p. 68] bouche du premier président : la première, que le Roi retournât à Paris pour assurer le peuple, la deuxième que les prisonniers d’Etat soient mis en liberté et les exilés rappelés, la troisième que le Roi, la Reine et les princes donnent et pourvoient de sûreté suffisante aux députés du parlement pour faire la conférence avec lesdits seigneurs princes, après que ces trois demandes auront été vidées. On les remit à envoyer quérir leur réponde dimanche prochain.
[…]
Dimanche 27, le parlement, par ses députés, retourna dîner à Saint-Germain, fut bien traité et vit la Reine ; et s'assemblant avec les princes seuls : sur la continuation du parlement durant les vacances, leur fut accordée pour huit jours, sans préjudice de la première parole de créance jointe à la première continuation de prolonger autant qu'ils en auroient besoin. Sur le retour du
Roi à Paris et la comparution ou venue des princes au Palais, en parlement, fut répondu qu’il n’y avoit pas assez de sûreté de la part du peuple. Pour le troisième point, concernant les prisonniers qui doivent être interrogés au bout de vingt-quatre heures après leur capture, le chancelier, qui s’y trouva, comme aussi le maréchal et surintendant de la Meilleraye, et avec lui M. Tubeuf, parla, disant que l’ordonnance en avoit été faite par les rois pour montrer et prescrire aux juges et officiers du royaume comme ils en devoient user dans les formes ordinaires, mais ce n'est pas dire que le Roi se soit lié les mains par là et astreint d'en user de même pour les prisonniers d’Etat, dont les crimes sont souvent si secrets, que même il n'est pas à propos qu’on leur donne à connoitre à eux-mêmes, que c'est pour cela que l’on les a emprisonnés. Pour le quatrième point, de la sûreté du Parlement, on la lui promit toute entière, jusqu’au bout de la conférence, laquelle on a ce jour même commencée, en faisant voir les rôles ou registres et livres des états des finances ; et la continuation fut remise à jeudi prochain.
[…]
[p. 70] Ce même jour de jeudi, premier octobre, les députés du parlement allèrent à Saint-Germain, où presque tous les présidents, qui se prétendent naturels députés, qui n’y avoient point encore été, y furent. M. le chancelier s'y trouva avec les princes. Sur le point du relâchement des prisonniers et de la sécurité publique, il fut, par les députés, dit et allégué que Louis XI, roi sévère et qui avoit en son règne emprisonné toutes sortes de gens à tort et à travers, comme s'en repentant, avoit fait une ordonnance, qui se trouve en la conférence des ordonnances ou volume de Fontanon, par laquelle il ne vouloit point qu’un officier, quel qu’il fût, pût être destitué ni privé de sa fonction qu’après poursuites contre lui juridiquement faites par devant ses juges naturels. Depuis lors, cela s'est pratiqué, les offices n’étant point vénaux, on n’en a ôté [p. 71] aucun à personne qu’en l’an 1561, le Roi en destitua un de sa fonction pour contenter le roi de Navarre ; mais ce ne fut que pour trois jours, au bout desquels il fut rétabli, comme aussi sous Henri IV cela est arrive. Et n’y a que sous Louis XIII, sous le
Gouvernement du cardinal de Richelieu, après celui de Luynes et du maréchal d'Ancre qui avoient commencé, que la destitution et interdiction des conseillers du parlement et des chambres entières ont eu lieu. Le parlement demande donc qu’à présent la Reine donne sûreté et promette s’abstenir de telles choses, en rappelant les exilés et libérant les prisonniers. M. le duc d’Orléans a été contre cela, disant que c’étoit la sûreté de l’Etat que le Roi et son Conseil puissent destituer les brouillons et se saisir des gens suspects etc. Et sur ce que le parlement a représenté que cette sûreté qu’il demandoit, regardoit lui et les autres princes, il a répondu que les princes devoient vivre près du Roi et de la Reine si bien qu’ils ne donnassent sujet de devenir fâcheux ni suspects, et que, pour lui, il y vivoit de sorte qu’il ne craignoit point de tomber jamais en tel inconvénient.
Enfin le parlement est retourné le soir même à Paris sans rien obtenir, sinon que samedi prochain il eût à retourner par les mêmes députés pour avoir la réponse sur cette demande que
M. d’Orléans se chargeoit de porter à la Reine, mais n’assuroit pas d'obtenir. Cependant M. le Chancelier a rendu auxdits députés tous les articles des assemblées ci devant tenues par les cours unies dans la chambre Saint-Louis, avec la réponse à chacun d’iceux, selon qu’ils sont accordés ou non. Là, le quartier de la remise de la taille au peuple pour 1648 n’est qu’à condition des charges préalablement déduites. Le chancelier a ajouté que si le parlement ne reçoit l’offre de la Reine, ainsi qu’elle l’a fait, elle ne tiendra rien de toutes les autres choses par elle accordées sur les autres points.
[…]
[p. 72] [3 octobre 1648] Samedi 3, les députés du parlement furent à Saint-Germain et y dînèrent par ordre du grand maître de France, M. le Prince, lequel, avec le duc d’Orléans, suivi du chancelier, les vint trouver assez tard et dit le chancelier, d’abord, qu’on ne se savoit assez étonner comme le parlement, durant une conférence qui est comme une surséance et trêve entr’eux, a donné l’arrêt d’ôter les quarante sols pour chaque bœuf que l’on payoit au Roi pour avoir gratifié son peuple de la remise du sol pour livre ; à quoi le Premier Président repartit vertement que le parlement s’étonnoit lui-même comme, puisque le Roi en avoit gratifié son peuple, on lui avoit si longtemps fait payer ces quarante sols, sans que Sa
Majesté en profitât. Et ainsi eurent plusieurs paroles, le Premier Président disant que c’étoit lui qui avoit signé ledit arrêt d’hier et avoit eu raison.
De là il passa sur certains droits et offices que ledit chancelier a établi sur le sceau et qui seront ou doivent être ôtés comme abusifs et à la foule du peuple. Le président de Nesmond interrompit, disant que ce n’étoit l’objet de leur venue, mais pour avoir contentement et réponse précise sur la sûreté de leurs personnes et de tout le monde et pour le relâchement des prisonniers. M. le duc d’Orléans dit que tous engageoient leur parole avec celle de la Reine que dans trois mois les prisonniers auroient liberté, sur quoi le Premier Président dit que ce n’étoit contentement, ains amusement, et se voulut lever pour s’en aller. Le prince de Condé parla et le retint, disant qu’il iroit avec M. d’Orléans supplier la Reine là-dessus et s’y en alla, le chancelier aussi avec eux et furent si longtemps que le parlement s’ennuya et s’en voulut aller. Là-dessus les princes et le chancelier retournèrent et [p. 73] voulurent recommencer ; mais le parlement dit qu’il ne se pouvoit annuiter et que le jeudi précédent, le peuple impatient de ce qu’ils ne retournoient point avant la nuit, fut sur le point de se mutiner et tendre les chaînes, craignant qu’on ne les eût retenus à Saint-Germain pour entreprendre sur Paris et qu’ils vouloient, à ce coup, prévenir tel désordre. Les princes étonnés prièrent qu’ils revinssent mercredi, et, sur refus, lundi, mais le Premier Président dit qu’il falloit finir et qu’ils ne croyoient pas que le peuple les voulût laisser retourner, toutefois que le lendemain dimanche 4, après dîner, ils reviendroient et se rendroient là sur une à deux heures, pour la dernière fois, comme ils ont fait, et ont obtenu par écrit de la Reine (laquelle a désiré un contre écrit des princes, comme tel étoit leur avis, et ils l’ont baillé à Sa Majesté) et [des] princes, qu’aucun officier ne seroit emprisonné, qu’au bout de vingt quatre heures il ne fût livré à ses juges naturels, pour lui être faite interrogation et procès. Que quant aux personnes d’autre qualité, dans trois mois ils seroient rendus au parlement, ou autres, leurs juges naturels, pour leur faire procès.
[…] [13 octobre 1648] Une lettre de cachet est venue avec ordre d’aller à Saint-Germain.
Les députés y sont arrivés à trois heures de relevée. Le Premier Président a dit à la Reine que la raison d’ôter cette entrée étoit parce que c’étoit un impôt jadis mis et établi seulement pour trois ou quatre ans et qui depuis avoit été par abus continué sans lettres du Roi. La Reine a dit que les délais, dont le parlement usoit, minoient les affaires du Roi et qu’ainsi il avoit [devoir] de finir dans demain, moyennant quoi elle offroit de rabais, sur toutes les levées qui se font à Paris, la somme de douze cens mille livres par an. Le Premier Président a répliqué qu’il étoit impossible de finir dans demain, y ayant encore beaucoup à examiner sur le tarif. La Reine s’est retirée en un coin du cabinet avec son Conseil, les députés en un autre coin, puis, eux faits venir, le chancelier a dit de la part de la Reine qu’elle faisoit le rabais de douze cens mille livres à Paris, outre l’impôt tout nouvellement et cette année mis de vingt et un sols par muid, pourvu que le parlement cessât ses assemblées dans jeudi soir, sauf à lui à députer commissaires pour le règlement de ces douze cens mille livres sur toutes les denrées sur lesquelles on lève ; et qu'elle ne pouvoit pas accorder une déclaration du Roi, que le Premier Président avoit demandée, pour autoriser l’arrêté de ce matin là, pour les [p. 77] cinquante huit sols ôtés sur le vin, parce que cela iroit à donner telles déclarations tantôt sur le bois, or sur le charbon, or sur le sel et sur les autres denrées, qui iroient à des longueurs entièrement ruineuses aux affaires du Roi et à des sommes que les affaires du Roi ne sauroient souffrir.
[…]
[p. 78] [15 octobre 1648] Cependant le sieur de Sainctot, parti ce matin avec M. du Plessis de Saint-Germain-en-Laye, est venu de la part de la Reine, vers laquelle les gens du Roi durent, en vertu d'une lettre de cachet, aller après dîner pour la supplier de donner les deux millions de rabais à Paris ; ce qu’ils firent, et trouvèrent la Reine retournant avec le Roi de Pontoise, de la visite de la mère Jeanne. Sa Majesté fit répéter deux ou trois fois la promesse de finir dans dimanche et, à cette condition, elle promit les deux millions, ajoutant qu’à proportion d’iceux, elle fit aussi diminution à toutes les villes du royaume.
[…]
[p. 79] [20 octobre 1648] Les députés, qui ont été de jour à autre à Saint-Germain vers la Reine et les ministres, se sont assemblés, l'après dîner, chez le Premier Président, pour rédiger par articles toutes choses.
[…]
[p. 81] [28 octobre 1648] Ce jour 28, la chambre des Comptes fut à Saint-Germain faire ses plaintes et remontrances contre le parlement, sur les sixième et septième articles de la déclaration du Roi du 22 octobre, vérifiée en parlement le 24, et le président Nicolai harangua à merveille, sans perdre respect à Leurs Majestés.
[…]
[29 octobre 1648] Le prévôt des marchands et les échevins de Paris à Saint-Germain, pour le retour du Roi en sa bonne ville.
Au soir, avis de Saint-Germain que le lendemain, vendredi 30, toute la cour déménage et ramène ses meubles de Saint-Germain à Paris.
[…]
[p. 82] [31 octobre 1648] Samedi au soir, le Roi, la Reine, toute la cour avec, retournent à Paris, à petit bruit, et sans que le peuple ait eu, comme il eût bien voulu, permission d’aller au devant, ni faire réception ; cela pour éviter toute assemblée.
[…]
[p. 102] [6 janvier 1649] Mercredi 6, jour des rois, à sept heures du matin, le comte de Miossens est venu chez M. du Plessis de Guénégaud, auquel, en ce même temps, on apporta à signer la lettre du Roi ci-après mentionnée, écrite au prévot des marchand, l’averti que, sur les trois heures, le Roi étoit parti du Palais-Royal avec la Reine et le cardinal Mazarin, et étoit allé à Saint-Germain. Messieurs les ducs d’Orléans et prince de Condé avoient suivi en même temps. En peu d’heures après, lesdits sieurs du Plessis, secrétaire d’Etat, et comte de Miossens, son beau frère, se sont mis en carrosse du premier, à six chevaux, et ont été en cour. Une heure après eux, sont partis les enfants dudit sieur du Plessis, pour aller à Fresne.
[…]
[p. 103] Cependant est arrivé une lettre de cachet, signée de Guénegaud, au prévôt des marchands et échevins de Paris, par laquelle le Roi dit qu'il s’en étoit allé, non pour déplaisir qu’il eût de sa bonne ville de Paris, mais pour la crainte d’aucuns du parlement qui avoient intelligence avec ses ennemis et dessein sur sa personne.
Il y arriva aussi deux lettres aux mêmes gens de la ville, une du duc d’Orléans, l’autre du prince de Condé, portant que c’étoit par leur avis que leRoi s’en étoit allé. Elles furent, comme l’autre, portées au parlement, où elles sont demeurées.
Aussitôt que la nouvelle du « Regifugium » a été connue dans le quartier Saint-Honoré, la populace s’est amassée vers la Friperie et les Halles ; et comme un chariot passoit, chargé d’argent au sieur Bonneau, il a été pillé, vis à vis des pilliers de ladite Friperie et de la rue Tirechappe. On dit aussi qu’un autre chariot fut pillé à la rue Fromenteau. Item un carrosse du comte de Tillières et celui du maréchal d’Estrées, où il y avoit deux cassettes, l’une d’argent, l’autre de papiers.
Les meubles et bagage du Roi, demeurés au Palais-Royal, sous la conduite du sieur du Mont, sous-gouverneur de Sa Majesté, furent exposés à sortir sur des mulets, mais arrêtés à la porte et renvoyés. Depuis lors, ont resté là ; mais le 10 janvier on a dit que conseillers du parlement étoient députés pour aller visiter ce qui appartenoit à la personne du Roi, et le faire passer ; le reste demeurant ici.
Le Roi coucha au lit du maréchal de Villeroy et la Reine en celui de M. le Prince, à Saint Germain. »

Dubuisson-Aubenay, François-Nicolas

Mentions de Saint-Germain-en-Laye dans les mémoires du cardinal de Retz

« [t. 2, p. 12] Le 26 d’aout de 1648, le Roi alla au te Deum. L’on borda, selon la coutume, depuis le Palais Royal jusques à Notre Dame, toutes les rues de soldats du regiment des gardes. Aussitôt que le Roi fut revenu au Palais Royal, l’on forma de tous ces soldats trois bataillons, qui demeurerent sur le pont Neuf et dans la place Dauphine. Comminges, lieutenant des gardes de la Reine, enleva dans un [p. 13] carrosse fermé le bonhomme Broussel, conseiller de la grande chambre, et il le mena à Saint Germain.
[…]
[p. 87] [septembre 1648] Le president Viole, qui avoit ouvert l’avis au parlement de renouveler l’arret de 617 contre les etrangres, vint à Saint Germain, où le Roi etoit allé de Ruel, sous la parole de monsieur le Prince, et il fut admis sans contestations à la conference qui fut tenue chez M. le duc d’Orleans, accompagné de monsieur le Prince, de M. le prince de Conti et de M. de Longueville. […]
[p. 88] Il y eut cinq conferences à Saint Germain. Il n’entra dans la premiere que messieurs les princes. Le chancelier et le marechal de La Maillerie, qui avoit eté fait surintendant en la place d’Emeri, furent admis dans les quatre autres. Ce premier y eut de grandes prises avec le premier president, qui avoit un mepris pour lui qui alloit jusques à la brutalité. [p. 89] Le lendemain de chaque conference, l’on opinoit, sur le rapport des deputés, au parlement. Il seroit infini et ennuyeux de vous rendre compte de toutes les scenes qui y furent données au public, et je me contenterai de vous dire, en general, que le parlement, ayant obtenu ou plutôt emporté sans exception tout ce qu’il demandoit, c’est à dire le retablissement des anciennes ordonnances par une declaration conçue sous le nom du Roi mais dressée et dictée par la Compagnie, crut encore qu’il se relachoit beaucoup en promettant qu’il ne continueroit pas ses assemblées. Vous verrez cette declaration toute d’une vue, s’il vous plait de vous souvenir des propositions que je vous ai marqué de temps en temps, dans la suite de cette histoire, avoir eté faites dans le parlement et dans la chambre de Saint Louis.
Le lendemain qu’elle fut publiée et enregistrée, qui fut le 24 d’octobre 1648, le parlement prit ses vacations et la Reine revint avec le Roi à Paris bientôt après.
[…]
[p. 99] Le parlement resolut, le 2 de janvier [1649], de s’assembler pour pourvoir à l’execution de la declaration, que l’on [p. 100] pretendoit avoir eté blessée, particulierement dans les huit ou dix derniers jours, en tous ses articles, et la Reine prit le parti de faire sortir le Roi de Paris, à quatre heures du matin, le jour des Rois, avec toute la cour.
[…]
[p. 129] Je l’appris, à cinq heures du matin, par l’argentier de la Reine, qui me fit eveiller et qui me donna une lettre ecrite de sa main par laquelle elle me commandoit, en des termes fort honnetes, de me rendre dans le jour à Saint Germain. L’argentier ajouta de bouche que le Roi venoit de monter en carrosse pour y aller, et que toute l’armée etoit commandée pour s’avancer. Je lui repondis [p. 130] simplement que je ne manquerois pas d’obeir. Vous me faites bien la justice d’etre persuadée que je n’en eus pas la pensée.
Blancmenil entra dans ma chambre, pale comme un mort. Il me dit que le Roi marchoit au Palais avec huit mille chevaux. Je l’assurai qu’il etoit sorti de la ville avec deux cents. Voilà la moindre des impertinences qui me furent dites depuis les cinq heures du matin jusques à dix. J’eus toujours une procession de gens effarés, qui se croyoient perdus. Mais j’en prenois bien plus de divertissement que d’inquietude, parce que j’etois averti, de moment à autre, par les officiers des colonelles, qui etoient à moi, que le premier mouvement du peuple, à la premiere nouvelle, n’avoit eté que de fureur, à laquelle la peur ne succede jamais que par degrés, et je croyois avoir de quoi couper, devant qu’il fut nuit, ces degrés, car quoique monsieur le Prince, qui se defioit de monsieur son frere, l’eut eté prendre dans son lit et l’eut emmené avec lui à Saint Germain, je ne doutois point, madame de Longueville etant demeurée à Paris, [p. 131] que nous le revissions bientôt, et d’autant plus que je savois que monsieur le Prince, qui ne le craignoit ni ne l’estimoit, ne pousseroit pas sa defiance jusqu’à l’arreter.
[…]
[p. 133] La terreur du parlement n’etoit pas encore bien dissipée. Je ne fus pas touché de son irresolution, parce que j’etois persuadé que j’aurois dans peu de quoi le fortifier. Comme je croyois que la bonne conduite vouloit que le premier pas, au moins public, de desobeissance vint de ce corps, qui justifieroit celle des particuliers, je songeai à propos de chercher une couleur au peu de soumission que je temoignois à la Reine en n’allant pas à Saint Germain. Je fis mettre mes chevaux au carrosse, je reçus les adieux de tout le monde, je rejetai avec une fermeté admirable toutes les instances que l’on me fit pour m’obliger à demeurer, et par un malheur signalé, je trouvai au bout de la rue Neuve Notre Dame Dubuisson, marchand de bois, et qui avoit beaucoup de [p. 134] credit sur les portes. Il etoit absolument à moi, mais il se mit ce jour là en mauvaise humeur. Il battit mon postillon, il menaça mon cocher. Le peuple, accourant en foule, renversa mon carrosse, et les femmes du Marché Neuf firent d’un etau une machine sur laquelle elles me rapportent, pleurantes et hurlantes, à mon logement. Vous ne doutez pas de la manière dont cet effort [p. 135] de mon obeissance fut reçu à Saint Germain. J’ecrivis à la Reine et à monsieur le Prince en leur temoignant la douleur que j’avois d’avoir si mal reussi dans ma tentative. La premiere repondit au chevalier de Sevigné, qui [p. 136] lui porta la lettre, avec une hauteur de mepris ; le second ne put s’empecher, en me plaignant, de temoigner de la colere. La Riviere eclata contre moi par des railleries et le chevalier de Sevigné vit clairement que les uns et les autres etoient persuadés qu’ils nous auroient des le lendemain la corde au cou.
Je ne fus pas beaucoup emu de leurs menaces, mais je fus tres touché d’une nouvelle que j’appris le meme jour, qui etoit que M. de Longueville, qui, comme je vous ai dit, revenboit de Rouen, où il avoit fait un voyage de dix ou douze jours, ayant appris la sortie du Roi à six lieues de Paris, avoit tourné tout court à Saint Germain. Madame de Longueville ne douta point que monsieur le Prince ne l’eut gagné, et qu’ainsi M. le prince de Conti ne fut infailliblement arreté. Le marechal de La Mothe lui declara, en ma presence, qu’il feroit sans exception tout ce que M. de Longueville voudroit, et contre et pour la cour. M. de Bouillon se prenoit à moi de ce que des gens dont je l’avois toujours assuré prenoient une conduite aussi contraire à ce que je lui en avois dit mille fois. Jugez, je vous supplie, de mon embarras, qui estoit d’autant plus grand que madame de Longueville me protestoit qu’elle n’avoit eu, de tout le jour, aucune nouvelle de M. de La Rochefoucauld, qui etoit toutefois parti, deux heures apres le Roi, pour fortifier et pour ramener M. le prince de Conti.
Saint Ibar revint encore à la charge pour m’obliger à l’envoyer, sans differer, au comte de Fuensaldagne. Je ne fus pas de cette opinion, et je pris le parti de faire [p. 137] partir pour Saint Germain le marquis de Noirmoutier, qui s’estoit lié avec moi depuis quelque temps, pour savoir, par son moyen, ce que l’on pouvoit attendre de M. le prince de Conti et de M. de Longueville. Madame de Longueville fut de ce sentiment, et Noirmoutier partit sur les six heures du soir.
[…]
[p. 144] [9 janvier] Le marquis de Noirmoutier m’assura, des le lendemain qu’il fut arrivé à Saint Germain, que M. le prince de Conti et M. de Longueville etoient tres bien disposés, et qu’ils eussent eté déjà à Paris si ils n’eussent cru assurer mieux leur sortie de la cour en s’y [p. 145] montrant quelques jours durant. M. de La Rochefoucauld ecrivoit en meme sens à madame de Longueville.
[…]
[p. 196] Monsieur le Prince etablit de sa part ses quartiers. Il posta le marechal du Plessis à Saint Denis, le marechal de Gramont à Saint Cloud, et palluau, qui a eté depuis le marechal de Clerembaut, à Sevres. L’activité naturelle à monsieur le Prince fut encore merveilleusement allumée par la colere qu’il eut de la declaration de M. le prince de Conti et de M. de Longueville, qui avoit jeté la cour dans une defiance si grande de ses intentions, que le cardinal, ne doutant point d’abord qu’il ne fut de concert avec eux, fut sur le point de quitter la cour, et ne se rassura point qu’il ne l’eut vu de retour à Saint Germain des quartiers où il etoit allé [p. 197] donner les ordres. Il eclata, en y arrivant, avec fureur contre madame de Longueville particulierement, à qui madame la Princesse sa mere, qui etoit aussi à Saint Germain, en ecrivit le lendemain tout le detail. Je lus ces mots, qui etoient dans la meme lettre : « L’on est ici si dechainé contre le coadjuteur qu’il faut que j’en parle comme les autres. Je ne puis toutefois m’empecher de le remercier de ce qu’il a fait pour la pauvre reine d’Angleterre ».
Cette circonstance est curieuse par la rareté du fait. Cinq ou six jours devant que le Roi sortit de Paris, j’allai chez la reine d’Angleterre, que je trouvai dans la chambre de madame sa fille, qui a eté depuis madame d’Orleans. Elle me dit d’abord : « Vous voyez, je viens tenir compagnie à Henriette. La pauvre enfant n’a pu se lever aujourd’hui faute de feu ». Le vrai etoit qu’il y avoit six mois que le cardinal n’avoit fait payer la reine de sa pension, que les marchands ne vouloient plus fournir et qu’il n’y avoit pas un morceau de bois dans la maison. Vous me faites bien la justice d’etre persuadée que madame d’Angleterre ne demeura pas, le lendemain, au lit faute d’un fagot, mais vous croyez bien aussi que ce n’etoit pas ce que madame la Princesse vouloit dire dans son billet. Je m’en ressouvins au bout de quelques jours. J’exagerai la honte de cet abandonnement, et le parlement envoya quarante mille livres à la reine d’Angleterre.
[…]
[p. 199] Le parti ayant pris sa forme, il n’y manquoit plus que l’etablissement du cartel, qui se fit sans negociation. Un cornette de mon regiment, ayant eté pris par un parti du regiment de La Villette, fut mené à Saint Germain, [p. 200] et la Reine commanda sur l’heure qu’on lui tranchat la tete. Le grand provot, qui ne douta point de la consequence, et qui etoit assez de mes amis, m’en avertit, et j’envoyai en meme temps une trompette à Palluau, qui commandoit dans le quartier de Sevres, avec une lettre tres ecclesiastique, mais qui faisoit entendre les inconvenients de la suite, d’autant plus proche que nous avions aussi des prisonniers, entre autres M. d’Olonne, qui avoit eté arreté comme il se vouloit [p. 201] sauver habillé en laquais. Palluau alla sur l’heure à Saint Germain, où il representa les consequences de cette execution. L’on obtint de la Reine, à toute peine, qu’elle fut differée jusques au lendemain, l’on lui fit comprendre, apres, l’importance de la chose, l’on échangea mon cornette, et ainsi le quartier s’etablit insensiblement.
[…]
[p. 287] Le 24 de ce mois, qui etoit celui de fevrier, les deputés [p. 288] du parlement, qui avoient reçu leurs passeports la veille, partirent pour aller à Saint Germain rendre compte à la Reine de l’audience accordée à l’envoyé de l’archiduc. La cour ne manqua pas de se servir, comme nous l’avions jugé, de cette occasion pour entrer en traité. Quoiqu’elle ne traitat pas dans ses passeports les deputés de presidents et de conseillers, elle ne les traita pas aussi de gens qui l’eussent eté et qui en fussent dechus : elle se contenta de les nommer simplement par leur nom ordinaire. La Reine dit aux deputés [p. 289] qu’il eut eté plus avantageux pour l’Etat et plus honorable pour leur compagnie de ne point entendre l’envoyé, mais que c’etoit chose faite, qu’il falloit songer à une bonne paix, qu’elle y etoit disposée et que, monsieur le chancelier etant malade depuis quelques jours, elle donneroit, des le lendemain, une reponse plus ample par ecrit. Monsieur d’Orleans et monsieur le Prince s’expliquerent encore plus positivement, et promirent au premier president et au president de Mesme, qui eurent avec eux des conferences tres particulieres et tres longues, de deboucher tous les passages aussitôt que le parlement auroit nommé des deputés pour traiter.
[…]
[p. 364] [5-7 mars] Il est necessaire que je vous rende compte de ce qui se passa ces jours là et au parlement et à la conference de Ruel.
Celle-ci commença aussi mal qu’il se pouvoit. Les deputés pretendirent, et avec raison, que l’on ne tenoit point la parole que l’on leur avoit donnée de deboucher les passages et que l’on ne laissoit pas meme passer librement les cent muids de blé. La cour soutint qu’elle n’avoit point promis l’ouverture des passages et qu’il ne tenoit pas à elle que les cent muids ne passassent. La Reine demanda, pour conditions prealables à la levée du siege, que le parlement s’engageât à aller tenir [p. 365] sa seance à Saint Germain tant qu’il plairoit au Roi, et qu’il promit de ne s’assembler de trois ans. les deputés refuserent tout d’une voix ces deux propositions, sur lesquelles la cour se modera des l’apres midi meme. M. le duc d’Orleans ayant dit aux deputés que la Reine se relachoit de la translation du parlement, qu’elle se contenteroit que, lorsque l’on seroit d’accord de tous les articles, il allât tenir un lit de justice à Saint Germain, pour y verifier la declaration qui contiendroit ces articles, et qu’elle moderoit aussi les trois années de defense de s’assembler, à deux : les deputés n’opiniatrerent pas le premier, ils ne se rendirent pas sur le second, en soutenant que le privilege de s’assembler etoit essentiel au parlement.
[…]
[p. 369] [9 mars] M. le prince de Conti ayant dit, le meme jour, au parlement que M. de Longueville l’avoit prié de l’assurer qu’il partiroit de Rouen, sans remise, le 15 du mois avec sept mille hommes de pied et trois mille [p. 370] chevaux et qu’il marcheroit droit à Saint Germain, la compagnie en temoigna une joie incroyable, et pria M. le prince de Conti d’en presser encore M. de Longueville.
[…]
[p. 379] La paix fut donc signée, avec beaucoup de contestations, trop longues et trop ennuyeuses à rapporter, le 11 de mars, et les deputés consentirent, avec beaucoup de difficulté, que M. le cardinal Mazarin y signât avec M. le duc d’Orleans, monsieur le Prince, monsieur le chancelier, M. de La Meilleraie et M. de Brienne, qui etoient les deputés nommés par le Roi. Les articles furent :
Que le parlement se rendra à Saint Germain, où sera tenu un lit de justice, où la declaration contenant les articles de la paix sera publiée ; apres quoi il retournera faire ses fonctions ordinaires à Paris ;
Ne sera faite aucune assemblée de chambre pour toute l’année 1649, excepté pour la reception des officiers et pour les mercuriales ;
Que tous les arrets rendus par le parlement, depuis [p. 380] le 6 de janvier, seront nuls, à la reserve de ceux qui auront eté rendus entre particuliers, sur faits concernant la justice ordinaire ;
Que toutes les lettres de cachet, declarations et arrets du conseil rendus au sujet des mouvements presents seront nuls et comme non avenus ;
Que les gens de guerre levés pour la defense de Paris seront licenciés aussitôt apres l’accommodement signé, et Sa Majesté fera aussi, en meme temps, retirer ses troupes des environs de ladite ville ;
Que les habitants poseront les armes, et ne les pourront reprendre que par ordre du Roi ;
Que le deputé de l’archiduc sera renvoyé incessamment sans reponse ;
Que tous les papiers et meubles qui ont eté pris aux particuliers et qui se trouveront en nature seront rendus ;
Que M. le prince de Conti, princes, ducs et tous ceux sans exception qui ont pris les armes n’en pourront etre recherchés, sous quelque pretexte que ce puisse etre, en declarant par les dessus dits dans quatre jours à compter de celui auquel les passages seront ouverts, et par M. de Longueville en dix, qu’ils veulent bien etre compris dans le present traité ;
Que le Roi donnera une decharge generale pour tous les deniers royaux qui ont eté pris, pour tous les meubles qui ont eté vendus, pour toutes les armes et munitions qui ont eté enlevés tant à l’Arsenal qu’ailleurs ;
Que le Roi fera expedier des lettres pour la revocation du mestre du parlement d’Aix, conformement aux articles accordés entre les deputés de Sa Majesté et ceux du parlement et pays de Provence du 21 février ;
[p. 381] Que la Bastille sera remise entre les mains du Roi.
[…]
[p. 398] [13 mars] Comme le president Le Cogneux commençoit à proposer que le parlement renvoyât les deputés pour traiter des interets de messieurs les generaux et pour faire reformer les articles qui ne plaisoient pas à la compagnie, ce que M. de Bouillon lui avoit inspiré la veille à onze heures du soir, l’on entendit un fort grand bruit dans la salle du Palais, qui fit peur à maitre Gonin, et qui l’obligea de se taire. Le president de Bellievre, qui etoit de ce qui avoit eté resolu chez M. de Bouillon, fut interrompu par un second grand bruit encore plus grand que le premier. L’huissier, qui etoit à la porte de la grande chambre, entra et dit, avec une voix tremblante, que le peuple demandoit M. de Beaufort. Il sortit, il harangua [p. 399] à sa manière, et il l’apaisa pour un moment.
Le fracas recommença aussitôt qu’il fut rentré, et le president de Novion, qui etoit bien voulu pour s’etre signalé dans les premieres assemblées des chambres contre la personne du Mazarin, etant sorti hors du parquet des huissiers pour voir ce que c’etoit, y trouva un certain du Boisle, mechant avocat et si peu connu que je ne l’avois jamais oui nommer, qui, à la tete d’un nombre infini de peuple, dont la plus grande partie avoit le poignard à la main, lui dit qu’il vouloit que l’on lui donnât les articles de la paix, pour faire bruler par la main d’un bourreau, dans la Greve, la signature du Mazarin, que si les deputés avoient signé cette paix de leur bon gré, il les falloit pendre ; que si on les y avoit forcés à Ruel, il la falloit desavouer. Le president de Novion, fort embarrassé, comme vous pouvez juger, representa à du Boisle que l’on ne pouvoit bruler la signature du cardinal sans bruler celle de M. le duc d’Orleans, mais [p. 400] que l’on etoit sur le point de renvoyer les deputés pour faire reformer les articles à la satisfaction du public. L’on n’entendoit cependant dans la salle, dans les galeries et dans la cour du Palais que des voix confuses et effroyables : « Point de paix ! et point de Mazarin ! Il faut aller à Saint Germain querir notre bon Roi, il faut jeter dans la riviere tous les Mazarins. »
[…]
[p. 454] Je vous ai dit ci-dessus que les deputés retournerent à Ruel le 16 de mars ; ils allerent, des le lendemain à Saint Germain, où la seconde conference se devoit tenir à la chancellerie, et ils ne manquerent pas d’y lire d’abord les propositions que tous ceux du parti avoient faites avec un empressement merveilleux pour leurs interets particuliers et que messieurs les generaux, qui ne s’y etoient pas oubliés, avoient toutefois stipulé ne devoir etre faites qu’apres que les interets du parlement seroient ajustés. Le premier president fit tout le contraire, sous pretexte de leur temoigner que leurs interets etoient plus chers à la compagnie que les siens propres, mais dans la verité pour les decrier dans le public.
[…]
[p. 472] L’on n’eut presque point de difficulté sur les articles dont le parlement de Paris avoit demandé la reformation. La Reine se relacha de faire tenir un lit de justice à Saint Germain ; elle consentit que la defense au parlement de s’assembler le reste de l’année 1649 ne fût pas inserée dans la declaration, à condition que les deputés en donnassent leur parole.
[…]
[p. 481] Cette paix, que le cardinal se vantoit d’avoir achetée à fort bon marché, ne lui valut pas aussi tout ce qu’il en esperoit. Il me laissa un levain de mecontents qu’il m’eut peu oter avec assez de facilité, et je me trouvai tres bien de son reste. M. le prince de Conti et madame de Longueville allerent faire leur cour à Saint Germain, [p. 482] apres avoir vu monsieur le Prince à Chaillot pour la premiere fois, de la manière du monde la plus froide de part et d’autre.
[…]
[t. 4, p. 214] [avril 1652] Le Roi, dont le dessein avoit toujours eté de s’approcher de Paris, comme il me semble que je vous l’ai déjà dit, partit de Gien aussitôt apres le combat de Bleneau, et il prit son chemin par Auxerre, par Sens et [p. 215] par Melun, jusques à Corbeil, cependant que MM. de Turenne et d’Hocquincourt, qui s’avancerent avec l’armée jusques à Moret, couvroient sa marche, et que MM. de Beaufort et de Nemours, qui avoient eté obligés de quitter Montargis faute de fourrage, s’etoient allés camper à Etampes. Leurs Majestés etant passées jusques à Saint Germain, M. de Turenne se posta à Palaiseau, ce qui obligea messieurs les princes à mettre garnison dans Saint Cloud, au pont de Neuilli et à Charenton.
[…]
[p. 233] Je vous y ai parlé de la demangeaison de negociation comme de la maladie qui regnoit dans le parti des princes. M. de Chavigni en avoit une regelée, mais secrete, avec monsieur le cardinal, par le canal de M. de Fabert. Elle ne reussit pas, parce que le cardinal ne vouloit point, dans le fond, d’accommodement, et il n’en recherchoit que les apparences, pour decrier dans le parlement et dans le peuple M. le duc d’Orleans et monsieur le Prince. Il employa pour cela le roi d’Angleterre, qui proposa au Roi, à Corbeil, une conference. Elle fut acceptée à la cour, et elle le fut aussi à Paris par Monsieur et par monsieur le Prince, [p. 234] auxquels la reine d’Angleterre en parla. Monsieur en donna part au parlement le 26 d’avril et fit partir, des le lendemain, MM. de Rohan, de Chavigni et Goulas pour aller à Saint Germain, où le Roi etoit allé de Corbeil.
[…]
[p. 237] Les choses en vinrent au point que madame de [p. 238] Chatillon alla publiquement à Saint Germain. Nogent disoit qu’il ne lui manquoit, en entrant dans le château, que le rameau d’olive à la main. Elle y fut recue et traitée effectivement comme Minerve auroit pu l’y etre. La difference fut que Minerve auroit apparemment prevu le siege d’Etampes, que monsieur le cardinal entreprit dans le meme instant, et dans lequel il ne tint presque à rien qu’il ensevelit tout le parti de monsieur le Prince.
[…]
[p. 240] Le 3 de mai, monsieur le procureur general fit la relation de ce qu’il avoit fait à Saint Germain, en consequence des ordres de la compagnie, et il dit que le Roi entendroit les remontrances lundi 6 du mois.
[…]
[p. 241] Le 6, les remontrances du parlement et de la chambre des comptes furent portées au Roi, avec une grande force, et le 7 celles de la cour des Aides et celles de la Ville se firent. La reponse du Roi aux unes et aux autres fut qu’il feroit retirer ses troupes quand celles des princes seroient eloignées. Monsieur le garde des sceaux, qui parla au nom de Sa Majesté, ne profera pas seulement le nom de monsieur le cardinal.
Le 10, il fut arreté au parlement que l’on envoiroit les gens du Roi à Saint Germain, et pour y demander reponse touchant l’eloignement du cardinal Mazarin, et pour insister encore sur l’eloignement des armées des environs de Paris.
[…]
[p. 391] Le 13 [octobre 1652], les colonels reçurent ordre du Roi d’aller par deputés à Saint Germain. M. de Seve, le plus ancien, y porta la parole. Le Roi leur donner à diner et il leur fit meme l’honneur d’entrer dans la salle cependant le repas. »

Gondi, Jean-François-Paul (de)

Récit par François-René de Chateaubriand d’une chasse royale dans la forêt de Saint-Germain-en-Laye

« [p. 337] Le duc de Coigny me fit prévenir que je chasserais avec le Roi dans la forêt de Saint-Germain. Je m’acheminai de grand matin vers mon supplice, en uniforme de débutant, habit gris, veste et culotte rouges, manchettes de bottes, [p. 338] bottes à l’écuyère, couteau de chasse au côté, petit chapeau française à galon d’or. Nous nous trouvâmes quatre débutants au château de Versailles, moi, les deux messieurs de Saint-Marsault et le comte d’Hautefeuille. Le duc de Coigny nous donna nos instructions : il nous avisa de ne pas couper la chasse, le Roi s’emportant lorsqu’on passait entre lui et la bête. Le duc de Coigny portait un nom fatal à la Reine. Le rendez-vous était au Val, dans la forêt de Saint-Germain, domaine engagé par la couronne au maréchal de Beauveau. L’usage voulait que les chevaux de la première chasse à laquelle assistaient les hommes présentés fussent fournis des écuries du Roi.
[f. 339] On bat aux champs : mouvement d’armes, voix de commandement. On crie : le Roi ! Le Roi sort, monte dans son carrosse : nous roulons dans les carrosses à la suite. Il y avait loin de cette course et de cette chasse avec le roi de France, à mes courses et à mes chasses dans les landes de la Bretagne ; et plus encore, à mes courses et à mes chasses avec les sauvages de l’Amérique : ma vie devait être remplie de ces contrastes.
Nous arrivâmes au point de ralliement, où de nombreux chevaux de selle, tenus en main sous les arbres, témoignaient leur impatience. Les carrosses arrêtés dans la forêt avec les gardes ; les groupes d’hommes et de femmes ; les meutes à peine contenues par les piqueurs ; les aboiements des chiens, le hennissement des chevaux, le bruit des cors, formaient une scène très animée. Les chasses de nos rois rappelaient à la fois les anciennes et les nouvelles mœurs de la monarchie, les rudes passe-temps de Clodion, de Chilpéric, de Dagobert, [p. 340] la galanterie de François Ier, de Henri IV et de Louis XIV.
J’étais trop plein de mes lectures pour ne pas voir partout des comtesses de Chateaubriand, des duchesses d’Etampes, des Gabrielle d’Estrées, des La Vallière, des Montespan. Mon imagination prit cette chasse historiquement, et je me sentis à l’aise : j’étais d’ailleurs dans une forêt, j’étais chez moi.
Au descendu des carrosses, je présentai mon billet aux piqueurs. On m’avait destiné une jument appelée l’Heureuse, bête légère, mais sans bouche, ombrageuse et pleine de caprices ; assez vive image de ma fortune, qui chauvit sans cesse des oreilles. Le Roi mis en selle partit ; la chasse le suivit, prenant diverses routes. Je restai derrière à me débattre avec l’Heureuse, qui ne voulait pas se laisser enfourcher par son nouveau maître ; je finis cependant par m’élancer sur son dos : la chasse était déjà loin.
Je maitrisai d’abord assez bien l’Heureuse ; [p. 341] forcée de raccourcir son galop, elle baissait le cou, secouait le mors blanchi d’écume, s’avançait de travers à petits bonds ; mais lorsqu’elle approcha du lieu de l’action, il n’y eut plus moyen de la retenir. Elle allonge le chanfrein, m’abat la main sur le garrot, vient au grand galop donner dans une troupe de chasseurs, écartant tout sur son passage, ne s’arrêtant qu’au heurt du cheval d’une femme qu’elle faillit culbuter, au milieu des éclats de rire des uns, des cris de frayeur des autres. Je fais aujourd’hui d’inutiles efforts pour me rappeler le nom de cette femme, qui reçut poliment mes excuses. Il ne fut plus question que de l’aventure du débutant.
Je n’étais pas au bout de mes épreuves. Environ une demi-heure après ma déconvenue, je chevauchais dans une longue percée à travers des parties de bois désertes ; un pavillon s’élevait au bout : voilà que je me mis à songer à ces palais répandus dans les forêts de la couronne, en souvenir de l’origine des rois chevelus [p. 342] et de leurs mystérieux plaisirs : un coup de fusil part ; l’Heureuse tourne court, brosse tête baissée dans le fourré, et me porte jusqu’à l’endroit où le chevreuil venait d’être abattu : le Roi paraît.
Je me souvins alors, mais trop tard, des injonctions du dc de Coigny : la maudite Heureuse avait tout fait. Je saute à terre, d’une main poussant en arrière ma cavale, de l’autre tenant mon chapeau bas. Le Roi regarde, et ne vois d’un débutant arrivé avant lui aux fins de la bête ; il avait besoin de parler ; au lieu de s’emporter, il me dit avec un ton de bonhomie et un gros rire : « Il n’a pas tenu longtemps ». C’est le seul mot que j’aie jamais obtenu de Louis XVI. On vint de toutes partes ; on fut étonné de me trouver causant avec le Roi. Le débutant Chateaubriand fit du bruit par ses deux aventures ; mais, comme il lui est toujours arrivé depuis, il ne sut profiter ni de la bonne ni de la mauvaise fortune.
Le Roi força trois autres chevreuils. Les débutants [p. 343] ne pouvant courre que la première bête, j’allai attendre au Val avec mes compagnons le retour de la chasse.
Le Roi revint au Val ; il était gai et contait les accidents de la chasse. On reprit le chemin de Versailles. Nouveau désappointement pour mon frère : au lieu de m’habiller pour me trouver au débotté, moment de triomphe et de faveur, je me jetai au fond de ma voiture et rentrai dans Paris plein de joie d’être délivré de mes honneurs et de mes maux. Je déclarai à mon frère que j’étais déterminé à retourner en Bretagne. »

Chateaubriand, François-René (de)

Mention d’une chasse faite par le duc de Wellington dans la forêt de Saint-Germain-en-Laye

« [p. 40] The following week the Duke hunted at [p. 41] St. Germain-en-Laye ; interesting from its historical recollections, but, although it is a large town, it has a melancholy air of desolation in its grass-grown streets and straggling edifices. The royal château, once the
favourite residence of Marguerite de Valois, Henry II, Henry IV, Francis I, and the birthplace of Charles IX and Louis XIV, is now converted into a military prison, and surrounded by a wall for security. Here the " mind's eye" may dwell on bygone days, and bring before it scenes of past times. How vividly does this venerable pile remind one of the bon roi Henry IV, and the graceful good-humour of that popular monarch. Here our bigoted James II resided for twelve years, holding the semblance of a court. Part of his body was buried in the parish church, where a monument has since been raised by George IV, at his own expense, to the memory of one described upon it
''Magnus in Prosperis, in Adversis Major,
Jacobus 2us, Anglorum Rex."
Acting upon the law of Solon, since universally adopted, [p. 42] of "de mortuis nil nisi
bonum", we will not say what the epitaph ought to have been; but, to call a monarch
great in prosperity "who had shown so thorough a disregard for the religion and constitution of his country", is even too untruthful for a monumental tablet.
The forest occupies a promontory, formed by a sweeping bend of the river Seine, and is one of the largest in France, having a circuit of twenty-one miles. In the centre of it, is the Pavilion de la Meute, begun by Francis I, whose refined taste is proverbial throughout his own country, and whose style is now so much appreciated in England. »

Lennox, William Pitt

Lettre de William Paget, ambassadeur d'Angleterre, concernant un voyage du roi en petit comité à Saint-Germain-en-Laye

« The Frenck King, leaving the Queen and the rest of the Household here at the Louvre, lies at St. Germain’s Dalley with only the Privy Council, Privy Chamber and Privy Band ; having ordered the harbingers to lodge no man nearer than Paris, and his Privy Council and Chamber to lodge none but their own servants. It is done either for quietness or to avoid such as haunt the Court to learn proceedings. Feared thereby to be excluded from all intelligence ; but has, by credible means, learnt that the Prothonotary St. Poule, brother to the bp. of Montpellier, whom the King sent with another to the Great Turk, in October, is intercepted about Ragusa. »

Paget, William

Analyse d'une lettre de sir Nicholas Throckmorton concernant les conditions dans lesquelles il est retenu en otage au château de Saint-Germain-en-Laye

« The chamber in the tower where he lies is hung with tapestry and the bedding which he and his folks occupy is hired by him, and so are all the things that he needs. In the morning, he is suffered (accompanied by three or four of his guard) to walk in the park of Saint Germain an hour, and in the daytime to walk when he wills in the gallery of the house with the keeper, and towards the evening is suffered to walk in the garden. Adjoining his chamber is a great one, where he has liberty all day to walk, and a smaller to dine and sup in. Some officers accompany him at meals. Twice in the day two of his folks are suffered to go in Saint Germain to buy his victuals. About 6 p. m. he with one of his servants is locked in his chamber, and the rest of his folks in another, and the guards lie upon a pallet at his chamber door. When Smith writes let his messenger come to the sign of “Our Lady” in Saint Germain, where, before diner and supper, one of his folks is suffered to go to to fetch his wine.
The captain of the castle has written to the King to have him to his own house at a village called Carriere.
Castle of Saint Germain, 25 August 1563 »

Throckmorton, Nicholas

Lettre du roi annonçant son arrivée à Saint-Germain-en-Laye et ordonnant le déménagement du dauphin au Château-Neuf

« Au duc de Montausier
Ath, le 6 juillet 1671
Hier, je vous mandai que nous serions à Saint Germain le mardi ou le mercredi de la semaine prochaine ; mais nous y serons samedi au soir, 11 de ce mois, ayant resolu de partir demain, sur la nouvelle de la maladie de mon fils le duc d’Anjou. Vous avancerez à proportion le delogement de mon fils pour aller au chateau neuf, et son depart, afin de venir à notre rencontre à Franconville. »

Louis XIV

Lettre mentionnant une chasse princière à Saint-Germain-en-Laye

« Dépêche
N° 19
Paris, 11/23 novembre 1815
Monsieur le comte,
Les rapports du duc de Wellington avec la cour continuent de s’améliorer journellement. Depuis ma dernière expédition, il s’est donné une chasse à Saint-Germain, à laquelle les princes et madame la duchesse d’Angoulême ont assisté. Le duc de Wellington, plusieurs dames anglaises et un grand nombre de généraux et d’officiers de cette nation y ont été invités.
A l’arrivée de la duchesse de Wellington à Paris, le Roi a offert au duc de s’établir à l’Elysée. Nous avons été si empressés de lever tous les obstacles que le comte Capo d’Istria a immédiatement quitté son appartement et est venu se loger avec les personnes de sa chancellerie à l’hôtel de la mission.
La présence du duc de Wellington à l’Elysée sera regardée comme une preuve matérielle de sa bonne intelligence avec les Tuileries. Le public de Paris, qui juge presque tout par les apparences, n’a pas manqué de saisir celle-ci.
J’ai l’honneur d’être, etc. »

Pozzo di Borgo, Charles-André

Lettre décrivant une chasse des fils de Louis-Philippe à Saint-Germain-en-Laye

« Paris, le lundi 20 juin 1842, à 8 heures et demie
J’espère que tu ne me reprocheras pas, cette fois, ma chère Henriette, d’abandonner le duc d’Aumale. Voici trois jours que je dîne avec lui, hier, avant-hier et mercredi ! Par exemple, il faut que j’y renonce aujourd’hui. Le prince a imaginé d’aller faire le bois ce matin à Saint-Germain. Voilà en quoi consiste cette plaisanterie : on se lève à une heure après minuit, on monte en voiture, on y dort de fatigue jusqu’à Saint-Germain où on arrive à deux heures et demie du matin. On se rend au chenil de l’équipage de chasse du prince royal, où on éveille en sursaut gens et chiens. On s’empare de deux ou trois limiers et on les lâche dans la forêt. La fonction des limiers est de dépister le cerf. On les suit comme on peut pendant plusieurs heures à travers ronces et broussailles, le pied dans la rosée et la tête dans le brouillard, et quand on a fait lever quelque grosse bête, cerf, daim, daim, chevreuil ou sanglier, ce qui ne s’obtient souvent qu’à la fuite d’une longue et pénible recherche, le tout est fait ; on a fait son bois, et on est autorisé à rentrer chez moi. Telle est la partie de plaisir à laquelle se livrent aujourd’hui le duc d’Aumale et son frère le duc de Nemours. Qu’en dis-tu ? Ne faut-il pas avoir le diable au corps pour s’amuser de ce qui est la corvée des autres ? car faire le bois a toujours [p. 253] passé pour la plus rude besogne des piqueurs et des valets de chien. Quand Jamin a reçu les ordres du prince pour cette équipée, il n’en pouvait croire ses oreilles, et il en pestait hautement. Il ressemblait à la poule qui a couvé des œufs de canards et qui les voit se jeter à l’eau sans pouvoir les suivre. Jamin suivra la chasse, mais en maugréant contre Dieu et les saints. Quant à moi, à qui la chasse a été offerte, je me suis prudemment récusé, d’autant que l’offre n’était qu’une ironie très fine à l’adresse de ma matinalité très suspecte.
Hier, à Neuilly, Madame m’a encore demandé de tes nouvelles. On admirait fort au Salon un tableau daguerréotypé dans lequel M. Eynard, le banquier philhellène, a représenté la famille royale, ornée de Jules La Rochefoucauld sur le second plan. C’est étonnant de ressemblance, ou plutôt c’est la nature prise sur le fait. Mais tous les visages sont noirs. Le daguerréotype ne peut pas faire autrement. Il en résulte que toute cette royale assemblée a l’air d’une réunion de nègres échappée au désastre de Saint-Domingue. Plus les attitudes sont vraies et naturelles, plus cette horrible couleur est laide à voir. »

Cuvillier-Fleury, Alfred-Auguste

Lettre d’Henri IV concernant des arbres fruitiers en partie destinés à Saint-Germain-en-Laye

« A nos amez et feaulx les gens tenans nostre chambre des comptes à Pau
Nos amez et feaulx,
Desirans peupler nos jardins et vergers de Fontainebleau, Saint Germain et les Tuilleries de plusieurs bon arbres fruictiers, notamment de millicotons et pavyes, desquels ils en sont despourveus, et saichant qu’il y en a grand nombre dans les jardins de nostre ville et chasteau de Pau, à cette cause, vous ne ferés faulte, incontinent la presente receue, de faire arracher des dicts arbres de milicotons et pavyes qui sont dans les susdicts jardins et lieux circumvoisins, la plus grande quantité que faire se pourra, à l’aage de deux ou trois ans seulement, et iceux faire delivrer à Arnaud de Bayle, present porteur, l’un de nos fouriers ordinaires, que nous envoyons expres pour cest effect, pour nous les faire amener et conduire jusques aux lieux que nous luy avons ordonné. Sy n’y faictes faulte, car tel est nostre plaisir.
A Rouen, le XIIIe jour de janvier 1597.
Henry »

Henri IV

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